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22/06/2007 | BELGIQUE | N°C.05.0514.N

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 22 juin 2007, C.05.0514.N


Cour de cassation de Belgique

Arret

I.

NDEG C.05.0514.N

INTERGEMEENTELIJK SAMENWERKINGSVERBAND ONDER DE VORM VAN EENOPDRACHTHOUDENDE VERENIGING ANTWERPSE WATERWERKEN,

Me Pierre van Ommeslaghe, avocat à la Cour de cassation,

contre

S.N.C.B. HOLDING,

Me Bruno Maes, avocat à la Cour de cassation.

II.

NDEG C.05.0518.N

INTERCOMMUNALE GASVOORZIENING VAN ANTWERPEN EN OMGEVING,

Me Huguette Geinger, avocat à la Cour de cassation,

contre

S.N.C.B. HOLDING,

Me Bruno Maes, avocat à la Cour de cassat

ion.

I. La procedure devant la Cour

Les pourvois en cassation C.05.0514.N et C.05.0518.N sont diriges contrel'arret rendu le 28 juin 2005 p...

Cour de cassation de Belgique

Arret

I.

NDEG C.05.0514.N

INTERGEMEENTELIJK SAMENWERKINGSVERBAND ONDER DE VORM VAN EENOPDRACHTHOUDENDE VERENIGING ANTWERPSE WATERWERKEN,

Me Pierre van Ommeslaghe, avocat à la Cour de cassation,

contre

S.N.C.B. HOLDING,

Me Bruno Maes, avocat à la Cour de cassation.

II.

NDEG C.05.0518.N

INTERCOMMUNALE GASVOORZIENING VAN ANTWERPEN EN OMGEVING,

Me Huguette Geinger, avocat à la Cour de cassation,

contre

S.N.C.B. HOLDING,

Me Bruno Maes, avocat à la Cour de cassation.

I. La procedure devant la Cour

Les pourvois en cassation C.05.0514.N et C.05.0518.N sont diriges contrel'arret rendu le 28 juin 2005 par la cour d'appel d'Anvers.

Le conseiller Beatrijs Deconinck a fait rapport.

L'avocat general Guy Dubrulle a conclu.

II. Les moyens de cassation

Cause C.05.0514.N

La demanderesse presente un moyen libelle dans les termes suivants :

Dispositions legales violees

- article 1er (article unique), alinea 7, de la loi du 17 janvier 1938reglant l'usage par les autorites publiques, associations de communes etconcessionnaires de services publics ou d'utilite publique, des domainespublics de l'Etat, des provinces et des communes, pour l'etablissement etl'entretien de canalisations et notamment des canalisations d'eau et degaz ;

- article 1er de la loi du 25 juillet 1891 revisant la loi du 15 avril1843 sur la police des chemins de fer ;

- article 7, alineas 1er et 2, de la loi du 9 aout 1948 portantmodification à la legislation sur la voirie par terre.

Decisions et motifs critiques

L'arret attaque condamne la demanderesse à payer à la defenderesse lasomme de 476.510,99 euros, majoree des interets et rejette la these de lademanderesse suivant laquelle la defenderesse etait sans competence pourordonner le deplacement des canalisations d'eau de la demanderesse, et ceetant donne qu'en l'espece il ne peut etre question d'une application dela theorie de l'interception des lors que le nouveau chemin de ferconstruit par la defenderesse ne croisait pas la Groenendaallaan danslaquelle se trouvaient les canalisations d'eau au niveau du sol mais demaniere aerienne, à savoir par un pont au-dessus de la Groenendaallaan.

L'arret attaque rejette ce moyen de defense par le motif :

« Que l'unite de la gestion de la voirie s'oppose à ce que la theorie del'interception se limite aux croisements au niveau du sol. Quel'interception avec une autre voirie doit, des lors, aussi etre admise encas de croisement aerien ou souterrain ».

Griefs

Il ressort de la connexite entre les dispositions legales mentionnees dansle present moyen, citee par l'arret attaque, qu'une route, à l'endroit ouelle est croisee par un nouveau chemin de fer (soit une grande voirie) quiest amenage, perd par le fait meme de sa nouvelle affectation, sa natureoriginale et fait dorenavant partie integrante du chemin de fer (la grandevoirie) auquel elle est incorporee.

Cela suppose un croisement au niveau du sol, des lors qu'en l'absence d'untel croisement la partie de la voirie qui est croisee par un chemin de ferne fait pas partie integrante du chemin de fer et ne peut etre reprise ouincorporee par le chemin de fer.

Comme l'a soutenu la demanderesse dans ses conclusions de synthese et sansetre contredite par l'arret attaque, les canalisations d'eau de lademanderesse qui devaient etre deplacees se trouvaient dans laGroenendaallaan et cette avenue a ete surplombee par le nouveau chemin defer au moyen d'un pont (le pont TGV). La demanderesse a soutenu, dans sesconclusions de synthese que la theorie de l'interception ne peuts'appliquer des lors que la partie de la Groenendaallaan situee sous lepont TGV n'a pas ete assimilee ou incorporee au domaine ferroviaire avecpour consequence que la defenderesse etait sans competence pour ordonnerle deplacement des canalisations d'eau sur la base de la loi du 17 janvier1938.

En considerant « que l'unite de la gestion de la voirie s'oppose à ceque la theorie se limite aux croisements au niveau du sol » et « quel'interception avec une autre voirie doit des lors aussi etre admise encas de croisement aerien ou souterrain » et en appliquant sur cette basela theorie de l'interception et en decidant que la defenderesse etaitcompetente en vertu de la loi du 17 janvier 1938 pour ordonner ledeplacement des canalisations d'eau aux frais de la demanderesse, l'arretattaque viole les dispositions legales citees au debut du moyen.

Cause C.05.0518.N

La demanderesse presente un moyen libelle dans les termes suivants.

Dispositions legales violees

- article 1er (article unique) , alinea 7, de la loi du 17 janvier 1938reglant l'usage par les autorites publiques, associations de communes etconcessionnaires de services publics ou d'utilite publique, des domainespublics de l'Etat, des provinces et des communes, pour l'etablissement etl'entretien de canalisations et notamment des canalisations d'eau et degaz ;

- article 4 de la loi du 23 juillet 1926 creant la Societe Nationale desChemins de fer belges, modifiee par l'arrete royal du 30 septembre 1992portant approbation du premier contrat de gestion de la Societe Nationaledes Chemins de fer belges et fixant des mesures relatives à cettesociete ;

- article 156, 2DEG, de la loi du 21 mars 1991 portant reforme decertaines entreprises publiques economiques tel qu'il etait applicableavant la modification par l'arrete royal du 19 octobre 2004

- article 1er de la loi du 25 juillet 1891 revisant la loi du 15 avril1843 sur la police des chemins de fer ;

- article 7 de la loi du 9 aout 1948 portant modification à lalegislation sur la voirie par terre.

