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14/10/2002 | BELGIQUE | N°C.00.0363.N

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 14 octobre 2002, C.00.0363.N


VLAAMSE OPERASTICHTING, a.s.b.l.,
Me Johan Verbist, avocat à la Cour de cassation,
contre
V. M. B., et cons.,
Me Ludovic De Gryse, avocat à la Cour de cassation,
en présence de
VLAAMSE GEMEESCHAP, et cons.
I. La décision attaquée
Le pourvoi en cassation est dirigé contre un arrêt rendu le 27 janvier 2000 par la cour d'appel de Gand.
II. La procédure devant la Cour
Le président a renvoyé la présente cause devant la troisième chambre par une ordonnance rendue le 8 août 2002.
Le conseiller Greta Bourgeois a fait rapport.
L'avocat général Anne D

e Raeve a conclu.
III. Les moyens de cassation
La demanderesse présente un moyen dans sa requête.
...

VLAAMSE OPERASTICHTING, a.s.b.l.,
Me Johan Verbist, avocat à la Cour de cassation,
contre
V. M. B., et cons.,
Me Ludovic De Gryse, avocat à la Cour de cassation,
en présence de
VLAAMSE GEMEESCHAP, et cons.
I. La décision attaquée
Le pourvoi en cassation est dirigé contre un arrêt rendu le 27 janvier 2000 par la cour d'appel de Gand.
II. La procédure devant la Cour
Le président a renvoyé la présente cause devant la troisième chambre par une ordonnance rendue le 8 août 2002.
Le conseiller Greta Bourgeois a fait rapport.
L'avocat général Anne De Raeve a conclu.
III. Les moyens de cassation
La demanderesse présente un moyen dans sa requête.
Dispositions légales violées
-article 11 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950 et approuvée par la loi du 13 mai 1955;
-article 22 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, fait à New York le 19 décembre 1966 et approuvé par la loi du 15 mai 1981;
-article 108 (ancien) , alinéa 4, de la Constitution tel qu'il était applicable avant la modification du 5 mai 1993;
-articles 27, 41 et 162, alinéa 4, de la Constitution coordonnée;
-articles 1er jusques et y compris 26 de la loi du 27 juin 1921 accordant la personnalité civile aux associations sans but lucratif et aux établissements d'utilité publique;
-articles 1er jusques et y compris 31 de la loi du 22 décembre 1986 relative aux intercommunales;
-articles 1382 et 1383 du Code civil.
Décision attaquée
L'arrêt attaqué condamne la demanderesse à payer une provision aux défendeurs après avoir constaté que les défendeurs ont subi un dommage suite à une faute commise par la demanderesse, sur la base des motifs suivants:
«L'article 23 de la loi du 22 décembre 1968 dispose que 'En cas de dissolution avant terme, de non-prorogation ou de retrait de l'intercommunale, la commune ou l'association appelée à exercer l'activité précédemment confiée à l'intercommunale est tenue . de reprendre le personnel de l'intercommunale affecté à l'activité reprise, conformément aux règles précisées entre les parties'.
La demanderesse invoque évidemment qu'elle n'est pas une association au sens de la loi du 22 décembre 1986, mais une personne morale de droit privé, plus spécialement une association sans but lucratif créée conformément à la loi du 27 juin 1921.
Le principe selon lequel une commune peut participer à une association de droit privé n'est pas à l'ordre du jour en l'espèce. Une telle participation n'est pas davantage une association de communes.
La demanderesse constitue toutefois une association de deux communes et d'une personne morale de droit public (la Communauté Flamande). Les deux communes ont un objet d'intérêt communal, dès lors que l'intérêt qui était auparavant poursuivi par 'Opera voor Vlaanderen', association intercommunale, continue à l'être. L'objet social de 'l'Opera voor Vlaanderen' et les statuts de la demanderesse concordent en majeure partie. Seules la coordination et la fusion des opéras existant auparavant à Anvers et à Gand et de leurs moyens disparaissent vu la fusion.
Les associations de communes ayant des objets bien déterminés d'intérêt communal sont régies par la loi du 22 décembre 1986, dès lors que l'article 108, alinéa 4 (actuellement article 164) de la Constitution n'autorise les communes à s'associer que pour régler et gérer en commun des objets d'intérêt communal dans les conditions et suivant le mode à déterminer par la loi et dès lors que la loi du 22 décembre 1986 a précisément été élaborée en exécution de la Constitution et spécialement pour répondre aux besoins des associations de communes.
