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17/12/2007 | BELGIQUE | N°S.06.0109.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 17 décembre 2007, S.06.0109.F


Cour de cassation de Belgique

Arrêt

N° S.06.0109.F

D. A.,

demanderesse en cassation,

représentée par Maître Cécile Draps, avocat à la Cour de cassation, dontle cabinet est établi à Liège, rue de Chaudfontaine, 11, où il est faitélection de domicile,

contre

OFFICE NATIONAL DE SECURITE SOCIALE, établissement public dont le siègeest établi à Saint-Gilles, place Victor Horta, 11,

défendeur en cassation,

représenté par Maître Antoine De Bruyn, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est établi à Bruxelles, r

ue de la Vallée, 67, où il estfait élection de domicile.

I. La procédure devant la Cour

Le pourvoi en cassation est dirigé...

Cour de cassation de Belgique

Arrêt

N° S.06.0109.F

D. A.,

demanderesse en cassation,

représentée par Maître Cécile Draps, avocat à la Cour de cassation, dontle cabinet est établi à Liège, rue de Chaudfontaine, 11, où il est faitélection de domicile,

contre

OFFICE NATIONAL DE SECURITE SOCIALE, établissement public dont le siègeest établi à Saint-Gilles, place Victor Horta, 11,

défendeur en cassation,

représenté par Maître Antoine De Bruyn, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est établi à Bruxelles, rue de la Vallée, 67, où il estfait élection de domicile.

I. La procédure devant la Cour

Le pourvoi en cassation est dirigé contre l'arrêt rendu le 23 mars 2006par la cour du travail de Liège.

Le conseiller Sylviane Velu a fait rapport.

Le procureur général Jean-François Leclercq a conclu.

II. Les moyens de cassation

La demanderesse présente quatre moyens dont les deuxième et troisième sontlibellés comme suit :

Deuxième moyen

Dispositions légales violées

* article 1^er, § 1^er, de la loi du 27 juin 1969 révisant l'arrêté-loidu28 décembre 1944 concernant la sécurité sociale des travailleurs ;

* articles 1^er et 2 de la loi du 29 juin 1981 établissant les principesgénéraux de la sécurité sociale des travailleurs salariés ;

* articles 1^er, 2, 3 et 17, 2°, de la loi du 3 juillet 1978 relativeaux contrats de travail ;

* articles 1134, 1710, 1779 et 1780 du Code civil.

Décisions et motifs critiqués

L'arrêt décide que la qualification de « contrat de louage d'entreprisemomentanée pour travailleurs indépendants » que les parties ont donnée aucontrat est contredite par les termes mêmes de celui-ci, en déduit qu'il ya lieu d'assujettir le sieur W.F. au régime général de la sécurité socialedes travailleurs salariés et condamne la demanderesse au paiement descotisations réclamées par le défendeur, pour tous ses motifs considérésici comme intégralement reproduits et plus particulièrement que :

« (La demanderesse) et son époux ont exploité de 1991 à 1994 un fonds decommerce affecté à l'exploitation du restaurant `Le Petit Pékin' à Liège.

En 1994, ils ouvrent un autre restaurant chinois à Oupeye.

Le 1^er février 1995, (la demanderesse) et son époux, agissant en tantque `la direction de l'établissement « Le Petit Pékin »' concluent alorsun `contrat de louage d'entreprise momentanée pour travailleursindépendants' avec Monsieur W.F. et Madame S.H. pour une durée de troisans allant du1^er février 1994 au 30 novembre 1997.

Alors que le contrat ne le précise pas, il n'est pas contesté que cedernier vise l'exploitation du restaurant `Le Petit Pékin'. Le contrat futrenouvelé le 1^er décembre 1997. Le contrat indique expressément à maintesreprises que Monsieur W.F. et Madame S.H. presteront en qualitéd'indépendants en dehors de tout lien de subordination.

L'article 8 du contrat prévoit que, `entre les différentes prestations dutravailleur indépendant, celui-ci disposera comme il lui plaira du tempsainsi laissé libre'.