Decisions et motifs critiques

L'arret attaque declare l'appel de la demanderesse non fonde, confirme lesjugements attaques dans toutes leurs dispositions à l'egard de lademanderesse et dit ainsi pour droit que la demanderesse est tenued'adapter et/ou de deplacer les equipements et/ou les installationsd'utilite publique conformement aux ordres de deplacement qui lui ont etesignifies par la defenderesse notamment par lettre recommandee avec accusede reception du 24 mars 1999, ou qui seront encore signifies à ladefenderesse, que la demanderesse n'est pas autorisee de facturer desacomptes à la defenderesse en vue de financer les frais d'adaptation oude deplacement, et condamne la demanderesse au remboursement des acomptesdejà payes par la defenderesse, à savoir une somme de 697.876,72 euros,majoree des interets moratoires au taux legal à partir du 6 octobre 1999jusqu'à la date de la citation et des interets judiciaires au taux legalà partir de la citation jusqu'au jour du paiement complet et ce, sur labase des motifs suivants :

« 1.Faits et antecedents, demande et moyen de defense en appel :

1.1. - La Societe nationale des Chemins de fer belges (la defenderesse)est en train d'amenager depuis quelques annees une ligne à grandevitesse. Le reseau de ligne à grande vitesse belge fait partie du projetnord europeen PCBAL qui vise à developper une liaison ferroviaire rapideentre les villes de Paris, Cologne, Bruxelles, Amsterdam et Londres(PCBAL).

Les societes de chemins de fer concernees ont ete chargees d'amenager denouvelles structures et/ou d'adapter des infrastructures existantes lorsd'une conference des ministres de la mobilite tenue à La Haye le 21novembre 1989.

Le reseau de lignes à grande vitesse belge comprend au total 314 kmdisperses entre trois zones : la zone ouest (entre la frontiere franc,aiseet Bruxelles), la zone nord (entre Bruxelles et la frontiere hollandaise)et la zone est (entre Bruxelles et la frontiere allemande).

1.2. L'execution de ces travaux necessite à divers endroits l'adaptationet/ou le deplacement d'installations et d'equipements d'utilite publiqueexistants de distribution d'eau, de teledistribution, de gaz et detelephonie.

Une contestation est nee entre la Societe nationale des Chemins de ferbelges et les societes d'utilite publiques quant à la question de savoirqui va supporter les frais de ce deplacement.

Pour la zone ouest (inauguree en decembre 1997) les societes d'utilitepubliques etaient uniquement disposees à supporter les frais dedeplacement de canalisations situees sur le domaine de la SocieteNationale des Chemins de fer belges. Le comite de direction a decide, le14 juin 1993, de prendre en charge certains frais des concessionnairespour les projets P1 et P2 dans la zone ouest.

Quant aux deplacements dans les zones est et nord, aucun accord n'a etetrouve entre la Societe nationale des Chemins de fer belges et lessocietes d'utilite publique. Le 1er decembre 1997, le comite de directionde la Societe nationale des Chemins de fer belges a decide de prefinanceraux societes d'utilite publique les montants evalues et approuves maistoutefois uniquement à titre d'acompte, sous toute reserve et sansrenonciation à un droit ni à une instance concernant la recuperationulterieure des montants factures et la reparation integrale du dommagesubi au moyen de procedures judiciaires.

1.3. Une contestation est nee entre la Societe nationale des Chemins defer belges, d'une part, et l'association commanditaire `IntercommunaleGasvoorziening van Antwerpen en Omgeving' (en abrege IGAO), (demanderesse)et `l'Intergemeentelijk samenwerkingsverband onder de vorm van eenopdrachthoudende vereniging Antwerpse Waterwerken' (en abrege AWW)(seconde intimee), d'autre part, en ce qui concerne les frais dedeplacement et d'adaptation à Anvers sur l'axe Bruxelles-Amsterdam (P7),notamment pour le tronc,on entre Anvers Canal Albert - Havanastraat et lecomplexe ferroviaire Luchtbalstopplaats Groenendaallaan (connu sous le nom`Projet 7321' travaux de construction civile).

La procedure d'adjudication a debute en juin 1999 afin de pouvoircommencer les travaux en novembre 1999. Sur l'ordre de la Societenationale des chemins de fer belges, la societe anonyme Tuc Rail, maitrede l'ouvrage delegue pour la ligne à grande vitesse belge, enconcertation et en dialogue avec les services competents des deux societesd'utilite publique, a planifie les modifications necessaires pour un prixde revient total evalue à 1.635.504,38 euros (65.976.083 francs belges).

En ce qui concerne l'AWW, il fallait dans une premiere phase deplacer lacanalisation d'eau DN 500 ST situee dans l'axe du tronc,on nord de laGroenendaallaan sur une longueur d'environ 80 metres en vue de laconstruction des fondations d'un pont et d'un nouveau pont de chemin defer pour ligne à grande vitesse à l'est du pont du chemin de ferexistant. Ces travaux ont ete realises effectivement en janvier 2000. Aucours d'une seconde phase, la canalisation d'eau DN 800 situee entre lecanal Albert et la Groenendaallaan, au pied du talus de la S.N.C.B.,devait aussi etre deplacee afin de pouvoir amenager des rails de lignes àgrande vitesse à l'ouest des lignes existantes.

En ce qui concerne la demanderesse, au debut des travaux il a falludeplacer les canalisations de gaz en acier D500 sur une longueur d'environ1550 metres entre Oude Schijn et le croisement de la canalisation de gazà l'est du collecteur de Aquafin. Ces travaux ont aussi ete executes enmars 2000.

1.4. - Par lettre recommandee du 24 mars 1999, la Societe nationale desChemins de fer belges a informe les deux societes d'utilite publique desmodifications à faire. En se referant à la legislation applicable enl'espece, suivant la Societe nationale des Chemins de fer belges (loi du17 janvier 1938) il a ete communique que les travaux d'adaptation et dedeplacement devaient etre effectues aux frais des societes d'utilitepublique, des lors qu'il s'agit de modifications necessaires au domainepublic gere par la Societe nationale des Chemins de fer belges dansl'interet general, dans l'interet du service public et des voiriespubliques.

Dans l'ordre de deplacement du 24 mars 1999, les deux societes d'utilitepublique ont ete invitees à manifester leur accord formel sur l'executiondes travaux dans un delai de trente jours calendrier et sans reserve. LaSociete nationale des Chemins de fer belges n'a pas obtenu cet accord ets'est declaree disposee, conformement à ladite decision du comite dedirection du 1er decembre 1997, à indemniser (prefinancer) les deuxsocietes d'utilite publique des frais evalues.

1.5. Cela fut communique à l'AWW par lettre du 12 mai 1999.

L'evaluation initiale de 63.460,74 euros (2.560.000 francs belges) pour lapremiere phase (deplacement de la conduite d'alimentation DN 500 ST) a eteevaluee par lettre du 10 decembre 1999 à 163.465,45 euros (6.594.180francs belges) et approuvee.