Bien qu'elle ait pris la forme d'une personne morale de droit privé, la demanderesse doit bien être considérée comme une association intercommunale de communes. Seules les personnes morales de droit public peuvent être membres des intercommunales.
La demanderesse ne peut, en outre, pas contester qu'elle a poursuivi les activités de l'intercommunale Opera voor Vlaanderen qui a été dissoute.
La forme juridique pour laquelle elle a opté sciemment avait pour objectif d'échapper aux dispositions impératives de l'article 23 de la loi du 22 décembre 1986. Cela ressort à suffisance des travaux préparatoires de sa création et des conventions conclues: auditions auxquelles seul le personnel de l'intercommunale dissoute Opera voor Vlaanderen pouvait participer, engagement par les villes de Gand et d'Anvers de 13 membres du personnel pour chacune d'elle. Ainsi que le protocole réglant le problème du personnel. Ce protocole a bien été approuvé par les trois syndicats traditionnels, mais manifestement cette approbation ne lie pas les membres des syndicats d'une manière individuelle, d'autant plus qu'il n'apparaît pas que les défendeurs 1 à 25 soient membres d'un syndicat.
Il était aussi question dans l'avenir de travailler avec un personnel engagé en vertu d'un contrat de travail et plus avec un personnel statutaire.
Il ressort de ce qui précède que, nonobstant la forme juridique sous laquelle elle a été créée, la demanderesse reste soumise à l'application de l'article 23 de la loi du 22 décembre 1986. Nonobstant cette forme juridique, elle doit être considérée comme une personne morale de droit public, plus spécialement comme une association de communes.
Son refus d'engager les défendeurs 1 à 25 inclus est illégal, fautif et contraire au principe de bonne administration».
Griefs
1.Première branche
L'article 41 de la Constitution coordonnée dispose que les intérêts exclusivement communaux sont réglés par les conseils communaux d'après les principes établis par la Constitution.
En vertu de l'article 108 (ancien), alinéa 4, de la Constitution, tel qu'il était applicable au moment de la création de la demanderesse, plusieurs communes peuvent s'associer dans les conditions et suivant le mode à déterminer par la loi, pour régler et gérer en commun des objets d'intérêt communal.
Cette disposition constitutionnelle contient une confirmation de la liberté de principe des communes de s'associer, qui se déduit de l'article 11 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, de l'article 22 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques et de l'article 27 de la Constitution coordonnée.
Ni l'article 108 (ancien), alinéa 4, de la Constitution tel qu'il était applicable avant la modification du 5 mai 1993, ni les articles 41 et 162, alinéa 4, de la Constitution coordonnée, ni les articles 1er à 31 inclus de la loi du 22 décembre 1986 relative aux intercommunales n'obligent les communes qui souhaitent régler et gérer en commun des objets d'intérêt communal de s'associer conformément aux dispositions de la loi du 22 décembre 1986 relative aux intercommunales.
La loi du 27 juin 1921 accordant la personnalité civile aux associations sans but lucratif et aux établissements d'utilité publique constitue une loi au sens de l'article 108 (ancien), alinéa 4, de la Constitution, tel qu'il était applicable avant la modification du 5 mai 1993.
Tant que dans l'exercice de la compétence qui lui est accordée en vertu de l'article 162, alinéa 4, de la Constitution coordonnée, le législateur décrétal n'interdit pas aux communes d'invoquer la loi du 27 juin 1921 précitée, celle-ci demeure un fondement juridique valable pour les associations de communes qui souhaitent régler et gérer en commun des objets d'intérêt communal.
Il ressort de ce qui précède que c'est à tort que la cour d'appel a considéré qu'en tant qu'association entre deux communes et la Communauté flamande qui règle et qui gère des objets d'intérêt communal, la demanderesse devait être soumise à la loi du 22 décembre 1986 relative aux intercommunales.
L'article 23 de la loi du 22 décembre 1986 relative aux intercommunales ne devait donc pas s'appliquer à la demanderesse;
Il ne peut, dès lors, se déduire de la seule circonstance que la demanderesse n'applique pas les dispositions de l'article 23 de la loi du 22 décembre 1986, que celle-ci a violé une disposition légale ou le principe de bonne administration.