Sous `Conditions particulières', il est mentionné que `leur travailindépendant sera rémunéré à raison de 8 p.c. des recettes'.

(...) Dans leur `contrat de louage d'entreprise momentanée pourtravailleurs indépendants', (la demanderesse) et son mari, d'un côté, etMonsieur W.F. et Madame S.H., de l'autre côté, ont qualifié ces derniers,sur une page et demie, dix-sept fois d'indépendants.

Cependant, (la demanderesse) et son mari y figurent, non pas commepersonnes physiques, mais comme `la direction de l'établissement « LePetit Pékin »'.

(La demanderesse) se considère donc elle-même comme la directrice durestaurant.

Le pouvoir de direction d'une des parties est cependant justement unecaractéristique d'un contrat de travail avec un lien de subordination.

De plus, l'article 8 du contrat prévoit que, `entre les différentesprestations du travailleur indépendant, celui-ci disposera comme il luiplaira du temps ainsi laissé libre'.

Ce qui implique incontestablement que, pendant ses prestations de travail,il ne jouit pas de cette liberté mais est soumis au pouvoir de directionde quelqu'un d'autre, cet autre ne pouvant être que la direction,c'est-à-dire (la demanderesse) ...

La qualification formelle que les parties ont donnée au contrat est ainsicontredite par le contrat lui-même.

Ce lien de subordination transpire encore d'autres éléments du dossier :(...)

92 p.c. des recettes du restaurant dont (la demanderesse) est l'ancienneexploitante reviennent à cette dernière ».

Griefs

En vertu de l'article 1134 du Code civil, la convention fait la loi desparties sauf si elle doit être écartée pour violation d'une dispositiond'ordre public ou impérative en faveur de la partie qui invoque cettecontrariété. Les articles 1^er, § 1^er, de la loi du 27 juin 1969 et 1^eret 2 de la loi du 29 juin 1981 rendent applicables les obligationsqu'elles déterminent aux travailleurs, définis comme les personnesengagées par un employeur dans les liens d'un contrat de travail, et auxemployeurs, définis comme la personne physique ou morale qui, en vertud'un contrat de travail, occupe un ou plusieurs travailleurs.

Il s'en déduit que le juge ne peut requalifier le contrat que les partiesont déclaré dans l'écrit vouloir adopter - soit en l'espèce le contratd'entreprise au sens des articles 1710, 1779 et 1780 du Code civil - en sefondant sur des clauses dudit contrat compatibles avec cettequalification. Il ne peut l'écarter que si l'écrit confère à une partie ledroit d'exercer sur l'autre l'autorité juridique caractéristique ducontrat de travail, ce qui exclut la qualification de contratd'entreprise.

Première branche

Par le contrat de louage d'entreprise, l'entrepreneur s'engage à exécuterun travail déterminé, en l'espèce, ainsi qu'il ressort des constatationsde l'arrêt, l'exploitation du restaurant intitulé « Le Petit Pékin », pourle compte du maître de l'ouvrage, en l'espèce, ainsi que le constatel'arrêt, la demanderesse, propriétaire dudit restaurant.

La qualification de contrat d'entreprise est conciliable avec le pouvoirdont disposerait l'une des parties de donner des instructions d'ordregénéral à l'autre partie et de contrôler l'exécution des tâches remplies,contraintes pouvant être dictées par des raisons économiques, commercialesou opérationnelles.

Il s'en déduit que le juge ne peut requalifier le contrat que s'il sedéduit de ses termes que l'employeur y trouve le droit d'exercer unesurveillance directe sur les prestations de travail, que les instructionsont pour objet de diriger la force de travail de l'autre partie qui estalors tenue, en vertu de l'article 17, 2°, de la loi du 3 juillet 1978,d'agir conformément aux ordres et aux instructions qui lui sont donnés parl'employeur.