Le 21 janvier 2000, apres l'execution des travaux en janvier 2000, uneavance a ete payee à l'AWW d'un montant de 163.465,45 euros (6.594.180francs belges) d'apres une facture d'acompte du 2 decembre 1999. Plustard, la Societe nationale des Chemins de fer belges a perc,u leremboursement de la somme de 23.709,58 euros (956.442 francs belges)suivant une note de credit nDEG 9600042/00823 du 9 juin 2000 de l'AWW etle 28 mars 2003 la Societe nationale des Chemins de fer belges a encorepaye une facture datant du 29 janvier 2003.

1.6. - A l'egard de la demanderesse, un point de vue identique a eteadopte par lettre du 11 mai 1999. Dans cette meme lettre, l'evaluationproposee d'un montant de 811.312,30 euros (32.728.257 francs belges) pourle deplacement de la canalisation de gaz en acier 0500 a ete approuvee.

Les frais evalues ont aussi ete payes à la demanderesse, à titred'acompte, le 6 octobre 1999 suivant une facture d'acompte du 28 mai 1999.Plus tard, la Societe nationale des Chemins de fer belges a perc,u leremboursement d'une somme de 113.435,58 euros (4.575.980 francs belges)suivant une note de credit nDEG 251002DEG3 du 6 avril 2000 de lademanderesse.

2. Quant au droit

2.1. Sur le fond (...)

2.2.2. La S.N.C.B. a ete creee par la loi du 23 juillet 1926 creant laSociete nationale des Chemins de fer belges. Aux termes du texte initialde l'article 4 de cette loi, l'apport de l'Etat consistera en lajouissance et le droit d'exploitation du reseau des chemins de fer del'Etat, tel que ce reseau existera au jour de la constitution de lasociete. Cet article 4 a toutefois ete modifie par l'article 3 de l'arreteroyal du 30 septembre 1992 portant approbation du premier contrat degestion dans le sens suivant : `L'Etat transfere sans indemnite lapropriete du reseau des chemins de fer de l'Etat, en ce compris lajonction Nord-Midi, à la Societe nationale des Chemins de fer belges. Cetransfert se fait de plein droit. Il est opposable aux tiers sans autresformalites à la date d'entree en vigueur du present article. La liste desbiens, qui font l'objet de ce transfert, est dressee par arrete royal, surla proposition de la Societe nationale des Chemins de fer belges.

La Societe nationale des Chemins de fer belges succede aux droits etobligations de l'Etat relatifs aux biens qui lui sont transferes par lepresent article, y compris les droits et obligations resultant deprocedures judiciaires en cours et à venir (...)'.

La mission du service public s'oppose à ce que, apres le transfert dureseau des chemins de fer, la Societe nationale des Chemins de fer belges,puisse exercer moins de droits dans le cadre de l'exploitation et dudeveloppement ulterieur de l'infrastructure ferroviaire d'utilite publiqueque ceux qui etaient compris auparavant dans les prerogatives de l'Etatbelge. La demanderesse ne peut, des lors, etre suivie lorsqu'elle soutientque la Societe nationale des Chemins de fer belges n'aurait pas le pouvoird'ordonner le deplacement d'equipements d'utilite publique qui ne setrouvent pas sur le domaine respectif qui lui a ete transfereinitialement, respectivement sur le domaine qu'elle a acquisulterieurement à la suite d'une expropriation dans le cadre de l'exercicede son service public.

2.2.3. Les chemins de fer font partie du domaine public. Cela vaut pourles chemins de fer donnes en concession et meme pour les chemins de feramenages par les particuliers afin de relier leurs entreprises au reseauferroviaire. Appartiennent aussi au domaine public, les gares, lesparkings attenants, les batiments administratifs, les batimentsresidentiels pour le personnel dans l'enceinte de la gare, les quais, lesentrepots, l'equipement de signalisation sur la voie ferree ainsi que lesponts sur lesquels passe le chemin de fer (F. Van Neste, Zakenrecht, 1,Bruxelles, E Story-Scientia, 1990, nDEG 91, p. 171 ; Cass., 3 mai 1968,Bull. et Pas., 1968, I, 1033, R.C.J.B., 1969, 5, et la note signee A.Mast).

La Societe nationale des Chemins de fer belges qui a repris les droits etobligations de l'Etat belge exerce une mission de service public et peut,des lors, invoquer les dispositions de la loi du 17 janvier 1938.

L'article 1er (article unique) de la loi du 17 janvier 1938 reglantl'usage par les autorites publiques, associations de communes etconcessionnaires de services publics ou d'utilite publique, des domainespublics de l'Etat, des provinces et des communes, pour l'etablissement etl'entretien de canalisations et notamment des canalisations d'eau et degaz, dispose ce qui suit :

`L'Etat, les provinces et les communes ont, en tout cas, sur leur domainerespectif, le droit de faire modifier ulterieurement les dispositions oule trace d'une installation, ainsi que les ouvrages qui s'y rapportent. Siles modifications sont imposees soit pour un motif de securite publique,soit pour preserver la beaute d'un site, soit dans l'interet de la voirie,des cours d'eau, des canaux ou d'un service public, soit comme consequencede changements apportes par les riverains aux acces des proprietes enbordure des voies empruntees, les frais de travaux sont à charge del'entreprise qui a etabli l'installation; dans les autres cas, ils sont àcharge de l'autorite qui impose les modifications. Celle-ci peut exiger undevis prealable et, en cas de desaccord, proceder elle-meme à l'executiondes travaux'.

En vertu de l'article 1er de la loi du 25 juillet 1891 revisant la loi du15 avril 1843 sur la police des chemins de fer, les chemins de fer sontclasses dans la grande voirie.

En vertu de l'article 7, alinea 1er, de la loi du 9 aout 1948 portantmodification à la legislation sur la voirie par terre, le Roi peutrepartir la grande voirie en itineraires numerotes et y comprendre dessections de routes provinciales et communales ; les deputationspermanentes et les communes interessees seront prealablement entendues,mais uniquement au sujet des routes ou sections de routes provinciales oucommunales incluses dans les itineraires susdits ; en vertu du secondalinea du meme article, le Roi peut prescrire l'incorporation d'office etsans indemnite, dans la grande voirie de l'Etat, des routes ou sections deroutes qui, etant etrangeres à cette grande voirie, sont incluses dansles itineraires numerotes ;

Il resulte de la connexite de ces dispositions qu'une route nationale,regionale ou communale, à l'endroit du croisement avec un chemin de ferperd, par le fait de sa nouvelle affectation, à l'endroit de cecroisement, sa nature originale et fait partie integrante ou doit etreconsideree comme faisant partie integrante du chemin de fer dans lequelelle a ete incorporee.