Il s'ensuit que dans la mesure où il déduit la faute de la demanderesse du refus d'engager les défendeurs sur la base de l'article 23 de la loi du 22 décembre 1986, l'arrêt viole toutes les dispositions énumérées au début du moyen.
2.Seconde branche
La circonstance que la forme juridique de l'association sans but lucratif a été sciemment choisie pour pouvoir échapper aux dispositions impératives de l'article 23 de la loi du 22 décembre 1986 relative aux intercommunales ne peut être imputée à la demanderesse mais uniquement à ceux qui l'ont créée.
La demanderesse ne peut en aucun cas être rendue responsable des actes et des intentions de ses créateurs.
Il s'ensuit que dans la mesure où il déduit la faute de la demanderesse du choix conscient de vouloir échapper aux dispositions impératives de l'article 23 de la loi du 22 décembre 1986 relative aux intercommunales, l'arrêt attaqué viole les articles 1382 et 1383 du Code civil.
IV. La décision de la Cour
1.Première branche
Attendu qu'en vertu de l'article 108, alinéa 4, de la Constitution applicable en l'espèce, plusieurs communes peuvent s'associer dans les conditions et suivant le mode à déterminer par la loi, pour régler et gérer en commun des objets d'intérêt communal;
Qu'il y a lieu d'entendre par «loi», une loi qui règle de manière spécifique le mode selon lequel les communes sont autorisées à s'associer;
Que les communes ne peuvent s'associer si ce n'est selon le mode déterminé par ou en vertu d'une loi ayant un tel objet;
Attendu qu'en vertu de l'article 1er de la loi du 22 décembre 1986 relative aux intercommunales applicable en l'espèce, loi qui était applicable à l'époque, plusieurs communes peuvent, dans les conditions prévues par la présente loi, former des associations ayant des objets bien déterminés d'intérêt communal;
Que cette loi est une loi telle que celle prévue à l'article 108, alinéa 4, de la Constitution;
Que cette loi a une portée générale de sorte que, sauf en cas d'application d'une autre disposition légale spécifique, ses dispositions doivent être appliquées lorsque des communes s'associent, y compris l'article 5 qui autorise le choix de la forme juridique d'une association;
Que le moyen qui, en cette branche, part de la supposition qu'une association de commune ne doit pas être soumise aux dispositions de la loi du 22 décembre 1986, manque en droit;
2.Deuxième branche
Attendu qu'en cette branche, le moyen est dirigé contre des considérations surabondantes;
Qu'à défaut d'intérêt, il est irrecevable;
3.Déclaration d'arrêt commun
Attendu que le rejet du pourvoi en cassation ôte tout intérêt à la demande en déclaration d'arrêt commun;
PAR CES MOTIFS,
LA COUR
Rejette le pourvoi ainsi que la demande en déclaration d'arrêt commun;
Condamne la demanderesse aux dépens.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, troisième chambre, à Bruxelles, où siégeaient le président Ivan Verougstraete, les conseillers Ernest Waûters, Ghislain Dhaeyer, Greta Bourgeois et Didier Batselé, et prononcé en audience publique du quatorze octobre deux mille deux par le président Ivan Verougstraete, en présence de l'avocat général Anne De Raeve, avec l'assistance du greffier adjoint principal Lisette De Prins.
Traduction établie sous le contrôle du conseiller Greta Bourgeois et transcrite avec l'assistance du greffier adjoint Christine Danhiez.
Le greffier adjoint, Le conseiller,


3e chambre (sociale)

Analyses

CONSTITUTION - CONSTITUTION 1831 (ART. 100 A FIN) - Article 108 -Commune - Association de communes - Intérêt communal -Règlement par la "loi" /

Il y a lieu d'entendre par "loi" au sens de l'article 108, alinéa 4, de la Constitution 1831, une loi qui règle de manière spécifique le mode selon lequel les communes sont autorisées à s'associer; les communes ne peuvent s'associer si ce n'est selon le mode déterminé par ou en vertu d'une loi ayant un tel objet.


Références :

Voir C.E., Driessens, n° 40.134, 15 septembre 1992, Rec. Arr. C.E., 1992 actuellement article 162, alinéa 4 de la Constitution coordonnée.


Origine de la décision
Date de la décision : 14/10/2002
Date de l'import : 14/10/2011

Numérotation
Numéro d'arrêt : C.00.0363.N
Numéro NOR : 147613 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2002-10-14;c.00.0363.n ?
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