La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

04/12/2008 | BELGIQUE | N°C.04.0582.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 04 décembre 2008, C.04.0582.F


Cour de cassation de Belgique

Arret

NDEG C.04.0582.F

A. P., et consorts

demandeurs en cassation,

representes par Maitre Huguette Geinger, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Bruxelles, rue des Quatre Bras, 6, ou il estfait election de domicile,

contre

1. REGION WALLONNE, representee par son gouvernement en la personne duministre du Logement, des Transports et du Developpement territorial,dont le cabinet est etabli à Namur, rue d'Harscamp, 22,

defenderesse en cassation,

representee par Maitre Pierre Van Omm

eslaghe, avocat à la Cour decassation, dont le cabinet est etabli à Bruxelles, avenue Louise, 106, ouil ...

Cour de cassation de Belgique

Arret

NDEG C.04.0582.F

A. P., et consorts

demandeurs en cassation,

representes par Maitre Huguette Geinger, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Bruxelles, rue des Quatre Bras, 6, ou il estfait election de domicile,

contre

1. REGION WALLONNE, representee par son gouvernement en la personne duministre du Logement, des Transports et du Developpement territorial,dont le cabinet est etabli à Namur, rue d'Harscamp, 22,

defenderesse en cassation,

representee par Maitre Pierre Van Ommeslaghe, avocat à la Cour decassation, dont le cabinet est etabli à Bruxelles, avenue Louise, 106, ouil est fait election de domicile,

2. SOCIETE DE DEVELOPPEMENT ET DE PROMOTION DE L'AEROPORT DELIEGE-BIERSET, societe anonyme dont le siege social est etabli àBierset, rue de l'Aerodrome Militaire, 44,

defenderesse en cassation,

representee par Maitre Jean-Marie Nelissen Grade, avocat à la Cour decassation, dont le cabinet est etabli à Bruxelles, rue Brederode, 13, ouil est fait election de domicile,

3. T.N.T. EXPRESS WORLDWIDE (Euro Hub), societe anonyme dont le siegesocial est etabli à Grace-Hollogne (Bierset), Aeroport de Liege, ruede l'Aeroport, 90,

defenderesse en cassation,

representee par Maitre Cecile Draps et Maitre Jacqueline Oosterbosch,avocats à la Cour de cassation, dont le cabinet est etabli à Liege, ruede Chaudfontaine, 11, ou il est fait election de domicile,

4. SOCIETE NATIONALE DES VOIES AERIENNES-BELGOCONTROL, entreprisepublique autonome dont le siege social est etabli à Schaerbeek, ruedu Progres, 80,

defenderesse en cassation,

representee par Maitre Lucien Simont, avocat à la Cour de cassation, dontle cabinet est etabli à Bruxelles, avenue Louise, 149, ou il est faitelection de domicile,

5. ETAT BELGE, represente par le ministre de la Defense, dont le cabinetest etabli à Bruxelles, rue Lambermont, 8, et dont les bureaux sontetablis à Evere, quartier Reine Elisabeth, rue d'Evere, 1,

defendeur en cassation,

6. CARGO AIRLINES Ltd, societe de droit israelien dont le siege estetabli à Tel-Aviv (Israel), rue Vissotzski, 6, ayant un sieged'exploitation à Grace-Hollogne (Bierset), aeroport de Bierset,

defenderesse en cassation,

representee par Maitre Pierre Van Ommeslaghe, avocat à la Cour decassation, dont le cabinet est etabli à Bruxelles, avenue Louise, 106, ouil est fait election de domicile,

les parties 2 à 6 à tout le moins appelees en declaration d'arretcommun.

NDEG C.05.0130.F

L. R.,

demanderesse en cassation,

representee par Maitre Huguette Geinger, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Bruxelles, rue des Quatre Bras, 6, ou il estfait election de domicile,

contre

1. REGION WALLONNE, representee par son gouvernement en la personne duministre du Logement, des Transports et du Developpement territorial,dont le cabinet est etabli à Namur, rue d'Harscamp, 22,

defenderesse en cassation,

representee par Maitre Pierre Van Ommeslaghe, avocat à la Cour decassation, dont le cabinet est etabli à Bruxelles, avenue Louise, 81, ouil est fait election de domicile,

2. SOCIETE DE DEVELOPPEMENT ET DE PROMOTION DE L'AEROPORT DELIEGE-BIERSET, societe anonyme dont le siege social est etabli àBierset, rue de l'Aerodrome Militaire, 44,

defenderesse en cassation,

representee par Maitre Jean-Marie Nelissen Grade, avocat à la Cour decassation, dont le cabinet est etabli à Bruxelles, rue Brederode, 13, ouil est fait election de domicile,

3. T.N.T. EXPRESS WORLDWIDE (Euro Hub), societe anonyme dont le siegesocial est etabli à Grace-Hollogne (Bierset), Aeroport de Liege, ruede l'Aeroport, 90,

defenderesse en cassation,

representee par Maitre Cecile Draps, avocat à la Cour de cassation, dontle cabinet est etabli à Liege, rue de Chaudfontaine, 11, ou il est faitelection de domicile,

4. SOCIETE NATIONALE DES VOIES AERIENNES-BELGOCONTROL, entreprisepublique autonome dont le siege social est etabli à Schaerbeek, ruedu Progres, 80,

defenderesse en cassation,

5. ETAT BELGE, represente par le ministre de la Defense, dont le cabinetest etabli à Bruxelles, rue Lambermont, 8, et dont les bureaux sontetablis à Evere, quartier Reine Elisabeth, rue d'Evere, 1,

defendeur en cassation,

6. CARGO AIRLINES Ltd, societe de droit israelien dont le siege estetabli à Tel-Aviv (Israel), rue Vissotzski, 6, ayant un sieged'exploitation à Grace-Hollogne (Bierset), aeroport de Bierset,

defenderesse en cassation,

representee par Maitre Pierre Van Ommeslaghe, avocat à la Cour decassation, dont le cabinet est etabli à Bruxelles, avenue Louise, 106, ouil est fait election de domicile,

les parties 2 à 6 à tout le moins appelees en declaration d'arretcommun.

NDEG C.05.0131.F

1. D. J. et

2. M. M.

demandeurs en cassation,

representes par Maitre Huguette Geinger, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Bruxelles, rue des Quatre Bras, 6, ou il estfait election de domicile,

contre

1. REGION WALLONNE, representee par son gouvernement en la personne duministre du Logement, des Transports et du Developpement territorial,dont le cabinet est etabli à Namur, rue d'Harscamp, 22,

defenderesse en cassation,

representee par Maitre Pierre Van Ommeslaghe, avocat à la Cour decassation, dont le cabinet est etabli à Bruxelles, avenue Louise, 106, ouil est fait election de domicile,

2. SOCIETE DE DEVELOPPEMENT ET DE PROMOTION DE L'AEROPORT DELIEGE-BIERSET, societe anonyme dont le siege social est etabli àBierset, rue de l'Aerodrome Militaire, 44,

defenderesse en cassation,

representee par Maitre Jean-Marie Nelissen Grade, avocat à la Cour decassation, dont le cabinet est etabli à Bruxelles, rue Brederode, 13, ouil est fait election de domicile,

3. T.N.T. EXPRESS WORLDWIDE (Euro Hub), societe anonyme dont le siegesocial est etabli à Grace-Hollogne (Bierset), Aeroport de Liege, ruede l'Aeroport, 90,

defenderesse en cassation,

representee par Maitre Cecile Draps, avocat à la Cour de cassation, dontle cabinet est etabli à Liege, rue de Chaudfontaine, 11, ou il est faitelection de domicile,

4. SOCIETE NATIONALE DES VOIES AERIENNES-BELGOCONTROL, entreprisepublique autonome dont le siege social est etabli à Schaerbeek, ruedu Progres, 80,

defenderesse en cassation,

5. ETAT BELGE, represente par le ministre de la Defense, dont le cabinetest etabli à Bruxelles, rue Lambermont, 8, et dont les bureaux sontetablis à Evere, quartier Reine Elisabeth, rue d'Evere, 1,

defendeur en cassation,

6. CARGO AIRLINES Ltd, societe de droit israelien dont le siege estetabli à Tel-Aviv (Israel), rue Vissotzski, 6, ayant un sieged'exploitation à Grace-Hollogne (Bierset), aeroport de Bierset,

defenderesse en cassation,

representee par Maitre Pierre Van Ommeslaghe, avocat à la Cour decassation, dont le cabinet est etabli à Bruxelles, avenue Louise, 81, ouil est fait election de domicile,

les parties 2 à 6 à tout le moins appelees en declaration d'arretcommun.

NDEG C.05.0132.F

1. S. L.,

2. C. M.-P.,

demandeurs en cassation,

representes par Maitre Huguette Geinger, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Bruxelles, rue des Quatre Bras, 6, ou il estfait election de domicile,

contre

1. REGION WALLONNE, representee par son gouvenerment en la personne duministre du Logement, des Transports et du Developpement territorial,dont le cabinet est etabli à Namur, rue d'Harscamp, 22,

defenderesse en cassation,

representee par Maitre Pierre Van Ommeslaghe, avocat à la Cour decassation, dont le cabinet est etabli à Bruxelles, avenue Louise, 106, ouil est fait election de domicile,

2. SOCIETE DE DEVELOPPEMENT ET DE PROMOTION DE L'AEROPORT DELIEGE-BIERSET, societe anonyme dont le siege social est etabli àBierset, rue de l'Aerodrome Militaire, 44,

defenderesse en cassation,

representee par Maitre Jean-Marie Nelissen Grade, avocat à la Cour decassation, dont le cabinet est etabli à Bruxelles, rue Brederode, 13, ouil est fait election de domicile,

3. T.N.T. EXPRESS WORLDWIDE (Euro Hub), societe anonyme dont le siegesocial est etabli à Grace-Hollogne (Bierset), Aeroport de Liege, ruede l'Aeroport, 90,

defenderesse en cassation,

representee par Maitre Cecile Draps, avocat à la Cour de cassation, dontle cabinet est etabli à Liege, rue de Chaudfontaine, 11, ou il est faitelection de domicile,

4. SOCIETE NATIONALE DES VOIES AERIENNES-BELGOCONTROL, entreprisepublique autonome dont le siege social est etabli à Schaerbeek, ruedu Progres, 80,

defenderesse en cassation,

5. ETAT BELGE, represente par le ministre de la Defense, dont le cabinetest etabli à Bruxelles, rue Lambermont, 8, et dont les bureaux sontetablis à Evere, quartier Reine Elisabeth, rue d'Evere, 1,

defendeur en cassation,

6. CARGO AIRLINES Ltd, societe de droit israelien dont le siege estetabli à Tel-Aviv (Israel), rue Vissotzski, 6, ayant un sieged'exploitation à Grace-Hollogne (Bierset), aeroport de Bierset,

defenderesse en cassation,

representee par Maitre Pierre Van Ommeslaghe, avocat à la Cour decassation, dont le cabinet est etabli à Bruxelles, avenue Louise, 81, ouil est fait election de domicile,

les parties 2 à 6 à tout le moins appelees en declaration d'arretcommun.

NDEG C.05.0134.F

1. F. C.

2. B. P.,

demandeurs en cassation,

representes par Maitre Huguette Geinger, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Bruxelles, rue des Quatre Bras, 6, ou il estfait election de domicile,

contre

1. REGION WALLONNE, representee par son gouvernement en la personne duministre du Logement, des Transports et du Developpement territorial,dont le cabinet est etabli à Namur, rue d'Harscamp, 22,

defenderesse en cassation,

representee par Maitre Pierre Van Ommeslaghe, avocat à la Cour decassation, dont le cabinet est etabli à Bruxelles, avenue Louise, 106, ouil est fait election de domicile,

2. SOCIETE DE DEVELOPPEMENT ET DE PROMOTION DE L'AEROPORT DELIEGE-BIERSET, societe anonyme dont le siege social est etabli àBierset, rue de l'Aerodrome Militaire, 44,

defenderesse en cassation,

representee par Maitre Jean-Marie Nelissen Grade, avocat à la Cour decassation, dont le cabinet est etabli à Bruxelles, rue Brederode, 13, ouil est fait election de domicile,

3. T.N.T. EXPRESS WORLDWIDE (Euro Hub), societe anonyme dont le siegesocial est etabli à Grace-Hollogne (Bierset), Aeroport de Liege, ruede l'Aeroport, 90,

defenderesse en cassation,

representee par Maitre Cecile Draps, avocat à la Cour de cassation, dontle cabinet est etabli à Liege, rue de Chaudfontaine, 11, ou il est faitelection de domicile,

4. SOCIETE NATIONALE DES VOIES AERIENNES-BELGOCONTROL, entreprisepublique autonome dont le siege social est etabli à Schaerbeek, ruedu Progres, 80,

defenderesse en cassation,

5. ETAT BELGE, represente par le ministre de la Defense, dont le cabinetest etabli à Bruxelles, rue Lambermont, 8, et dont les bureaux sontetablis à Evere, quartier Reine Elisabeth, rue d'Evere, 1,

defendeur en cassation,

6. CARGO AIRLINES Ltd, societe de droit israelien dont le siege estetabli à Tel-Aviv (Israel), rue Vissotzski, 6, ayant un sieged'exploitation à Grace-Hollogne (Bierset), aeroport de Bierset,

defenderesse en cassation,

representee par Maitre Pierre Van Ommeslaghe, avocat à la Cour decassation, dont le cabinet est etabli à Bruxelles, avenue Louise, 106, ouil est fait election de domicile,

les parties 2 à 6 à tout le moins appelees en declaration d'arretcommun.

NDEG C.05.0135.F

1. K. M.,

2. L. I.,

3. K. J.-L.

demandeurs en cassation,

representes par Maitre Huguette Geinger, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Bruxelles, rue des Quatre Bras, 6, ou il estfait election de domicile,

contre

1. REGION WALLONNE, representee par son gouvernement en la personne duministre du Logement, des Transports et du Developpement territorial,dont le cabinet est etabli à Namur, rue d'Harscamp, 22,

defenderesse en cassation,

representee par Maitre Pierre Van Ommeslaghe, avocat à la Cour decassation, dont le cabinet est etabli à Bruxelles, avenue Louise, 106, ouil est fait election de domicile,

2. SOCIETE DE DEVELOPPEMENT ET DE PROMOTION DE L'AEROPORT DELIEGE-BIERSET, societe anonyme dont le siege social est etabli àBierset, rue de l'Aerodrome Militaire, 44,

defenderesse en cassation,

representee par Maitre Jean-Marie Nelissen Grade, avocat à la Cour decassation, dont le cabinet est etabli à Bruxelles, rue Brederode, 13, ouil est fait election de domicile,

3. T.N.T. EXPRESS WORLDWIDE (Euro Hub), societe anonyme dont le siegesocial est etabli à Grace-Hollogne (Bierset), Aeroport de Liege, ruede l'Aeroport, 90,

defenderesse en cassation,

representee par Maitre Cecile Draps, avocat à la Cour de cassation, dontle cabinet est etabli à Liege, rue de Chaudfontaine, 11, ou il est faitelection de domicile,

4. SOCIETE NATIONALE DES VOIES AERIENNES-BELGOCONTROL, entreprisepublique autonome dont le siege social est etabli à Schaerbeek, ruedu Progres, 80,

defenderesse en cassation,

5. ETAT BELGE, represente par le ministre de la Defense, dont le cabinetest etabli à Bruxelles, rue Lambermont, 8, et dont les bureaux sontetablis à Evere, quartier Reine Elisabeth, rue d'Evere, 1,

defendeur en cassation,

6. CARGO AIRLINES Ltd, societe de droit israelien dont le siege estetabli à Tel-Aviv (Israel), rue Vissotzski, 6, ayant un sieged'exploitation à Grace-Hollogne (Bierset), aeroport de Bierset,

defenderesse en cassation,

representee par Maitre Pierre Van Ommeslaghe, avocat à la Cour decassation, dont le cabinet est etabli à Bruxelles, avenue Louise, 106, ouil est fait election de domicile,

les parties 2 à 6 à tout le moins appelees en declaration d'arretcommun.

NDEG C.05.0136.F

D. P. et consorts

demandeurs en cassation,

representes par Maitre Huguette Geinger, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Bruxelles, rue des Quatre Bras, 6, ou il estfait election de domicile,

contre

1. REGION WALLONNE, representee par son gouvernement en la personne duministre du Logement, des Transports et du Developpement territorial,dont le cabinet est etabli à Namur, rue d'Harscamp, 22,

defenderesse en cassation,

representee par Maitre Pierre Van Ommeslaghe, avocat à la Cour decassation, dont le cabinet est etabli à Bruxelles, avenue Louise, 106, ouil est fait election de domicile,

2. SOCIETE DE DEVELOPPEMENT ET DE PROMOTION DE L'AEROPORT DELIEGE-BIERSET, societe anonyme dont le siege social est etabli àBierset, rue de l'Aerodrome Militaire, 44,

defenderesse en cassation,

representee par Maitre Jean-Marie Nelissen Grade, avocat à la Cour decassation, dont le cabinet est etabli à Bruxelles, rue Brederode, 13, ouil est fait election de domicile,

3. T.N.T. EXPRESS WORLDWIDE (Euro Hub), societe anonyme dont le siegesocial est etabli à Grace-Hollogne (Bierset), Aeroport de Liege, ruede l'Aeroport, 90,

defenderesse en cassation,

representee par Maitre Cecile Draps, avocat à la Cour de cassation, dontle cabinet est etabli à Liege, rue de Chaudfontaine, 11, ou il est faitelection de domicile,

4. SOCIETE NATIONALE DES VOIES AERIENNES-BELGOCONTROL, entreprisepublique autonome dont le siege social est etabli à Schaerbeek, ruedu Progres, 80,

defenderesse en cassation,

5. ETAT BELGE, represente par le ministre de la Defense, dont le cabinetest etabli à Bruxelles, rue Lambermont, 8, et dont les bureaux sontetablis à Evere, quartier Reine Elisabeth, rue d'Evere, 1,

defendeur en cassation,

6. CARGO AIRLINES Ltd, societe de droit israelien dont le siege estetabli à Tel-Aviv (Israel), rue Vissotzski, 6, ayant un sieged'exploitation à Grace-Hollogne (Bierset), aeroport de Bierset,

defenderesse en cassation,

representee par Maitre Pierre Van Ommeslaghe, avocat à la Cour decassation, dont le cabinet est etabli à Bruxelles, avenue Louise, 106, ouil est fait election de domicile,

les parties 2 à 6 à tout le moins appelees en declaration d'arretcommun.

NDEG C.05.0222.F

A. M. et consorts,

demandeurs en cassation,

representes par Maitre Huguette Geinger, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Bruxelles, rue des Quatre Bras, 6, ou il estfait election de domicile,

contre

1. REGION WALLONNE, representee par son gouvernement en la personne duministre du Logement, des Transports et du Developpement territorial,dont le cabinet est etabli à Namur, rue d'Harscamp, 22,

defenderesse en cassation,

representee par Maitre Pierre Van Ommeslaghe, avocat à la Cour decassation, dont le cabinet est etabli à Bruxelles, avenue Louise, 106, ouil est fait election de domicile,

2. SOCIETE DE DEVELOPPEMENT ET DE PROMOTION DE L'AEROPORT DELIEGE-BIERSET, societe anonyme dont le siege social est etabli àBierset, rue de l'Aerodrome Militaire, 44,

defenderesse en cassation,

representee par Maitre Jean-Marie Nelissen Grade, avocat à la Cour decassation, dont le cabinet est etabli à Bruxelles, rue Brederode, 13, ouil est fait election de domicile,

3. T.N.T. EXPRESS WORLDWIDE (Euro Hub), societe anonyme dont le siegesocial est etabli à Grace-Hollogne (Bierset), Aeroport de Liege, ruede l'Aeroport, 90,

defenderesse en cassation,

representee par Maitre Cecile Draps, avocat à la Cour de cassation, dontle cabinet est etabli à Liege, rue de Chaudfontaine, 11, ou il est faitelection de domicile,

4. SOCIETE NATIONALE DES VOIES AERIENNES-BELGOCONTROL, entreprisepublique autonome dont le siege social est etabli à Schaerbeek, ruedu Progres, 80,

defenderesse en cassation,

5. ETAT BELGE, represente par le ministre de la Defense, dont le cabinetest etabli à Bruxelles, rue Lambermont, 8, et dont les bureaux sontetablis à Evere, quartier Reine Elisabeth, rue d'Evere, 1,

defendeur en cassation,

6. CARGO AIRLINES Ltd, societe de droit israelien dont le siege estetabli à Tel-Aviv (Israel), rue Vissotzski, 6, ayant un sieged'exploitation à Grace-Hollogne (Bierset), aeroport de Bierset,

defenderesse en cassation,

representee par Maitre Pierre Van Ommeslaghe, avocat à la Cour decassation, dont le cabinet est etabli à Bruxelles, avenue Louise, 106, ouil est fait election de domicile,

les parties 2 à 6 à tout le moins appelees en declaration d'arretcommun.

NDEG C.05.0224.F

F. C. et consorts,

demandeurs en cassation,

representes par Maitre Huguette Geinger, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Bruxelles, rue des Quatre Bras, 6, ou il estfait election de domicile,

contre

1. REGION WALLONNE, representee par son gouvernement en la personne duministre du Logement, des Transports et du Developpementterritorial, dont le cabinet est etabli à Namur, rue d'Harscamp,22,

defenderesse en cassation,

representee par Maitre Pierre Van Ommeslaghe, avocat à la Cour decassation, dont le cabinet est etabli à Bruxelles, avenue Louise, 106, ouil est fait election de domicile,

2. SOCIETE DE DEVELOPPEMENT ET DE PROMOTION DE L'AEROPORT DELIEGE-BIERSET, societe anonyme dont le siege social est etabli àBierset, rue de l'Aerodrome Militaire, 44,

defenderesse en cassation,

representee par Maitre Jean-Marie Nelissen Grade, avocat à la Cour decassation, dont le cabinet est etabli à Bruxelles, rue Brederode, 13, ouil est fait election de domicile,

3. T.N.T. EXPRESS WORLDWIDE (Euro Hub), societe anonyme dont le siegesocial est etabli à Grace-Hollogne (Bierset), Aeroport de Liege,rue de l'Aeroport, 90,

defenderesse en cassation,

representee par Maitre Cecile Draps, avocat à la Cour de cassation, dontle cabinet est etabli à Liege, rue de Chaudfontaine, 11, ou il est faitelection de domicile,

4. SOCIETE NATIONALE DES VOIES AERIENNES-BELGOCONTROL, entreprisepublique autonome dont le siege social est etabli à Schaerbeek, ruedu Progres, 80,

defenderesse en cassation,

5. ETAT BELGE, represente par le ministre de la Defense, dont lecabinet est etabli à Bruxelles, rue Lambermont, 8, et dont lesbureaux sont etablis à Evere, quartier Reine Elisabeth, rued'Evere, 1,

defendeur en cassation,

6. CARGO AIRLINES Ltd, societe de droit israelien dont le siege estetabli à Tel-Aviv (Israel), rue Vissotzski, 6, ayant un sieged'exploitation à Grace-Hollogne (Bierset), aeroport de Bierset,

defenderesse en cassation,

representee par Maitre Pierre Van Ommeslaghe, avocat à la Cour decassation, dont le cabinet est etabli à Bruxelles, avenue Louise, 106, ouil est fait election de domicile,

les parties 2 à 6 à tout le moins appelees en declaration d'arretcommun.

NDEG C.05.0129.F

1. D. E. et

2. S. J.,

demandeurs en cassation,

representes par Maitre Philippe Gerard, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Bruxelles, avenue Louise, 523, ou il estfait election de domicile,

contre

1. REGION WALLONNE, representee par son gouvernement en la personne duministre du Logement, des Transports et du Developpement territorial,dont le cabinet est etabli à Namur, rue d'Harscamp, 22,

defenderesse en cassation,

representee par Maitre Pierre Van Ommeslaghe, avocat à la Cour decassation, dont le cabinet est etabli à Bruxelles, avenue Louise, 106, ouil est fait election de domicile,

2. SOCIETE DE DEVELOPPEMENT ET DE PROMOTION DE L'AEROPORT DELIEGE-BIERSET, societe anonyme dont le siege social est etabli àBierset, rue de l'Aerodrome Militaire, 44,

defenderesse en cassation,

representee par Maitre Jean-Marie Nelissen Grade, avocat à la Cour decassation, dont le cabinet est etabli à Bruxelles, rue Brederode, 13, ouil est fait election de domicile,

3. T.N.T. EXPRESS WORLDWIDE (Euro Hub), societe anonyme dont le siegesocial est etabli à Grace-Hollogne (Bierset), Aeroport de Liege, ruede l'Aeroport, 90,

defenderesse en cassation,

representee par Maitre Cecile Draps, avocat à la Cour de cassation, dontle cabinet est etabli à Liege, rue de Chaudfontaine, 11, ou il est faitelection de domicile,

4. SOCIETE NATIONALE DES VOIES AERIENNES-BELGOCONTROL, entreprisepublique autonome dont le siege social est etabli à Schaerbeek, ruedu Progres, 80,

defenderesse en cassation,

5. ETAT BELGE, represente par le ministre de la Defense, dont le cabinetest etabli à Bruxelles, rue Lambermont, 8, et dont les bureaux sontetablis à Evere, quartier Reine Elisabeth, rue d'Evere, 1,

defendeur en cassation,

6. CARGO AIRLINES Ltd, societe de droit israelien dont le siege estetabli à Tel-Aviv (Israel), rue Vissotzski, 6, ayant un sieged'exploitation à Grace-Hollogne (Bierset), aeroport de Bierset,

defenderesse en cassation,

representee par Maitre Pierre Van Ommeslaghe, avocat à la Cour decassation, dont le cabinet est etabli à Bruxelles, avenue Louise, 106, ouil est fait election de domicile,

les parties 2 à 6 à tout le moins appelees en declaration d'arretcommun.

NDEG C.05.0133.F

B. R. et consorts,

demandeurs en cassation,

representes par Maitre Philippe Gerard, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Bruxelles, avenue Louise, 523, ou il estfait election de domicile,

contre

1. REGION WALLONNE, representee par son gouvernement en la personne duministre du Logement, des Transports et du Developpement territorial,dont le cabinet est etabli à Namur, rue d'Harscamp, 22,

defenderesse en cassation,

representee par Maitre Pierre Van Ommeslaghe, avocat à la Cour decassation, dont le cabinet est etabli à Bruxelles, avenue Louise, 106, ouil est fait election de domicile,

2. SOCIETE DE DEVELOPPEMENT ET DE PROMOTION DE L'AEROPORT DELIEGE-BIERSET, societe anonyme dont le siege social est etabli àBierset, rue de l'Aerodrome Militaire, 44,

defenderesse en cassation,

representee par Maitre Jean-Marie Nelissen Grade, avocat à la Cour decassation, dont le cabinet est etabli à Bruxelles, rue Brederode, 13, ouil est fait election de domicile,

3. T.N.T. EXPRESS WORLDWIDE (Euro Hub), societe anonyme dont le siegesocial est etabli à Grace-Hollogne (Bierset), Aeroport de Liege, ruede l'Aeroport, 90,

defenderesse en cassation,

representee par Maitre Cecile Draps, avocat à la Cour de cassation, dontle cabinet est etabli à Liege, rue de Chaudfontaine, 11, ou il est faitelection de domicile,

4. SOCIETE NATIONALE DES VOIES AERIENNES-BELGOCONTROL, entreprisepublique autonome dont le siege social est etabli à Schaerbeek, ruedu Progres, 80,

defenderesse en cassation,

5. ETAT BELGE, represente par le ministre de la Defense, dont le cabinetest etabli à Bruxelles, rue Lambermont, 8, et dont les bureaux sontetablis à Evere, quartier Reine Elisabeth, rue d'Evere, 1,

defendeur en cassation,

6. CARGO AIRLINES Ltd, societe de droit israelien dont le siege estetabli à Tel-Aviv (Israel), rue Vissotzski, 6, ayant un sieged'exploitation à Grace-Hollogne (Bierset), aeroport de Bierset,

defenderesse en cassation,

representee par Maitre Pierre Van Ommeslaghe, avocat à la Cour decassation, dont le cabinet est etabli à Bruxelles, avenue Louise, 81, ouil est fait election de domicile,

les parties 2 à 6 à tout le moins appelees en declaration d'arretcommun.

I. La procedure devant la Cour

Les pourvois en cassation sont diriges contre l'arret rendu le 29 juin2004 par la cour d'appel de Liege.