L'ordre de modification du trace en un endroit ou le chemin de fer croiseune autre route, releve des operations qui donne leur nouvelle affectationà cette partie de l'autre route. En tant que gestionnaire du chemin defer, la Societe nationale des Chemins de fer belges peut reclamer cedeplacement et il n'est pas requis que le gestionnaire de la route croiseesoit entendu au prealable (Comp. Cass., 13 juin 2003, C.00.0725.N). En vuede l'amenagement d'une nouvelle voie de chemin de fer qui croise une autreroute, la Societe nationale des Chemins de fer belges a donc le droit dedemander le deplacement des canalisations de gaz et/ou d'eau (comp. Cass.,10 octobre 1979, Bull. et Pas., 1980, I, p. 197, R.W., 1980-81, col.1466/1474 et la note signee R. Quintens, J.T., 1981, p. 23 et la notesignee D. Lagasse, `Du sort d'une route communale incorporee dans uneroute nationale en construction'). Le terme `voirie' figurant à l'article13, alinea 3, de la loi du 10 mars 1925 sur les distributions d'energieelectrique et à l'article 1er, dernier alinea, de la loi du 17 janvier1938 reglant l'usage par les autorites publiques, associations de communeset concessionnaires de services publics ou d'utilite publique, desdomaines publics de l'Etat, des provinces et des communes, pourl'etablissement et l'entretien de canalisations et notamment descanalisations d'eau et de gaz, vise l'ensemble des voies de communicationaffectees à la circulation publique et pas seulement les voiries occupeespar les installations de gaz et d'eau à l'exclusion de toutes les autresvoiries publiques existantes ou à creer (Cass., 20 avril 1978, Bull. etPas., 1978, I, 936). La Societe nationale des Chemins de fer belgespouvait, des lors, legalement reclamer le deplacement des canalisations degaz et d'eau.

L'unite de la gestion des voiries s'oppose à ce que la theorie del'interception se limite aux croisements se trouvant au niveau du sol.L'intersection avec une autre voirie doit donc aussi etre admise en cas decroisement aerien ou souterrain.

Il y a lieu d'entendre par `interet des voiries', `l'interet des voies decirculation en general', sans limitation aux voies sur lesquelles setrouvent les canalisations qui doivent etre modifiees ou deplacees (FlammeA., `De la rencontre de canalisations et de cables au cours de travauxpublics', J.T., 1966, p. 116, nDEG24). Il ressort aussi des considerationsprecedentes que la defenderesse invoque à juste titre l'interet de lavoirie afin de mettre les frais de deplacement à charge de lademanderesse et de l'AWW et d'en reclamer le remboursement ».

Griefs

Premiere branche

1. La demanderesse a conteste devant la cour d'appel que sur la base del'article unique de la loi du 17 janvier 1938 reglant l'usage par lesautorites publiques, associations de communes et concessionnaires deservices publics ou d'utilite publique, des domaines publics de l'Etat,des provinces et des communes, pour l'etablissement et l'entretien decanalisations et notamment des canalisations d'eau et de gaz, ladefenderesse pouvait ordonner le 24 mars 1999, le deplacement de lacanalisation de gaz de la demanderesse par un ordre de deplacement du 24mars 1999 situee à l'epoque sur le domaine de la Region flamande ettransfere ulterieurement à la defenderesse.

La demanderesse a defendu à ce propos non seulement le point de vue selonlequel la defenderesse pouvait ordonner le deplacement de la canalisationde gaz uniquement en ce qui concerne le domaine des chemins de fer qui luia ete transfere initialement par l'Etat belge en 1992, mais aussi que ladefenderesse ne pouvait ordonner que le deplacement des canalisationssituees sur ses domaines respectifs en ce sens que la defenderesse nepouvait ordonner le deplacement de canalisations situees sur ou sous ledomaine des autres autorites.

La demanderesse a invoque specialement à cet egard dans ses conclusionsde synthese en degre d'appel que :

« Il ressort clairement de l'etude des plans de situation quel'installation litigieuse de la distribution de gaz avant l'extension dureseau ferroviaire etait situee en dehors du domaine Societe nationale desChemins de fer belges, à savoir sous le domaine transfere ulterieurement.

A cet egard, on peut relever le fait que la defenderesse ecrit ce qui suità la page 34 de ses conclusions d'appel :

`Il ressort tres clairement du plan de situation produit que lacanalisation de gaz en acier D 500 etait situee entre la Havanastraat etla Groenendaallaan, parallelement au chemin de fer et à la E 19 sur ledomaine de la Region flamande. Cette canalisation devait etre deplacee surune longueur d'environ 1550 metres entre Oude Schijn et le croisement dela canalisation de gaz à l'est du collecteur de Aquafin (...)'. LaSociete nationale des Chemins de fer belges reconnait donc elle-memeexpressis verbis au moyen de ses conclusions que les canalisations de gazqui devaient etre deplacees etaient situees en dehors du domaine initialet respectif de la Societe nationale des Chemins de fer belges. Lesequipements d'utilite publique se trouvent notamment sur le domaine de laRegion flamande'.

`Il faut insister sur le fait que les autorites concernees ne disposent dece droit de deplacement que sur leur propre domaine respectif. Il ressortdu dossier, fut-ce repete, que les canalisations de gaz qui devaient etredeplacees etaient situees en dehors du domaine Societe nationale desChemins de fer belges initial et respectif et que la defenderesse lereconnait expressement dans ses conclusions. Les equipements d'utilitepublique se trouvaient notamment sous le domaine transfereulterieurement'. La defenderesse soutient, des lors, tout à fait à tortque `le critere le plus essentiel pour decider qui doit supporter lesfrais de deplacement n'est pas de savoir sur quel domaine les equipementsd'utilite publiques sont situes, mais bien la question de savoir si lesdeplacements imposes sont ou non la consequence directe et necessaire detravaux qui sont executes par une autorite determinee à son propredomaine dans l'interet de la voirie et du service public'. Par cettethese, la defenderesse ne tient pas compte des dispositions legalesprecises et fait ce qu'elle estime devoir reprocher à la demanderesse, àsavoir evider une reglementation claire. Le deplacement ne peut, en effet,etre ordonne, suivant la reglementation applicable, que par chaqueautorite distincte sur son domaine propre ».

2. Tel que cela ressort des constatations du jugement entrepris dutribunal de premiere instance d'Anvers du 11 decembre 2003 ainsi que desconclusions de synthese deposees par la demanderesse devant la courd'appel , la canalisation de gaz de la demanderesse devait etre deplaceesur des parcelles attenantes à la E 19 entre la Groenendaallaan et laHavanastraat sur une longueur d'environ 1.550 metres, l'anciennecanalisation de gaz etait situee parallelement entre la ligne de trains demarchandises existante et la E19, cette canalisation devait etre deplaceede l'autre cote des voies ferrees afin de pouvoir deplacer la ligne detrains de marchandises vers la E 19, et à la hauteur des ponts du cheminde fer de la Groenendaallaan, ou un pont de chemin de fer etait construitdes deux cotes, des travaux devaient etre effectues au-dessous de cesponts dans la Groenendaallaan, afin de permettre la liaison entrel'ancienne canalisation de gaz et la nouvelle canalisation de gaz dans laArgentinienlaan, de l'autre cote de l'assiette du chemin de fer.