Ce lien de subordination ne peut se déduire des circonstances que lemaître de l'ouvrage figure au contrat non pas comme personne physique maiscomme « la direction de l'établissement `Le Petit Pékin' » et que lesparties ont, par l'article 8 du contrat, convenu que, en dehors desprestations effectuées par le travailleur indépendant en vue del'exploitation de l'établissement, celui-ci « disposera comme il luiplaira du temps ainsi laissé libre ».

En déduisant desdites circonstances que la qualification de contrat delouage d'entreprise pour travailleur indépendant adoptée par les partiesdoit être écartée et qu'il convient d'y substituer la qualification decontrat de travail, l'arrêt méconnaît la notion légale de lien desubordination (violation des articles 1^er à 3 et 17, 2°, de la loi du 3juillet 1978, 1^er, § 1^er, de la loi du27 juin 1969, 1^er et 2 de la loi du 29 juin 1981), viole la notion légalede contrat d'entreprise au sens des articles 1710, 1779 et 1780 du Codecivil et, par voie de conséquence, en écartant la qualificationconventionnelle qui fait la loi des parties, méconnaît la forceobligatoire du contrat (violation de l'article 1134 du Code civil).

Seconde branche

La subordination, qui forme l'élément essentiel du contrat de travail, estde nature juridique et ne peut se déduire de clauses du contrat quirévèlent uniquement la dépendance économique du cocontractant.

La circonstance que le contrat de louage d'entreprise prévoit que letravail indépendant de Monsieur W.F. et Madame S.H. sera rémunéré à raisonde 8 p.c. des recettes et que 92 p.c. desdites recettes reviennent à lademanderesse est uniquement susceptible de révéler une inégalité descocontractants au point de vue économique. Il ne peut légalement s'endéduire que le contrat aurait accordé à la demanderesse le droit d'exercerl'autorité caractéristique du contrat de travail sur le sieur W.F.

En déduisant de cette circonstance que la qualification de contrat delouage d'entreprise pour travailleur indépendant adoptée par les partiesdoit être écartée et qu'il convient d'y substituer la qualification decontrat de travail, l'arrêt méconnaît la notion légale de lien desubordination (violation des articles 1^er à 3 et 17, 2°, de la loi du 3juillet 1978, 1^er, § 1^er, de la loi du27 juin 1969, 1^er et 2 de la loi du 29 juin 1981), viole la notion légalede contrat d'entreprise au sens des articles 1710, 1779 et 1780 du Codecivil et, par voie de conséquence, en écartant la qualificationconventionnelle qui fait la loi des parties, méconnaît la forceobligatoire du contrat (violation de l'article 1134 du Code civil).

Troisième moyen

Dispositions légales violées

* article 1^er, § 1^er, de la loi du 27 juin 1969 révisant l'arrêté-loidu28 décembre 1944 concernant la sécurité sociale des travailleurs ;

* articles 1^er et 2 de la loi du 29 juin 1981 établissant les principesgénéraux de la sécurité sociale des travailleurs salariés ;

* articles 1^er, 2, 3 et 17, 2°, de la loi du 3 juillet 1978 relativeaux contrats de travail ;

* articles 1134, 1710, 1779 et 1780 du Code civil.

Décisions et motifs critiqués

L'arrêt décide que la qualification de « contrat de louage d'entreprisemomentanée pour travailleurs indépendants » que les parties ont donnée aucontrat est contredite par l'exécution que les parties lui ont donnée, endéduit qu'il y a lieu d'assujettir le sieur W.F. au régime général de lasécurité sociale des travailleurs salariés et condamne la demanderesse aupaiement des cotisations réclamées par le défendeur, pour tous ses motifsconsidérés ici comme intégralement reproduits et plus particulièrementque :

« (La demanderesse) et son époux ont exploité de 1991 à 1994 un fonds decommerce affecté à l'exploitation du restaurant `Le Petit Pékin' à Liège.

En 1994, ils ouvrent un autre restaurant chinois à Oupeye.