A l'examen de la premiere branche du deuxieme moyen des pourvoisC.04.0582.F, C.05.0130.F, C.05.0131.F, C.05.0132.F, C.05.0134.F,C.05.0135.F, C.05.0136.F, C.05.222.F et C.05.0224.F et de la deuxiemebranche du deuxieme moyen des pourvois C.05.0129.F et C.05.0133.F, la Coura, par arret du 14 decembre 2006, estime devoir poser à la Cour dejustice des Communautes europeennes trois questions prejudiciellesauxquelles repond l'arret C- 2/07 du 28 fevrier 2008.

Le conseiller Didier Batsele a fait rapport.

L'avocat general Thierry Werquin a conclu.

II. Les moyens de cassation

A l'appui du pourvoi inscrit sous le numero C.04.0582.F du role general,les demandeurs presentent six moyens dont les deuxieme, quatrieme,cinquieme et sixieme sont libelles dans les termes suivants :

Deuxieme moyen

Dispositions legales violees

- articles 33 à 41, 149 et 159 de la Constitution ;

- article 10 du Traite du 25 mars 1957 instituant la Communauteeuropeenne, dans sa version consolidee, telle que celle-ci est en vigueurdepuis la modification et la nouvelle numerotation par le Traite du 2octobre 1997, ratifie par la loi du 10 aout 1998 ;

- articles 1er, 2 et 4 de la directive 85/337/CE du Conseil du 25 juin1985 concernant l'evaluation des incidences de certains projets publics etprives sur l'environnement, telle qu'elle etait d'application avant samodification par la directive 97/11/CEE du Conseil du 3 mars 1997, ainsique les points 7 de l'annexe I et 12 de l'annexe II de la directive85/337/CE precitee ;

- articles 1er, 2, 3, 4, 5, 9 et 10 du decret de la Region wallonne du 11septembre 1985 organisant l'evaluation des incidences sur l'environnementdans la Region wallonne, tel qu'il etait d'application avant lamodification par le decret du 11 mars 1999, ainsi que son annexe I ;

- articles 3, 4, 5, 6 et 8 de l'arrete de l'executif regional wallon du 31octobre 1991 portant execution du decret du 11 septembre 1985 organisantl'evaluation des incidences sur l'environnement dans la Region wallonne,tel qu'il etait d'application avant sa modification par l'arrete du 4juillet 2002, ainsi que son annexe II ;

- articles 1382 et 1383 du Code civil ;

- article 1138, 3DEG, du Code judiciaire ;

- principe general de la separation des pouvoirs, compris dans l'article33, alinea 2, de la Constitution.

Decisions et motifs critiques

L'arret rec,oit les appels principaux et les appels incidents desriverains tant en ce qui concerne les trois [premieres defenderesses]qu'en ce qui concerne la [sixieme defenderesse], confirme le jugemententrepris en ce qui concerne la jonction des causes et au surplus ditrecevables les demandes des riverains actuellement formees contre [lestrois premieres defenderesses] et la [sixieme defenderesse] mais les ditnon fondees, dit l'arret commun à la [quatrieme defenderesse] et [aucinquieme defendeur] et condamn[e] les riverains aux depens des deuxinstances des trois [premieres defenderesses], par tous ses motifs reputesici integralement reproduits, dont notamment les motifs reproduitsci-apres :

« 4. La directive CEE 85/337 sur l'evaluation des incidences et le decretwallon de transposition

Avant d'examiner les arguments des riverains, il apparait utile depreciser le cadre juridique invoque (voir les copies des reglementationsmentionnees dans le dossier complementaire de documentation de la[premiere defenderesse]) ;

La directive en cause contient une annexe I qui contient une liste deprojets pour lesquels l'evaluation des incidences est obligatoire ;

Cette liste mentionne la construction d'un aeroport `dont la piste dedecollage et d'atterrissage a une longueur de 2.100 metres ou plus' ;

L'annexe II de la directive mentionne des projets qui sont soumis à etuded'incidence lorsque les Etats membres `considerent que leurscaracteristiques l'exigent' ; dans cette liste, figure la `modificationdes projets figurant à l'annexe I', à savoir ainsi la modification de laconstruction d'un aeroport ;

Le decret du 11 septembre 1985 a transpose fidelement la directive encause, notamment, en reprenant textuellement la liste figurant dansl'annexe I de la directive ;

L'arrete d'execution du 31 octobre 1991 vise toujours la `construction[...] d'aeroports' meme s'il etend l'application en precisant `dont lapiste a une longueur de 1.200 m ou plus, y compris l'allongement despistes existantes au-delà de ce dernier seuil' (voir la copie du decretet de cet arrete dans le dossier de documentation de la [premieredefenderesse]) ;

Quant aux donnees de fait propres à l'espece, il y a lieu de relever quela piste de l'aeroport de Bierset presente une longueur largementsuperieure à 2.100 metres, qu'elle existait bien avant l'entree envigueur de la directive et du decret de transposition, et qu'elle n'a pasete allongee pour permettre l'arrivee des vols de nuit en 1996 et 1998 ;

Compte tenu de ces elements de fait, les riverains glosent longuement maisinutilement sur la notion d'aeroport ;

En effet, il est evident que tant la directive que le decret envisagent etdefinissent la notion d'aeroport par rapport à la longueur de sa piste etnon par rapport aux installations annexes à la piste, tels des hangars oumeme une tour de controle ;

Au surplus, l'annexe I de la directive vise la `construction' d'unaeroport et l'annexe II, qui, pour rappel, ne vise seulement que deshypotheses pour lesquelles les Etats peuvent prevoir une etuded'incidence, parle de la modification d'un projet vise à l'annexe I, soitla modification de la construction ;

En l'espece, il n'y a eu ni construction ni modification de laconstruction d'un aeroport au sens des dispositions invoquees dans lamesure ou la piste de l'aeroport n'a pas ete modifiee dans sa longueur ;

Il resulte de cette analyse qu'il y a lieu de rejeter les arguments de MeLebrun, notamment quant à une definition de l'aeroport tiree d'autresdispositions legales ou reglementaires ou quant à une application del'article 9 de l'arrete du 31 octobre 1991 qui evoque un nouveau projetprevoyant `l'augmentation de capacite d'une installation existante de plusd'un cinquieme de la capacite initiale et entrainant le depassement de lacapacite indiquee comme seuil dans l'annexe II' ;

Ce sont, d'ailleurs, les memes circonstances de fait qui entrainentl'immense difficulte, en realite l'impossibilite, des riverains à trouveren quoi pourrait consister le projet ou l'autorisation vises par ladirective en cause ;

En effet, en l'espece, l'aeroport existait bien avant l'entree en vigueurde la directive ;

Il n'y a donc pas eu un projet ou une autorisation clairement identifiableet prealable, dans le sens de la directive ou du decret en cause, pourpermettre les vols de nuit ou l'arrivee des integrateurs de fret ;

Le probleme pose n'est pas un probleme de construction ou de travaux maisun probleme d'autorisation d'exploiter une infrastructure aeroportuaireexistante ;

Les riverains l'avaient bien compris dans le cadre de leur citationintroductive d'instance mais ils ont ensuite essaye de reorienter leursarguments en constatant qu'un tel permis n'etait pas legalement requis àl'epoque ;

Dans cette mesure, c'est de maniere arbitraire que les riverains tententd'analyser certains des actes ou decisions intervenus comme pouvantconstituer un projet ou une autorisation au sens de la directive ;

Compte tenu du raisonnement fait ci-dessus, il est inutile de rentrer danscette logique et notamment de s'interroger sur la qualite d'autorisationque pourrait ou non revetir un plan de secteur;

Ainsi, la cour [d'appel] estime inutile de poser à la Cour de justice descommunautes europeennes les questions prejudicielles mentionnees par lesriverains ;

On peut ajouter, quant à la jurisprudence de cette cour, qu'un desconseils de la Region wallonne a correctement souligne à l'audience quel'arret concernant l'aeroport de Bolzano, à savoir l'arret W.W.F. contre`Autonome Provinz Bozen' (affaire C-435/97, arret du 11 septembre 1999,analyse, notamment, en page 345 des conclusions de synthese de Me Misson),n'etait pas transposable à la presente affaire car, dans l'hypothese del'aeroport de Bolzano, la piste de cet aeroport avait ete allongee,element de fait qui modifie evidemment tout le raisonnement à suivre etqui entraine que ce cas ne peut etre utilement invoque ;

Ce fait materiel essentiel est effectivement expressement releve par laCour de justice au point 4 de cet arret qui mentionne les travaux etamenagements essentiellement prevus, dont `le prolongement de la piste de1040 à 1.400 metres' (voir la copie de l'arret qui figure dans lesdossiers complementaires de documentation de la [premiere defenderesse]) ;

La meme analyse que celle qui vient d'etre faite peut etre transposee dansle cadre des arguments invoques au niveau du decret et de l'arrete detransposition de cette directive ;

Ainsi, il n'y a pas non plus d'illegalite formelle quant à l'absenced'etude d'incidence ;

(...) On peut encore ajouter qu'il n'est pas admissible de globaliser tousles permis pour essayer d'en degager un projet plus general qui necorrespond de toute maniere pas à la notion de `construction' d'unaeroport telle qu'elle est envisagee par les dispositions invoquees ;

Les permis en cause sont une serie de permis qui ne demandent pas, eneux-memes, une etude d'incidence et dont les notices presentes etaient, ensoi, suffisamment motivees ;

En consequence, les permis en cause n'etaient pas nuls ou illegaux ;

Quant à l'argument tire de la disposition du decret qui prevoit que`lorsqu'elle estime que les incidences risquent d'etre importantes, (...)l'autorite competente prescrit l'etablissement d'une etude d'incidence surl'environnement' (article 10, S: 4), cette disposition mentionne unpouvoir d'appreciation de l'administration qui ne peut etre sanctionnedans le cadre d'une illegalite mais qui pourra etre examine commeconstitutif d'une faute dans le cadre de l'analyse à faire ci-dessous ».

L'arret considere qu' « il resulte de l'analyse faite au point IIprecedent que la plupart des illegalites invoquees ne peuvent dejà pasetre retenues utilement en tant que telles » et, quant au lien causalentre la violation alleguee de la directive 85/337 et le dommage, que :

« Notamment, quant à la directive CEE 85/337 sur l'evaluation desincidences et au decret de transposition, il n'est nullement etabli que,s'il y avait eu une evaluation ou une etude d'incidence ou encore desnotices d'incidences plus detaillees, la [premiere defenderesse] n'auraitpas eu exactement la meme appreciation quant à la politique aeroportuaireà suivre ;

Il y a lieu d'ajouter que l'analyse faite à ce stade rend d'autant moinspertinentes les questions que les riverains veulent voir soumises à laCour de justice dans la mesure ou la reponse à ces questions, à defautde lien de causalite, n'aurait, en tout etat de cause, aucun interet pourla solution du present litige ;

Sur ce point precis, il est d'ailleurs interessant de relever que la[premiere defenderesse] n'a nullement abandonne sa volonte de modifier leplan de secteur et de faire allonger la piste de l'aeroport pour permettrel'utilisation d'avions gros porteurs à pleine charge, alors pourtant quedes etudes d'incidence realisees ulterieurement, à savoir notammentl'etude Polyart, revelent clairement et de maniere detaillee le problemedes incidences creees par la gestion actuelle de l'aeroport et qui serontencore augmentees par l'allongement de la piste et l'activitesupplementaire qu'elle permettra ;

Quant à l'argument specifique de la nullite de certains permis de batirou d'exploiter, on peut relever que les infrastructures mentionnees à cestade sont, certes, destinees à permettre ou à faciliter l'activite dessocietes de fret, mais que ce ne sont nullement ces infrastructures enelle-memes qui sont la cause des nuisances sonores subies par lesriverains (voir le raisonnement que la cour [d'appel] fait sien qui figureen pages 136 et 137 du jugement entrepris du 9 fevrier 2001) ».

Le premier juge avait considere :

« En ce qui concerne non plus le projet aeroportuaire dans sa globalitemais les permis delivres depuis decembre 1991 pour la realisation decertaines infrastructures, les riverains invoquent des illegalites, lesnotices etant à leur estime soit inexistantes soit lacunaires, impreciseset incompletes ;

Il est vrai que des projets apparemment d'importance mineure peuvent avoirdes incidences notables sur l'environnement, par exemple en raison de leurlocalisation ou encore en raison de leur nature, et il convient alors quel'autorite integre cette dimension dans son appreciation. De meme, il luiincombe de tenir compte de l'effet cumulatif des projets pour fixer lescriteres d'exoneration d'une etude d'incidences ;

Le tribunal considere cependant qu'un examen approfondi de la regularitede chaque permis n'apporterait rien au debat et ce, pour deux raisons ;

Tout d'abord, il parait difficile de soutenir que l'autorite, en nereclamant ni notice prealable plus explicite (car il ne faudrait pascroire qu'il n'y en avait pas ou qu'elles passaient totalement soussilence le probleme du bruit) ni etude d'incidences, aurait ete malinformee sur les nuisances potentielles sur l'environnement. Il ne fautpas oublier que les constructions et activites litigieuses etaientclairement inscrites dans le cadre du developpement de l'aeroport, que niles autorites locales ni l'autorite de tutelle ne l'ignoraient et que lesnuisances sonores liees au developpement d'un aeroport ne sont nicontestables ni contestees ;

Qu'aurait donc apporte au debat le rappel du fait que la construction d'unhall de fret ou d'un parc petrolier s'inscrivaient dans le cadre d'uneintensification du trafic rendant inhabitables ou difficilementsupportables les environs de l'aeroport ?

Les demandeurs ne repondent pas à cette question, cependant essentielle ;

Ensuite, il est peut-etre utile de rappeler que le litige ne releve pas ducontentieux de l'annulation mais s'inscrit dans le cadre d'une action enresponsabilite fondee sur l'article 1382 du Code civil. L'optique est doncà la fois differente et plus large ;

Ainsi, pour etre pertinents, les riverains devraient demontrer que lecaractere eventuellement irregulier de realisations de parking, dehangars, de hall de stockage, de bureau, de voiries, de bassins d'oragepresente un lien causal avec la problematique des vols de nuit ;

Or, à supposer que les riverains n'aient aucun grief à formuler sur laprocedure de delivrance des permis relatifs à ces infrastructures situeesdans le perimetre de l'aeroport, les nuisances qu'ils subissent n'enseraient nullement reduites ;

Les riverains expliquent que, si la procedure avait ete suivie tellequ'ils estiment qu'elle aurait du l'etre, ils auraient pu introduire desreclamations, se faire entendre et avoir une chance de voir leursobjections rencontrees par le pouvoir politique ;

Il n'est ni demontre ni meme hautement vraisemblable que le principe dedevelopper l'aeroport de Bierset aurait pu etre remis en cause lors de ladelivrance de permis ponctuels se rapportant à quelques infrastructures.La `perte de chance' parait ainsi avoisiner le neant ;

Par ailleurs, il est loin d'etre certain que les riverains auraientintroduit les reclamations qu'ils invoquent aujourd'hui. Les partiesdefenderesses font justement valoir qu'ils n'ont pris aucune initiative dece type ni lors de l'elaboration du plan de secteur de Liege approuve en1987 ni lors de la revision partielle du plan en 1992. Bien plus, despermis ont ete octroyes recemment (en juin et septembre 2000), impliquantla tenue d'enquetes publiques. La procedure administrative s'est doncderoulee au moment meme ou les riverains redigeaient des conclusionsaffirmant qu'ils se seraient fait entendre dans de telles procedures. Or,ils ne l'ont pas fait. Leur argument releve donc davantage de lasupputation que de la demonstration ;

En l'absence de justification d'un lien causal entre la faute pretendue etle dommage, il est sans interet de pousser l'examen de la faute plusavant ».

Griefs

Premiere branche

Aux termes de l'article 1er de la directive 85/337/CE du Conseil du 25juin 1985 concernant l'evaluation des incidences de certains projetspublics et prives sur l'environnement, telle qu'elle etait d'applicationavant sa modification par la directive 97/11/CEE du Conseil du 3 mars1997, cette derniere concerne l'evaluation des incidences surl'environnement des projets publics et prives susceptibles d'avoir desincidences notables sur l'environnement.

En outre, cet article precise que, par projet au sens de la directive, onentend la realisation de travaux de construction ou d'autres installationsou ouvrages ou encore d'autres interventions dans le milieu naturel ou lepaysage, y compris celles qui sont destinees à l'exploitation desressources du sol.

L'article 2 de la directive 85/337 prevoit qu'un projet au sens del'article 1er de cette meme directive doit faire l'objet d'une evaluationde ses incidences « avant l'octroi de l'autorisation » de le realiser,l'autorisation etant definie par l'article 1.2 comme la decision del'autorite ou des autorites competentes qui ouvre le droit du maitred'ouvrage de realiser le projet.

L'article 4 de la directive precise le concept `projet' en lesrepartissant en deux categories, la premiere categorie, visee parl'article 4, S: 1er, de la directive, comprenant ceux qui sont enumeresdans l'annexe I de la directive, tels que des projets relatifs à la «construction d'un aeroport dont la piste depasse 2.100 metres de long »,vises par le point 7 de l'annexe I de ladite directive, qui font l'objet,de plein droit, d'une evaluation des incidences, la seconde categorie,visee par l'article 4, S: 2, de la directive, concernant des projetsappartenant aux classes enumerees à l'annexe II, qui sont soumis à uneevaluation, conformement aux articles 5 à 10, lorsque les Etats membresconsiderent que leurs caracteristiques l'exigent.

Conformement au point 12 de l'annexe II de la directive 85/337, avant samodification par la directive 97/11/CE du Conseil du 3 mars 1997, la« modification des projets figurant à l'annexe I ainsi que les projetsde l'annexe I qui servent exclusivement ou essentiellement audeveloppement et à l'essai de nouvelles methodes ou produits et qui nesont pas utilises pendant plus d'un an », constitue un projet susceptibled'etre soumis à evaluation des incidences, pour autant que sescaracteristiques l'exigent.

S'agissant de travaux se rapportant à un aeroport, il resulte del'ensemble de ces dispositions que ce qui est determinant pourl'application de la directive est de savoir si le projet envisage,consistant en la restructuration d'un aeroport existant, se rapporte à unaeroport ayant une piste qui depasse 2.100 metres de long et estsusceptible d'avoir des incidences sur l'environne-ment, sans qu'il soitexige que ces travaux concernent l'allongement de la piste, un ensemble detravaux pouvant constituer un projet au sens de l'article 1.2 de ladirective 85/337.

La directive devra s'appliquer des lors que les caracteristiques du projetl'exigent.

De meme, le decret de la Region wallonne du 11 septembre 1985 organisantl'evaluation des incidences sur l'environnement dans la Region wallonne,tel qu'il etait d'application avant sa modification par decret du 11 mars1999, transposant la directive, prevoit en son article 4 que la delivrancede toute autorisation est subordonnee à la mise en oeuvre du systemed'evaluation des incidences sur l'environnement prevu par le decret ; siplusieurs autorisations sont requises, un seul systeme d'evaluation desincidences sera prevu, l'article 1.2 precisant que le « projet » designetoute operation, activite, ouvrage, construction, demolition,transformation, extension ou desaffectation d'installation, programme ouplan modifiant l'environnement, dont la realisation est envisagee par unepersonne physique ou morale, de droit public ou prive.

L'evaluation des incidences correspondant aux obligations imposees par ladirective 85/337/CE est qualifiee par le decret d'etudes d'incidences,laquelle doit etre menee par un auteur independant de la Region wallonne.

A l'image de la repartition prevue dans la directive europeenne, une etuded'incidences a lieu de plein droit si le projet du demandeur du permiscorrespond aux travaux vises dans l'annexe I du decret (article 9, alinea2, du decret) ou dans l'annexe II de l'arrete du gouvernement wallon du 31octobre 1991 portant execution du decret du 11 septembre 1985, les autresprojets ne faisant l'objet d'une etude d'incidences que si l'autoriteestime que les incidences risquent d'etre importantes.

L'annexe I du decret, qui enumere les projets soumis d'office à etudesd'incidences, comprend notamment un point 7, ainsi redige :« construction d'autoroutes, de voies rapides, de voies pour le trafic àgrande distance des chemins de fer ainsi que des aeroports dont la pistede decollage et d'atterrissage a une longueur de 2.100 metres ou plus ».

L'annexe II de l'arrete du gouvernement wallon du 31 octobre 1991etendait, au numero 8, le caractere systematique de l'etude des incidencesà la construction d'aeroports dont la piste a une longueur de 1.200metres ou plus, y compris l'allongement de pistes existantes au-delà dece dernier seuil, ainsi que les aerodromes à vocation de loisirs.

En resume, comme dans la directive 85/337/CE, la legislation wallonnesoumet, d'une part, obligatoirement certains projets à une etuded'incidences et, d'autre part, soumet les autres projets à une telleetude si l'autorite peut craindre des incidences importantes pourl'environnement.

Il s'ensuit qu'en l'absence d'etude d'incidences conformement auxdispositions de la directive et du decret, tous les permis delivres dansle cadre dudit projet sont illegaux, l'article 5 du decret du 11 septembre1985 precisant explicitement que l'autorite et le juge administratifpeuvent prononcer la nullite de toute autorisation delivree encontradiction avec les dispositions de l'article 4, alinea 1er, la nullitedevant en tout cas etre prononcee en cas d'absence d'etude d'incidenceslorsqu'elle etait prevue par l'article 10, S: 4, du decret.

En l'occurrence, les demandeurs faisaient valoir devant la cour d'appelque la convention du 26 fevrier 1996, par les travaux qui y sont prevus,constitue un « projet » au sens de la directive 85/337, la conventionprevoyant notamment :

- que la [deuxieme defenderesse] fera en sorte que la piste principale(23L/05R) de l'aeroport soit pleinement operationnelle sur toute salongueur et equipee d'un systeme d'atterrissage (article 17.1),

- que la [deuxieme defenderesse] equipera la piste d'atterrissageparallele (23R) avec au moins ILS30 CAT 1 au plus tard le 1er mars 1998(article 17.2),

- que la [deuxieme defenderesse] assumera l'elargissement de la pisteparallele (23L/05R) à 45 metres, aux normes suffisantes pour manoeuvrerun Airbus 300, et veillera à ce que la piste soit entierementoperationnelle au plus tard le 15 decembre 1997 (article 18),l'elargissement de la piste parallele etant en principe soumis à permisd'urbanisme,

- que la [deuxieme defenderesse] equipera la piste 23ML de deux sorties depiste à haute vitesse supplementaires, comme il est indique dans le plande situation 2 de la carte reprise en annexe à la presente (article 18),ce qui est egalement soumis à permis d'urbanisme,

- qu'en raison de la necessite de deplacer la tour A.T.C. dans le cadre duprogramme de developpement, la [deuxieme defenderesse] developpera les 18hectares de stationnement pour avions de maniere à ce que :

pour le 31 octobre 1997, le nouvel espace de stationnement se situedirectement en face de l'installation principale de tri de [la troisiemedefenderesse],

pour le 31 decembre 1997, la zone de stationnement soit etendue endirection du hangar de maintenance des avions et reliee à la nouvellesortie à haute vitesse,

un espace de stationnement de 18 hectares etant evidemment soumis àpermis d'urbanisme, de meme que le hanger de maintenance vise par laconvention,

- que la [deuxieme defenderesse] s'engageait à eriger une tour decontrole (article 19), qu'elle s'engageait à fournir et maintenir uncentre d'approvisionnement en carburant, d'une capacite minimale d'unmillion de litres, avec possibilite pour [la troisieme defenderesse] d'enexiger l'agrandissement (article 21),

- que l'aeroport serait ouvert 24 heures sur 24, 365 jours par an, etqu'une source de puissance correcte serait disponible pour les activitesde [la troisieme defenderesse] (approximativement 2000 amperes) avec enrenfort une reserve permettant d'assurer un approvisionnement ininterrompuen energie (article 37), ce qui necessitait l'autorisation d'etablir deuxcabines à haute tension electriques 15 Kv.

Les demandeurs concluaient que cette convention ou ce projet avait poureffet d'enormes nuisances sur l'environnement, puisqu'il etait lacondition sine qua non de la venue d'une compagnie qui exigeait de pouvoirutiliser 365 jours par an, sans interruption, des infrastructures encoreà construire, et qui a insere dans le contrat une dispositionl'autorisant à effectuer un nombre illimite de mouvements, y comprispendant la nuit, et faisaient valoir, apres avoir analyse l'arret de laCour de Justice du 16 septembre 1999, que cette convention du 26 fevrier1996, parce qu'elle prevoit des travaux destines à modifier l'aeroport,expose bien l'existence d'un projet vise à l'annexe II de la directive.

Partant, en considerant que « tant la directive que le decret envisagentet definissent la notion d'aeroport par rapport à la longueur de sa pisteet non par rapport aux installations annexes à la piste, tels des hangarsou meme une tour de controle », pour en conclure que la directive nes'appliquait pas à la restructuration d'un aeroport, des lors que lapiste de cet aeroport n'est pas modifiee, l'arret meconnait la notion de« projet » reprise à la directive 85/337/CE du Conseil (violation del'article 1er de la directive 85/337/CE du Conseil du 25 juin 1985concernant l'evaluation des incidences de certains projets publics etprives sur l'environnement, telle qu'elle etait d'application avant samodification par la directive 97/11/CEE du Conseil du 3 mars 1997) et lechamp d'application de la directive, tel qu'il est defini par les articles1er, 2 et 4, dont il ressort que chaque projet se rapportant à unaeroport dont la piste a une longueur de 2100 metres, pouvant avoir desincidences notables sur l'environnement, doit faire l'objet d'une etuded'incidence (violation des articles 1er et 4 de la directive 85/337/CE duConseil du 25 juin 1985 concernant l'evaluation des incidences de certainsprojets publics et prives sur l'environnement, telle qu'elle etaitd'application avant sa modification par la directive 97/11/CEE du Conseildu 3 mars 1997). En outre, il viole les dispositions reprises à l'annexeII de la directive 85/337, avant sa modification par la directive 97/11/CEdu Conseil du 3 mars 1997, sous le point 12, en tant que celui-ci serefere notamment aux travaux modificatifs effectues à un aeroport, telqu'il est vise par le point 7 de l'annexe I de la directive, enconsiderant, au moins implicitement, que ces modifications devraientnecessairement avoir pour but de modifier la piste ou de l'allonger(violation de l'article 4, S: 2, de la directive 85/337/CE du Conseil du25 juin 1985 concernant l'evaluation des incidences de certains projetspublics et prives sur l'environnement, telle qu'elle etait d'applicationavant sa modification par la directive 97/11/CEE du Conseil du 3 mars1997, ainsi que le point 7 de l'annexe I et le point 12 de l'annexe II dela directive 85/337/CE precitee). De meme, l'arret viole les articles 1er,2, 3, 4, 5, 9 et 10 du decret de la Region wallonne du 11 septembre 1985organisant l'evaluation des incidences sur l'environnement dans la Regionwallonne, transposant la directive en droit belge en ce qui concerne laRegion wallonne, ainsi que son annexe I, tel qu'il etait d'applicationavant sa modification par le decret du 11 mars 1999, et les articles 3, 4,5, 6 et 8 de l'arrete de l'executif regional wallon du 31 octobre 1991portant execution du decret du 11 septembre 1985 organisant l'evaluationdes incidences sur l'environnement dans la Region wallonne, ainsi que sonannexe II, tel qu'il etait d'application avant sa modification parl'arrete du 4 juillet 2002, en considerant que les travaux autres que ceuxse rapportant à la piste d'un aeroport, à l'exclusion des modificationsapportees à l'infrastructure de l'aeroport concerne, echappent àl'application de ce decret et de cet arrete. Partant, l'arret n'a pudecider legalement, implicitement mais certainement, que les travaux visespar la convention du 26 fevrier 1996 et ayant pour objet d'amenagerl'aeroport pour les besoins d'une des parties à cette convention nepouvaient pas constituer un projet au sens de la directive, à tout lemoins sans examiner si celle-ci pouvait avoir des incidences notables surl'environnement (violation de articles 1er, 2, 4 de la directive 85/337/CEdu Conseil du 25 juin 1985 concernant l'evaluation des incidences decertains projets publics et prives sur l'environnement, telle qu'elleetait d'application avant sa modification par la directive 97/11/CEE duConseil du 3 mars 1997, 1er, 2, 3, 4, 5, 9 et 10 du decret de la Regionwallonne du 11 septembre 1985 organisant l'evaluation des incidences surl'environnement dans la Region wallonne, transposant la directive en droitbelge, en ce qui concerne la Region wallonne, ainsi que son annexe I, telqu'il etait d'application avant sa modification par le decret du 11 mars1999, 3, 4, 5, 6 et 8 de l'arrete de l'executif regional wallon du 31octobre 1991 portant execution du decret du 11 septembre 1985 organisantl'evaluation des incidences sur l'environnement dans la Region wallonne,ainsi que son annexe II, tel qu'il etait d'application avant samodification par l'arrete du 4 juillet 2002).