Il ressort aussi des constatations du meme jugement et des conclusions desynthese en degre d'appel de la defenderesse, que par arrete royal du 13octobre 1999 declarant d'utilite publique (M.B. du 14 decembre 1999) lapossession immediate de certaines parcelles situees sur le domaine de laville d'Anvers, les parcelles situees entre la Havanastraat et laGroenendaallaan, necessaires à l'elargissement de l'assiette du chemin defer et à la construction de nouveaux ouvrages d'art en vue del'amenagement de la ligne à grande vitesse, ont ete expropriees.

3. L'arret attaque constate que, par un ordre de deplacement du 24 mars1999, la defenderesse a invite la demanderesse à manifester son accordformel et sans reserve à l'execution des travaux de deplacement, dans undelai de trente jours calendrier, que dans cette meme lettre ladefenderesse s'est declaree disposee à prefinancer les frais evalues parla demanderesse des travaux de deplacement et que le 6 octobre 1999 lesfrais evalues ont ete payes à titre d'acompte par la defenderesse à lademanderesse.

4. L'arret attaque rejette tant le moyen de defense de la demanderessesuivant lequel la defenderesse ne peut invoquer le droit de deplacement dela loi precitee du 17 janvier 1938 qu'en ce qui concerne le domainetransfere « initialement » par l'Etat à la defenderesse en 1992, que lemoyen de defense de la demanderesse suivant lequel la defenderesse ne peutinvoquer le droit de deplacement precite qu'en ce qui concerne lesequipements d'utilite publique sur son propre domaine.

L'arret attaque considere que la these de la demanderesse ne peut etresuivie lorsqu'elle soutient que la defenderesse ne serait pas autorisee àordonner le deplacement d'equipements d'utilite publique qui ne setrouvent pas sur son domaine propre transfere initialement, respectivementsur le domaine qu'elle a acquis ulterieurement à la suite del'expropriation dans le cadre de l'exercice de son service public.

L'arret fonde cette decision sur les considerations « que la mission duservice public s'oppose à ce que la defenderesse puisse exercer moins dedroits apres le transfert du reseau ferroviaire de l'Etat dans le cadre del'exploitation et du developpement ulterieur de l'infrastructureferroviaire d'utilite publique que ceux qui existaient auparavant sous lesprerogatives de l'Etat belge ».

L'arret attaque ne constate pas, mais n'exclut pas davantage, commel'invoque la demanderesse, que la canalisation de gaz à deplacer, dans lamesure ou elle se trouve sur les parcelles situees le long de la E19 entrela Groenendaellaan et la Havanastraat, parallelement entre la ligne detrains de marchandises existante et la E19, à deplacer de l'autre cotedes voies de chemin de fer afin de pouvoir deplacer la ligne de trains demarchandises vers la E19, etait situee sur des terrains appartenant à laRegion flamande, qui n'ont ete transferes qu'ulterieurement à ladefenderesse, à la suite d'une expropriation, soit apres que ledeplacement litigieux a ete ordonne.

5. L'alinea 7 de l'article unique de la loi du 17 janvier 1938 reglantl'usage par les autorites publiques, associations de communes etconcessionnaires de services publics ou d'utilite publique, des domainespublics de l'Etat, des provinces et des communes, pour l'etablissement etl'entretien de canalisations et notamment des canalisations d'eau et degaz dispose que : « L'Etat, les provinces et les communes ont, en toutcas, sur leur domaine respectif, le droit de faire modifier ulterieurementles dispositions ou le trace d'une installation, ainsi que les ouvragesqui s'y rapportent. Si les modifications sont imposees soit pour un motifde securite publique, soit pour preserver la beaute d'un site, soit dansl'interet de la voirie, des cours d'eau, des canaux ou d'un servicepublic, soit comme consequence de changement apporte par les riverains auxacces des proprietes en bordure des voies empruntees, les frais de travauxsont à charge de l'entreprise qui a etabli l'installation; dans lesautres cas, ils sont à charge de l'autorite qui impose les modifications.Celle-ci peut exiger un devis prealable et, en cas de desaccord, procederelle-meme à l'execution des travaux ».

Aux termes de l'article 4 de la loi du 23 juillet 1926 creant la Societenationale des Chemins de fer belges, modifiee par l'arrete royal du 30septembre 1992 portant approbation du premier contrat de gestion de laSociete nationale des Chemins de fer belges et fixant des mesuresrelatives à cette Societe, l'Etat transfere, suite à la creation de laSociete nationale des Chemins de fer belges en tant qu'entreprise publiqueautonome en execution du Titre V de la loi du 21 mars 1991 portant reformede certaines entreprises publiques economiques, « la propriete du reseaudes chemins de fer de l'Etat, en ce compris la jonction Nord-Midi, à laSociete nationale des Chemins de fer belges ». En vertu du meme article,la Societe nationale des Chemins de fer belges succede aux droits etobligations de l'Etat « relatifs aux biens qui lui sont transferes ».

Aux termes de l'article 156, 2DEG, de la loi du 21 mars 1991 portantreforme de certaines entreprises publiques economiques, tel qu'il etaitapplicable avant la modification par l'arrete royal du 20 octobre 2004portant certaines mesures de reorganisation de la Societe nationale desChemins de fer belges, les « missions de service public de la Societenationale des Chemins de fer belges » comprennent notamment« l'acquisition, la construction, l'entretien, la gestion etl'exploitation de l'infrastructure ». En vertu de la meme dispositionlegale, il y a lieu d'entendre par infrastructure « l'ensemble del'equipement ferroviaire, la signalisation, la fourniture de courantelectrique ainsi que le terrain sur lequel elle est situee ».

Dans la mesure ou la Societe nationale des Chemins de fer belges succedeà l'Etat, elle puise les memes droits que l'Etat auparavant, dansl'article unique de la loi du 17 janvier 1938.

Le droit de deplacement qui, en vertu de l'alinea 7 de l'article unique dela loi du 17 janvier 1938 revient à « l'Etat, aux provinces et auxcommunes» pour faire modifier les installations « sur leur domainerespectif » requiert que le domaine sur lequel ou dans lequel lacanalisation à deplacer se trouve, appartient à l'autorite qui requiertle deplacement.