Le 1^er février 1995, (la demanderesse) et son époux, agissant en tant que`la direction de l'établissement « Le Petit Pékin »', concluent alors un`contrat de louage d'entreprise momentanée pour travailleurs indépendants'avec Monsieur W.F. et Madame S.H. pour une durée de trois ans allant du1^er février 1994 au 30 novembre 1997.

Alors que le contrat ne le précise pas, il n'est pas contesté que cedernier vise l'exploitation du restaurant `Le Petit Pékin'. Le contrat futrenouvelé le 1^er décembre 1997. Le contrat indique expressément à maintesreprises que Monsieur W.F. et Madame S.H. presteront en qualitéd'indépendants en dehors de tout lien de subordination.

Sous `Conditions particulières', il est mentionné que `leur travailindépendant sera rémunéré à raison de 8 p.c. des recettes'. En fait, ils'agit de +/- 250 euros par mois confondus pour Monsieur W.F. et MadameS.H. A cette rémunération s'ajoutent des avantages en nature tels que lelogement, la nourriture, le téléphone...

(Le défendeur) a procédé à une enquête au cours de laquelle (lademanderesse) et son mari ainsi que le sieur W.F. ont été auditionnés :

1. Le sieur W.F. se présente comme indépendant mais n'a ni numéro deT.V.A. (celui de [la demanderesse] est utilisé) ni de registre decommerce. Toutes les déclarations fiscales du restaurant sont faites par(la demanderesse) (procès-verbal d'audition du 15 avril 1997). Lors d'uncontrôle surprise en date du 28 août 1998, il déclare que le restaurantappartient au `patron' (l'époux de [la demanderesse]), auquel il téléphoneimmédiatement pour le prévenir du contrôle (rapport du contrôle).

2. (La demanderesse) présente également le sieur W.F. comme indépendant enprécisant que ce dernier `est rétribué à raison de 8 p.c. des recettesmensuelles, ce qui correspond à +/- 10.000 francs par mois nets. Ilbénéficie des avantages suivants : logement, nourriture, chauffage,électricité et téléphone. Tous ces frais sont à ma charge. Les cotisationssociales d'indépendant de W.F. sont payées à Integrity avec l'argent de larecette journalière. Sa commission est calculée sur le montant restant'(procès-verbal d'audition du 9 février 1997).

3. L'époux de (la demanderesse) présente aussi le sieur W.F. commeindépendant mais indique que : `Je vous réponds en tant qu'époux de lapatronne (...). On (c'est-à-dire [la demanderesse] et son époux) lui faitconfiance. De temps en temps, on vide la caisse' (procès-verbal d'auditiondu 1^er septembre 1998).

(…) Même en admettant que la qualification formelle donnée par les partiesà leur convention n'était pas ainsi neutralisée par les autres éléments ducontrat même, au moins un élément du vécu contractuel serait en tout casincompatible avec la qualification de travailleur indépendant : ladirection vidait de temps en temps la caisse du restaurant `Le PetitPékin'.

En ayant le droit de `vider la caisse', (la demanderesse) avait, afortiori, le pouvoir de contrôler la caisse du sieur W.F. et, à traversles finances, toute son activité professionnelle.

Un tel pouvoir implique incontestablement une autorité de (lademanderesse) sur le sieur W.F.

Le lien de subordination est ainsi établi.

Ce lien de subordination transpire encore d'autres éléments du dossier :

- Aussi bien le sieur W.F. que le mari de (la demanderesse) qualifientcette dernière de `patronne' ;

- 92 p.c. des recettes du restaurant, dont (la demanderesse) estl'ancienne exploitante, reviennent à cette dernière ;

- L'exploitation du restaurant a été faite avec le numérod'immatriculation à la T.V.A. de (la demanderesse) ;

- Cette dernière essaie d'éviter de devoir expliquer comment, par qui etsur [la] base de quelles informations les comptes étaient établis ;

* Elle ne donne pas d'informations en ce qui concerne la personne qui al'accès à la profession pour le restaurant ».