Deuxieme branche

La victime d'une faute, que celle-ci consiste en une illegalite ou en unefaute de comportement, a droit à charge de l'auteur de celle-ci à desdommages et interets, pour autant qu'il existe un lien de causalite entre,d'une part, la faute invoquee et, d'autre part, le dommage.

Afin de determiner l'existence d'un tel lien de causalite, il appartientau juge du fond d'examiner si, sans la faute commise, le dommage alleguese serait produit de la meme fac,on, une reponse negative devant entrainerla conclusion qu'il existe un lien de causalite entre la faute invoquee etle dommage allegue.

En l'occurrence, les demandeurs postulaient la condamnation de la[premiere defenderesse] à les dedommager des tres importantes nuisancessonores, majoritairement nocturnes, et leurs consequences sur le sommeilet la sante, faisant valoir que le lien de causalite entre la faute,consistant en l'absence d'etude d'incidences prealable aux demandes depermis d'urbanisme et d'autorisations d'exploiter necessaires à la miseen oeuvre des travaux, vises par la convention du 26 fevrier 1996, absenced'etude d'incidences qui avait pour consequence l'illegalite des permisnecessaires à la mise en oeuvre de cette convention, et donc à la foisl'illegalite des infrastructures visees par ces permis et l'illegalite del'utilisation de ces infrastructures, et les nuisances qu'engendre uneexploitation illegale, etait certain.

Ils faisaient notamment valoir qu'une etude d'incidences serieuse auraitpermis à la [premiere defenderesse] de constater l'impact excessif del'activite de [la troisieme defenderesse] sur l'environnement, citantl'exemple de Strasbourg ou, à l'issue du rapport Muzet-Vallet, il futdecide de ne pas accueillir D.H.L. et ses vols nocturnes de fret expressen raison des graves nuisances que cela impliquerait.

Les demandeurs y soutenaient que les riverains auraient du, en applicationde la legislation relative à l'evaluation des incidences, pouvoir seprononcer sur le projet et sur l'etude d'incidences, à l'occasion d'uneenquete publique serieuse, mentionnant clairement qu'il s'agissait decreer les conditions necessaires au lancement de vols de nuits tresimportants, et qu'à defaut de refus des autorisations, la [premieredefenderesse] aurait du, au minimum, imposer des conditions d'exploitationdrastiques.

Les demandeurs faisaient, en outre, valoir que le raisonnement de la[premiere defenderesse] etait, en tout etat de cause, contraire à latheorie de l'equivalence des conditions, puisque, in concreto, le dommageest du à une exploitation qui s'avere illegale. Or, l'exploitation etantillegale, il n'appartient pas au juge, sous peine de se substituer auxprocedures administratives pre-vues par le droit de l'environnement etd'enfreindre par consequent le principe de la separation des pouvoirs, dedire qu'elle aurait pu etre legale et que donc il n'y aurait pas de liende causalite.

Partant, les demandeurs concluaient que, pour le passe, il appartenait aujuge de reparer par equivalent le dommage subi, en indemnisant l'ensembledes dommages pour les riverains issus de l'utilisation desinfrastructures, visees par la convention du 26 fevrier 1996, et faisaientvaloir que l'ensemble des nuisances infligees par [la troisiemedefenderesse], principal utilisateur desdites infrastructures, estillegal, de sorte que le dommage qui en resulte doit etre totalementindemnise, solidairement par [les trois premieres defenderesses].

Quant à l'avenir, ils concluaient que, l'utilisation des infrastructuresillegales se poursuivant, il appartenait au juge d'empecher que la fauteet le dommage se perpetuent, en interdisant l'utilisation desinfrastructures visees par la convention du 26 fevrier 1996, y comprisl'ensemble des hangars mis à la disposition de [la troisiemedefenderesse], ce qui signifie a fortiori que les vols de nuit doiventetre interdits aussi longtemps que de nouveaux permis n'auront pas etedelivres en concordance avec la legislation europeenne et wallonne.

L'arret, qui omet de repondre au moyen developpe par les demandeurs dansleurs conclusions de synthese, relatif à l'absence de pouvoir de la courd'appel de se prononcer sur la question de savoir si les autoritesadministratives auraient eu exactement la meme appreciation quant à lapolitique aeroportuaire, se trouvant à l'origine des nuisances subies parles demandeurs, ne motive pas regulierement sa decision (violation del'article 149 de la Constitution). A tout le moins, en concluant au rejetde la demande en tant que celle-ci etait fondee sur l'absence d'etuded'incidences sur l'environnement au motif que « notamment, quant à ladirective CEE 85/337 sur l'evaluation des incidences et au decret detransposition, il n'est nullement etabli que, s'il y avait eu uneevaluation ou une etude d'incidences ou encore des notices d'incidencesplus detaillees, la [premiere defenderesse] n'aurait pas eu exactement lameme appreciation quant à la politique aeroportuaire à suivre »,l'arret statue en violation du principe general de la separation despouvoirs (violation des articles 33 à 41 de la Constitution, dont plusparticulierement [l'article] 33, alinea 2, ainsi que du principe generalde la separation des pouvoirs, qui y est compris). En outre, l'arret n'apu exclure legalement l'existence d'un lien de causalite entre, d'unepart, l'illegalite consistant en l'absence d'etude d'incidences,entrainant l'illegalite de tous les permis necessites par la mise enoeuvre de la convention du 26 fevrier 1996, et, d'autre part, le dommagesubi pendant toute la periode pendant laquelle l'infrastructure erigeeillegalement fut et est encore utilisee, au vu des elements retenus par lacour d'appel, dont il ne ressort nullement qu'elle a eu egard auximplications d'une telle etude, qui comprend notamment la consultation dela population, qui se seraient traduites immanquablement par l'impositionde conditions d'exploitation drastiques (violation des articles 1382 et1383 du Code civil). A tout le moins, dans la mesure ou il n'apparait pasà la lecture de l'arret que la cour d'appel ait eu egard aux implicationsd'une etude d'incidences, telle qu'elle est prescrite par la directive85/337 du Conseil du 27 juin 1985 concernant l'evaluation de certainsprojets publics et prives sur l'environnement et par le decret wallon du11 septembre 1985 organisant l'evaluation des incidences surl'environnement dans la Region wallonne, avec toutes ces prescriptions àrespecter, telles que la consultation de la population, l'arret met laCour dans l'impossibilite de controler la legalite de la decision, et,partant, ne motive pas regulierement sa decision (violation de l'article149 de la Constitution). Finalement, en tant que l'arret fait dependre lareparation de l'absence d'etude d'incidences, imposee par la directiveeuropeenne 85/337, de la preuve absolue, à apporter par les demandeurs,que la [premiere defenderesse] n'aurait pas eu la meme attitude si elleavait fait realiser une etude d'incidences au sujet du projet contenu dansla convention du 26 fevrier 1996, l'arret rend difficile ou en tout casexcessivement difficile l'exercice des droits conferes par l'ordrejuridique communautaire, violant ainsi les articles 10 du Traite du 25mars 1957 instituant la Communaute europeenne dans sa version consolidee,telle que celle-ci est en vigueur depuis la modification et la nouvellenumerotation par le Traite du 2 octobre 1997, ratifie par la loi du10 aout 1998, et 2, S: 1er, de la directive 85/337/CE du Conseil du 25juin 1985 concernant l'evaluation des incidences de certains projetspublics et prives sur l'environnement, telle qu'elle etait d'applicationavant sa modification par la directive du 97/11/CEE du Conseil du 3 mars1997.

Troisieme branche

Aux termes de l'article 1138, 3DEG, du Code judiciaire, le juge commet uneillegalite lorsqu'il omet de se prononcer sur l'un des chefs de lademande.

Les demandeurs faisaient valoir qu'une partie des mesures solliciteesetaient fondees sur l'illegalite des permis couvrant les activites del'aeroport, en particulier de nuit, savoir la cessation de l'utilisationdes infrastructures illegales.

Ils soutenaient notamment que le principe de legalite impose que leslegislations protegeant l'environnement s'appliquent aux particulierscomme aux autorites administratives. Ces dernieres ne peuvent, tout commeles particuliers, exploiter un etablissement classe ou edifier uneconstruction que si elles disposent du permis ad hoc.

Si le permis dont elle beneficie s'avere nul ou illegal, l'administrationest tenue, en application du principe de legalite, de ne pas poursuivrel'exploitation de l'activite couverte par celui-ci.

Lorsque la [premiere defenderesse] est elle-meme beneficiaire de sespermis, la separation des pouvoirs ne la met pas à l'abri d'unedeclaration d'illegalite de ceux-ci, que ce soit par le Conseil d'Etat oupar le juge judiciaire, avec la consequence logique de la cessation del'activite qui est couverte par le permis illegal.

Ils precisaient que c'est precisement le principe de legalite, premierfondement de l'Etat de droit, qui dicte qu'il soit mis fin à une activiteillicite prejudiciant le bien-etre des personnes.

Les demandeurs demandaient des lors à la cour d'appel, dans le cadre deleur appel incident, « de constater et dire pour droit que l'ensemble desautorisations administratives en matiere d'urbanisme ou d'exploitationdelivrees depuis le mois de janvier 1992 l'ont ete en violation desdispositions wallonnes et europeennes organisant l'evaluation desincidences sur l'environnement de certains projets publics et prives,qu'elles sont atteintes de nullite radicale en application des articles 5,alinea 3, 3e tiret, 9 et 10 du decret du 11 septembre 1985 organisantl'evaluation des incidences sur l'environnement dans la Region wallonne etque ces autorisations doivent etre ecartees sur la base de l'article 159de la Constitution ».

En omettant de faire droit [à] la demande tendant à la cessation del'utilisation de l'infrastructure illegale en tant qu'elle reposait surl'illegalite, resultant de l'absence d'etude d'incidences, la cour d'appela rendu son arret en violation de l'article 1138, 3DEG, du Codejudiciaire, à tout le moins est-elle restee en defaut de repondre auxconclusions de synthese ou les demandeurs faisaient valoir que le principede legalite imposait qu'il soit mis fin à l'utilisation del'infrastructure illegale (violation de l'article 149 de la Constitution).En tout cas, la cour d'appel a viole l'article 159 de la Constitution enrefusant de faire droit à cette demande (violation des articles 159 de laConstitution et, pour autant que de besoin, 5, alinea 3, 3e tiret, 9 et 10du decret du 11 septembre 1985 organisant l'evaluation des incidences surl'environnement dans la Region wallonne, tel qu'il etait d'applicationavant la modification par le decret du 11 mars 1999).

Quatrieme moyen

Dispositions legales violees

- article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et deslibertes fondamentales, signee à Rome le 4 novembre 1950 et approuvee parla loi du 13 mai 1955 ;

- article 149 de la Constitution.

Decisions et motifs critiques

L'arret rec,oit les appels principaux et les appels incidents desriverains en ce qui concerne les trois premieres et la sixiemedefenderesse, confirme le jugement entrepris en ce qui concerne lajonction des causes et au surplus dit recevables les demandes desriverains, actuellement formees contre [ces defenderesses], mais les ditnon fondees, dit l'arret commun aux quatrieme et cinquieme defendeurs etcondamne les riverains aux depens des deux instances, par tous ses motifsreputes ici integralement reproduits, dont notamment ceux qui serapportent à la violation invoquee de l'article 8 de la Convention desdroits de l'homme, savoir :

« 1. Preambule

Qu'on peut d'abord relever que la [premiere defenderesse], dans sesconclusions de synthese, ne conteste pas que des nuisances sonores, tellescelles qui sont generees par les activites de l'aeroport de Bierset,peuvent constituer une ingerence au regard du droit au respect de la vieprivee et familiale ou une atteinte au droit de propriete ;

Qu'au surplus, avant d'entrer dans l'analyse, il y a lieu de cerner leprobleme qui reste à etre examine en consequence de tous les elementsdejà degages ci-dessus ;

Qu'ainsi, pour rappel, le probleme de la prise en compte d'illegalites adejà ete analyse et aucune illegalite utile n'a ete retenue pourl'application specifique des articles de la convention et du PremierProtocole additionnel etudies à ce stade, soit que l'illegalite invoqueen'etait pas retenue comme telle, soit que l'illegalite en cause n'etaitpas une illegalite des mesures creant l'ingerence mais une illegalitetouchant seulement aux mesures destinees à gerer les nuisances sonores,soit que l'illegalite vantee n'etait pas en lien causal suffisant avec ledommage invoque ;

Que la notion de faute a ete ecartee, en ce compris une faute dechronologie dans les mesures prises ;

Que, sur ce point, il y a lieu de considerer reprise à ce stade toutel'analyse faite ci-dessus quant à la faute ;

Qu'en consequence, le seul probleme qui peut encore etre examine à cestade est la question de savoir si l'ingerence dans la vie privee etl'atteinte au droit de propriete sont des mesures proportionnelles enfonction du but poursuivi et ceci, en prenant en compte les mesuresprevues par la [premiere defenderesse] pour la gestion des nuisancessonores ;

Qu'au surplus, comme il a dejà ete signale ci-dessus, la cour [d'appel]ne partage pas l'interpretation particulierement extensive que Met'Serstevens et Cambier veulent donner à l'arret nDEG 51/2003 de la Courd'arbitrage ;

Que ladite cour n'a nullement retenu une violation de l'article 8 de laconvention et qu'il n'est pas admissible, en isolant certains considerantsde l'arret, de pretendre qu'il serait 'logique de considerer que la Courd'arbitrage a implicitement mais certainement admis la violation' de cetarticle ;

2. L'article 8 de la Convention

Que, dans le souci de ne pas rentrer inutilement dans des controversesdoctrinales, la cour [d'appel] n'etablira pas une analyse detaillee de lajurisprudence de la Cour europeenne des droits de l'homme, notamment quantà la nature exacte du droit à la protection d'un environnement sain, quiest, selon la [premiere defenderesse], un droit de la troisiemegeneration, dans la mesure ou la reconnaissance meme de ce droit n'est pasniee ;

Que, dans la meme optique, la cour [d'appel] evitera, dans la mesure dupossible, de penetrer dans les questions de la difference entre lesingerences, ou obligations negatives, et les obligations positives, etdans le probleme de l'effet horizontal des droits proteges par laconvention ;

Qu'a priori, il y a lieu de constater que la Cour europeenne a encore euà connaitre tres recemment du probleme des nuisances aeroportuaires ;

Que, dans cette mesure, la cour [d'appel] s'attachera exclusivement àl'analyse approfondie faite par la Cour europeenne de ce cas tres recent ;

Que ce cas recent a donne lieu à deux arrets de la Cour europeenne, àsavoir un premier arret du 2 octobre 2001 rendu par la troisieme sectionde la Cour composee de sept magistrats, puis un arret du 8 juillet 2003,rendu par la Grande chambre sur demande du gouvernement anglais, savoir unarret rendu par dix-sept magistrats de la Cour ;

Que, si le premier arret avait retenu, en l'espece, par cinq voix contredeux, une violation de l'article 8 de la convention, le second arret adit, par contre, par douze voix contre cinq, qu'il n'y avait pas eu deviolation de cet article ;

Que, dans cette mesure, la cour [d'appel] estime qu'il n'est pasadmissible, pour la presente analyse, de retenir les principes mentionnespar le premier arret ou dans les opinions dissidentes du second arret,dans la mesure ou la conclusion de ce premier arret, quant à l'article 8en cause, n'a plus du tout ete retenue dans le second arret ;

Que, quant aux elements utiles repris dans l'arret du 8 juillet 2003,qu'on qualifiera comme les parties à la presente cause d'arret Hatton II,il y a lieu de retenir que :

- la Cour europeenne precise elle-meme que, dans les affaires anterieuresou des problemes environnementaux l'ont amenee à conclure à desviolations de la Convention, ses constats se fondaient sur uneinobservation par les autorites nationales de certains aspects de lareglementation interne, ce qui n'est pas le cas dans l'affaire Hatton ;

- pour justifier la reglementation des vols de nuit, il est legitime pourl'Etat en cause de prendre en compte des interets economiques, l'alinea 2de l'article 8 autorisant les restrictions necessaires au bien-etreeconomique du pays, les interets cites à ce stade etant 'non seulementles interets economiques des compagnies aeriennes et autres entreprises etceux de leurs clients, mais aussi, et surtout, les interets economiques dupays dans son ensemble' ;

- l'examen à faire est celui d'un juste equilibre, un statut special nedevant pas etre accorde aux droits environnementaux dans cette analyse(voir point 122 de l'arret) ;

- dans le cas des vols de nuit, l'appreciation à faire est celle qui estrelative à la regle normale applicable aux decisions de politiquegenerale et non celle qui est applicable à une ingerence par une mesurepenale (voir point 123 de l'arret) ;

- l'appreciation à faire est une appreciation en fait (voir points 124 et125 de l'arret) ;

- quant à l'appreciation du juste equilibre du cote des interetseconomiques, la Cour ne procede meme pas à une quelconque analyse à cesujet et se contente de dire que, 'quant aux interets economiques faisantcontrepoids à l'opportunite de restreindre ou de supprimer les vols denuit pour atteindre les buts mentionnes, la Cour juge raisonnable depresumer que ces vols contribuent, du moins dans une certaine mesure, àl'economie generale' (voir point 126 de l'arret) ;

- pour apprecier le juste l'equilibre, la Cour estime devoir aussi prendreen consideration les mesures mises en place pour attenuer les effets dubruit genere par les aeronefs (voir point 127 de l'arret) ;

- la Cour releve que, dans des questions complexes de politiqueenvironnementale et economique, le processus decisionnel doitnecessairement comporter la realisation d'enquetes et d'etudesappropriees, de maniere à permettre l'etablissement d'un juste equilibreentre les differents interets concurrents en jeu (voir point 128 del'arret) ;

- la question à se poser est, en definitive, de savoir si les autoritesont ou 'n'ont pas depasse leur marge d'appreciation dans la recherche d'unjuste equilibre entre, d'une part, le droit des personnes touchees par lareglementation litigieuse à voir respecter leur vie privee et leurdomicile, et, d'autre part, les interets concurrents d'autrui et de lasociete dans son ensemble' (voir point 129 de l'arret) ;

Que, si on applique ces principes et elements au cas de l'aeroport deBierset, il y a lieu de constater que l'analyse à faire est celle de lamarge d'appreciation de la [premiere defenderesse] dans le cadre du justeequilibre à respecter entre les ingerences subies par les riverains etles interets economiques du developpement de l'activite en cause et ceci,en regardant aussi les mesures mises en place pour la gestion du bruit eten verifiant si les decisions prises l'ont ete sur la base d'enquetes etd'etudes appropriees ;

Que, dans ce cadre, il y a lieu de relever les elements suivants :

- au niveau des enquetes et etudes appropriees, la [premiere defenderesse]avait à sa disposition une etude economique, soit l'analyse faite parTractebel, et trois etudes techniques, à savoir l'etude A-Tech de 1996,l'etude du CEDIA et l'etude realisee par A-Tech, notamment, encollaboration avec le bureau Speedwing ;

- il n'est pas prouve que ces etudes etaient insuffisantes pour permettreà la [premiere defenderesse] de mesurer correctement les ingerencesgenerees par l'activite litigieuse et de prendre des decisions enconnaissance de cause ;

- les mesures prises pour la gestion des nuisances sont assez nombreuses,soit reglementation des routes aeriennes, reglementation du type d'avionsutilises, reglementation pour l'elaboration d'un PEB, reglementation pourle rachat de certains immeubles et reglementation pour des insonorisations(voir les commentaires faits ci-dessus quant aux details de cesreglementations) ;

- alors que la Cour europeenne se contente d'une presomption d'intereteconomique des vols de nuit, en l'espece, l'interet economique a etereleve et analyse par le CIRIEC dans plusieurs rapports ;

- dans cette mesure, il n'est pas utile de rentrer dans les polemiquesquant au nombre exact, à la qualite et au cout des emplois generes parl'activite aeroportuaire sur le site de Bierset ;

- c'est ainsi à titre quasi superfetatoire qu'on peut relever leschiffres importants d'emplois directs et indirects sur le siteaeroportuaire meme, à savoir, en 2001, au minimum 1.761 + 554 emplois,chiffres n'incluant nullement les emplois indirects hors du site et lesemplois induits ;

- dans cette meme mesure, et, par ailleurs, la cour [d'appel] nes'attardera pas au rapport invoque, au niveau budgetaire du couteconomique de l'emploi genere par l'aeroport, par Me t'Serstevens etCambier, ce rapport, qui reconnait la creation d'un nombre non negligeabled'emploi, procedant à des estimations du cout des emplois crees enpartant d'hypotheses maximalistes, notamment en matiere de fraisd'isolation ;

- il est, certes, possible de contester l'utilite economique theorique desvols de nuit, neanmoins, l'interet economique ne peut s'apprecier, à cestade, d'une maniere theorique et macroeconomique mais doit s'analyser enfonction de la plus-value apportee par les activites de l'aeroport à laregion qui l'entoure, notamment, en termes d'emplois ;

Que, par ailleurs, compte tenu du point 122 susvise de l'arret, à savoirqu'un statut special ne doit pas etre accorde aux droits environnementauxdans l'analyse du juste equilibre, la cour [d'appel] ne peut suivre leraisonnement fait par Me Misson et par Me t'Serstevens et Cambier,raisonnement dans lequel il est estime qu'il y aurait, quod non, unepreponderance de la protection de la sante publique par rapport auxconsiderations economiques ;

Que, dans cette meme mesure, la cour [d'appel] estime inutile et nonpertinent de poser la question prejudicielle mentionnee à la page 547desdites conclusions de Me Misson ;

Que, quant à l'application de l'article 8 en cause, le nouveau decret du29 avril 2004 ne permet pas une autre analyse ;

Qu'en effet, quant aux etudes prealables, outre les etudes precitees quisont toujours pertinentes, d'autres etudes ont encore ete commandees etfaites pour apprecier les mesures à prendre en matiere de gestion desnuisances ;

Que l'on peut mentionner sur ce point :

- l'etude precitee de l'expert canadien Bradley, auquel la [premieredefenderesse] a soumis sa reglementation, qui a conclu que le plan de[celle-ci] etait correct et reflechi ;

- l'etude du professeur Fontaine 'De la relation du bruit aeroportuaire àla sante - A propos de l'aeroport de Liege' ;

- l'etude du professeur Linkowski intitulee 'Region wallonne - Bierset :expertise' du 14 novembre 2003 ;

Que, par ailleurs, plusieurs etudes d'incidence ont ete faites dans lecadre de la modification du plan de secteur de Liege et dans le cadre del'allongement de la piste ;

Que les bureaux qui ont realise ces etudes devaient, legalement, etrestructurellement independants des defendeurs originaires ;

Que toutes ces etudes, qui integraient la situation specifique del'aeroport de Bierset, notamment le fait que cet aeroport fonctionne avecune piste unique, une trajectoire unique et une concentration temporelle,donnaient à la [premiere defenderesse] les bases necessaires à uneappreciation de la situation ;

Que, par ailleurs, quant aux mesures de gestion du bruit à prendre encompte, il y a lieu de se referer à l'analyse faite ci-dessus tant auniveau des premieres mesures que des mesures prevues dans le nouveaudecret ;

Qu'enfin, il y a eu une prise en compte de la situation des riverains, cetelement imposant seulement que le pouvoir public ait les elementsd'appreciation sur cette situation, ce qui etait manifestement le cas parle biais, notamment, de SERINFO ;

Que la [premiere defenderesse] disposait aussi d'etudes specifiques sur lasituation des effets de la nuisance sonore pour les riverains del'aeroport de Bierset ;

Que, dans le cadre du decret du 29 avril 2004, si l'association desriverains 'Net Sky' n'a pas ete auditionnee, c'est au motif que sa lettrene mentionnait nulle part un souhait d'etre entendue par le Parlementwallon et que ce courrier etait suffisamment precis dans son contenu etdans ses objectifs ;

Que, par contre, les deputes wallons ont entendu un expose de membres del'ACNAW, soit l'autorite de controle des nuisances sonores aeroportuairesen region wallonne, dont l'independance n'a jamais ete contestee, et unexpose de Jean Numerlin, directeur de la cellule d'etudes et dedeveloppement en ingenierie acoustique (CEDIA) à l'Universite de Liege ;

Qu'au surplus, il est particulierement hasardeux de tenter une comparaisonentre la situation de fait de l'aeroport d'Heathrow et la situation defait de l'aeroport de Bierset dans la mesure ou les seuls elements de faitrelates par les arrets Hatton sont particulierement minces et peudetailles ;

Qu'au contraire, on pourrait, à tout le moins, s'interroger sur lasituation precise vecue par les riverains reprise dans l'arret Hatton Ilen rapport avec les chiffres cites pour les nuisances sonores subies parceux-ci avant six heures tous les matins (voir le premier paragraphe dupoint 27 de l'arret Hatton II), alors que l'arret ne parle pas de mesuresprecises d'isolation ou de rachat pour les immeubles habites par cesriverains ;

Que l'interrogation est encore plus forte si on consulte, dans lestableaux non contestes de la [deuxieme defenderesse], les actions mises enouvre pour la gestion specifique du bruit à Heathrow avant l'annee 2000 ;

Qu'on pourrait encore s'interroger sur les enquetes etonnantes, encomparaison avec les plaintes des riverains de Bierset, faites aupres de400 riverains de Heathrow et de trois autres gros aeroport anglais, dansla mesure ou, selon ces enquetes, telles qu'elles sont rapportees au point35 de l'arret Hatton Il, tres peu de personnes vivant dans le voisinaged'un aeroport risquaient, une fois endormies, de voir leur sommeilgravement perturbe par le bruit des avions et, par comparaison avec lamoyenne globale d'environ dix-huit reveils nocturnes non causes par lebruit des aeronefs, meme un grand nombre de mouvements nocturnes bruyantsn'entrainaient qu'une augmentation minime des reveils nocturnes chez unindividu moyen. Le rapport concluait que les resultats de l'etude sur leterrain ne mettaient en evidence aucun element indiquant que le bruitgenere par les aeronefs fut susceptible de laisser des sequelles' et si'ses conclusions se fondaient sur des effets moyens', seul un pourcentageparticulierement minime de sujets de l'etude, soit 2 à 3 p.c., etait plussensible que 'la moyenne à cette nuisance';

Qu'à tout le moins, il n'est pas suffisamment demontre que les riverainsde Bierset seraient dans une situation certainement moins favorable queles riverains d'Heathrow ;

Que, surabondamment, si une comparaison precise devait etre faite, elle nepourrait non plus se limiter à envisager la situation des seulsrequerants de l'affaire Hatton mais devrait concerner l'ensemble desmesures prises pour gerer les nuisances sonores subies par tous lesriverains de l'aeroport d'Heathrow ».

Griefs

Premiere branche

Aux termes de l'article 8 de la Convention de sauvegarde des droits del'homme et des libertes fondamentales, toute personne a droit au respectde sa vie privee et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Ilne peut y avoir ingerence d'une autorite publique dans l'exercice de cedroit que pour autant que cette ingerence constitue une mesure qui, dansune societe democratique, est necessaire à la securite nationale, à lasurete publique, au bien-etre economique du pays, à la defense de l'ordreet à la prevention des infractions penales, à la protection de la santeou de la morale, ou à la protection des droits et libertes d'autrui.

Partant, si l'ingerence d'une autorite publique est admise, celle-ci nepeut se faire que dans un but legitime. En outre, l'ingerence doit sefaire de maniere raisonnable et etre proportionnee au but poursuivi.

II appartiendra des lors au juge du fond de sanctionner tout comportementde l'autorite publique qui meconnaitrait ces principes.

L'examen auquel peut se livrer le juge, à qui est soumis une tellecontestation, notamment dans les affaires ayant trait à des decisionsayant une incidence sur des aspects environnementaux, comporte deuxaspects ; d'une part, il peut apprecier le contenu materiel de la decisiondes autorites publiques en vue de s'assurer qu'elle est compatible avecl'article 8, d'autre part, il peut se pencher sur le processus decisionnelafin de verifier si les interets de l'individu ont ete dument pris encompte.

Quant à la demarche procedurale, la Cour europeenne considere que,lorsqu'il s'agit pour un Etat de traiter des questions complexes depolitique environnementale et economique, le processus decisionnel doitnecessairement comporter la realisation d'enquetes et d'etudes approprieesde maniere à permettre l'etablissement d'un juste equilibre entre lesdivers interets concurrents en jeu.