L'Etat, lorsqu'il etait encore proprietaire du reseau ferroviaire, nepouvait ordonner le deplacement, dans l'interet general del'infrastructure ferroviaire, d'une canalisation de gaz au frais dugestionnaire de cette canalisation, lorsque celle-ci n'etait pas situeesur le domaine de l'Etat. Lorsque cette installation etait situee sur ledomaine d'une autre autorite, celle-ci devait marquer son accord auxtravaux projetes par l'Etat à l'infrastructure ferroviaire, et seulecette autorite pouvait ordonner le deplacement des canalisations sur sondomaine, le cas echeant dans l'interet general des chemins de fer. Cen'est qu'apres que l'Etat est devenu proprietaire des terrains danslesquels les canalisations de gaz sont situees, fut-ce par expropriationou achat, qu'il a pu invoquer le droit de deplacement prevu par l'alinea 7de l'article unique de la loi du 17 janvier 1938, parce que ce n'est qu'àce moment-là que la canalisation etait situee sur son « domainerespectif ».

La meme limitation vaut pour la Societe nationale des Chemins de ferbelges qui, depuis le transfert en 1992 du reseau ferroviaire, peutinvoquer l'application de l'alinea 7 de l'article unique de la loi du 17janvier 1938.

Lorsque, comme il est invoque par la demanderesse dans ses conclusions, lacanalisation de gaz etait situee sur un domaine qui n'appartenait pas àla Societe nationale des Chemins de fer belges, en particulier le domainede la Region flamande, et que cette canalisation de gaz devait etredeplacee dans l'interet general des chemins de fer, seule la Regionflamande pouvait ordonner le deplacement et la Societe nationale desChemins de fer belges ne pouvait ordonner le deplacement aux frais de lademanderesse qu'apres avoir acquis elle-meme les terrains dans lesquels setrouvait la canalisation.

Le deplacement qui, comme en l'espece, a ete convenu entre la Societenationale des Chemins de fer belges et la societe publique à la suite del'ordre de deplacement du 24 mars 1999 moyennant une indemnisation desfrais evalues par la societe publique, lorsque le domaine dans lequel setrouvait la canalisation de gaz appartenait encore à la Region flamandeet donc avant que le domaine ne releve du « domaine propre » de laSociete nationale des Chemins de fer belges, ne constitue pas undeplacement dont la demanderesse devait supporter les frais au sens del'alinea 7 de l'article unique de la loi du 17 janvier 1938, mais undeplacement dont la S.N.C.B. doit supporter les frais des lors qu'ellen'avait pas la qualite requise le 24 mars 1999 pour imposer le deplacementaux frais de la demanderesse.

6. L'arret attaque ne pouvait, des lors, pas admettre legalement quel'Etat belge, avant le transfert du reseau ferroviaire etatique, et laSociete nationale des Chemins de fer belges apres le transfert de cereseau, avaient le droit d'ordonner le deplacement de la canalisation memesi elle ne se trouvait pas sur son « domaine propre », ne pouvait paslegalement rejeter la defense de la demanderesse suivant laquelle seul ledeplacement aux frais de la societe publique pouvait etre ordonne pour lescanalisations situees sur « le domaine propre » de la Societe nationaledes Chemins de fer belges et, des lors, sur la base des considerationsqu'il contient et desquelles il ne ressort pas que la canalisation de gazà deplacer au moment de l'ordre de deplacement se trouvait sur/dans lesparcelles appartenant au domaine de la defenderesse, ne pouvait accueillirlegalement la demande de la defenderesse à charge de la demanderesse(violation de l'alinea 7 de l'article unique de la loi du 17 janvier 1938reglant l'usage par les autorites publiques, associations de communes etconcessionnaires de services publics ou d'utilite publique, des domainespublics de l'Etat, des provinces et des communes, pour l'etablissement etl'entretien de canalisations et notamment des canalisations d'eau et degaz, de l'article 4 de la loi du 23 juillet 1926 creant la Societenationale des chemins de fer belges, modifie par l'arrete royal du 30septembre 1992 portant approbation du premier contrat de gestion de laSociete nationale des Chemins de fer belges et fixant des mesuresrelatives à cette societe, ainsi que de l'article 156, 2DEG, de la loi du21 mars 1991 portant reforme de certaines entreprises publiqueseconomiques, tel qu'il etait applicable avant la modification par l'arreteroyal du 20 octobre 2004 portant certaines mesures de reorganisation de laSociete nationale des Chemins de fer belges) .

Le jugement attaque ne pouvait pas davantage legalement dire pour droitque la demanderesse est tenue d'adapter et/ou de deplacer les equipementset/ou les installations d'utilite publique conformement à l'ordre dedeplacement qui lui a ete signifie par la defenderesse par lettrerecommandee avec accuse de reception du 24 mars 1999 et ne pouvait pasmettre legalement à charge de la demanderesse les frais de deplacement dela canalisation de gaz dans la mesure ou l'ancienne canalisation de gazetait situee sur des parcelles attenantes à la E19 entre laGroenendaallaan et la Havanastraat sur une longueur d'environ 1.550 metreset ce parallelement entre la ligne de trains de marchandises existante etla E19 (violation de l'alinea 7 de l'article unique de la loi du 17janvier 1938 reglant l'usage par les autorites publiques, associations decommunes et concessionnaires de services publics ou d'utilite publique,des domaines publics de l'Etat, des provinces et des communes, pourl'etablissement et l'entretien de canalisations et notamment descanalisations d'eau et de gaz, de l'article 4 de la loi du 23 juillet 1926creant la Societe nationale des chemins de fer belges, modifie parl'arrete royal du 30 septembre 1992 portant approbation du premier contratde gestion de la Societe nationale des Chemins de fer belges et fixant desmesures relatives à cette societe, ainsi que de l'article 156, 2DEG, dela loi du 21 mars 1991 portant reforme de certaines entreprises publiqueseconomiques, tel qu'il etait applicable avant la modification par l'arreteroyal du 20 octobre 2004 portant certaines mesures de reorganisation de laSociete nationale des Chemins de fer belges ).

Seconde branche

1. Aux termes de l'alinea 7 de l'article unique de la loi du 17 janvier1938 reglant l'usage par les autorites publiques, associations de communeset concessionnaires de services publics ou d'utilite publique, desdomaines publics de l'Etat, des provinces et des communes, pourl'etablissement et l'entretien de canalisations et notamment descanalisations d'eau et de gaz applicable en l'espece à la canalisation degaz de la demanderesse, en ce qui concerne l'etablissement et l'entretiendes canalisations et notamment des canalisations d'eau et de gaz,« l'Etat, les provinces et les communes ont, en tout cas, sur leurdomaine respectif, le droit de faire modifier ulterieurement lesdispositions ou le trace d'une installation, ainsi que les ouvrages quis'y rapportent ». Si les modifications sont imposees « soit pour unmotif de securite publique, soit pour preserver la beaute d'un site, soitdans l'interet de la voirie, des cours d'eau, des canaux ou d'un servicepublic, soit comme consequence de changement apporte par les riverains auxacces des proprietes en bordure des voies empruntees », les frais detravaux sont « à charge de l'entreprise qui a etabli l'installation ».Dans les autres cas, ils sont à charge « de l'autorite qui impose lesmodifications ».