Griefs

En vertu de l'article 1134 du Code civil, la convention fait la loi desparties sauf si elle doit être écartée pour violation d'une dispositiond'ordre public ou impérative en faveur de la partie qui invoque cettecontrariété. Les articles 1^er, § 1^er, de la loi du 27 juin 1969 et 1^eret 2 de la loi du 29 juin 1981 rendent applicables les obligationsqu'elles déterminent aux travailleurs, définis comme les personnesengagées par un employeur dans les liens d'un contrat de travail, et auxemployeurs, définis comme la personne physique ou morale qui, en vertud'un contrat de travail, occupe un ou plusieurs travailleurs.

Il s'en déduit que le juge ne peut requalifier le contrat que les partiesont déclaré dans l'écrit vouloir adopter, soit en l'espèce le contratd'entreprise au sens des articles 1710, 1779 et 1780 du Code civil, en sefondant sur la manière dont ledit contrat a été exécuté que si lescirconstances de fait qu'il retient sont incompatibles avec cettequalification parce qu'elles révèlent que, dans les faits, une partie adisposé du droit d'exercer sur l'autre l'autorité caractéristique ducontrat de travail.

Première branche

Cette autorité est juridique et ne peut se déduire de circonstances quirévèlent la dépendance économique du cocontractant.

Ainsi, les circonstances que le contrat prévoit que le travail del'entrepreneur sera rémunéré à raison de 8 p.c. des recettes en sorte que92 p.c. des recettes reviennent à la demanderesse, que celle-ci établitles déclarations fiscales, « vide la caisse », « évite(...) d'expliquercomment, par qui et sur base de quelles informations les comptes étaientétablis », que l'exploitation du restaurant s'est faite avec le registrede commerce et le numéro de T.V.A. de la demanderesse et que celle-ci nedonne pas d'information quant à la personne qui a l'accès à la professionpour le restaurant, si elles peuvent révéler un déséquilibre économiqueentre les parties au contrat d'entreprise qu'elles ont déclaré vouloiradopter, ne sont aucunement inconciliables avec un tel contrat.

En déduisant desdites circonstances que la qualification de contrat delouage d'entreprise pour travailleur indépendant adoptée par les partiesdoit être écartée et qu'il convient d'y substituer la qualification decontrat de travail, l'arrêt méconnaît la notion légale de lien desubordination (violation des articles 1^er à 3 et 17, 2°, de la loi du 3juillet 1978, 1^er, § 1^er, de la loi du27 juin 1969, 1^er et 2 de la loi du 29 juin 1981), viole la notion légalede contrat d'entreprise au sens des articles 1710, 1779 et 1780 du Codecivil et, par voie de conséquence, en écartant la qualificationconventionnelle qui fait la loi des parties, méconnaît la forceobligatoire du contrat (violation de l'article 1134 du Code civil).

Seconde branche

Le contrat de travail au sens des articles 1^er, § 1^er, de la loi du 27juin 1969, 1^er et 2 de la loi du 29 juin 1981, 1^er à 3 de la loi du 3juillet 1978, est un contrat par lequel une partie s'engage à se placersous l'autorité de l'autre pour exercer un travail déterminé moyennant unerémunération déterminée. Pour conclure à l'existence d'un tel contrat, lejuge doit vérifier que la rémunération est individuellement déterminée oudéterminable.

L'arrêt constate que le contrat a été conclu entre la demanderesse et sonépoux, d'une part, le sieur W.F. et la dame S.H., d'autre part, en vued'exploiter le restaurant, que, selon la convention, c'était « leurtravail indépendant » qui devait être rémunéré à raison de 8 p.c. desrecettes et qu'en fait ce travail commun a été rémunéré à raison de « +/-
250 euros par mois confondus pour M. W.F. et Mme S.H. », auxquels se sontajoutés des avantages en nature tels que le logement, la nourriture, letéléphone.