S'agissant d'un processus decisionnel, ces enquetes et etudes approprieedevront logiquement preceder la prise de decision.

Partant, il y aura meconnaissance du droit au respect de la vie privee etfamiliale lorsque le projet d'autoriser des vols nocturnes, constituantune ingerence dans le droit consacre par l'article 8 de la Conventioneuropeenne des droits de l'homme en raison notamment des nuisances sonoresimportantes occasionnees, est realise sans que des etudes et enquetesappropriees, independantes et critiques, permettant à l'autorite publiqued'etablir un equilibre entre les interets concurrents, aient ete realiseesdans le cadre du processus decisionnel, le simple fait de commander desetudes ou des enquetes ne pouvant suffire. Les etudes et enquetes doiventen outre avoir ete realisees avant la decision impliquant l'ingerence.

En l'occurrence, non seulement il n'apparait d'aucune consideration del'arret attaque que, prealablement à la decision d'autoriser les vols denuit, constituant l'ingerence, savoir la signature de la convention du 26fevrier 1996 par la premiere et la troisieme defenderesse, à tout lemoins dans la periode precedant le debut des vols de nuit par [cettederniere], se situant au 1er mars 1998, une quelconque etude fut realiseequant aux effets des vols de nuit sur l'environnement ou qu'une quelconqueenquete fut faite aupres de la population.

Par ailleurs, il ne ressort pas davantage de l'arret attaque que l'etudeTractebel, une etude economique, ni les etudes techniques realisees dansla periode precedant le debut des vols de nuit et, partant, des nuisances,dont fait etat la cour d'appel, etaient des etudes appropriees au sensprecite, autrement dit que lesdites etudes ont permis à la premiere et àla deuxieme defenderesse d'apprecier, dans le cadre du processusdecisionnel, de maniere objective tous les interets concurrents, dont ceuxdes demandeurs, aux fins d'etablir un juste equilibre entre les diversinterets en jeu, l'arret constatant explicitement qu'il s'agissait d'uneanalyse purement economique.

Quant à ce, les demandeurs faisaient d'ailleurs valoir expressement enleurs conclusions de synthese que la date charniere à prendre enconsideration pour apprecier l'existence des etudes et enquetesappropriees etait la convention du 26 fevrier 1996 avec la troisiemedefenderesse, par laquelle [les deux premieres defenderesses] deciderentd'accorder à [celle-ci], pour une duree exceptionnellement longue de 20ans, une liberte totale quant aux horaires, un nombre illimite demouvements de nuit, un minimum de quarante mouvements par heure, ainsiqu'une serie impressionnante d'aides.

Ils observaient que cette convention fut signee sans aucune des garantiesprocedurales constatees par l'arret Hatton II, sans aucune consultationprealable des riverains (etant restee secrete pendant tres longtemps),sans aucune concertation prealable avec les autorites communales, sansaucune etude environnementale, sans aucune etude de la sante publique,sans aucune analyse budgetaire des mesures d'accompagnement en faveur desriverains, sans aucune etude prealable des procedures de vol, sans aucunetablissement d'un quelconque PEB, sans test en matiere d'insonorisation,etc., elements demontrant que le processus decisionnel, qui a conduit [lesdeux premieres defenderesses] à conclure la convention du 26 fevrier1996, a exclusivement favorise l'approche economique du dossier enignorant totalement les interets environnementaux, et en deduisaient quecette approche etait à ce point desequilibree qu'il fallaitnecessairement en conclure à la violation de l'article 8 de la Conventioneuropeenne des droits de l'homme.

Les demandeurs observaient, en outre, qu'au 1er mars 1998, savoir la datedu debut des vols de nuits, aucune information n'etait disponible,qu'aucun texte n'etait publie au Moniteur belge, qu'aucune consultationn'avait eu lieu (la creation de SERINFO etant ulterieure), qu'aucunemesure de protection effective n'existait pour les riverains, que le PEBn'etait toujours pas finalise, que la publication des trajectoires aux «AIP » n'avait pas encore lieu, que la [premiere defenderesse] n'avaittoujours pas la moindre idee de ce que pouvait representerl'insonorisation d'une habitation (les cinq premiers testsd'insonorisation ne debuteront qu'en octobre 1999), qu'aucunebudgetisation n'etait prevue, que la publication des trajectoires aux «AIP » eut lieu le 23 avril 1998, sans que les riverains concernes n'aientjamais ete consultes au prealable et aient jamais pu formuler desobservations sur des scenarios alternatifs.

Ils soulignaient que, si la [premiere defenderesse] a vraisemblablementdepense des sommes tres importantes pour commander des etudes diverses,elle n'a jamais consulte de medecin ni de specialiste du sommeil,concluant qu'aucune des garanties procedurales, constatees par l'arretHatton Il, n'a ete respectee (etude prealable, consultation prealable,possibilite de formuler des observations, controle permanent etquinquennal), qu'au contraire [les deux premieres defenderesses] ontsystematiquement utilise la politique du fait accompli en favorisantexclusivement l'approche economique du dossier, et que les interets desdemandeurs n'avaient pas ete et continuaient à ne pas etre prissuffisamment en compte, de sorte que l'examen de l'article 8 sous sonangle procedural conduisait à un constat de violation.

Finalement, les demandeurs faisaient valoir expressement qued'innombrables problematiques n'ont jamais fait l'objet de la moindreetude, tels que les aspects environnementaux, comme les gravesconsequences psychologiques resultant d'un passage aussi brusque entre desnuits paisibles et des nuits à ce point bruyantes, qu'aucune approchecomparative du phenomene « monopiste/multipiste » n'avait jamais eterealisee, que le phenomene de l'emergence etait totalement absent despreoccupations de la [premiere defenderesse], que la problematique de lapollution atmospherique par dispersion du kerosene et du glycol, qui estun produit tres cancerigene utilise pour eviter le gel du carburant, etaittotalement oubliee, que l'analyse du cout social n'avait jamais eterealisee, que la sante des travailleurs de nuit n'avait pas non plus faitl'objet d'etude.

Au vu des elements de fait, repris aux considerations critiquees, dont ilressort qu'avant la signature de la convention du 26 fevrier 1996 par lesprmeieres et troisiemes defenderesses, à tout le moins avant le 1er mars1998, debut des vols de nuit par [cette derniere], aucune etude ne futrealisee quant aux effets des vols de nuit sur l'environnement ainsi quesur la sante des riverains et, partant, relativement aux interets desdemandeurs, l'arret se bornant à avoir egard à une etude economique,realisee par Tractebel en 1992, à trois etudes techniques, qui etaientposterieures à la convention du 26 fevrier 1996, ainsi qu'à des etudesrealisees en cours de procedure et, partant, posterieures à la decisiond'autoriser les vols de nuit, et dont il n'apparait nullement que lesriverains auraient ete entendus dans le cadre d'une enquete appropriee,l'arret n'a pu legalement exclure une violation de l'article 8 de laConvention europeenne des droits de l'homme (violation de l'article 8 dela Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertesfondamentales, signee à Rome le 4 novembre 1950 et approuvee par la loidu 13 mai 1955). A tout le moins, en omettant de preciser le moment auquelse situait le debut de l'ingerence critique, instant determinant pourl'appreciation de la presence d'etudes et d'enquetes appropriees dans lecadre du processus decisionnel, l'arret met la Cour dans l'impossibilitede controler la legalite de la decision et, partant, ne motive pasregulierement sa decision (violation de l'article 149 de la Constitution).Finalement, l'arret reste en defaut de repondre au moyen precise ci-avantquant à l'absence d'etudes et d'enquetes appropriees precedant ladecision, autorisant les vols de nuit, provoquant les nuisancesincriminees, à tout le moins quant à leur absence avant le debut desvols de nuit, et, partant, ne motive pas regulierement sa decision(violation de l'article 149 de la Constitution).

Deuxieme branche

Aux termes de l'article 8 de la Convention de sauvegarde des droits del'homme et des libertes fondamentales, toute personne a droit au respectde sa vie privee et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Ilne peut y avoir ingerence d'une autorite publique dans l'exercice de cedroit que pour autant que cette ingerence constitue une mesure qui, dansune societe democratique, est necessaire à la securite nationale, à lasurete publique, au bien-etre economique du pays, à la defense de l'ordreet à la prevention des infractions penales, à la protection de la santeou de la morale, ou à la protection des droits et libertes d'autrui.

Si l'ingerence d'une autorite publique est admise, celle-ci ne peut sefaire que dans un but legitime. En outre, l'ingerence doit se faire demaniere raisonnable et etre proportionnee au but poursuivi.

Aux termes de l'article precite, les atteintes graves à l'environnement,consistant en des nuisances sonores importantes, telles que celles quisont produites par des vols de nuit, entrent dans le champ d'applicationde l'article 8 de la Convention, de telles atteintes pouvant affecter lebien-etre d'une personne et la priver de la jouissance de son domicile, demaniere à nuire à sa vie privee et familiale, sans qu'il soit necessairede mettre en evidence un grave danger pour la sante humaine.

Partant, il y a atteinte au droit au respect de la vie privee et familialedu citoyen, garanti par l'article 8 de la Convention europeenne des droitsde l'homme, lorsqu'il n'existe pas de juste equilibre entre l'intereteconomique invoque par le gouvernement pour justifier les vols nocturnes,causant nuisance aux riverains d'un aeroport, d'une part, et le droit del'individu au respect de sa vie privee, comprenant le droit à unenvironnement sain, d'autre part, l'ingerence de l'autorite publiquen'etant admise que si celle-ci est raisonnable et proportionnee au butpoursuivi.

Si l'autorite publique dispose d'une certaine marge d'appreciation en casd'ingerence dans les droits consacres par l'article 8 de la Conventioneuropeenne des droits de l'homme, la question de la marge d'appreciationne peut etre resolue qu'à la lumiere du contexte de l'affaire examinee.

II s'ensuit que seule une approche casuistique et l'analyse de la gravitede la situation subie par les individus prejudicies peuvent permettre deverifier, utilement et en connaissance de cause, si le juste equilibreentre les interets en presence a ete ou est atteint, si l'ingerence dansles droits consacres par l'article 8 de la Convention europeenne desdroits de l'homme est proportionnee au but poursuivi par les autoritespubliques, et si les personnes concernees beneficient d'une protection deleurs droits suffisamment concrete et effective et non pas seulementtheorique ou illusoire.

Cette appreciation du juste equilibre ainsi que du caractere proportionnede l'ingerence necessitera des lors que soient prises en considerationnotamment les nuisances effectivement subies par les riverains.

En l'occurrence, les demandeurs faisaient valoir dans leurs conclusions desynthese que le rapport Plom du 17 avril 2000 constatait de maniereobjective la realite des nuisances, monsieur Plom ayant effectue pendant110 nuits, de fevrier à juin 1999, des mesures acoustiques concernant 319immeubles, et qu'il resultait de ce rapport que 137 familles (43 p.c.)subissent des nuisances qualifiees d'insupportables, 98 familles (31 p.c.)des nuisances qualifiees de graves, 62 familles (19 p.c.) des nuisancesqualifiees de moderees et 22 familles (7 p.c.) des nuisances qualifiees defaibles, de sorte que 74 p.c. des familles se trouvent dans une situationgrave ou insupportable.

Quant au prejudice subi, les demandeurs faisaient valoir que lesinnombrables pieces du dossier demontraient de maniere objective etincontestable la gravite extreme des nuisances sonores, portant atteinteau droit à un repos nocturne paisible, le bruit nocturne des avionsentrainant une gene sonore, consistant en des difficultesd'endormissement, la perturbation du sommeil, les modifications de lastructure du sommeil, fatigue, impossibilite de dormir la fenetre ouverte,des sentiments de malaise lie à un cadre de vie mediocre, la crainte d'unaccident, des troubles psychologiques lies au constat qu'aucuneamelioration future n'est possible, la desolation liee à la perte devaleur immobiliere, stress, hypertension et effets cardiovasculaires, destroubles hormonaux, la deterioration de la memorisation, des reactionsvegetatives, la consommation de medicaments et des consultations medicalesou psychiatriques, et etant un facteur de risque pour la sante desenfants.

Or, si l'arret attaque se refere à diverses etudes, à caractere plus oumoins general, il ne ressort nullement de ces constatations qu'il a egardaux nuisances effectivement subies par les demandeurs depuis le 1er mars1998, debut des vols nocturnes, jusqu'à ce jour, aux problemes de sommeilqu'ils endurent depuis le 1er mars 1998, ou encore à l'atteinte à lasante qui en resulte, notamment en raison de l'aeroport monopiste, de latrajectoire unique sur piste unique et de la concentration extreme desvols sur les plages d'horaires nocturnes tres limitees en debut et en finde nuit.

A aucun moment, il n'analyse la situation concrete subie par lesdemandeurs, alors qu'un rapport d'expertise judiciaire verse au dossierconstate qu'une majorite de riverains subit des nuisances sonoresqualifiees de grave et meme d'insupportables.

En s'abstenant de proceder à une approche casuistique du prejudice et desnuisances effectivement subies par les demandeurs dans le cadre specifiquede l'article 8 de la Convention europeenne des droits de l'homme, l'arretn'a pu proceder, utilement et en connaissance de cause, à l'analyse dujuste equilibre des interets en presence, exigee par l'article precite,savoir, d'une part, l'ingerence de l'autorite publique dans les droitsgarantis par l'article 8 de la Convention à des fins economiques, d'autrepart, le droit des riverains au respect de la vie privee et de la viefamiliale, dont fait partie le droit à un environnement sain, n'a puproceder, utilement et en connaissance de cause, à l'examen du dossier auregard du principe de la proportionnalite, requis par l'article 8 precite,et, partant, n'a pu decider legalement, au moins implicitement, maiscertainement, que les autorites publiques n'avaient pas depasse leur marged'appreciation dans la recherche d'un juste equilibre entre, d'une part,le droit des personnes touchees par la reglementation litigieuse à voirrespecter leur vie privee et leur domicile et, d'autre part, les interetsconcurrents d'autrui et de la societe dans son ensemble (violation del'article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et deslibertes fondamentales, signee à Rome le 4 novembre 1950 et approuvee parla loi du13 mai 1955) et n'a, des lors, pu decider legalement qu'il n'y avait pasde violation de l'article 8 de la Convention (violation de l'articleprecite). A tout le moins, en omettant de preciser si les rapports citesdans la decision, dont celui du professeur Fontaine relativement à la« relation du bruit aeroportuaire à la sante », se rapportaient à lasituation concrete des demandeurs et aux nuisances effectivement subiespar eux, l'arret met la Cour dans l'impossibilite de verifier s'il a egardaux nuisances effectivement subies par les demandeurs jour apres jourdepuis le 1er mars 1998 jusqu'au jour du prononce ainsi qu'aux effetsconcrets de ces nuisances sur leur droit au repos, leur sante ou leurcadre de vie, en d'autres mots s'il a egard à la situation concrete dedemandeurs et, partant, ne motive pas regulierement sa decision (violationde l'article 149 de la Constitution).

Troisieme branche

Il ressort des considerations developpees à la deuxieme branche, quidoivent etre considerees comme reproduites ici integralement, qu'il nepourra y avoir ingerence dans les droits reconnus par l'article 8 de laConvention europeenne des droits de l'homme que si cette ingerence estnecessaire pour poursuivre un but legitime et que si l'atteinte aux droitsest proportionnee.

Ainsi, aux termes de l'article precite, les atteintes graves àl'environnement, consistant en des nuisances sonores importantes, tellesque celles qui sont produites par des vols nocturnes, entrent dans lechamp d'application de l'article 8 de la Convention europeenne des droitsde l'homme, de telles atteintes pouvant affecter le bien-etre d'unepersonne et la priver de la jouissance de son domicile de maniere à nuireà sa vie privee et familiale, sans qu'il soit necessaire de mettre enevidence un grave danger pour la sante humaine.

Il y aura notamment atteinte au droit au respect de la vie privee etfamiliale, garanti par l'article 8 de ladite convention, lorsqu'iln'existe pas un juste equilibre entre l'interet economique invoque parl'autorite publique pour justifier les vols nocturnes, causant nuisanceaux riverains d'un aeroport, d'une part, et le droit de l'individu aurespect de sa vie privee, comprenant le droit à un environnement sain,d'autre part.

En outre, l'ingerence de l'autorite publique ne sera admissible quemoyennant des mesures concretes et effectives pour endiguer ses effetsnegatifs, la Convention ayant pour but de proteger des droits, non pastheoriques ou illusoires, mais concrets et effectifs. Partant, l'autoritepublique devra agir de fac,on concrete pour diminuer les nuisancesgenerees par les mesures qui peuvent etre qualifiees d'ingerences, commele reconnaissait par ailleurs la [premiere defenderesse] elle-meme devantla cour d'appel dans ses dernieres conclusions.

En d'autres termes, il ne suffira pas d'envisager ou de prevoir certainesmesures, destinees à limiter les effets nuisibles d'une ingerence, pourechapper à la critique d'avoir viole le droit au respect de la vie priveeet familiale. Encore faudra-t-il que la mise en oeuvre de ces mesures soitconcomitante avec l'ingerence et ses effets negatifs. Tant que ces mesuresn'auront pas ete concretisees, l'individu pourra invoquer la protection del'article 8 de la Convention europeenne des droits de l'hommes.

Partant, si les mesures prises par l'autorite publique afin d'amoindrirles nuisances constituent un element dans l'appreciation du justeequilibre des interets en cause ainsi que du caractere proportionnel del'ingerence, c'est à condition que celles-ci aient un caractere concret,de sorte que le juge du fond ne pourra pas exclure legalement l'existenced'une atteinte au droit au respect de la vie privee et familiale et,partant, le droit à une indemnite des nuisances subies, tant que lesmesures proposees afin d'attenuer les effets nuisibles de l'ingerencen'auront pas ete concretisees.

Il s'ensuit qu'en aucun cas l'autorite publique ne peut se contenterd'annoncer des mesures, tendant à minimaliser les atteintes au droitprecite, mais qu'il lui appartient en outre de prendre toutes les mesuresutiles et concretes pour leur mise en oeuvre effective et ce, sans qu'ilpuisse etre exige de la part des personnes concernees qu'elless'abstiennent de critiquer les mesures proposees ou qu'elles collaborentactivement à leur elaboration, ou encore sans qu'il puisse leur etrereproche d'attendre le deroulement des procedures en annulation,introduites devant les juridictions, instaurees par le legislateur, auxfins de controler la legalite des mesures prises par les autoritesadministratives. Ce reproche pourra d'autant moins leur etre adresse queces recours reveleront des irregularites.

Partant, il y aura violation du droit au respect de la vie privee etfamiliale des lors que l'ingerence est anterieure à la concretisation desmesures proposees pour en limiter les effets negatifs, ce qui est àexaminer pour chaque demandeur.

Les demandeurs faisaient ainsi valoir explicitement qu'une protection surpapier de leurs droits n'est pas suffisante, que la [premieredefenderesse] a beau publier autant d'arretes qu'elle veut au Moniteurbelge, cette action normative ne suffit pas à la dedouaner de saresponsabilite, si, dans le meme temps, aucune concretisationn'intervient, que la theorie du juste equilibre ne peut donc s'envisagerque dans le cadre d'une protection effective et concrete des droits encause, que c'est ce que le jugement dont appel avait tres bien compris,que cette approche devait etre confirmee, puisqu'elle (et elle seule)respecte les exigences de la Cour de Strasbourg, selon laquelle laConvention europeenne des droits de l'homme a pour but de proteger desdroits non pas theoriques ou illusoires mais concrets et effectifs,enoncees notamment dans les arrets Airey du 11 septembre 1979, S: 24,Linguistique belge du 23 juillet 1968, S:S: 3 et 4, Lueticke du 28novembre 1978, S: 42, et Marckx du 13 juin 1979, S: 31, et selon laquellele principe de la protection effective et concrete vaut egalement enmatiere environnementale, enoncee notamment dans l'arret Lopez Ostra du 23novembre 1994, S: 58.

En l'occurrence, l'arret reconnait explicitement que, pour apprecier lejuste equilibre, la Cour europeenne des droits de l'homme estime devoirprendre en consideration les mesures mises en place pour attenuer le bruitgenere par les aeronefs et declare appliquer lesdits principes, retenuspar la Cour europeenne.

Il ressort toutefois des considerations de l'arret attaque, d'une part,que nombre des mesures, prises par la [premiere defenderesse] et retenuespar la cour d'appel pour apprecier le caractere raisonnable de l'ingerencede [celle-ci] dans la vie privee et familiale des riverains de l'aeroportde Bierset, ont ete annulees, soit par le Conseil d'Etat, soit par la Courd'arbitrage, ou modifiees, d'autre part, que les arretes d'execution dudecret du 29 avril 2004, modifiant les premieres mesures, à la suitenotamment des differents recours au Conseil d'Etat et à la Courd'arbitrage, qui furent couronnes de succes, n'etaient pas encore prislors du prononce de l'arret, alors que le 1er mars 1998 debuterent lesvols de nuit de [la troisieme defenderesse] et, partant, les nuisances.

Ainsi, comme le relevaient les demandeurs, la premiere zone A du PEB n'aete publiee au Moniteur belge que le 24 septembre 1998, soit 218 nuitsapres le debut des vols, tandis que la premiere zone B n'a ete publiee quele 16 janvier 2001, soit avec 1053 nuits de retard, seule la delimitationde la zone A a ete republiee au Moniteur belge le 13 juin 2003, soit plusde cinq ans apres le debut des vols de nuit, que les rachats ont egalementete entrepris avec un enorme retard, puisque la premiere maison fut videele 28 juillet 1999, soit apres 515 nuits de vols nocturnes, alors que la[premiere defenderesse] avait admis d'emblee le caractere inhabitable dela zone A et que le contrat avait ete conclu 3,5 annees auparavant, et quele dossier des insonorisations connut quant à lui une formidable inertie,puisque les tests d'insonorisation furent realises avec un grand retard.

Les demandeurs faisaient en outre valoir que le present, lequel se situaità la date du depot des conclusions de synthese, soit au 16 mars 2004, estcaracterise par un defaut de concretisation des mesures d'accompagnement,par de multiples abstentions de la [premiere defenderesse] et, plus graveencore, par une serie inquietante de reculs dans les mesuresd'accompagnement.

Ils faisaient valoir qu'alors que le jugement entrepris avait fixe à sixmois le delai dans lequel il pouvait paraitre raisonnable que lesriverains obtiennent des mesures de protection effective, trois ans apresle jugement :

- la [premiere defenderesse]n'etait toujours pas en mesure de delimiterles zones A et B du PEB de maniere adequate et non-discriminatoire,

- de tres nombreux riverains de la zone A restaient dans l'impossibilitede quitter cette zone qui est pourtant inhabitable,

- les travaux d'insonorisation n'avaient toujours pas debute,

- les zones C et D n'avaient toujours pas ete delimitees,

- les nouveaux principes envisages sur le plan decretal ne sont toujourspas accompagnes d'une concretisation effective sur le terrain,

- [les deux premieres defenderesses] n'avaient toujours pris aucuneinitiative permettant d'ameliorer concretement la situation par mesures dereduction des nuisances à la source,

- ce defaut de concretisation se prolongeait à present depuis six annees.

Les demandeurs poursuivaient que, pendant tout ce temps, ils avaientcontinue à etre affectes par une concentration extreme des vols sur unetrajectoire, que pendant tout ce temps la troisieme defenderesse a pucontinuer et developper son activite polluante en toute liberte, et que cedesequilibre manifeste entre les interets environnementaux et les interetseconomiques vantes de part adverse se perpetuait et traduisait un dommagepermanent des demandeurs.

Ils faisaient valoir ensuite que six ans apres le debut des vols de nuit,le dossier presentait de multiples comportements d'abstention de la Regionwallonne sur le plan reglementaire, savoir que:

- le decret wallon du ler avril 1999 impose au gouvernement de delimiterles zones du PEB, alors qu'à ce jour, savoir le 16 mars 2004, la zone Best inexistante et les zones C et D n'avaient jamais ete delimitees (cinqannees d'abstention),

- le decret du 25 octobre 2001 a instaure le principe d'equite entre leszones du PEB, alors qu'à ce jour les campagnes de mesures pour rendreoperationnel ce principe d'equite n'avaient toujours pas ete entamees,

- par son arret du 30 avril 2003, la Cour d'arbitrage a annule lesdispositions decretales relatives à la zone B en constatant une situationdiscriminatoire entre les riverains de la zone A et ceux de la zone B,situation à laquelle il n'etait toujours pas remedie une annee plus tard.

Autrement dit, les demandeurs soutenaient qu'au moins jusqu'au 16 mars2004, date du depot des conclusions de synthese, la [premieredefenderesse] avait porte atteinte à leur droit au respect de la vieprivee et familiale, leur causant un dommage reel.

Finalement, les demandeurs concluaient qu'un desequilibre avait ete creedans le passe à leur detriment par la [premiere defenderesse] en nes'assurant pas d'une concomitance entre les atteintes qu'allait engendrersa politique de developpement de l'aeroport et l'application desdispositions destinees à en reduire les effets nefastes sur des milliersde personnes et poursuivaient que cette exigence de concomitance s'imposecomme corollaire du principe de protection effective degage par lajurisprudence de la Cour de Strasbourg, que seules des mesuresconcomitantes permettant de proteger efficacement les riverains, des ledebut des vols de nuit, auraient permis une protection utile, effective etconcrete de leurs droits, mais que trois annees apres le jugement dontappel et six annees apres le debut des vols de nuit, ce desequilibrepersistait, le defaut de concomitance se doublant d'un defaut deconcretisation.

L'arret, qui constate à plusieurs endroits qu'un certain nombre desarretes d'execution pris par la [premiere defenderesse] relatifs auxmesures destinees à endiguer les problemes de nuisance ont ete annules,que d'autres mesures ont ete reprises ou modifiees et que, meme, certainesmesures concretes ne sont toujours pas perceptibles sur le terrain, queles mesures concretes relatives aux insonorisations n'etaient pas pretesen concordance avec le debut des vols de la [troisieme defenderesse], quelesdites mesures d'insonorisation ne concernaient, en outre, à l'origine,pas la zone la plus exposee du PEB, pour laquelle seules des mesures derachat etaient envisagees, que la premiere procedure specifique prevuepour les rachats a ete attaquee immediatement devant le Conseil d'Etat etannulee, qu'il y a eu des tatonnements quant aux delimitationscartographiques precises des quatre zones, ce qui impliquait que, lesmesures etant differentes selon la zone concernee, les riverains concernesrestaient dans le noir quant à la mesure qui leur etait applicable,elements dont il ressort, non seulement que les mesures envisagees ouproposees etaient posterieures au debut des vols de nuit, mais aussi queces mesures ou certaines d'entre elles n'ont toujours pas ete mises àexecution à l'heure actuelle et, partant, que l'obligation d'uneprotection effective et concrete n'a pas ete respectee par l'autoritepublique, n'a pu decider legalement, au vu de ces elements, se rapportantaux mesures prises afin de limiter la nuisance, au moins implicitement,que le juste equilibre n'etait pas rompu et, partant, qu'il n'y avait paslieu de retenir une violation de l'article 8 de la Convention europeennedes droits de l'homme (violation de l'article 8 de la Convention desauvegarde des droits de l'homme et des liber-tes fondamentales, signee àRome le 4 novembre 1950 et approuvee par la loi du 13 mai 1955). En outre,l'arret reste en defaut de repondre au moyen invoque ci-dessus, developpedans les conclusions de synthese des demandeurs, relatif à l'absence deconcretisation des mesures et des consequences et, partant, ne motive pasregulierement sa decision (violation de l'article 149 de la Constitution).A tout le moins, l'arret n'a pu exclure legalement, au vu de sesconstatations, dont il ressort notamment que les mesures proposees etaientloin d'etre (toutes) concretisees à l'heure de la prononciation del'arret, qu'il n'y avait eu, à aucun moment, dans les annees precedant laprononciation, violation du droit au respect de la vie privee etfamiliale, comprenant le droit à un environnement sain (violation del'article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et deslibertes fondamentales, signee à Rome le 4 novembre 1950 et approuvee parla loi du 13 mai 1955) et n'a pu davantage exclure legalement l'existenced'une violation de l'article 8 de la Convention europeenne des droits del'homme à l'egard de tous les demandeurs, consideres individuellement,sans constater que les mesures proposees par la [premiere defenderesse]avaient ete concretisees à leur egard (violation de l'article 8 de laConvention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertesfondamentales, signee à Rome le 4 novembre 1950 et approuvee par la loidu 13 mai 1955). Partant, l'arret n'a pu rejeter legalement les demandesen dommages et interets, introduites initialement par les demandeurs parexploit du 7 juin 1999 et tendant à la reparation de leur prejudice danstoutes ses composantes, le prejudice etant physique, psychologique,immobilier et financier, et se rapportant aussi bien au dommage existantlors de l'introduction de la demande qu'à celui ne par apres (violationde l'article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et deslibertes fondamentales, signee à Rome le 4 novembre 1950 et aprouvee parla loi du 13 mai 1955).