En raison de l'article unique de la loi du 17 janvier 1938, le deplacementne peut etre ordonne qu'aux frais de l'exploitant de la canalisation degaz à deplacer, dans la mesure ou le deplacement est ordonne parl'autorite sur le domaine de laquelle la canalisation est situee.

2. Tel que cela ressort des constatations du jugement entrepris du 11decembre 2003 et des conclusions de synthese en degre d'appel de ladefenderesse, l'application de la « theorie de l'interception »,invoquee relativement à la canalisation de gaz de la demanderesse,concerne l'adaptation de la canalisation de gaz dans la Groenendaallaandans laquelle, sous le pont du chemin de fer, des travaux devaient etreeffectues afin de permettre la liaison entre l'ancienne canalisation degaz et la nouvelle canalisation de gaz de l'autre cote de l'assiette duchemin de fer.

3. La « theorie de l'interception », fondee sur la connexite entrel'article 1er de la loi du 25 juillet 1891 revisant la loi du 15 avril1843 sur la police des chemins de fer, l'article 7 de la loi du 9 aout1948 portant modification à la legislation sur la voirie par terre etl'article unique de la loi du 17 janvier 1938 reglant l'usage par lesautorites publiques, associations de communes et concessionnaires deservices publics ou d'utilite publique, des domaines publics de l'Etat,des provinces et des communes, pour l'etablissement et l'entretien decanalisations et notamment des canalisations d'eau et de gaz, signifie,comme l'admet aussi l'arret attaque, qu'une route, à l'endroit ou elleest croisee par une nouvelle ligne de chemin de fer, perd, par le faitmeme de sa nouvelle affectation, sa nature originale et fait desormaispartie integrante du chemin de fer auquel elle est incorporee.

L'application de la « theorie de l'interception » a pour consequence,comme l'admet l'arret attaque, que l'ordre de deplacement de lacanalisation de gaz à l'endroit ou le chemin de fer croise une route,releve des actes qui conferent son affectation à cette partie de la routecroisee, de sorte qu'en l'espece la Societe nationale des Chemins de ferbelges qui, en vertu de l'article 4 de la loi du 23 juillet 1926 creant laSociete nationale des Chemins de fer belges, modifie par l'arrete royal du30 septembre 1992 portant approbation du premier contrat de gestion de laSociete nationale des Chemins de fer belges et fixant des mesuresrelatives à cette societe et de l'article 156, 2DEG, de la loi du 21 mars1991 portant reforme de certaines entreprises publiques economiques, telqu'il etait applicable avant la modification par l'arrete royal du 19octobre 2004 portant certaines mesures de reorganisation de la Societenationale des Chemins de fer belges , est le gestionnaire du domaineferroviaire, et peut reclamer le deplacement de la canalisation de gaz.

4. En l'espece, il apparait que le croisement entre la route, à savoir laGroenendaallaan dans laquelle se trouve la canalisation de gaz de lademanderesse, et le chemin de fer de la defenderesse, n'est pas uncroisement au niveau du sol, mais que le chemin de fer passe sur un pontau-dessus de la Groenendaallaan.

Lorsqu'un chemin de fer croise une route au moyen d'un pont de chemin defer, il n'y a pas d'incorporation de fait du chemin croise au chemin defer, et il ne peut etre fait application de la theorie de l'interceptionpour admettre que le gestionnaire du chemin de fer est l'autoritecompetente pour ordonner une adaptation de la canalisation de gaz situeedans la route appartenant au domaine d'une autre autorite.

L'arret attaque considere neanmoins que la theorie de l'interception nepeut « se limiter aux croisements au niveau du sol » et « quel'interception par une autre route doit aussi etre admise en cas decroisement aerien ou souterrain » et ce, parce que « l'unite de lagestion des voiries » s'opposerait à une autre solution.

A defaut d'incorporation de fait, « l'unite dans la gestion desvoiries » ne requiert toutefois pas qu'en cas de croisement entre uneroute et un chemin de fer qui ne se fait pas au niveau du sol, la route« croisee » doit etre consideree comme faisant partie du chemin de fer.

Dans les circonstances donnees de la cause et sur la base desconstatations qu'il contient, l'arret attaque ne pouvait deciderlegalement que la Groenendaallaan avait rec,u une « nouvelleaffectation », soit l'affectation de chemin de fer soumis à la gestionde la Societe nationale des Chemins de fer belges, parce qu'elle n'est pascroisee au niveau du sol par un chemin de fer, à savoir le pont du cheminde fer (violation de l'article 1er de la loi du 25 juillet 1891 revisantla loi du 15 avril 1843 sur la police des chemins de fer, l'article 7 dela loi du 9 aout 1948 portant modification à la legislation sur la voiriepar terre et l'article unique , alinea 7, de la loi du 17 janvier 1938reglant l'usage par les autorites publiques, associations de communes etconcessionnaires de services publics ou d'utilite publique, des domainespublics de l'Etat, des provinces et des communes, pour l'etablissement etl'entretien de canalisations et notamment des canalisations d'eau et degaz ).

Il ne pouvait, des lors, pas davantage admettre legalement que pourl'application de l'alinea 7 de l'article unique de la loi du 17 janvier1938, la defenderesse etait l'autorite competente pour ordonner ledeplacement de la canalisation de gaz dans la Groenendaallaan, et nepouvait pas davantage decider legalement que la defendresse avait ledroit, en application de l'article unique de la loi du 17 janvier 1938, demettre à charge de la demanderesse les frais de deplacement de lacanalisation de gaz dans la Groenendaallaan (violation de l'article uniquede la loi du 17 janvier 1938 reglant l'usage par les autorites publiques,associations de communes et concessionnaires de services publics oud'utilite publique, des domaines publics de l'Etat, des provinces et descommunes, pour l'etablissement et l'entretien de canalisations etnotamment des canalisations d'eau et de gaz ).

III. La decision de la Cour

Quant à la jonction des causes :

1. Les pourvois en cassation dans les causes C.05.0514.N et C.05.0518.Nsont diriges contre le meme arret.

Il y a lieu de les joindre.

Quant à la cause C.05.0514.N :

2. Le dernier alinea de l'article unique de la loi du 17 janvier 1938reglant l'usage par les autorites publiques, associations de communes etconcessionnaires de services publics ou d'utilite publique, des domainespublics de l'Etat, des provinces et des communes, pour l'etablissement etl'entretien de canalisations et notamment des canalisations d'eau et degaz confere à l'Etat, aux provinces et aux communes, le droit de fairemodifier, en tout cas, sur leur domaine, les dispositions d'unecanalisation d'eau ainsi que les ouvrages qui s'y rapportent.

En vertu de cette disposition les frais des travaux sont à charge duconcessionnaire s'ils sont imposes dans l'interet de la voirie.

3. En vertu de l'article 7, alinea 1er, de la loi du 9 aout 1948 portantmodification à la legislation sur la voirie par terre, le Roi peutrepartir la grande voirie en itineraires numerotes et y comprendre dessections de routes provinciales et communales.