A défaut de constater l'existence d'une rémunération convenueindividuellement pour les prestations personnelles du sieur W.F., l'arrêtn'a pu décider légalement que la demanderesse et celui-ci étaient liés parun contrat de travail. Il viole en conséquence tant les dispositionslégales visées au moyen qui définissent le contrat de travail (articles1^er à 3 et 17, 2°, de la loi du3 juillet 1978, 1^er, § 1^er, de la loi du 27 juin 1969, 1^er et 2 de laloi du 29 juin 1981) que celles qui définissent le contrat d'entreprise(violation des articles 1710, 1779 et 1780 du Code civil) et méconnaît laforce obligatoire du contrat (violation de l'article 1134 du Code civil).

III. La décision de la Cour

Sur le deuxième moyen :

Quant à la première branche :

Lorsque les éléments soumis à son appréciation ne permettent pas d'exclurela qualification donnée par les parties à la convention qu'elles ontconclue, le juge du fond ne peut y substituer une qualificationdifférente.

Pour écarter la qualification de contrat d'entreprise que, selon sesconstatations, la demanderesse et son époux, d'une part, et monsieur W.F.et madame S.H., d'autre part, avaient donnée à leur convention et retenirl'existence d'un lien de subordination, l'arrêt se fonde sur lacirconstance que les premiers sont désignés dans cette convention comme« la direction de l'établissement `Le Petit Pékin' » ainsi que surl'article 8 de cette convention, suivant lequel, « entre les différentesprestations du travailleur indépendant, celui-ci disposera comme il luiplaira du temps ainsi laissé libre », stipulation dont l'arrêt déduit que,« pendant ses prestations de travail, il ne jouit pas de cette libertémais est soumis au pouvoir de direction » de la demanderesse.

Contrairement à ce que l'arrêt considère, ces éléments ne sont pasincompatibles avec l'existence d'un contrat d'entreprise.

L'arrêt ne décide, dès lors, pas légalement que la demanderesse etmonsieur W.F. étaient liés par un contrat de travail.

Le moyen, en cette branche, est fondé.

Sur le troisième moyen :

Quant à la première branche :

Contrairement à ce que l'arrêt considère, le fait que « la directionvidait de temps en temps la caisse du restaurant » n'est pas davantageincompatible avec l'existence d'un contrat d'entreprise.

Pour le motif indiqué dans la réponse à la première branche du deuxièmemoyen, l'arrêt ne justifie dès lors pas légalement sa décision.

Dans cette mesure, le moyen, en cette branche, est fondé.

La cassation de la décision sur le fondement de la demande principales'étend à la décision sur la demande reconventionnelle, cette dernièredécision étant la suite de la première.

Sur les autres griefs :

Il n'y a pas lieu d'examiner le premier moyen, les deuxième et troisièmemoyens, en leur seconde branche, et le quatrième moyen, qui ne sauraiententraîner une cassation plus étendue.

Par ces motifs,

La Cour

Casse l'arrêt attaqué, sauf en tant qu'il dit l'appel contre le jugementdu 21 février 2003 irrecevable ;

Ordonne que mention du présent arrêt sera faite en marge de l'arrêtpartiellement cassé ;

Réserve les dépens pour qu'il soit statué sur ceux-ci par le juge dufond ;

Renvoie la cause, ainsi limitée, devant la cour du travail de Mons.

Ainsi jugé par la Cour de cassation, troisième chambre, à Bruxelles, oùsiégeaient le président Christian Storck, les conseillers Daniel Plas,Christine Matray, Sylviane Velu et Philippe Gosseries, et prononcé enaudience publique du dix-sept décembre deux mille sept par le présidentChristian Storck, en présence du procureur général Jean-François Leclercq,avec l'assistance du greffier Jacqueline Pigeolet.

17 DECEMBRE 2007 S.06.0109.F/14



Analyses

CONVENTION - ELEMENTS CONSTITUTIFS - Généralités


Références :

Origine de la décision
Date de la décision : 17/12/2007
Date de l'import : 31/08/2018

Numérotation
Numéro d'arrêt : S.06.0109.F
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2007-12-17;s.06.0109.f ?
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