Cinquieme moyen

Dispositions legales violees

- article 1er du Premier protocole additionnel du 20 mars 1952 à laConvention europeenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertesfondamentales, signee à Rome le 4 novembre 1950 et approuvee par la loidu13 mai 1955 ;

- articles 16, 142, 144, 145 et 149 de la Constitution ;

- article 1er, avant sa modification par la loi speciale du 9 mars 2003,1er, en sa version actuelle, et 2 de la loi speciale du 6 janvier 1989 surla Cour d'arbitrage ;

- article 14 (avant sa modification par la loi du 25 mai 1999) et 14 (danssa version actuelle) des lois coordonnees du 12 janvier 1973 sur leConseil d'Etat ;

- articles 17 et 18 du Code judiciaire ;

- articles 1382 et 1383 du Code civil.

Decisions et motifs critiques

L'arret rec,oit les appels principaux et les appels incidents desriverains tant en ce qui concerne les trois premiere defenderesse qu'en cequi concerne la sixieme defenderesse, confirme le jugement entrepris en cequi concerne la jonction des causes et au surplus dit recevables lesdemandes des riverains, actuellement formees contre [ces defenderesses],mais les dit non fondees, dit l'arret commun [aux quatrieme et cinquiemedefendeurs] et condamne les riverains aux depens des deux instances,rejetant entre autres la violation invoquee de l'article 1er du Premierprotocole additionnel du 20 mars 1952 à la Convention de sauvegarde desdroits de l'homme et des libertes fondamentales, par ses motifs reputesici integralement reproduits, dont notamment les motifs suivants :

« 3. L'article 1er du Premier protocole additionnel

Qu'une grande partie de l'analyse qui vient d'etre emise quant àl'article 8 susvise est aussi applicable pour l'article 1er en cause ;

Que, par ailleurs, pour rappel, la violation doit s'apprecier en fonctiondes mesures prises par la [premiere defenderesse] pour la gestion desnuisances ;

Qu'ainsi, il y a lieu de souligner, quant au respect du droit depropriete, l'existence des mesures specifiques de rachat etd'insonorisation prevues par [cette defenderesse] ;

Qu'il y a lieu de s'en referer à tout ce qui a ete mentionneanterieurement dans l'arret quant aux principes et quant aux details deces mesures ;

Que, pour les cas qui peuvent etre consideres comme des violations dudroit de propriete en raison du caractere particulierement eleve desnuisances, il leur est loisible d'obtenir le rachat de leur immeuble ;

Que, quant aux procedures concretes de rachat, ces mesures n'ont pas etejugees fautives et la preuve n'est pas rapportee que les sommes octroyeespar la [premiere defenderesse] dans ce cadre seraient insuffisantes pourconsiderer qu'une juste indemnisation n'a pas ete donnee aux riverainsconcernes ;

Que, quant aux mesures d'insonorisation, il n'est pas prouve que cesmesures ne seraient pas satisfaisantes ou qu'il y aurait une atteintesuffisamment grave au droit de propriete des riverains concernes ;

Que, par ailleurs, les references à d'autre reglementations reprises àce stade à la page 577 des conclusions de synthese de Me Missonn'apportent rien de plus à l'analyse ;

Que, comme il a dejà ete dit ci-dessus, l'article 16 de la Constitutionreprend un principe general qui n'est pas different de celui de l'article1er du Premier protocole ici en cause et l'article 79, S: 1er, de la loispeciale du 8 aout 1980 n'est qu'une disposition qui autorise lesgouvernements regionaux à recourir à des expropriations ;

Que l'article 544 du Code civil qui definit l'etendue du droit depropriete est, certes, un article qui est à la base de la theorie destroubles de voisinage qui sera etudie ci-dessous mais n'est pas unedisposition qui permettrait, pour le cas d'espece, de poser une autreconstatation specifique et separee de celle faite dans le cadre del'article 1er du Premier protocole ;

[...] Que, sur ce point, à defaut de faute prealable retenue de la[premiere defenderesse], les circonstances susvisees ne peuvent etreappreciees sans tenir compte de l'attitude des riverains ;

Que, sur ce point precis, on peut relever les elements suivants :

- bien avant meme le debut des vols de nuit, certains riverains avaientdejà assigne en refere, devant les juridictions bruxelloises, la Regionwallonne, l'Etat belge et la societe SAB pour, notamment, obtenirl'interdiction de ces vols (assignations d'octobre 1996 qui ont finalementabouti à un arret de la cour d'appel de Bruxelles du 15 janvier 1998) ;

- une nouvelle demande d'interdiction de ces vols a ete faite devant lejuge des referes de Liege, parallelement à des demandes en matiered'expertise ;

- le juge des referes de Namur a ete saisi d'une demande similaired'interdiction des vols ;

- la quasi-totalite des mesures prises par la [premiere defenderesse] ontete ou sont attaquees devant le Conseil d'Etat ou la Cour d'arbitrageselon le type de la norme en cause ;

- selon les chiffres non contestes mentionnes dans un rapportenvironnemental de SERINFO-Liege, en avril 2003, soit cinq ans apres ledebut des vols de la societe TNT, on peut relever que, pour la zone A,soit, pour la procedure de rachat, 557 dossiers pour les maisons sur 1412possibles n'etaient pas encore rentres dans la procedure, 128 des maisonsacquises etaient toujours occupees par l'ancien vendeur ou locataire, etque, pour les insonorisations de la zone B, sur 1960 dossiers possibles,1149 n'etaient pas rentres dans la procedure et 399 n'avaient pas encoreretourne le formulaire d'aides delivre ;

Que, certes, cette attitude des riverains ou de certains d'entre eux nepeut leur etre reprochee à faute ;

Que, neanmoins, cette attitude negative de blocage ou d'oppositionsystematique à toutes les mesures prises par la [premiere defenderesse]peut avoir pour effet de considerer que le fait que les mesures ont etemodifiees et meme que certaines n'ont toujours pas rec,u d'application surle terrain n'est pas constitutif de faute [de cette defenderesse] quis'est trouvee acculee dans de multiples procedures dont la logique globaleetait loin d'etre evidente à suivre ;

Qu'on soulignera encore, sur ce dernier point, qu'alors que certainsriverains avaient obtenu la suspension de toutes les procedures de rachaten cours sous peine d'une astreinte tres importante à charge de la[premiere defenderesse], d'autres riverains assignaient cette meme[defenderesse] pour obtenir sa condamnation, sous astreinte, à leur payerle prix convenu dans le cadre de cette procedure de rachat ;

Que cette attitude de blocage peut d'ailleurs etre couplee à l'attitudeattentiste, relevee par le rapport susvise de SERINFO, de beaucoup deriverains, attitude qui peut etre reprise comme un element objectifd'appreciation meme si elle n'est nullement reprochable en soi et peuts'expliquer par des considerations humaines, affectives et sentimentales ;

Que cette attitude attentiste etait d'autant plus problematique que lesmesures de gestion de la nuisance sonore impliquaient la necessite d'unecooperation des riverains quant aux mesures d'insonorisation à faire dansleurs habitations et quant à la procedure de rachat qui repose sur unmode volontaire ».

Griefs

Aux termes de l'article 1er du Premier protocole additionnel du 20 mars1952 à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertesfondamentales, toute personne physique ou morale a droit au respect de sesbiens. Nul ne peut etre prive de sa propriete que pour cause d'utilitepublique et dans les conditions prevues par la loi et les principesgeneraux de droit international.

L'article precite dispose toutefois, dans le deuxieme alinea, que lesdispositions precedentes ne portent pas atteinte au droit que possedentles Etats de mettre en vigueur les lois qu'ils jugent necessaires pourreglementer l'usage des biens conformement à l'interet general ou pourassurer le paiement des impots ou d'autres contributions ou des amendes.

Toutefois, de telles mesures privatives ne peuvent imposer à l'individuune charge anormalement lourde, la mesure privative ou limitative de lapropriete entrainant un droit à obtenir une indemnite equitable.

Cette indemnite devra en outre etre effective ; autrement dit, il nesuffit pas que l'autorite en prevoie la possibilite dans un avenir plus oumoins proche.

L'article 16 de la Constitution dispose quant à lui que nul ne peut etreprive de sa propriete que pour cause d'utilite publique, dans les cas etde la maniere etablis par la loi, et moyennant une juste et prealableindemnite.

Une nuisance sonore, excedant les limites de ce qui peut etre impose à unriverain dans l'interet general, equivaut incontestablement à uneprivation de la propriete.

Il s'ensuit que toute personne souffrant une telle mesure privative oulimitative de sa propriete, a droit à une indemnite equitable, sans quele juge puisse lui reprocher son attitude expectative, etant donnenotamment les procedures en annulation qui auraient ete introduites pard'autres ou par lui-meme devant le Conseil d'Etat ou devant la Courd'Arbitrage, les articles 1er du Premier protocole additionnel du 20 mars1952 à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertesfondamentales et 16 de la Constitution ne faisant nullement dependre ledroit à une indemnite de l'adhesion immediate et sans reserve aux mesuresque l'autorite publique propose en contrepartie des mesures privatives oulimitatives de la propriete de l'individu, attitude qui reviendrait àrestreindre le droit de tout individu de soumettre les contestationsrelatives à ses droits civils et politiques aux cours et tribunauxinstaures à cette fin, sans que l'exercice de ces recours puissent etresanctionnes, à l'exclusion de l'hypothese de l'abus de procedure.

En l'occurrence, l'arret retient explicitement une telle privation dans lechef de certains riverains, non identifies par la cour d'appel, et disposeque, pour les cas qui peuvent etre consideres comme des violations dudroit de propriete en raison du caractere particulierement eleve desnuisances, il leur est loisible d'obtenir le rachat de leur immeuble.

Toutefois, s'il ressort de ces considerations que ces riverains ont ledroit au rachat de leur immeuble, cette mesure ne vaut que pour le futuret, partant, oblige les riverains concernes à subir entre-temps lesnuisances, equivalant à une mesure privative de propriete, sanscontrepartie tant qu'il n'aura pas ete procede à ce rachat, l'arretconstatant d'ailleurs explicitement que la premiere procedure a eteannulee par le Conseil d'Etat.

L'arret, qui releve l'existence de mesures specifiques de rachat etd'insonorisation prevues par la [premiere defenderesse] et constate que,pour les cas qui peuvent etre consideres comme des violations du droit depropriete en raison du caractere particulierement eleve des nuisances,sans autre precision quant à l'identite des personnes concernees, il leurest loisible d'obtenir le rachat de leur immeuble, perd de vue que cesmesures ne constitueront une indemnite pour les nuisances subies qu'àpartir de la mise à execution de celles-ci, ne compensant nullement lesnuisances dejà subies et, partant, n'a pu decider legalement ne pasdevoir retenir une violation de l'article 1er du Premier protocoleadditionnel du 20 mars 1952 à la Convention de sauvegarde des droits del'homme et des libertes fondamentales (violation dudit article 1er duPremier protocole additionnel du 20 mars 1952 à la Convention europeennede sauvegarde des droits de l'homme et des libertes fondamentales). Enoutre, l'arret n'a pu considerer legalement devoir tenir compte del'attitude expectative que certains demandeurs auraient prise quant auxmesures elaborees au fur et à mesure par la [premiere defenderesse],etant donne notamment les procedures en annulation introduites devant leConseil d'Etat ou devant la Cour d'arbitrage, dont certains riverains, nonidentifies par la cour d'appel, ont pris l'initiative, procedures en outrecouronnees de succes, pour leur refuser toute indemnite du chef desmesures privatives ou limitatives, ajoutant ainsi aux articles 1er duPremier protocole et 16 de la Constitution une condition que ceux-ci necontiennent pas, savoir adherer immediatement et sans reserve aux mesuresque l'autorite publique propose en contrepartie des mesures privatives oulimitatives de la propriete de l'individu (violation des articles 1er duPremier protocole et 16 de la Constitution), restreignant de la sorte demaniere illegale le droit de tout individu de soumettre les contestationsrelatives à ses droits civils et politiques aux cours et tribunauxinstaures à cette fin, sans que l'exercice de ces recours puissent etresanctionnes, à l'exclusion de l'hypothese de l'abus de procedure, nonretenue par l'arret (violation des articles 142, 144, 145 de laConstitution, 1er, avant sa modification par la loi speciale du 9 mars2003, 1er, en sa version actuelle, et 2 de la loi speciale du 6 janvier1989 sur la Cour d'arbitrage, 14, d'application avant sa modification parloi du 25 mai 1999, 14, en sa version actuelle, des lois coordonnees du 12janvier 1973 sur le Conseil d'Etat, 17 et 18 du Code judiciaire). A toutle moins, l'arret n'a pu decider legalement que la possibilite de mettreà execution certaines mesures suffit à justifier la restrictionprivative sans constater que la circonstance que ces mesures ne soient pasencore mises en oeuvre est uniquement due aux comportement fautif desdemandeurs en question (violation des articles 1er du Premier protocole,1382 et 1383 du Code civil). En outre, l'arret viole de la sorte l'article16 de la Constitution qui prevoit une juste et prealable indemnite(violation de l'article 16 de la Constitution). A tout le moins, enomettant de preciser l'identite des personnes dont le comportement auraitbloque la mise en oeuvre des mesures envisagees, l'arret met la Cour dansl'impossibilite de controler la legalite de la decision, savoir deverifier si, au vu de ce comportement, l'arret exclut legalement uneviolation de l'article 1er du Premier protocole et, partant, ne motive pasregulierement sa decision (violation de l'article 149 de la Constitution).

Sixieme moyen

Dispositiosn legales violees

- articles 16 et 149 de la Constitution ;

- article 544 du Code civil ;

- articles 6 et 1138, 3DEG, du Code judiciaire.

Decisions et motifs critiques

L'arret rec,oit les appels principaux et les appels incidents desriverains tant en ce qui concerne les trois premieres defenderesses qu'ence qui concerne la sixieme defenderesse, confirme le jugement entrepris ence qui concerne la jonction des causes et au surplus dit recevables lesdemandes des riverains, actuellement formees contre [ces defenderesses],mais les dit non fondees, dit l'arret commun [aux quatrieme et cinquiemedefendeurs] et condamne les riverains aux depens des deux instances,rejetant entre autres l'action en tant qu'elle est fondee sur la theoriedes troubles de voisinages, par ses motifs reputes ici integralementreproduits, dont notamment les motifs suivants :

« b) La theorie des troubles de voisinage

Qu'à ce stade encore, la cour [d'appel] evitera de rentrer dans descontroverses doctrinales dont l'interet immediat ne serait pas utile à lasolution du litige ;

Que, d'ailleurs, l'appreciation en fait n'est pas fondamentalementdifferente suivant l'explication et le fondement doctrinal donnes à cettetheorie, qu'elle concerne uniquement des particuliers ou qu'elle concernedes personnes privees dans leur rapport avec une autorite publique ;

Qu'au surplus, il n'est evidemment pas question de nier l'importance desnuisances sonores causees par l'activite realisee sur le site de Biersetmais de voir si la theorie invoquee peut etre appliquee au cas d'espece ;

Que la theorie des troubles de voisinage repose sur la notion d'unerupture de l'equilibre, soit entre des fonds voisins, soit vis-à-vis descharges publiques ;

Qu'il y a donc lieu de s'interroger sur l'equilibre et sur la rupture del'equilibre ;

Que, quant aux circonstances de fait pour definir l'equilibre, il y a lieude constater la caracteristique de la cause qui est la presence d'unaeroport qui est particulierement ancien puisqu'il a ete construit durantles annees 1914-1918 ;

Que les riverains ne contestent evidemment pas cette presenceparticulierement ancienne de l'aeroport mais font etat du fait que cetaeroport n'avait qu'une activite reduite au debut des annees 1990 ;

Que ce fait est exact mais ne demontre pas que c'est precisement cesannees qui doivent etre prises en compte pour apprecier l'equilibre ;

Qu'en effet, avant cette periode, l'aeroport avait connu une activitemilitaire relativement intensive, notamment avec des avions de chasse,dont il n'est pas conteste qu'ils sont particulierement bruyants ;

Que, dans ce cadre, les premiers juges ont d'ailleurs correctement releveque 'le fait que l'activite ait d'abord ete exclusivement militaire nepermet pas, en soi, de conclure que le developpement ulterieur d'uneactivite civile a rompu l'equilibre des charges normales du voisinage ;[...]que le fait que l'activite militaire ait decru depuis un certaintemps, compte tenu du contexte militaire international, n'est pasrelevant ; qu'une recrudescence de cette activite reste, au demeurant,autant envisageable qu'un accroissement des mouvements civils' ;

Qu'on peut aussi poser le probleme d'une maniere beaucoup plus generale,savoir : quel est le trouble normal auquel on peut s'attendre à laproximite d'un aeroport ?

Que ce probleme a dejà ete pose recemment pour l'aeroport de Zaventem ;

Que la cour d'appel de Bruxelles, dans un arret du 24 janvier 1997, arejete l'application de cette theorie ;

Que, certes, l'aeroport de Zaventem est l'aeroport national et est situeà la peripherie de la ville de Bruxelles ;

Que, neanmoins, sa situation est relativement semblable à celle del'aeroport de Bierset dans la mesure ou ce dernier est situe à proximited'une ville importante, la ville de Liege, qui est le pole economique detoute une region, et ou les deux aeroports ont une caracteristiqueidentique, savoir qu'ils accueillent chacun les activites d'un des quatregrands integrateurs de fret express ;

Que, pour une analyse comparative concernant d'autre aeroports, il peutetre renvoye aux tableaux susmentionnes de la [deuxieme defenderesse] ;

Qu'au surplus, quant à l'appreciation de la rupture et quant au caractereexcessif du trouble, il faut s'interroger sur la situation precise quidoit etre prise en compte ;

Que, sur ce point, il y a lieu de tenir compte des mesures prises par la[premiere defenderesse] pour remedier aux nuisances sonores ;

Qu'en effet, dans la mesure ou aucune faute n'a finalement ete retenue àcharge de [cette defenderesse], on ne peut apprecier les elements utilessusvises en omettant ces mesures ;

Qu'on pourrait encore rappeler ici les chiffres importants susmentionnesde riverains qui ont, pendant des annees, neglige de rentrer dans lesprocedures prevues par la [premiere defenderesse] et qui ne pourraient,ainsi, invoquer, dans le cadre de la theorie des troubles de voisinage, untrouble dont ils n'ont pas cherche à eviter ou à diminuer les nuisancesalors que des mesures leur etaient proposees dans ce sens ;

Que c'est d'ailleurs dans une telle logique que certains riverainscontestent à nouveau, à ce stade, ces mesures et, notamment,l'efficacite des mesures d'insonorisation ;

Qu'à ce stade, il y a lieu de rappeler que, tres rapidement apres ledebut des vols, les riverains qui supportaient les nuisances les plusgraves pouvaient demander le rachat de leur immeuble et demenager ;

Que les hypotheses de nuisance dans lesquelles le rachat est possible ontete etendues, notamment, dans le nouveau decret vote le 28 avril 2004 ;

Que, sur ce point precis en rapport avec les troubles de voisinage, la[premiere defenderesse] a ecrit dans ses conclusions complementaires, sansque les autres parties contestent ensuite formellement ces affirmations,que 'le decret du 28 avril 2004 ameliore la situation des riverainspuisqu'il vise à mettre les riverains situes en zone B sur le meme piedque ceux situes en zone A en leur permettant de vendre leur immeuble à laRegion wallonne. Les riverains situes en zone B beneficient ainsi duregime juridique prevu en cas de nuisances insupportables alors qu'auxtermes du rapport Plom, notamment, bon nombre d'entre eux ne subissent quedes nuisances qualifiees de graves - et donc non excessives aux alentoursimmediats d'un aeroport. Les riverains vont donc ainsi recevoir une« juste et adequate compensation » du trouble effectivement subi, quiexcede, pour tous les riverains, un trouble normal de voisinage' ;

Que, quant aux autres riverains qui subissent des nuisances nettementmoindres, il n'est pas suffisamment prouve que les travauxd'insonorisation dont ils peuvent beneficier ne sont pas de nature àsupprimer le trouble subi, à reconnaitre, quod non, que ce trouble seraitexcessif ;

Qu'il y a lieu, en consequence, de retenir qu'outre la difficultespecifique de definir, à proximite d'un aeroport, un equilibre devoisinage ou de charges publiques, les riverains qui pourraient invoquerune nuisance non admissible dans le cadre de la theorie en cause peuventbeneficier de mesures prevues par la [premiere defenderesse] et qui sontsusceptibles, soit d'attenuer le trouble de telle maniere qu'il ne soitplus excessif, soit, par le rachat ou le payement d'indemnites dedemenagement, de supprimer le trouble en quittant les zones de nuisance ;

[...] Que, sur ce point, à defaut de faute prealable retenue de la[premiere defenderesse], les circonstances susvisees ne peuvent etreappreciees sans tenir compte de l'attitude des riverains ;

Que, sur ce point precis, on peut relever les elements suivants:

- bien avant meme le debut des vols de nuit, certains riverains avaientdejà assigne en refere, devant les juridictions bruxelloises, la Regionwallonne, l'Etat belge et la societe SAB pour, notamment, obtenirl'interdiction de ces vols ;

- une nouvelle demande d'interdiction de ces vols a ete postulee devant lejuge des referes de Liege, parallelement à des demandes en matiered'expertise ;

- le juge des referes de Namur a ete saisi d'une demande similaired'interdiction des vols ;

- la quasi-totalite des mesures prises par la Region wallonne ont ete ousont attaquees devant le Conseil d'Etat ou la Cour d'arbitrage, selon letype de la norme en cause ;

- selon les chiffres non contestes mentionnes dans un rapportenvironnemental de SERINFO-Liege, en avril 2003, soit cinq ans apres ledebut des vols de la societe TNT, on peut relever que, pour la zone A,soit, pour la procedure de rachat, 557 dossiers pour les maisons sur 1412possibles n'etaient pas encore rentres dans la procedure, 128 des maisonsacquises etaient toujours occupees par l'ancien vendeur ou locataire, etque, pour les insonorisations de la zone B, sur 1960 dossiers possibles,1149 n'etaient pas rentres dans la procedure et 399 n'avaient pas encoreretourne le formulaire d'aides delivre ;

Que, certes, cette attitude des riverains ou de certains d'entre eux nepeut leur etre reprochee à faute ;

Que, neanmoins, cette attitude negative de blocage ou d'oppositionsystematique à toutes les mesures prises par la [premiere defenderesse]peut avoir pour effet de considerer que le fait que les mesures ont etemodifiees et meme que certaines n'ont toujours pas rec,u d'application surle terrain n'est pas constitutif de faute de [cette defenderesse] quis'est trouvee acculee dans de multiples procedures dont la logique globaleetait loin d'etre evidente à suivre ;

Qu'on soulignera encore, sur ce dernier point, qu'alors que certainsriverains avaient obtenu la suspension de toutes les procedures de rachaten cours sous peine d'une astreinte tres importante à charge de la[premiere defenderesse], d'autres riverains assignaient cette meme[defenderesse] pour obtenir sa condamnation, sous astreinte, à leur payerle prix convenu dans le cadre de cette procedure de rachat ;

Que cette attitude de blocage peut d'ailleurs etre couplee à l'attitudeattentiste, relevee par le rapport susvise de SERINFO, de beaucoup deriverains, attitude qui peut etre reprise comme un element objectifd'appreciation meme si elle n'est nullement reprochable en soi et peuts'expliquer par des considerations humaines, affectives et sentimentales ;

Que cette attitude attentiste etait d'autant plus problematique que lesmesures de gestion de la nuisance sonore impliquaient la necessite d'unecooperation des riverains quant aux mesures d'insonorisation à faire dansleurs habitations et quant à la procedure de rachat qui repose sur unmode volontaire ».

Griefs

Le proprietaire d'un immeuble qui, sans commettre un fait fautif, romptl'equilibre etabli entre les proprietes voisines et impose au proprietairevoisin un trouble excedant la mesure des inconvenients ordinaires duvoisinage lui doit une juste et adequate compensation, retablissantl'equilibre rompu, une compensation ne pouvant etre accordee que si lamesure des inconvenients normaux du voisinage est depassee.

Cette obligation vaut tout aussi bien pour l'autorite publique, laquellene peut, notamment en vertu du principe consacre par l'article 16 de laConstitution, sans compensation, imposer des charges qui excedent cellesqu'un particulier doit supporter dans l'interet collectif.

Le caractere excessif des troubles subis devant s'apprecier dans lesrelations de voisinage entre celui qui cause le trouble et celui qui lesubit, il s'ensuit que, lorsque l'auteur du trouble est l'autoritepublique, le juge devra examiner la proportionnalite entre les charges etl'interet de la collectivite.

Si chacun a l'obligation de supporter, dans l'interet general, desinconvenients qu'un particulier ne pourrait imposer dans son interetpersonnel, le pouvoir public ne peut toutefois, sans compensation,depasser la mesure des inconvenients que chacun doit supporter dansl'interet collectif.

Si, en l'occurrence, l'arret constate qu'il y a lieu de s'interroger surl'equilibre et sur la rupture de l'equilibre, constatant la presence d'unaeroport particulierement ancien puisqu'il a ete construit durant lesannees 1914-1918, qui a connu avant les annees 1990 une activite militairerelativement intense, notamment avec des avions de chasse, qu'on peutaussi se poser la question d'une maniere beaucoup plus generale, savoirquel est le trouble normal auquel on peut s'attendre à la proximite d'unaeroport, que la situation de l'aeroport de Zaventem est relativementsemblable à celle de l'aeroport de Bierset, dans la mesure ou ce dernierest situe à proximite d'une ville importante, qui est le pole economiquede toute une region, et ou les deux aeroports ont une caracteristiqueidentique, savoir qu'ils accueillent chacun les activites d'un des quatregrands integrateurs de fret express, qu'au surplus, quant àl'appreciation de la rupture et quant au caractere excessif du trouble, ilfaut s'interroger sur la situation precise qui doit etre prise en compte,et notamment des mesures prises par la [premiere defenderesse] pourremedier aux nuisances sonores, l'arret, d'une part, omet de preciser lamesure des inconvenients que le riverain d'un aeroport doit subir dansl'interet collectif, d'autre part, neglige le fait que, tant que cesmesures n'ont pas ete mises à execution, celles-ci ne peuvent justifierl'exclusion de tout droit à compensation, le retard mis à l'execution deces mesures ne pouvant etre mis en aucun cas à charge du particulier,sauf l'hypothese de l'abus de droit.

Eu egard aux constatations de fait, dont il ressort notamment que lesmesures de rachat et d'insonorisation appartenaient au domaine despossibilites, n'ayant pas encore ete mises en oeuvre à l'egard desparties demanderesses, que ces mesures ont ete annulees ou modifiees àplusieurs reprises, que les arretes d'execution du decret du 29 avril2004, elargissant la mesure de rachat, devaient encore etre pris, l'arretn'a pu decider legalement qu'il n'y avait pas lieu d'accueillir lademande, les mesures proposees, qui etaient susceptibles, soit d'attenuerle trouble de telle maniere qu'il ne soit plus excessif, soit, par lerachat ou le paiement d'indemnite de demenagement, de supprimer le troubleen quittant les zones de nuisance, ne pouvant mettre fin au troubleexcessif qu'à partir de leur mise en oeuvre effective (violation desarticles 544 du Code civil et 16 de la Constitution). En outre, enomettant de preciser si le trouble emanant de l'aeroport de Bierset etconsistant dans les nuisances sonores, provoquees par les vols de nuit,instaures à partir de 1996 et 1998, depassait ou non les charges que lesriverains d'un aeroport doivent subir dans l'interet collectif, l'arretomet de se prononcer sur un point de la demande (violation des articles 6et 1138, 3DEG, du Code judiciaire) et n'a pu decider legalement, dans cecontexte, devoir rejeter la demande fondee sur la theorie du trouble devoisinage (violation des articles 544 du Code civil et 16 de laConstitution). A tout le moins, l'arret, qui laisse planer un doute quantà savoir si la presence de l'aeroport de Bierset etait cause d'un troubleexcessif dans le chef de ses riverains ou quant à l'identite desriverains dans le chef desquels l'aeroport causait effectivement untrouble excessif, rendant ainsi impossible le controle de la legalite, nemotive pas regulierement sa decision (violation de l'article 149 de laConstitution). Finalement, il n'a pu decider legalement, à tout le moinsimplicitement, que les mesures proposees suffisaient, independamment deleur mise en execution, etant donne l'attitude des riverains, alors que,d'une part, l'obligation de mettre en oeuvre les mesures representant lacompensation du trouble repose uniquement sur l'auteur du trouble et que,d'autre part, il n'est pas constate que la mise à execution des mesuresauraient ete retardee par les demandeurs (violation des articles 544 duCode civil et 16 de la Constitution).