En vertu du second alinea du meme article, le Roi peut prescrirel'incorporation d'office et sans indemnite, dans la grande voirie del'Etat, des routes ou sections de routes qui, etant etrangeres à cettegrande voirie, sont incluses dans les itineraires numerotes.

4. En vertu de l'article 1er de la loi du 25 juillet 1891 revisant la loidu 15 avril 1843 sur la police des chemins de fer, les chemins de fer sontclasses dans la grande voirie.

5. Il resulte de la connexite de ces dispositions qu'une route nationale,regionale, provinciale ou communale, à l'endroit du croisement avec lechemin de fer, perd par le fait meme de sa nouvelle affectation, àl'endroit de ce croisement, sa nature originale et fait partie integrantedu chemin de fer, soit de la grande voirie.

6. Le simple fait d'un croisement aerien du chemin de fer avec la routenationale, regionale, provinciale ou communale situee en contrebas n'a paspour effet, à l'endroit de ce croisement, l'incorporation de la routesituee en contrebas nonobstant le fait que le carrefour aerien s'appuiesur une construction reposant sur cette route situee en contrebas ;

7. L'arret constate qu'en ce qui concerne la demanderesse, dans unepremiere phase, la canalisation d'eau DN 500 ST situee dans l'axe nord dela Groenendaallaan sur une longueur d'environ 80 metres devait etredeplacee en vue de la construction de fondations d'un pont et de laconstruction d'un pont de chemin de fer pour une ligne à grande vitesseà l'est du pont de chemin de fer existant et que ces travaux onteffectivement ete executes en janvier 2000.

8. L'arret considere que l'unite dans la gestion des voiries s'oppose àce que la theorie de l'interception soit limitee aux croisements au niveaudu sol et que l'interception d'une route doit des lors aussi etre admiseen cas de croisement aerien.

L'arret ne justifie, des lors, pas legalement sa decision.

Le moyen est fonde.

Quant à la cause C.05.0518.N :

Quant à la seconde branche :

Sur la fin de non-recevoir :

9. La defenderesse souleve que le moyen est irrecevable des lors quel'article unique de la loi du 24 mars 1999 est designe comme dispositionviolee, alors que cet article est abroge par l'article 21 de la loi du 12avril 1965 en ce qui concerne le transport de gaz.

10. L'arret ne constate pas quel usage a ete fait en l'espece descanalisations de gaz de sorte que pour determiner si les canalisationssont destinees au transport de gaz vise par la fin de non-recevoir, leCour est obligee de proceder à un examen des fait pour lequel elle estsans pouvoir.

Il y a lieu de rejeter la fin de non-recevoir.

Quant à la branche meme :

11. Il ressort de la reponse au moyen dans la cause C.05.0514.N qu'encette branche, le moyen est fonde.

Quant à la premiere branche :

Sur la fin de non-recevoir :

12. Il ressort de la reponse donnee à la fin de non-recevoir opposee parla defenderesse à la seconde branche du moyen que la fin de non-recevoiridentique tend aussi à un examen des faits pour lequel la Cour est sanspouvoir.

Il y a lieu de rejeter la fin de non-recevoir.

13. La defenderesse souleve, en outre, qu'en cette branche le moyen estirrecevable des lors que la decision attaquee est aussi fondee sur lemotif non critique que « l'interet de la voirie » doit etre interpretede maniere large.

14. Le motif non critique ne concerne pas la decision attaquee par lemoyen en sa premiere branche sur la question de savoir qui pouvaitordonner le deplacement, mais la question juridique distincte de savoir sil'ordre de deplacement a ete donne « dans l'interet de la voirie ».

Il y a lieu de rejeter la fin de non-recevoir.

Quant à la branche meme :

15. Le dernier alinea de l'article unique de la loi du 17 janvier 1938precitee confere, en tout cas, le droit à l'Etat, aux provinces et auxcommunes, sur leur domaine respectif, de faire modifier ulterieurement lesdispositions ou le trace d'une installation, ainsi que les ouvrages quis'y rapportent et si les modifications sont imposees soit pour un motif desecurite publique, soit pour preserver la beaute d'un site, soit dansl'interet de la voirie, des cours d'eau, des canaux ou d'un servicepublic, les frais de travaux sont à charge de l'entreprise qui a etablil'installation.

Cette disposition concerne tant le domaine public que le domaine prive deces autorites mais ne s'applique pas à un domaine qui n'appartient pas àl'une d'elles.

Il ressort de cette disposition, qu'en ce qui concerne un immeuble qui nereleve pas de son domaine, une autorite obtient, le cas echeant, le droitd'invoquer la disposition precitee apres son expropriation.

16. L'arret considere que :

- la mission de service public s'oppose à ce qu'apres le transfert dureseau ferroviaire etatique, la defenderesse exercerait moins de droitsdans le cadre de l'exploitation et du developpement ulterieur del'infrastructure ferroviaire d'utilite publique compare à ceux quirelevaient auparavant des prerogatives de l'Etat belge ;

- la these de la demanderesse ne peut, des lors, etre suivie lorsqu'ellesoutient que la defenderesse n'aurait pas le droit d'ordonner ledeplacement d'equipements d'utilite publique qui se trouvent sur ledomaine respectif qui lui a ete transfere initialement, respectivement surle domaine qu'elle a acquis ulterieurement à la suite d'une expropriationdans le cadre de l'exercice de son service public.

17. En statuant ainsi l'arret ne justifie pas legalement sa decision.

Le moyen, en cette branche, est fonde.

Par ces motifs,

La Cour

Joint les causes C.05.0514.N et C.05.0518.N.

Casse l'arret attaque, sauf en tant qu'il declare recevables les appels,la demande de la defenderesse et l'extension de la demande de lademanderesse dans la cause C.05.0514.N ;

Ordonne que mention du present arret sera faite en marge de l'arretpartiellement casse ;

Reserve les depens pour qu'il soit statue sur ceux-ci par le juge dufond ;

Renvoie la cause, ainsi limitee, devant la cour d'appel de Gand.

Ainsi juge par la Cour de cassation, premiere chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le premier president Ghislain Londers, le president de sectionErnest Wauters, les conseillers Eric Dirix, Beatrijs Deconinck et AlainSmetryns, et prononce en audience publique du vingt-deux juin deux millesept par le premier president Ghislain Londers, en presence de l'avocatgeneral Guy Dubrulle, avec l'assistance du greffier Philippe Van Geem.

Traduction etablie sous le controle du conseiller Didier Batsele ettranscrite avec l'assistance du greffier Marie-Jeanne Massart.

Le greffier, Le conseiller,

22 JUIN 2007 C.05.0514.N/27

C.05.0518.N



Références :

Origine de la décision
Date de la décision : 22/06/2007
Date de l'import : 14/10/2011

Numérotation
Numéro d'arrêt : C.05.0514.N
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2007-06-22;c.05.0514.n ?
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