A l'appui du pourvoi inscrit au role general sous le numero C.05.0130.F,les demandeurs presentent six moyens dans la requete jointe au presentarret en copie certifiee conforme.

A l'appui du pourvoi inscrit au role general sous le numero C.05.0131.F,les demandeurs presentent six moyens dans la requete jointe au presentarret en copie certifiee conforme.

A l'appui du pourvoi inscrit au role general sous le numero C.05.0132.F,les demandeurs presentent six moyens dans la requete jointe au presentearret en copie certifiee conforme.

A l'appui du pourvoi inscrit au role general sous le numero C.05.0134.F,les demandeurs presentent six moyens dans la requete jointe au presentearret en copie certifiee conforme.

A l'appui du pourvoi inscrit au role general sous le numero C.05.0135.F,les demandeurs presentent six moyens dans la requete jointe au presentearret en copie certifiee conforme.

A l'appui du pourvoi inscrit au role general sous le numero C.05.0136.F,les demandeurs presentent six moyens dans la requete jointe au presentearret en copie certifiee conforme.

A l'appui du pourvoi inscrit au role general sous le numero C.05.0222.F,les demandeurs presentent six moyens dans la requete jointe au presentearret en copie certifiee conforme.

A l'appui du pourvoi inscrit au role general sous le numero C.05.0224.F,les demandeurs presentent six moyens dans la requete jointe au presentearret en copie certifiee conforme.

A l'appui du pourvoi inscrit au role general sous le numero C.05.129.F durole general, les demandeurs presentent quatre moyens dont le deuxieme, letroisieme et le quatrieme sont libelles dans les termes suivants :

Deuxieme moyen

Dispositions legales violees

- articles 33, 36 à 41, 149 et 159 de la Constitution ;

- article 10 (ex-article 5) du Traite instituant la Communaute europeennedu 25 mars 1957, approuve par la loi du 2 decembre 1957, dans sa versionconsolidee à Amsterdam le 2 octobre, approuvee par loi du 10 aout 1998 ;

- articles 1er, 2, 3 et 4 de la directive 85/337/CEE du Conseil du 25 juin1985 concernant l'evaluation des incidences de certains projets publics etprives sur l'environnement, telle qu'elle etait d'application avant samodification par la directive du 97/11/CEE du Conseil du 3 mars 1997 ;points 7 de l'annexe I et 12 de l'annexe II de la directive 85/337/CEEprecitee ;

- articles 1er, 2, 3, 4, 5, 9, 10, 12, S: 2, et 17 du decret du Conseilregional wallon du 11 septembre 1985 organisant l'evaluation desincidences sur l'environnement dans la Region wallonne, tel qu'il etaitd'application avant sa modification par le decret du 11 mars 1999 ; point7 de l'annexe I de ce decret ;

- articles 3, 4, 5, 6, 8, S: 3, 9 et 41 à 51 de l'arrete de l'executifregional wallon du 31 octobre 1991 portant execution du decret du 11septembre 1985 organisant l'evaluation des incidences sur l'environnementdans la Region wallonne, tel qu'il etait d'application avant sonabrogation par arrete du4 juillet 2002 ; point 8 de l'annexe II de cet arrete ;

- articles 1382 et 1383 du Code civil ;

- article 1138, 3DEG, du Code judiciaire ;

- principe general du droit de la separation des pouvoirs compris dansl'article 33, alinea 2, de la Constitution.

Decisions et motifs critiques

Apres avoir constate que les demandeurs sont des riverains de l'aeroportde Liege-Bierset ; qu'apres une etude economique confiee par la [premieredefenderesse] à la societe Tractebel en 1991, la [premiere defenderesse]decida d'y developper une activite de fret aerien fonctionnant 24 heuressur 24 ; que la [premiere defenderesse] et la [deuxieme defenderesse] ontconclu des conventions avec des operateurs de fret aerien, savoir la[sixieme defenderesse] à une date indeterminee et la [troisiemedefenderesse] le 26 fevrier 1996 ; qu'en mai 1996, les premiers vols denuit furent effectues par la [sixieme defenderesse] ; que la [troisiemedefenderesse] commenc,a ses vols de nuit au mois de mars 1998 ; « que lesnuisances generees par l'aeroport de Bierset sont intolerables danscertaines zones » ; que les demandeurs postulent devant la cour d'appella reparation du prejudice qu'ils subissent en raison des nuisancessonores produites par les vols de nuit ; qu'à l'appui de leur demande,les riverains ont fait valoir que la directive CEE 85/337 sur l'evaluationdes incidences et le decret wallon de transposition de cette directiven'ont pas ete respectes,

et saisi des conclusions de riverains soutenant à cet egard que laconvention precitee du 26 fevrier 1996 constitue un « projet » au sensde cette directive, aux motifs suivants : cette convention prevoyaitnotamment que la piste principale (23L/05R) de l'aeroport soit pleinementoperationnelle sur toute sa longueur et equipee d'un systemed'atterrissage, que la piste d'atterrissage parallele (23R) soit equipeeau plus tard le 1er mars 1996, que la piste 23L/05 soit elargie à 45metres et reponde aux normes suffisantes pour pouvoir manoeuvrer un Airbus300, que la piste 23ML soit equipee de deux sorties à haute vitessesupplementaires, que la tour A.T.C. soit deplacee, qu'un nouvel espace destationnement de 18 hectares se situe directement en face del'installation principale de tri de [la troisieme defenderesse], que lazone de stationnement soit etendue en direction du hangar de maintenancedes avions et reliee à la nouvelle sortie à haute vitesse, qu'une tourde controle soit erigee, qu'un centre d'approvisionnement en carburant,d'une capacite minimale d'un million de litres, soit maintenu, avec lapossibilite pour [la troisieme defenderesse] d'en exiger l'agrandissement,que l'aeroport soit ouvert 24/24 heures, 365 jours par an, et qu'unesource de puissance correcte soit disponible pour les activites de [latroisieme defenderesse] (approximativement 2000 amperes) avec en renfortune reserve permettant d'assurer un approvisionnement ininterrompu enenergie, ce qui necessitait l'autorisation d'etablir deux cabineselectriques [à] haute tension de 15 Kv ; que cette convention-projetavait pour effet d'enormes nuisances sur l'environnement, puisqu'elleetait la condition sine qua non de la venue d'une compagnie qui exigeaitde pouvoir utiliser 365 jours par an, y compris la nuit, sansinterruption, des infrastructures etant encore à construire, et que, deslors, cette convention du 26 fevrier 1996, parce qu'elle prevoyait destravaux destines à modifier l'aeroport à cette fin, constituait bien unprojet vise à l'annexe II de la directive,

et saisi encore de conclusions de riverains demandant que des questionsprejudicielles soient posees à la Cour de justice des Communauteseuropeennes quant à l'application de la directive CEE 85/337 à cetteconvention-projet du 26 fevrier 1996,

l'arret attaque dit les demandes des demandeurs non fondees « en tantqu'elles demandent que la cour [d'appel] pose des questions prejudiciellesà la Cour de justice de Communautes europeennes ; en tant qu'elles visentà faire prononcer des illegalites en lien causal avec le fondementcentral de la demande principale basee sur un comportement fautif ou uneingerence non proportionnee ; en tant qu'elles reposent sur l'article 1382du Code civil, l'article 8 de la Convention europeenne des droits del'homme et l'article 1er du Protocole additionnel » et condamne lesdemandeurs aux depens des deux instances [des trois premieresdefenderesses], cet arret etant declare commun à la [quatriemedefenderesse], [au cinquieme defenderesse], ainsi qu'à la [sixiemedefenderesse].

L'arret attaque fonde sa decision sur les motifs suivants :

(1) Quant à la directive CEE 85/337 sur l'evaluation des incidences et ledecret wallon de transposition : « La directive en cause contient uneannexe I qui contient une liste de projets pour lesquels l'evaluation desincidences est obligatoire. Cette liste mentionne la construction d'unaeroport `dont la piste de decollage et d'atterrissage a une longueur de2.100 metres ou plus'. L'annexe II de la directive mentionne des projetsqui sont soumis à etude d'incidence lorsque les Etats membres`considerent que leurs caracteristiques l'exigent'. Dans cette liste,figure la `modification des projets figurant à l'annexe I', à savoirainsi, la modification de la construction d'un aeroport. Le decret du 11septembre 1985 a transpose fidelement la directive en cause, notamment, enreprenant textuellement la liste figurant dans l'annexe I de la directive.L'arrete d'execution du 31 octobre 1991 vise toujours la `construction ...d'aeroports' meme s'il etend l'application en precisant `dont la piste aune longueur de 1.200 m ou plus, y compris l'allongement des pistesexistantes au-delà de ce dernier seuil' (...). Quant aux donnees de faitpropres à l'espece, il y a lieu de relever que la piste de l'aeroport deBierset presente une longueur largement superieure à 2.100 metres,qu'elle existait bien avant l'entree en vigueur de la directive et dudecret de transposition, et qu'elle n'a pas ete allongee pour permettrel'arrivee des vols de nuits en 1996 et 1998. Compte tenu de ces elementsde fait, les riverains glosent longuement mais inutilement sur la notiond'aeroport. En effet, il est evident que tant la directive que le decretenvisagent et definissent la notion d'aeroport par rapport à la longueurde sa piste et non par rapport aux installations annexes à la piste, telsdes hangars ou meme une tour de controle. Au surplus, l'annexe I de ladirective vise la `construction' d'un aeroport et l'annexe II, qui, pourrappel, ne vise seulement que des hypotheses pour lesquelles les Etatspeuvent prevoir une etude d'incidence, parle de la modification d'unprojet vise à l'annexe I, soit la modification de la construction. Enl'espece, il n'y a eu ni construction ni modification de la constructiond'un aeroport au sens des dispositions invoquees dans la mesure ou lapiste de l'aeroport n'a pas ete modifiee dans sa longueur. Il resulte decette analyse qu'il y a lieu de rejeter les arguments de Me Lebrun,notamment, quant à une definition de l'aeroport tiree d'autresdispositions legales ou reglementaires [...] ou quant à une applicationde l'article 9 de l'arrete du 31 octobre 1991 qui evoque un nouveau projetprevoyant `l'augmentation de capacite d'une installation existante de plusd'un cinquieme de la capacite initiale et entrainant le depassement de lacapacite indiquee comme seuil dans l'annexe II [...]. Ce sont, d'ailleurs,les memes circonstances de fait qui entrainent l'immense difficulte, enrealite l'impossibilite, des riverains à trouver en quoi pourraitconsister le projet ou l'autorisation vises par la directive en cause. Eneffet, en l'espece, l'aeroport existait bien avant l'entree en vigueur dela directive. Il n'y a donc pas eu un projet ou une autorisationclairement identifiable et prealable, dans le sens de la directive ou dudecret en cause, pour permettre les vols de nuit ou l'arrivee desintegrateurs de fret. Le probleme pose n'est pas un probleme deconstruction ou de travaux mais un probleme d'autorisation d'exploiter uneinfrastructure aeroportuaire existante. [...] Dans cette mesure, c'est demaniere arbitraire que les riverains tentent d'analyser certains des actesou decisions intervenus comme pouvant constituer un projet ou uneautorisation au sens de la directive [...].

Compte tenu du raisonnement fait ci-dessus, il est inutile de rentrer danscette logique et, notamment, de s'interroger sur la qualite d'autorisationque pourrait ou non revetir un plan de secteur. Ainsi, la cour [d'appel]estime inutile de poser à la Cour de justice les questions prejudiciellesmentionnees par les riverains ». « Ainsi, il n'y a pas [...]d'illegalite formelle quant à l'absence d'etude d'incidence ». « Onpeut encore ajouter qu'il n'est pas admissible de globaliser tous lespermis pour essayer d'en degager un projet plus general qui ne correspondde toute maniere pas à la notion de `construction' d'un aeroport tellequ'elle est envisagee par les dispositions invoquees. Les permis en causesont une serie de permis qui ne demandent pas, en eux-memes, une etuded'incidence et dont les notices presentes etaient, en soi, suffisammentmotivees. En consequence, les permis en cause n'etaient pas nuls ouillegaux. Quant à l'argument tire de la disposition du decret qui prevoitque, `lorsqu'elle estime que les incidences risquent d'etre importantes,[...] l'autorite competente prescrit l'etablissement d'une etuded'incidences sur l'environnement' (article 10, S: 4), cette dispositionmentionne un pouvoir d'appreciation de l'administration qui ne peut etresanctionne dans le cadre d'une illegalite mais qui pourra etre examinecomme constitutif d'une faute dans le cadre de l'analyse à faireci-dessous ».

(2) Quant au lien causal entre la violation alleguee de la directive CEE85/337 sur l'evaluation des incidences et du decret de transposition, etle dommage allegue : « Il n'est nullement etabli que, s'il y avait eu uneevaluation ou une etude d'incidence ou encore des notices d'incidencesplus detaillees, la [premiere defenderesse] n'aurait pas eu exactement lameme appreciation quant à la politique aeroportuaire à suivre. [...]L'analyse faite à ce stade rend d'autant moins pertinentes les questionsque les riverains veulent voir soumises à la Cour de justice dans lamesure ou la reponse à ces questions, à defaut de lien de causalite,n'aurait, en tout etat de cause, aucun interet pour la solution du presentlitige. Sur ce point precis, il est d'ailleurs interessant de relever quela [premiere defenderesse] n'a nullement abandonne sa volonte de modifierle plan de secteur et de faire allonger la piste de l'aeroport pourpermettre l'utilisation d'avions gros porteurs à pleine charge, alorspourtant que des etudes d'incidence realisees ulterieurement, savoirnotamment l'etude Polyart, revelent clairement et de maniere detaillee leprobleme des incidences creees par la gestion actuelle de l'aeroport etqui seront encore augmentees par l'allongement de la piste et l'activitesupplementaire qu'elle permettra [...]. Quant à l'argument specifique dela nullite de certains permis de batir ou d'exploiter, on peut relever queles infrastructures mentionnees à ce stade sont, certes, destinees àpermettre ou à faciliter des societes de fret, mais que ce ne sontnullement ces infrastructures en elles-memes qui sont la cause desnuisances sonores subies par les riverains (voir le raisonnement que lacour [d'appel] fait sien qui figure en pages 136 et 137 du jugemententrepris du 9 fevrier 2001) ». En substance, le premier juge avaitconsidere à cet egard qu' « il parait difficile de soutenir quel'autorite, en ne reclamant ni notice prealable plus explicite (car il nefaudrait pas croire qu'il n'en avait pas ou qu'elles passaient totalementsous silence le probleme du bruit) ni etude d'incidences, aurait ete malinformee sur les nuisances potentielles sur l'environnement. Il ne fautpas oublier que les constructions et activites litigieuses etaientclairement inscrites dans le cadre du developpement de l'aeroport, que niles autorites locales ni l'autorite de tutelle ne l'ignoraient, et que lesnuisances sonores liees au developpement d'un aeroport ne sont nicontestables ni contestees » et qu' « à supposer que les riverainsn'aient aucun grief à formuler sur la procedure de delivrance des permisrelatifs à ces infrastructures situees dans le perimetre de l'aeroport,les nuisances qu'ils subissent n'en seraient nullement reduites ».

(3) Quant à l'analyse specifique de la faute de comportement dans lecadre de l'article 1382 du Code civil : « la faute de comportement quipourrait etre retenue à ce stade est une simple faute par rapport à uncomportement normal et diligent que l'on peut attendre d'un pouvoirpublic. Dans ce cadre [...], les principes generaux qui ne peuvent etreretenus directement dans le cadre d'une illegalite, à defaut d'effetdirect, tel le principe de precaution ou de bonne administration, peuventtrouver un echo interessant pour la reconnaissance d'une faute decomportement ». Quant à « la presence d'etudes commandees avant ledebut de l'activite [de la troisieme defenderesse] » : « trois etudesont ete commandees avant le debut de l'activite [de la troisiemedefenderesse], savoir : l'etude A-Tech sur l'etat des lieux acoustiques[...] ; l'etude du C.E.D.I.A. sur l'etude acoustique previsionnelle del'aeroport [...] ; l'etude A-Tech sur l'optimalisation des routes dedecollage et d'atterrissage [...]. Le fait d'avoir commande ces etudes nepeut certainement pas etre considere comme une faute dans le chef de la[premiere defenderesse]. [...] Il y a lieu de constater qu'un reprocheimportant fait à ces etudes est en realite ce qu'elles ne mentionnentpas. En effet, ces etudes sont des etudes techniques et n'ont pas eterealisees comme aurait pu l'etre une etude d'incidences. Ce fait ne peutpas etre reproche aux bureaux qui ont realise ces etudes en conformiteavec ce qui leur a ete demande. Au surplus, ces etudes ont integre leprobleme specifique de l'environnement de l'aeroport de Bierset [...]. Parcontre, on pourrait reprocher à la [premiere defenderesse], meme si ellen'y etait pas tenue legalement (voir ci-dessus), de ne pas avoir,neanmoins, fait proceder à une telle etude ». « Dans ce meme cadre, desriverains invoquent longuement l'etude d'incidences realisee par le bureauPolyart [...]. Quant à cette etude Polyart, on doit relever qu'elle estune etude d'incidence qui a ete faite dans le cadre de la modification duplan de secteur de Liege et qui a ete ainsi realisee en 2001. Cette etudeanalyse, neanmoins, toute la problematique liee aux mesures prises ou àprendre pour limiter les nuisances pour les riverains et, notamment toutela question des rachats [...]. Certes, cette etude est tres critique surles consequences de l'activite de l'aeroport. C'est un element tout àfait normal puisque c'est le but de ce type d'etude [...]. Cette etude n'anullement empeche la [premiere defenderesse] de continuer à vouloirrealiser la modification du plan de secteur de Liege et l'allongement dela piste, element qui demontre que, meme si on estimait, soit legalement,soit en vertu du principe de precaution, que la [premiere defenderesse]aurait du faire une etude ou une evaluation prealable des incidences, iln'est nullement demontre qu'une telle etude ou evaluation l'aurait faitrenoncer à ses projets de developper l'activite de fret express parl'arrivee d'un gros integrateur à Bierset ».

Griefs

Premiere branche

L'arret attaque ne rencontre pas les moyens precites des conclusions desynthese prises par Me Misson aux termes desquelles il etait soutenu quela convention conclue le 26 fevrier 1996 entre la [deuxieme defenderesse],la [premiere defenderesse] et la [troisieme defenderesse] constituaitnecessairement un projet vise à l'annexe II de la directive CEE 85/337,des lors que tous les travaux qui y etaient prevus (amenagement de lapiste principale et de la piste parallele, notamment pour pouvoir y fairemanoeuvrer des Airbus 300, equipement de ces pistes, deplacement de latour, construction d'une tour de controle, amenagement d'une aire destationnement de 18 hectares, approvisionnement d'energie pour permettrel'utilisation de l'aeroport 24/24 heures, 365 jours par an) etaientdestines à modifier l'aeroport existant.

L'arret attaque n'est des lors pas regulierement motive (violation del'article 149 de la Constitution).

Deuxieme branche

1) En vertu de l'article 1er de la directive 85/337/CEE du Conseil du25 juin 1985 concernant l'evaluation des incidences de certains projetspublics et prives sur l'environnement (telle qu'elle etait d'applicationavant sa modification par la directive 97/11/CEE du Conseil du 3 mars1997), « la directive concerne l'evaluation des incidences surl'environnement des projets publics et prives susceptibles d'avoir desincidences notables sur l'environnement » (article 1er), les projetsvises etant notamment « la realisation de travaux de construction oud'autres installations ou ouvrages » (article 1er.2). Selon l'article 2.1de la directive, « les Etats membres prennent les dispositionsnecessaires pour que, avant l'octroi de l'autorisation, les projetssusceptibles d'avoir des incidences notables sur l'environnement,notamment en raison de leur nature, de leurs dimensions ou de leurlocalisation, soient soumis à une evaluation en ce qui concerne leursincidences ». En vertu de l'article 3 de la directive, « l'evaluationdes incidences identifie, decrit et evalue de maniere appropriee, enfonction de chaque cas particulier [...], les effets directs d'un projetsur les facteurs suivants : l'homme, [...] les biens materiels ».L'article 4 de la directive distingue deux categories de projets : 1) ceuxappartenant aux classes enumerees dans l'annexe I de la directive qui sontsoumis, de plein droit, à une evaluation des incidences, conformement auxarticles 5 à 10, et 2) les projets appartenant aux classes enumerees àl'annexe II, qui sont soumis à une evaluation, conformement aux articles5 à 10, lorsque les Etats membres considerent que leurs caracteristiquesl'exigent.

La directive vise à ne soustraire à l'evaluation des incidences aucunprojet qui soit susceptible d'avoir des incidences notables surl'environnement en raison de sa nature, de ses dimensions ou de salocalisation, la marge d'appreciation reconnue aux Etats membres nepouvant etre utilisee par ces derniers pour faire echapper un projetspecifique à l'obligation d'evaluation. Seuls des projets qui ne figurentpas sur la liste de l'annexe I de la directive et dont l'autoritenationale a decide, par une decision motivee, qu'ils ne pouvaient avoird'incidence sur l'environnement, ne doivent pas etre soumis à une etuded'incidence sur l'environnement. Un ensemble de travaux constitue unprojet au sens de l'article 1er de la directive s'il est susceptibled'avoir des incidences importantes sur l'environnement.

Les projets relatifs à la « construction d'un aeroport dont la pistedepasse 2.100 metres de long », sont vises au point 7 de l'annexe I de ladirective. Au point 12 de l'annexe Il de la directive, est mentionnee la« modification des projets figurant à l'annexe I ». Des lors, larealisation d'un ensemble de travaux ou d'ouvrages qui entrainent desmodifications importantes à la structure d'un aeroport, existat-il memeanterieurement à la directive, dont la piste a une longueur de plus de2.100 metres, ou à son mode d'utilisation, est necessairement un projetvise à l'annexe II de la directive, puisqu'il s'agit d'un projet demodification d'un projet appartenant aux classes enumerees dans l'annexe Ide la directive. Il est indifferent que la piste ne soit pas allongee.

2) Par ailleurs, selon l'article 1.2 du decret du Conseil regional wallondu 11 septembre 1985 organisant l'evaluation des incidences surl'environnement dans la Region wallonne, qui transpose la directiveprecitee, le « projet » designe « toute operation, activite, ouvrage,construction, demolition, transformation, extension ou desaffectationd'installations, programme ou plan modifiant l'environnement, dont larealisation est envisagee par une personne physique ou morale, de droitpublic ou prive ». L'article 2 du decret precite dispose : « la mise enoeuvre des procedures prevues par le present decret doit avoirprincipalement pour but : de proteger et d'ameliorer la qualite du cadrede vie et des conditions de vie de la population, pour lui assurer unenvironnement sain, sur et agreable ; [...] d'instaurer entre les besoinshumains et le milieu de vie un equilibre qui permette à l'ensemble de lapopulation de jouir durablement d'un cadre et de conditions de vieconvenables ». L'article 4 du decret dispose, en ses alineas 1er et 2 :« La delivrance de toute autorisation est subordonnee à la mise enoeuvre de l'evaluation des incidences sur l'environnement prevue par ledecret. Si plusieurs autorisations sont requises, un seul systemed'evaluation des incidences sera prevu pour autant qu'il soit relatif àtous les aspects des autorisations indispensables à la bonne fin duprojet ». Il ressort des dispositions precitees du decret qu'un ensemblede travaux peut constituer un projet unique.

En vertu de l'article 5 du decret, l'autorite competente et le jugeadministratif peuvent prononcer la nullite de toute autorisation delivreeen contradiction avec les dispositions de l'article 4, alinea 1er, lanullite devant en tout cas etre prononcee en cas d'absence d'etuded'incidences, lorsqu'elle est prevue par l'article 10, S: 4, du decret,lequel dispose : « lorsqu'elle estime que les incidences risquent d'etreimportantes ou lorsque le present decret ou tout autre reglementation leprevoit, l'autorite competente prescrit l'etablissement d'une etuded'incidences sur l'environnement ». L'article 9 dispose : « L'executifarrete un systeme de normes d'evaluation permettant de determiner les casou les incidences d'un projet risquent d'etre importantes. Les projetsvises à l'annexe 1 font d'office l'objet d'une etude d'incidences ».L'article 10, S: 1er, alinea 1er, du decret dispose : « L'autoritecompetente apprecie les incidences du projet sur l'environnement enprenant en consideration la notice d'evaluation prealable et toute autreinformation qu'elle juge utile ». Selon le paragraphe 2, de cette memedisposition, « lorsque l'autorite competente juge les incidences surl'environnement peu importantes, le projet est dispense du reste de laprocedure d'evaluation ». L'annexe I du decret enumere les projets soumisd'office à une etude d'incidences, parmi lesquels la construction desaeroports dont la piste de decollage et d'atterrissage a une longueur de2.100 metres au plus (point 7 de l'annexe I).

3) Enfin, l'article 3 de l'arrete de l'executif regional wallon du 31octobre 1991 portant execution du decret du 11 septembre 1985 enumere lesactes administratifs subordonnes à la mise en oeuvre du systemed'evaluation des incidences sur l'environnement prevu par le decret. Selonles articles 4 à 6 dudit arrete, lorsqu'un projet requiert plusieursautorisations, il peut etre soumis à un systeme d'evaluation unique.Selon l'article 8, S: 3, de l'arrete, « l'administration competenteexamine si la demande d'autorisation vise un projet repris en l'annexe IIou si d'autres raisons pourraient justifier l'imposition d'une etuded'incidences ». Selon l'article 9, sont soumis de plein droit à larealisation d'une etude d'incidences, les projets vises dans l'annexe II,les projets autres y etant soumis si l'autorite competente le decide.L'annexe II de l'arrete du gouvernement wallon du 31 octobre 1991 cite enson numero 8 la construction d'aeroports dont la piste a une longueur de1.200 metres ou plus, en ce compris l'allongement de pistes existantesau-delà de ce dernier seuil, ainsi que les aerodromes à vocation deloisirs.

4) En l'espece, l'arret ne denie pas que l'utilisation de nuit del'aeroport de Bierset par des avions gros porteurs de fret aerien pourraitavoir une incidence notable sur l'environnement et notamment sur laqualite de l'habitat. Pour decider qu'il n'y avait pas de projet soumis àl'obligation d'une etude d'incidences sur l'environnement, l'arretconsidere que « tant la directive que le decret envisagent et definissentla notion d'aeroport par rapport à la longueur de sa piste et non parrapport aux installations annexes à la piste, tels des hangars ou memeune tour de controle ; qu'au surplus, l'annexe I de la directive vise la`construction' d'un aeroport et l'annexe II, qui, pour rappel, ne viseseulement que des hypotheses pour lesquelles les Etats peuvent prevoir uneetude d'incidences, parle de la modification d'un projet vise à l'annexeI, soit la modification de la construction ; qu'en l'espece, il n'y a euni construction ni modification de la construction d'un aeroport au sensdes dispositions invoquees dans la mesure ou la piste de l'aeroport n'apas ete modifiee dans sa longueur ». L'arret meconnait ainsi la notion de« projet susceptible d'avoir des incidences notables surl'environnement » vise à la directive 85/337/CEE du Conseil et le champd'application de la directive, tel qu'il est defini par les articles 1er,2, 3 et 4, dont il ressort que chaque projet se rapportant à un aeroportdont la piste a une longueur de 2.100 metres, susceptible d'avoir desincidences notables sur l'environnement, doit en principe faire l'objetd'une etude d'incidences, que ce soit de plein droit ou parce que l'Etatconsidere que leurs caracteristiques l'exigent (violation des articles1er, 2, 3 et 4 de la directive 85/337/CEE du Conseil du 25 juin 1985concernant l'evaluation des incidences de certains projets publics etprives sur l'environnement).

En outre, en considerant qu'il n'y a aucun projet clairement identifiableà l'origine de la modification de l'exploitation de l'infrastructure del'aeroport de Bierset et donc que les modifications à la structure del'aeroport en vue d'une extension de son utilisation, ne constituent pasdes travaux modificatifs d'un aeroport susceptibles d'etre soumis à uneevaluation des incidences sur l'environnement, l'arret attaque violel'article 4, S: 2, de la directive 85/337/CEE du Conseil du 25 juin 1985concernant l'evaluation des incidences de certains projets publics etprives sur l'environnement ainsi que le point 7 de l'annexe I et le point12 de l'annexe II de la directive 85/337/CEE precitee dans la mesure oul'annexe I, point 7, à la directive 85/337 CEE vise la construction d'unaeroport dont la piste depasse 2.100 metres de long et que l'annexe 2,point 12, vise la modification de projets figurant à l'annexe I.

En considerant que les travaux de modification de l'aeroport de Biersetechappent à l'application du decret wallon et à son arrete d'execution,parce qu'il n'y a pas eu un « projet general » mais seulement « uneserie de permis », l'arret attaque viole egalement les articles 1er, 2,4, 5, 9 et 10, S: 4 du decret de la Region wallonne du 11 septembre 1985organisant l'evaluation des incidences sur l'environnement dans la Regionwallonne ainsi que son annexe I, et les articles 3, 4, 5, 6, 8, S: 3 et 9de l'arrete de l'executif regional wallon du 31 octobre 1991 portantexecution du decret du 11 septembre 1985 ainsi que son annexe II, point 8.

Troisieme branche

Dans leurs conclusions d'appel de synthese, les riverains representes parMe Misson faisaient valoir qu'une etude d'incidences serieuse auraitpermis à la [premiere defenderesse] de constater l'impact excessif del'activite de [la troisieme defenderesse] sur l'environnement, citantl'exemple de l'aeroport de Strasbourg ou, à l'issue du rapportMuzet-Vallet, il fut decide de ne pas accueillir D.H.L. et ses volsnocturnes en raisons des graves nuisances que cela impliquerait ; que lesriverains auraient du pouvoir se prononcer sur le projet et ses incidencesà l'occasion d'une enquete publique serieuse, mentionnant clairementqu'il s'agissait de creer les conditions necessaires au lancement de volsde nuit tres importants et, qu'à defaut de refuser les autorisations, la[premiere defenderesse] aurait du au minimum imposer des conditionsd'exploitation drastiques.

L'arret attaque estime que la [premiere defenderesse] a, en dehors detoute illegalite, commis une faute en ne faisant pas proceder à une etuded'incidences prealablement à la convention conclue avec [la troisiemedefenderesse], mais [il] considere qu'il n'y a pas de lien causal entrecette faute et le dommage des demandeurs pour le motif « qu'il n'estnullement etabli que s'il y avait eu une evaluation ou une etuded'incidences ou encore des notices d'incidences plus detaillees, la[premiere defenderesse] n'aurait pas eu exactement la meme appreciationquant à la politique aeroportuaire à suivre » et « qu'il n'est pasdemontre qu'une telle etude ou evaluation l'aurait fait renoncer à sesprojets de developper l'activite de fret par l'arrivee d'un grosintegrateur à Bierset ». Par ces motifs, l'arret attaque ne rencontrepas le moyen precite des conclusions des riverains en tant qu'ilssoutenaient que si une etude d'incidences serieuse avait ete menee, aucours de laquelle les riverains auraient pu s'exprimer, la [premieredefenderesse] aurait au moins impose des conditions drastiquesd'exploitation. L'arret n'est des lors pas regulierement motive (violationde l'article 149 de la Constitution).

Quatrieme branche

En vertu de l'article 4.2 de la directive CEE 85/337 du 25 juin 1985concernant l'evaluation des incidences de certains projets publics etprives sur l'environnement, il appartient aux Etats membres de deciderquels sont les projets non vises à l'annexe I qui sont susceptiblesd'avoir des incidences notables sur l'environnement et qui doivent fairel'objet d'une etude d'evaluation des incidences. En vertu des articles 8,S: 3, et 9, alinea 2, du decret du Conseil regional wallon du 31 octobre1991 portant execution du decret du 11 septembre 1985 organisantl'evaluation des incidences sur l'environnement dans la Region wallonne,il appartient à l'administration de decider si les projets qui ne sontpas soumis de plein droit à une telle evaluation doivent cependant y etresoumis. Apres que l'etude d'incidence a ete realisee, laquelle comprendune enquete publique (decret du 11 septembre 1985, article 12, S: 2 ;arrete de l'executif regional wallon du 31 octobre 1991, articles 41 à51), il appartient à l'administration de decider si l'autorisation est ounon accordee (decret du 11 septembre 1985, article 17).

En vertu du principe general du droit de la separation des pouvoirs, iln'appartient pas au pouvoir judiciaire de determiner la decision qu'auraitprise le pouvoir executif si une etude d'incidences, avec enquetepublique, avait ete imposee, comme elle aurait du l'etre.

En considerant que, quels qu'aient ete les resultats des etudesd'incidences, qui auraient necessairement contenu une consultationpopulaire au sujet des incidences de l'ouverture de l'aeroport de Biersetaux vols de nuit accomplis par des operateurs de fret aerien, que la[premiere defenderesse] aurait du realiser, la politique aeroportuaire decelle-ci aurait ete identique, l'arret meconnait le principe general dudroit de la separation des pouvoirs (violation dudit principe general dudroit consacre notamment par l'article 33, alinea 2, de la Constitution),ainsi que les articles 4.2 de la directive CEE 85/337 du 25 juin 1985, 8,S: 3, 9, alinea 2, 12, S: 2, et 17 du decret du Conseil regional wallon du11 septembre 1985 et 41 à 51 de l'arrete de l'executif regional wallon du31 decembre 1991.

Cinquieme branche

L'arret fait dependre la reparation du dommage consistant en ou resultantde l'absence d'etude d'incidences, imposee par la directive europeenne85/337, de la preuve absolue, à apporter par les demandeurs, que la[premiere defenderesse] n'aurait pas eu la meme attitude si elle avaitfait realiser une etude d'incidences au sujet du projet, contenu dans laconvention passee le 26 fevrier 1996 entre la [premiere defenderesse], la[deuxieme defenderesse] et la [troisieme defenderesse]. L'arret rend ainsidifficile ou en tout cas excessivement impossible l'exercice des droitsconferes par l'ordre juridique communautaire, violant ainsi les articles10 du Traite du 25 mars 1957 instituant la Communaute europeenne dans saversion consolidee à Amsterdam le 2 octobre 1997 et 2.1 de la directive85/337/CEE du Conseil du 25 juin 1985 concernant l'evaluation desincidences de certains projets publics et prives sur l'environnement.

Sixieme branche

Dans le cadre de leur appel incident, les riverains representes par MeMisson ont demande à la cour d'appel « de constater et dire pour droitque l'ensemble des autorisations administratives en matiere d'urbanisme oud'exploitation delivrees depuis le mois de janvier 1992 l'ont ete enviolation des dispositions wallonnes et europeennes organisantl'evaluation des incidences sur l'environnement de certains projetspublics et prives et qu'elles sont atteintes de nullite radicale enapplication des articles 5, alinea 3, 3e tiret, 9 et 10 du decret du 11septembre 1985 organisant l'evaluation des incidences sur l'environnementdans la Region wallonne et que ces autorisations doivent etre ecartees surla base de l'article 159 de la Constitution ».

En omettant de faire droit à la demande tendant à la cessation del'utilisation de l'infrastructure en tant qu'elle reposait surl'illegalite resultant de l'absence d'etude d'incidence, l'arret attaqueviole l'article 1138, 3DEG, du Code judiciaire. A tout le moins, l'arretattaque reste en defaut de repondre aux moyens des conclusions ou lesriverains faisaient valoir que le principe de legalite imposait qu'il soitmis fin à l'utilisation de l'infrastructure illegale (violation del'article 149 de la Constitution). En outre, l'arret attaque violel'article 159 de la Constitution en refusant de faire droit à cettedemande (violation de l'article 159 de la Constitution et, pour autant quede besoin de l'article 5, alinea 3, 3e tiret, 9 et 10 du decret du 11septembre 1985 organisant l'evaluation des incidences sur l'environnementdans la Region wallonne).

Troisieme moyen

Dispositions legales violees

- article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et deslibertes fondamentales, signee à Rome le 4 novembre 1950 et approuvee parla loi du 13 mai 1955 ;

- article 149 de la Constitution.

Decisions et motifs critiques

Apres avoir constate que « la [premiere defenderesse], dans sesconclusions de synthese, ne conteste pas que des nuisances sonores tellesque celles qui sont generees par les activites de l'aeroport de Biersetpeuvent constituer une ingerence au regard du droit au respect de la vieprivee et familiale ou une atteinte au droit de propriete »,

et saisi des conclusions de synthese des riverains representes par MeMisson qui soutenaient en substance que, par convention conclue le 26fevrier 1996, [les premiere et deuxieme defenderesse] ont accorde à la[troisieme], pour une duree de vingt ans, une liberte totale quant auxhoraires, un nombre illimite de vols de nuit et un minimum de 40mouvements par heure ; que cette convention a ete signee sans qu'aient eterealises prealablement une consultation des riverains, une concertationavec les autorites communales, une etude environnementale, une etude desante publique, une analyse budgetaire des mesures d'accompagnement desriverains, une etude prealable des procedures de vol, l'etablissement d'unPEB et des tests d'insonorisation ; que cela demontre que [cesdefenderesses] ont favorise une approche economique du dossier en ignoranttotalement les interets environnementaux ; que les riverains deduisaientde cette approche desequilibree une violation de l'article 8 de laConvention des droits de l'homme ; qu'au debut des vols de nuit en mars1998, aucune consultation n'avait eu lieu et aucune mesure de protectioneffective des riverains n'existait ; que l'approche economique a prevalu,[les deux premieres defenderesses] pratiquant la politique du faitaccompli, les interets des riverains n'ayant pas ete suffisamment pris encompte,

et saisi egalement des conclusions de synthese des demandeurs soulignant« le degre d'impreparation [des deux premieres defenderesses] », deslors qu' « à Bierset, rien n'etait pret avant le debut du lancement del'exploitation de l'aeroport et aucune etude quant à l'impact desnuisances sonores sur la sante des personnes n'avait ete entreprise avantque la decision ne soit prise, en 1991 ou meme en 1996, d'autoriser lesvols de nuit ; [...] qu'aujourd'hui, plus de six annees apres le debut del'exploitation, les mesures d'accompagnement en sont encore au pointmort ; que des annulations ont eu lieu entre-temps » ; que « seules despreoccupations economiques ont guide le choix des pouvoirs publics dans lagestion de l'aeroport wallon et que ce n'est que par la suite que desconsiderations d'ordre environnemental sont venues 'habiller' les choixinitiaux ; que le desequilibre entre les preoccupations de differentsordres est donc manifeste », soulignant egalement tant « la tardivete etl'insuffisance des etudes scientifiques entreprises sur le planenvironnemental » , des lors qu'il n'existait au moment de la conclusionde la convention du 26 fevrier 1996 « aucune etude portant sur lesincidences environnementales et sur la sante des riverains, de ces vols denuit ; que les conclusions de l"etude acoustique previsionnelle del'aeroport de Bierset » - au demeurant nettement insuffisante - n'ont etedeposees que le 26 octobre 1996; qu'or, la decision d'autoriser les volsde nuit ne pouvait plus etre remise en cause, sous peine de payer delourdes indemnites à la [troisieme defenderesse] ; que, quant aux autresetudes deposees par la [premiere defenderesse], et financees par la[deuxieme], force est de constater qu'elles n'ont ete deposees qu'apres ledebut des vols de nuit; que, comme le soulignait Benoit Jadot, auditeur auConseil d'Etat, « des engagements de ce type (la convention du 26 fevrier1996) illustrent bien le fait que la protection de l'environnement et lasante et la tranquillite des habitants du voisinage des aeroportsn'entrent pas d'entree de jeu dans les preoccupations de ceux qui prennentles decisions en matiere de gestion aeroportuaire » ; que lajurisprudence de l'arret Hatton (rendu par la Cour de justice desCommunautes europeennes [lire : par la Cour europeenne des droits del'homme]) est pourtant claire : meme si les etudes ne doivent pas etreexhaustives, eu egard aux evolutions des recherches en la matiere, l'Etatqui entreprend l'exploitation d'un aeroport ou s'effectuent des vols denuit doit proceder à des recherches avant meme de se lancer dans cetteentreprise ; [...] qu'en l'espece, alors que la decision d'intensifierl'activite de l'aeroport de Bierset remontait au debut des annees 90 etque l'intention d'autoriser les vols de nuit existait depuis le depot desrapports Tractebel de 1991 et 1992, aucune conclusion substantielle n'estintervenue avant la mise en oeuvre d'un tel projet », et soulignant enfin« l'insuffisance des etudes scientifiques » et leur caractere lacunaire,

l'arret attaque deboute les demandeurs de leur action en tant qu'elle estfondee sur l'article 8 de la Convention europeenne des droits de l'homme.

L'arret attaque fonde sa decision sur les motifs suivants :

« Le seul probleme qui doit encore etre examine à ce stade est laquestion de savoir si l'ingerence dans la vie privee et l'atteinte audroit de propriete sont des mesures proportionnelles en fonction du butpoursuivi et ceci en prenant en compte les mesures prevues par la[premiere defenderesse] pour la gestion des nuisances sonores ; [...] laCour europeenne a encore eu à connaitre tres recemment du probleme desnuisances aeroportuaires ; dans cette mesure, la cour [d'appel]s'attachera exclusivement à l'analyse approfondie faite par la Coureuropeenne de ce cas tres recent ; [...] pour justifier la reglementationdes vols de nuit, il est legitime pour l'Etat en cause de prendre encompte des interets economiques, l'alinea 2 de l'article 8 autorisant lesrestrictions necessaires au bien-etre economique du pays, les interetscites à ce stade etant, 'non seulement les interets economiques descompagnies aeriennes et autres entreprises et ceux de leurs clients, maisaussi, et surtout, les interets economiques du pays dans son ensemble' ;l'examen à faire est celui d'un juste equilibre, un statut special nedevant pas etre accorde aux droits environnementaux dans cette analyse ;[...] l'appreciation à faire est une appreciation en fait [...] ; pourapprecier le juste equilibre, la Cour estime devoir aussi prendre enconsideration les mesures mises en place pour attenuer les effets du bruitgenere par les aeronefs ; [...] la Cour releve que, dans des questionscomplexes de politique environnementale et economique le processusdecisionnel doit necessairement comporter la realisation d'enquetes etd'etudes appropriees, de maniere à permettre l'etablissement d'un justeequilibre entre les differents interets concurrents en jeu; la question àse poser est, en definitive, de savoir si les autorites ont ou `n'ont pasdepasse leur marge d'appreciation dans la recherche d'un juste equilibreentre, d'une part, le droit des personnes touchees par la reglementationlitigieuse à voir respecter leur vie privee et leur domicile et, d'autrepart, les interets concurrents d'autrui et de la societe dans sonensemble' [...] ; si on applique ces principes et elements au cas del'aeroport de Bierset, il y a lieu de constater que l'analyse à faire estcelle de la marge d'appreciation de la [premiere defenderesse] dans lecadre du juste equilibre à respecter entre les ingerences subies par lesriverains et les interets economiques du developpement de l'activite encause et ceci, en regardant les mesures mises en place pour la gestion dubruit et en verifiant si les decisions prises l'ont ete sur la based'enquetes et d'etudes appropriees ; dans ce cadre, il y a lieu de releverles elements suivants : au niveau des enquetes et etudes appropriees, la[premiere defenderesse] avait à sa disposition une etude economique, soitl'analyse faite par Tractebel, et trois etudes techniques, à savoirl'etude A-Tech de 1996, l'etude du CEDIA et l'etude realisee par A-Tech,notamment, en collaboration avec le bureau Speedwing ; il n'est pas prouveque ces etudes etaient insuffisantes pour permettre à la [premieredefenderesse] de mesurer correctement les ingerences generees parl'activite litigieuse et de prendre des decisions en connaissance decause ; les mesures prises pour la gestion des nuisances sont asseznombreuses, soit reglementation des routes aeriennes, reglementation dutype d'avions utilises, reglementation pour l'elaboration d'un PEB,reglementation pour le rachat de certains immeubles et reglementation pourdes insonorisations [...]; alors que la Cour europeenne se contente d'unepresomption d'interet economique des vols de nuit, en l'espece, l'intereteconomique a ete releve et analyse par le CIRIEC dans plusieurs rapports[...] ; quant à l'application de l'article 8 en cause, le nouveau decretdu 29 avril 2004 ne permet pas une autre analyse ; en effet, quant auxetudes prealables, outre les etudes precitees qui sont toujourspertinentes, d'autres etudes ont encore ete commandees et faites pourapprecier les mesures à prendre en matiere de gestion des nuisances; l'onpeut mentionner sur ce point : l'etude precitee de l'expert canadienBradley, auquel la [premiere defenderesse] a soumis sa reglementation, quia conclu que le plan de [celle-ci] etait correct et reflechi; l'etude duprofesseur Fontaine, 'De la relation du bruit aeroportuaire à la sante -A propos de l'aeroport de Liege' [...], l'etude du professeur Linkoswkiintitulee 'Region wallonne - Bierset : expertise' du 14 novembre 2003[...] ; par ailleurs, plusieurs etudes d'incidence ont ete faites dans lecadre de la modification du plan de secteur de Liege et dans le cadre del'allongement de la piste ; les bureaux qui ont realise ces etudesdevaient, legalement, etre structurellement independants des defendeursoriginaires ; toutes ces etudes, qui integraient la situation specifiquede l'aeroport de Bierset, notamment le fait que cet aeroport fonctionneavec une piste unique, une trajectoire unique et une concentrationtemporelle, donnaient à la Region wallonne les bases necessaires à uneappreciation de la situation; par ailleurs, quant aux mesures de gestiondu bruit à prendre en compte, il y a lieu de se referer à l'analysefaite ci-dessus tant au niveau des premieres mesures que des mesuresprevues dans le nouveau decret ; enfin, il y a eu une prise en compte dela situation des riverains, cet element imposant seulement que le pouvoirpublic ait les elements d'appreciation sur cette situation, ce qui etaitmanifestement le cas par le biais, notamment, de SERINFO ; la [premieredefenderesse] disposait aussi d'etudes specifiques sur la situation deseffets de la nuisance sonore pour les riverains de l'aeroport de Bierset(voir les etudes citees ci-dessus) ».

Griefs

Premiere branche

L'arret attaque ne rencontre pas les moyens precites des conclusions desynthese de Me Misson et de MMes `t Serstevens et Cambier, quant àl'absence d'etudes et d'enquetes appropriees en matiere d'impact surl'environnement des vols de nuit, tant avant la decision d'autoriser cesvols qu'avant le moment ou les vols ont debute. L'arret attaque n'est deslors pas regulierement motive (violation de l'article 149 de laConstitution).

Deuxieme branche

Aux termes de l'article 8 de la Convention europeenne des droits del'homme, toute personne a droit au respect de sa vie privee et familiale,de son domicile et de sa correspondance ; il ne peut y avoir ingerenced'une autorite publique dans l'exercice de ce droit que pour autant quecette ingerence est prevue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui,dans une societe democratique, est necessaire à la securite nationale, àla surete publique, au bien-etre economique du pays, à la defense del'ordre et à la prevention des infractions penales, à la protection dela sante ou de la morale, ou à la protection des droits et libertesd'autrui. Partant, si l'ingerence d'une autorite publique est admise,celle-ci ne peut se produire que dans un but legitime. En outre,l'ingerence doit se produire de maniere raisonnable et etre proportionneeau but poursuivi. Il appartient au juge de sanctionner tout comportementde l'autorite publique qui meconnaitrait ces principes. L'examen auqueldoit se livrer le juge, dans les contestations relatives aux decisions del'autorite publique qui ont une incidence sur le droit protege, comportedeux aspects : d'une part, il doit apprecier le contenu materiel de ladecision des autorites publiques en vue de s'assurer qu'elle estcompatible avec l'article 8, d'autre part, il doit examiner si, dans leprocessus decisionnel, les interets de l'individu ont ete dument pris encompte. Le processus decisionnel doit necessairement comporter larealisation d'enquetes et d'etudes appropriees, de maniere à permettre lerespect d'un juste equilibre entre les interets concurrents en jeu. Cesenquetes et etudes appropriees doivent preceder la prise de decision.Partant, il y a ingerence non autorisee dans l'exercice du droit consacrepar l'article 8 de la Convention europeenne des droits de l'homme lorsquecette ingerence est realisee sans que prealablement aient ete effectueesdes etudes et enquetes appropriees, independantes et critiques, permettantà l'autorite publique d'etablir un equilibre entre les interetsconcurrents. Le simple fait de commander des etudes ou des enquetes nepeut suffire.

En l'espece, il n'etait pas denie que l'autorisation donnee par la[premiere defenderesse] à la realisation de vols de nuit à l'aeroport deBierset constituait une ingerence dans le droit des riverains consacre parl'article 8.1 de la Convention europeenne des droits de l'homme. Il neressort d'aucune consideration de l'arret que, prealablement à ladecision d'autoriser les vols de nuit, constituant l'ingerence, à savoirla signature de la convention conclue le 26 fevrier 1996 entre [les troispremieres defenderesses] ou, à tout le moins, pendant la periodeprecedant le debut des vols de nuit, soit au 1er mars 1998, une quelconqueetude ait ete realisee quant aux effets des vols de nuit surl'environnement ou qu'une quelconque enquete ait ete menee aupres de lapopulation. Il ne ressort pas davantage de l'arret que l'etude Tractebel,qui constituait une etude economique, et les etudes techniques realiseesdans la periode precedant le debut des vols de nuit, etaient des etudesappropriees qui auraient, dans le cadre du processus decisionnel, permis[aux deux premieres defenderesses] d'apprecier de maniere objective tousles interets concurrents, dont ceux des demandeurs, aux fins d'etablir unjuste equilibre entre les divers interets en jeu.

Il ressort au contraire des considerations critiquees qu'avant lasignature de la convention du 26 fevrier 1996 et, à tout le moins, avantle 1er mars 1998, debut des vols de nuit, aucune etude n'a ete realiseequant aux effets des vols de nuit sur l'environnement, sur la sante desriverains et sur les interets de ceux-ci, l'arret se bornant à avoiregard à une etude economique, realisee par Tractebel en 1992, à troisetudes techniques, qui etaient posterieures à la convention du 26 fevrier1996, ainsi qu'à des etudes realisees en cours de procedure et doncposterieures à la decision d'autoriser les vols de nuit. Des lors, iln'apparait nullement des motifs de l'arret que les riverains auraient eteentendus dans le cadre d'une enquete appropriee. L'arret n'a donc pulegalement exclure une violation de l'article 8 de la Conventioneuropeenne des droits de l'homme (violation de l'article 8 de laConvention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertesfondamentales).

A tout le moins, en omettant de preciser le moment auquel se situait ledebut de l'ingerence dans l'exercice du droit protege par l'article 8.1 deladite convention, instant determinant pour l'appreciation de l'existenced'etudes et d'enquetes appropriees dans le cadre du processus decisionnel,l'arret attaque met la Cour dans l'impossibilite de controler la legalitede la decision et, partant, n'est pas regulierement motive (violation del'article 149 de la Constitution).

Troisieme branche

Si l'autorite publique dispose, en cas d'ingerence dans l'exercice desdroits consacres par l'article 8.1 de la Convention europeenne des droitsde l'homme, d'une certaine marge d'appreciation quant au juste equilibreà realiser entre les interets en jeu, la question de savoir si ladecision de l'autorite publique respecte cette marge d'appreciation nepeut etre resolue qu'en fonction de toutes les circonstances de la cause,au cas par cas. Seule une approche casuistique et l'analyse de la gravitede la situation des individus prejudicies peuvent permettre de verifier,utilement et en connaissance de cause, si le juste equilibre entre lesinterets en presence a ete atteint, si l'ingerence est proportionnelle aubut poursuivi par les autorites publiques et si les personnes concerneesbeneficient d'une protection de leurs droits suffisamment concrete eteffective et non pas seulement theorique ou illusoire. Dans cetteappreciation du juste equilibre et du caractere proportionnel del'ingerence resultant de l'intensification de l'activite d'un aeroport,les nuisances effectivement subies par les riverains doivent etre prisesen consideration.

En l'occurrence, les riverains representes par Me Misson ont fait valoirque le rapport de l'expert Plom du 17 avril 2000 avait constate de maniereobjective la realite des nuisances, Plom ayant effectue pendant 110 nuits,de fevrier à juin 1999, des mesures acoustiques concernant 319 immeubles,et qu'il resultait de ce rapport que 137 familles (43 p.c.) subissent desnuisances qualifiees d'insupportables, 98 familles (31 p.c.) des nuisancesqualifiees de graves, 62 familles (19 p.c.) des nuisances qualifiees demoderees et 22 familles (7 p.c.) des nuisances qualifiees de faibles, desorte que 74 p.c. des familles se trouvent dans une situation grave ouinsupportable. Quant au prejudice subi, les riverains representes par MeMisson ont fait valoir que les innombrables pieces du dossier demontraientde maniere objective et incontestable la gravite extreme des nuisancessonores, portant atteinte au droit à un repos nocturne paisible, le bruitdes vols de nuit entrainant une gene sonore provoquant des difficultesd'endormissement, la perturbation du sommeil, des modifications de lastructure du sommeil, de la fatigue, l'impossibilite de dormir la fenetreouverte, des sentiments de malaise lie à un cadre de vie mediocre, lacrainte d'un accident, des troubles psychologiques lies au constatqu'aucune amelioration future n'est possible, la desolation liee à laperte de valeur immobiliere, du stress, de l'hypertension et des effetscardio-vasculaires, des troubles hormonaux, la deterioration de lamemorisation, des reactions vegetatives, la consommation de medicaments,des consultations medicales ou psychiatriques, et un risque pour la santedes enfants.

Or, si l'arret se refere à diverses etudes à caractere plus ou moinsgeneral, il ne ressort nullement de ses constatations que la cour d'appela eu egard aux nuisances effectivement subies par les demandeurs, depuisle1er mars 1998, debut des vols nocturnes, jusqu'à ce jour, aux problemesde sommeil qu'ils endurent depuis le 1er mars 1998, ou encore àl'atteinte à la sante qui en resulte. A aucun moment, l'arret n'analysela situation concrete subie par les riverains, alors qu'un rapportd'expertise judiciaire verse au dossier constate qu'une majorite deriverains subit des nuisances sonores qualifiees de graves et memed'insupportables.

En s'abstenant de proceder à une approche casuistique du prejudice et desnuisances effectivement subies par les riverains dans le cadre specifiquede l'article 8 de la Convention europeenne des droits de l'homme,notamment pour le motif que, dans l'examen du juste equilibre, « unstatut special ne doit pas etre accorde aux droits environnementaux », lacour d'appel n'a pas procede, utilement et en connaissance de cause, àl'analyse du juste equilibre des interets en presence, exigee parl'article precite, savoir, d'une part, l'ingerence de l'autorite publiquedans les droits garantis par l'article 8.1 de la Convention europeenne àdes fins economiques et, d'autre part, le droit des riverains au respectde la vie privee et de la vie familiale, dont fait partie le droit à unenvironnement sain, et n'a pas procede, utilement et en connaissance decause, à l'examen du dossier au regard du principe de laproportionnalite, requis par l'article 8 precite. Partant, la cour d'appeln'a pu legalement decider que les autorites publiques n'avaient pasdepasse leur marge d'appreciation dans la recherche d'un juste equilibreentre, d'une part, le droit des personnes touchees par la reglementationlitigieuse à voir respecter leur vie privee et leur domicile et, d'autrepart, les interet concurrents d'autrui et de la societe dans son ensemble(violation de l'article 8 de la Convention de sauvegarde des droits del'homme et des libertes fondamentales) et n'a des lors pu deciderlegalement qu'il n'y avait pas de violation de l'article 8 de laditeconvention (violation de l'article precite).

A tout le moins, en omettant de preciser si les rapports cites dans ladecision, dont celui du professeur Fontaine intitule « De la relation dubruit aeroportuaire à la sante », se rapportaient à la situationconcrete des demandeurs et aux nuisances effectivement subies par eux,l'arret met la Cour dans l'impossibilite de verifier s'il a egard auxnuisances effectivement subies par les demandeurs jour apres jour depuisle 1er mars 1998 jusqu'au jour de sa prononciation ainsi qu'aux effetsconcrets de ces nuisances sur leur droit au repos, leur sante ou leurcadre de vie, en d'autres mots s'il a egard à la situation concrete dedemandeurs. Des lors, l'arret n'est pas regulierement motive (violation del'article 149 de la Constitution).

Quatrieme branche

Les riverains representes par Me Misson concluaient qu'un desequilibre aete cree au detriment des interets des riverains par la [premieredefenderesse] qui ne s'est pas assure d'une concomitance entre lesatteintes qu'allait engendrer sa politique de developpement de l'aeroportet l'application des dispositions destinees à en reduire les effetsnefastes sur des milliers de personnes. Ils poursuivaient que cetteexigence de concomitance s'impose comme corollaire du principe deprotection effective degage par la jurisprudence de la Cour de Strasbourg,que seules des mesures concomitantes permettant de proteger efficacementles riverains, des le debut des vols de nuit, auraient permis uneprotection utile, effective et concrete de leurs droits, mais que, troisannees apres le jugement dont appel et six annees apres le debut des volsde nuit, ce desequilibre persiste, le defaut de concomitance se doublantd'un defaut de concretisation.

L'arret reste en defaut de repondre à ce moyen et n'est donc pasregulierement motive (violation de l'article 149 de la Constitution).

Cinquieme branche

Il ne peut y avoir ingerence dans les droits reconnus par l'article 8 dela Convention europeenne des droits de l'homme que si cette ingerence estnecessaire pour poursuivre un but legitime et que si l'atteinte aux droitsest proportionnee à ce but. Il y a notamment atteinte au droit au respectde la vie privee et familiale, garanti par l'article 8 de laditeconvention, lorsqu'il n'existe pas un juste equilibre entre l'intereteconomique invoque par l'autorite publique pour justifier des volsnocturnes, causant des nuisances aux riverains d'un aeroport, d'une part,et le droit de l'individu au respect de sa vie privee, comprenant le droità un environnement sain, d'autre part.

En outre, l'ingerence de l'autorite publique n'est admissible quemoyennant des mesures concretes et effectives pour endiguer ses effetsnegatifs, la Convention europeenne ayant pour but de proteger des droits,non pas theoriques ou illusoires, mais concrets et effectifs. Partant,l'autorite publique doit agir de fac,on concrete pour diminuer lesnuisances generees par des mesures qui peuvent etre qualifieesd'ingerences. L'autorite publique ne peut se borner à envisager ouprevoir certaines mesures, destinees à limiter les effets nuisibles d'uneingerence, pour echapper au grief d'avoir viole le droit au respect de lavie privee et familiale. Encore faudra-t-il que la mise en oeuvre de cesmesures soit concomitante à l'ingerence et ses effets negatifs. Tant queces mesures n'auront pas ete concretisees, l'individu pourra invoquer laprotection de l'article 8 de la Convention europeenne des droits del'homme. Si les mesures prises par l'autorite publique afin de reduire lesnuisances constituent un element d'appreciation du juste equilibre desinterets en cause et du caractere proportionnel de l'ingerence, c'est àla condition que celles-ci aient un caractere concret. Le juge du fond nepourra pas legalement exclure l'existence d'une atteinte au droit aurespect de la vie privee et familiale et, partant, le droit à uneindemnite pour les nuisances subies, tant que les mesures proposees afind'attenuer les effets nuisibles de l'ingerence n'auront pas eteconcretisees. En aucun cas l'autorite publique ne peut se contenterd'annoncer des mesures, tendant à limiter les atteintes au droit precite.Il lui appartient de prendre toutes les mesures utiles et concretes pourleur mise en oeuvre effective et ce, sans qu'il puisse etre exige de lapart des personnes concernees qu'elles s'abstiennent de critiquer lesmesures proposees ou qu'elles collaborent activement à leur realisation,ou encore sans qu'il puisse leur etre reproche d'attendre le denouementdes procedures en annulation, introduites devant les juridictionsinstaurees par le legislateur, aux fins de controler la legalite desmesures prises par les autorites administratives. Il y a donc violation dudroit au respect de la vie privee et familiale des lors que l'ingerenceest anterieure à la concretisation des mesures destinees à en limiterles effets negatifs, ce qui est à examiner dans le chef de chaquedemandeur.

Il ressort des considerations de l'arret, d'une part, que nombre desmesures prises par la [premiere defenderesse] pour attenuer les nuisanceset retenues par l'arret pour apprecier le caractere raisonnable del'ingerence de [cette defenderesse] dans la vie privee et familiale desriverains de l'aeroport de Bierset n'ont rec,u aucune applicationconcrete, pour avoir ete annulees, soit par le Conseil d'Etat, soit par laCour d'Arbitrage et, d'autre part, que les arretes d'execution du decretdu 29 avril 2004 adopte à la suite des differents recours introduits auConseil d'Etat ou à la Cour d'Arbitrage contre les premieres mesures,recours qui furent couronnes de succes, n'avaient pas encore ete pris lorsde la prononciation de l'arret, alors que c'est le 1er mars 1998 qu'ontdebute les vols de nuit de TNT et les nuisances qui en ont resulte.L'arret attaque constate egalement que d'autres mesures ont ete reprisesou modifiees « et que, meme, certaines mesures concretes ne sont toujourspas perceptibles sur le terrain », « que les mesures concretes relativesaux insonorisations n'etaient pas pretes en concordance avec le debut desvols de la [troisieme defenderesse] », que lesdites mesuresd'insonorisation « ne concernaient pas, à l'origine, la zone la plusexposee du PEB, pour laquelle seules des mesures de rachat etaientenvisagees », que la premiere procedure specifique prevue pour lesrachats a ete attaquee immediatement devant le Conseil d'Etat et annulee,« qu'il y a eu des tatonnements quant aux delimitations cartographiquesprecises des quatre zones », les mesures etant differentes selon la zoneconcernee. Ces constatations impliquent que les riverains concernes nepouvaient savoir quelle mesure leur etait applicable et n'ont donc pasbeneficie d'une protection effective et concrete par l'autorite publique.L'arret attaque n'a donc pu legalement decider que le juste equilibreavait ete respecte et qu'il n'y avait pas lieu de retenir une violation del'article 8 de la Convention europeenne des droits de l'homme (violationde l'article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et deslibertes fondamentales).

A tout le moins, l'arret attaque n'a pu legalement decider qu'il n'y a euà aucun moment dans les annees precedant sa prononciation, violation dudroit au respect de la vie privee et familiale, comprenant le droit à unenvironnement sain (violation de l'article 8 de la Convention desauvegarde des droits de l'homme et des libertes fondamentales). Enfin,l'arret n'a pu exclure legalement l'existence d'une violation de l'article8 de la Convention europeenne des droits de l'homme à l'egard de tous lesdemandeurs, consideres individuellement, sans constater que les mesuresproposees par la [premiere defenderesse] avaient ete concretisees à leuregard (violation de l'article 8 de la Convention de sauvegarde des droitsde l'homme et des libertes fondamentales).

Quatrieme moyen

Dispositions legales violees

- articles 544, 1382 et 1383 du Code civil ;

- articles 17 et 18 du Code judiciaire ;

- articles 1er (avant sa modification par la loi speciale du 9 mars 2003),2 et 9, S: 1er, de la loi speciale du 6 janvier 1989 sur la Courd'arbitrage ;

- articles 14 (avant sa modification par la loi du 25 mai 1999) et 17,

S:S: 1er et 2, des lois coordonnees le 12 janvier 1973 sur le Conseild'Etat ;

- articles 10, 11, 16, 22, 23, 142, 144, 145 et 149 de la Constitution ;

- article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et deslibertes fondamentales, signee à Rome le 4 novembre 1950 et approuvee parla loi du 13 mai 1955 ;

- article 1er du Premier protocole additionnel à la Convention desauvegarde des droits de l'homme et des libertes fondamentales, signe àParis le 20 mars 1952 et approuve par la loi du 13 mai 1955 ;

- principe general du droit consacrant l'egalite devant les chargespubliques, consacre par les articles 10, 11 et 16 de la Constitution.

Decisions et motifs critiques

Apres avoir constate que les demandeurs sont des riverains de l'aeroportde Liege-Bierset ; qu'apres une etude economique confiee par la [premieredefenderesse] à la societe Tractebel en 1991, la [premiere defenderesse]decida d'y developper une activite de fret aerien fonctionnant 24 heuressur 24 ; que [les deux premieres defenderesses] ont conclu des conventionsavec des operateurs de fret aerien, à savoir la societe CAL à une dateindeterminee et la societe de courrier express TNT le 26 fevrier 1996 ;qu'en mai 1996, les premiers vols de nuit furent effectues par la societeCAL ; que la societe TNT commenc,a ses vols de nuit au mois de mars 1998 ;que les demandeurs postulent devant la cour d'appel la reparation duprejudice qu'ils subissent en raison des nuisances sonores produites parles vols de nuit ; « que les nuisances generees par l'aeroport de Biersetsont intolerables dans certaines zones » ; que, dans le cadre de lagestion des nuisances, le gouvernement wallon a elabore un pland'exposition au bruit (PEB) ; que, par un arrete du 10 septembre 1998delimitant la premiere zone du plan d'exposition au bruit de l'aeroport deBierset (zone A), la [premiere defenderesse] a determine la zone danslaquelle les riverains sont exposes à un bruit egal ou superieur à 70dB(A) ; que, par un arrete du meme jour, fixant les mesuresd'accompagnement relatives à la premiere zone d'exposition au bruit (zoneA) des aeroport relevant de la Region wallonne, le gouvernement wallon aprevu le rachat des immeubles situes dans cette zone; que, le 26 novembre1998, un arrete du gouvernement wallon a prevu l'octroi d'une prime dedemenagement aux locataires de la zone A et l'indemnisation du prejudicecommercial subi par certains riverains ; que, par arret du 15 janvier1999, le Conseil d'Etat a suspendu l'arrete de delimitation de la zone Adu plan d'exposition au bruit, dont l'annulation etait demandee par unriverain, estimant serieux un moyen fonde sur un defaut d'habilitationlegale permettant à la Region wallonne d'adopter un tel arrete ; que, pararret du 24 fevrier 2000, le Conseil d'Etat a annule l'arrete du 10septembre 1998 fixant le regime juridique de la zone A, pour le motif quel'urgence alleguee en preambule ne justifiait pas que l'acte attaque n'aitpas ete soumis à l'avis de la section de legislation du Conseil d'Etat ;que le gouvernement wallon adopta d'autres arretes de delimitation deszones : un arrete du 19 octobre 2000 de delimitation de la zone A et unarrete du 20 decembre 2000 de delimitation de la zone B, tous deux annulespar un arret du Conseil d'Etat du 12 novembre 2002, apres que le Conseild'Etat en eut suspendu l'application par arret du 10 aout 2001 ; un arretedu 20 decembre 2000 definissant le regime juridique des immeublesd'habitation classes en zone A, annule par un arret du Conseil d'Etat du24 octobre 2002 ; un arrete du 31 mai 2001 fixant les mesuresd'accompagnement relatives aux immeubles d'habitation de la deuxieme zone(zone B) du plan d'exposition au bruit des aeroports relevant de la Regionwallonne, qui fait l'objet d'un recours en annulation devant le Conseild'Etat; deux arretes du 18 avril 2002 fixant la delimitation des zones Aet B du plan d'exposition au bruit, dont l'execution fut suspendue par unarret du Conseil d'Etat du 30 janvier 2003 ; que, par decrets des 1eravril 1999 et 25 octobre 2001, modifiant la loi du 18 juillet 1973relative à la lutte contre le bruit en y introduisant un article 1erbis,la Region wallonne a delimite differentes zones d'exposition au bruit avecdes mesures d'accompagnement ; que la Cour d'arbitrage a, par arret nDEG51 du 30 avril 2003, prononce l'annulation partielle de l'article 1erbisde la loi du 18 juillet 1973, modifiee par les decrets precites de laRegion wallonne, en ce qui concerne la delimitation de la zone B ou lesriverains subissent des nuisances sonores qui se situent entre 65 et 70dB(A) ; que le decret de la Region wallonne du 29 avril 2004, non publieau moment de la prise en delibere de la cause, a prevu un nouvel indice debruit et elabore un nouveau plan d'exposition au bruit comprenant un plande developpement à long terme (PDLT) qui correspond à une utilisationmaximale de l'aeroport et un plan d'exposition à moyen terme, soit dixans (PEB), dans lequel est prevue la delimitation de quatre zones A à D,selon des niveaux maxima de bruit devant etre fixes « au droit desonometres fixes » ainsi qu'une regle de dix depassements par jour duniveau de bruit maximum ; que, selon ce decret, sauf pour la zone A duPDLT, la limite de 45 dB(A) à l'interieur des habitations est garantiesous reserve de la regle de dix depassements maximum par jour ; que pourcertains habitants des zones A et B, il existe un choix entre le rachat deleur habitation et son insonorisation ; que pour les riverains situes àl'interieur de la zone A qui supportent dejà actuellement des niveauxegaux ou superieurs à 70 dB(A), il est exclusivement prevu le rachat;que, pour les habitants de la zone D, la moins atteinte par les nuisancessonores, il est prevu le benefice d'une prime; que les anciennes zones Cet D n'ont pas encore ete concretement delimitees et qu'aucun riverain deces anciennes zones n'a encore beneficie de mesures concretes ; que ledecret du 29 avril 2004, en lui-meme, ne resout pas les difficultesconcretes d'application des mesures qui devront etre precisees dans desarretes d'application; « que les seules dispositions de ce decret nepermettent pas de definir les details du droit subjectif de chaqueriverain à un rachat ou à une insonorisation »,

et apres avoir egalement constate que la base juridique des demandesoriginaires est la suivante : « A. Quant à l'article 1382 du Code civil: la base juridique centrale de l'action est l'article 1382 du Code civil.Tous les autres moyens invoques le sont dans le cadre de cet article ou encombinaison avec cet article, comme c'est le cas, notamment de l'article 8de la Convention. Pour qu'il puisse etre retenu utilement, cet articlenecessite traditionnellement la presence de trois elements, à savoir 1)la faute, 2) le dommage, et 3) le lien de causalite entre la faute et ledommage. Quant à la faute, premier element d'application de l'article1382 precite, deux composantes peuvent etre envisagees : soit une fauteconstituee par une illegalite, soit une faute appreciee en fonction d'unenorme de comportement, savoir un comportement qui n'est pas uncomportement normalement diligent et prudent. C'est dans la premierecomposante de la faute que s'inscrivent toutes les illegalites invoqueespar les riverains.

B. Quant à l'article 8 de la Convention : cet article enonce, en sonpremier alinea, que 'toute personne a droit au respect de sa vie privee etfamiliale, de son domicile et de sa correspondance'. Dans le presentlitige, c'est l'aspect respect de la vie privee et familiale qui estinvoque. L'alinea 2 de cet article precise qu'il ne peut y avoird'ingerence d'une autorite publique dans l'exercice de ce droit que sicette ingerence 'est prevue par la loi' et si 'elle constitue une mesurequi, dans une societe democratique, est necessaire à la suretenationale..., au bien-etre economique du pays, ... à la protection de lasante ... ou à la protection des droits et libertes d'autrui'. On traduittraditionnellement cet alinea en soulignant qu'une ingerence est possiblesi elle est legale et proportionnelle à d'autres buts legitimespoursuivis. Il y a lieu de constater ici que le probleme de la legalite dela mesure apparait aussi à ce stade.

C. Consequences provisoires pour l'analyse à venir : Ainsi, la presenced'une illegalite des mesures presente un interet tant dans le cadre del'article 1382 du Code civil que dans le cadre de l'article 8 de laConvention, dans la mesure ou, dans le cas de ce dernier article, laconstatation d'une illegalite de la mesure d'ingerence peut dejà rendrecette ingerence inadmissible. [...] Le raisonnement qui peut etre fait surl'article 1er du Premier protocole additionnel est totalement parallele.En effet, le premier alinea de cet article enonce que 'Toute personnephysique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut etre privede sa propriete que pour cause d'utilite publique et dans les conditionsprevues par la loi et les principes generaux du droit international'.L'alinea 2 precise que ces dispositions `ne portent pas atteinte [...] audroit [...] de mettre en vigueur les lois [...] necessaires pourreglementer l'usage des biens conformement à l'interet general ou pourassurer le paiement des impots ou autres contributions ou des amendes'. Ilpeut etre conclu à ce stade qu'il est indispensable d'analyser d'abordtoutes les causes d'illegalites invoquees par les riverains avant derevenir à l'application des articles 1382 du Code civil et 8 de laConvention »,

l'arret attaque dit les demandes non fondees « en tant qu'elles visent àfaire prononcer les illegalites ou des nullites en lien causal avec lefondement central de la demande principale basee sur un comportementfautif ou une ingerence disproportionnee ; en tant qu'elles reposent surl'article 1382 du Code civil, l'article 8 de la Convention europeenne desdroits de l'homme et l'article 1er du Premier protocole additionnel ; entant qu'elles reposent sur la theorie des troubles de voisinage », etcondamne les demandeurs aux depens de la societe SAB, de la societe TNT etde la Region wallonne, l'arret etant declare commun à la societeBelgocontrol, à l'Etat belge et à la societe CAL.

L'arret attaque fonde cette decision sur les motifs suivants :

(1) Quant aux arrets d'annulation du Conseil d'Etat et à l'arretd'annulation partielle de la Cour d'arbitrage : « A priori, il semble queles arrets [du Conseil d'Etat] ont sanctionne, soit une absenced'habilitation precise pour prendre les dispositions attaquees, soit uneinsuffisance de forme ou de motivation de la mesure. Il semble aussi queles mesures annulees pouvaient etre reprises quasi à l'identique apresque les corrections necessaires auraient ete apportees. En tout etat decause, meme à retenir que ces arrets seraient constitutifs, en soi, defautes de la [premiere defenderesse], il y aurait lieu de poursuivrel'analyse pour ces illegalites en se referant au point III suivant del'arret ; quant à l'annulation retenue par la Cour d'arbitrage dans sonarret nDEG 51 du 30 avril 2003, elle ne concerne que la delimitation de lazone B au regard d'une discrimination fondee sur le seul critere d'unesituation semblable, portes et fenetres fermees, pour les riverains de lazone B compares aux riverains de la zone A. Il s'agit donc d'uneannulation tout à fait marginale par rapport à l'ensemble des moyenssoutenus devant la Cour d'arbitrage dans les deux procedures qui ont donnelieu, à ce jour, à un arret de cette cour [...]. [...] Si la Cour[d'arbitrage] mentionne qu'il ne lui appartient pas 'de donner uneappreciation sur les conclusions des differents rapports etablis par lesexperts', elle `constate toutefois qu'aucun des rapports ne permet deconclure que les riverains de l'aeroport de Bierset pourraient occuperleur immeuble, sans qu'il soit porte une atteinte exorbitante au respectde leur vie privee, s'ils doivent subir des nuisances sonores qui sesituent entre 65 et 70 dB(A) (...) Si l'annulation susvisee peut etreretenue à ce stade comme constituant une faute, il y a aussi lieu depoursuivre l'analyse en se referant au point III de l'arret qui suitimmediatement » ;

(2) « Analyse de ces illegalites en rapport avec 1382 du Code civil etles articles 8 de la Convention et 1er du Premier protocole additionnel.En theorie : au surplus, pour pouvoir etre retenues utilement, il faudraitencore que ces illegalites puissent etre contenues dans le cadre desarticles susvises. Dans le cadre de l'article 1382 du Code civil, retenirune illegalite n'a un interet que si elle peut etre mise en lien causalavec le dommage postule. [...] A priori, une distinction pourrait etrefaite entre les illegalites invoquees à l'egard des actes ou desdecisions prises pour creer ou faciliter les vols de nuit et lesillegalites invoquees à l'egard des actes ou des decisions qui ont pourbut de remedier aux nuisances generees par les vols de nuit ; en effet,seules les illegalites de la premiere categorie peuvent avoir un liencausal avec les dommages postules ; pour les illegalites de la deuxiemecategorie, on ne voit pas le lien causal avec les dommages, le but, dansce cas, va dans l'autre sens, savoir remedier aux nuisances et non pas lescreer. Dans le cadre des articles 8 et 1er susvises, un raisonnementrelativement similaire peut etre elabore ; ces articles ne permettent quedes ingerences legales. Les illegalites invoquees peuvent etre classees endeux categories, savoir des illegalites quant à la creation et à lafacilitation de l'ingerence meme, et des illegalites qui touchent lesmesures destinees à attenuer ou à remedier à l'ingerence au droitprotege. Dans cette mesure, seules les premieres illegalites pourrait enetre retenues dans le cadre de ces articles comme un element utiled'illegalite » ;

(3) « En pratique : il resulte de l'analyse faite au point II precedentque la plupart des illegalites invoquees ne peuvent dejà pas etreretenues utilement en tant que telles ; par ailleurs, les seulesillegalites qui ne peuvent etre eliminees sur leur analyse interne, àsavoir les illegalites tirees des arrets d'annulation du Conseil d'Etat etde la Cour d'arbitrage rentrent manifestement dans la deuxieme categorie,savoir que ces illegalites ne peuvent etre retenues comme etant en liencausal avec les dommages postules ; pour rappel, la Cour d'arbitrage n'anullement sanctionne les vols de nuit en eux-memes mais uniquement ladelimitation de la zone B en tant que les riverains de cette zoneconnaissaient une situation similaire à ceux de la zone A en devant vivreportes et fenetres fermees. Ainsi, la seule faute à retenir estuniquement une violation du principe d'egalite entre les riverains de lazone A et de la zone B quant au fait de devoir vivre portes et fenetresfermees mais sans que le principe meme d'une delimitation des zones,l'indice de bruit retenu ou encore les mesures de rachat etd'insonorisation ne soient aussi sanctionnees ; dans cette mesure, on peutse demander quel est le lien entre les dommages invoques et la seuleviolation retenue par la Cour d'arbitrage et ceci, d'autant plus que cetarret de la Cour d'arbitrage ne precise nullement la maniere dont ilpourrait etre remedie à cette discrimination [...] ; on pourrait aussi s'interroger sur le dommage precis qui pourrait etre invoque en liaisoncausale suffisante avec cette seule violation retenue par la Courd'arbitrage ; sur ce point, les riverains n'exposent guere le dommagespecifique qui serait cause par cette discrimination qui ne pourrait, detoute maniere, que toucher certains des riverains qui sont à la cause[...] ; quant aux arrets du Conseil d'Etat, les dispositions annuleesavaient pour objet de remedier aux nuisances creees et non de les creer oude les faciliter ; au surplus, les annulations n'ayant ete prononcees quepour des motifs de manque d'habilitation, manque de forme ou demotivation, les dispositions annulees pouvaient en consequence etrereprises à l'identique quant au fond ; dans cette mesure, le lien decausalite entre les dommages subis et le manquement n'est pas etabli àsuffisance » ;

(4) « Le raisonnement des premiers juges sur le lien de causalite :« Quant aux mesures annulees par le Conseil d'Etat ou la Courd'arbitrage, ces mesures avaient pour but de gerer les nuisances sonoreset, si elles avaient ete appliquees, elles ne pouvaient qu'ameliorer lasituation de beaucoup de riverains ; au surplus, il y a lieu de s'enreferer à ce qui sera dit ci-dessous quant à l'analyse concrete desmesures de rachat et d'insonorisation, en soulignant dejà, à ce stade,que, malgre les annulations prononcees par lesdites juridictions, la[premiere defenderesse] a poursuivi la mise en place des mesures qu'ellevoulait prendre ; notamment, les mesures de rachat se sont toujourspoursuivies sous la reserve d'une seule periode de suspension de quelquesmois imposee par un arret du Conseil d'Etat ; ainsi, le lien de causaliteentre les annulations prononcees et le dommage invoque n'est passuffisamment etabli » ;

(5) Quant aux « premieres mesures prises par la Region wallonne dans lecadre de la gestion des nuisances sonores. La definition du PEB et sesconsequences pratiques : [...] il n'est plus question de savoir si lesmesures prises etaient conformes à une norme d'habilitation ou à desregles formelles de motivation mais il faut envisager le fond meme de lamesure ; cette derniere remarque est valable pour toute l'analyse quisuivra quant aux mesures prises pour la gestion des nuisances sonores ;par ailleurs, dans le cadre des mesures de gestion du bruit, il ne peutnon plus etre reproche à la [premiere defenderesse] un changement dansles mesures initialement adoptees si, à la fois, les mesures adoptees audepart et les mesures prises par apres n'etaient pas fautives. Enfin, iln'est nullement question de minimiser les nuisances manifestes subies parles riverains de l'aeroport de Bierset et les consequences que cesnuisances peuvent avoir sur la sante ; la seule question, à ce stade, estde voir si les mesures prises pour la gestion de ces nuisances sont ou nonfautives » ;

(6) « Il y a d'abord lieu de relever que le principe de depart del'elaboration du PEB, qui est de distinguer des zones de bruit autour del'aeroport suivant l'importance de la nuisance sonore, n'est nullementcritiquable ; le principe de quatre zones differenciees dans cette logiqueet le fait de prevoir des mesures prises pour chaque zone n'est pas nonplus fautif ; [...] quant aux premieres delimitations des zones, on peutd'abord relever que les parties à la cause etaient d'accord de declarerque les delimitations retenues assez rapidement [...] correspondaientrelativement bien aux constatations faites par l'expert judiciaire Plomdans la qualification des nuisances en plusieurs categories ; au surplus,certes, il y a eu des tatonnements quant aux delimitations cartographiquesprecises des zones ; neanmoins, meme si ces tatonnements avaient uneimportance tres grande pour certains riverains, il n'est pas demontre àsuffisance que les delimitations successives faites etaient fautives et,plus precisement, que le comportement suivi n'aurait pas ete lecomportement qu'aurait suivi une administration normalement diligente etprudente placee dans une situation identique ; ces tatonnements ont aussiete corriges par l'application d'un principe d'egalite ; quant aux mesuresprises à l'origine au regard de chaque zone, on ne perc,oit pas la fauted'avoir prevu des mesures de rachat pour la zone A et des mesuresd'insonorisation pour les trois autres zones moins atteintes par lanuisance sonore ; ces mesures ont aussi ete accompagnees d'autres mesuresqui visaient à accorder une prime aux locataires de la zone A pour leurdemenagement et qui prevoyaient une indemnisation pour le prejudicecommercial subi par certains riverains. [...]. Certains riverains ontbeneficie de ces mesures specifiques [...] ; au surplus, sans entrer dansle detail, qui necessiterait une analyse approfondie de certains recoursintroduits devant le Conseil d'Etat, il n'est pas non plus fautif deprevoir, en principe, des poches qui pourraient etre incluses dans uneautre zone pour des raisons urbanistiques ; enfin, la [premieredefenderesse] a prevu la possibilite pour les riverains de demander quedes mesures specifiques de bruit soient prises au niveau de leurhabitation avec à la cle un changement de zone en consequence desresultats obtenus » ;

(7) Quant aux « premieres mesures de rachat. La decision theoriqued'adopter un principe de rachat volontaire plutot qu'une mesure forceetelle une expropriation pour cause d'utilite publique n'est pas, en soi,une decision fautive et ceci, meme si, en pratique, les riverains de lazone A ne peuvent raisonnablement trouver un acquereur tiers pour leurimmeuble ; une procedure de rachat volontaire n'est pas necessairementplus defavorable à l'administre ; [...] quant à la premiere procedurespecifique prevue pour les rachats, soit celle qui permettait uneintervention de notaires pour evaluer le bien, il y a lieu de constaterque des riverains l'ont attaquee immediatement devant le Conseil d'Etat ;certes, le recours au Conseil d'Etat a abouti à la nullite de cetteprocedure mais uniquement au motif de l'absence d'habilitation expresse dupouvoir qui avait pris cette norme de procedure ; si on rentre dansl'application pratique qui pouvait etre faite de cette mesure, on ne voitpas en quoi la procedure prevue etait fautive ; il est interessant, dejàà ce stade, de voir ce qui s'est passe ensuite de l'annulation de cetteprocedure ; la Region wallonne a finalement prevu une simple procedurenegociee traditionnelle comme dans une vente ordinaire ; les riverainsaffirment à present que la procedure n'offre pas suffisamment degarantie ; c'est une attitude actuelle assez paradoxale si on la relie àcelle qui a precede ; en tout etat de cause, il y a lieu de constater queles procedures successives mises en place par la Region wallonne n'etaientpas et ne sont pas, en soi, fautives quant au fond de leurreglementation ; quant à la concretisation pratique des mesures et quantaux decisions individuelles de rachat, les riverains concernes secontentent d'affirmations [...] ou d'un expose des faits insuffisammentprecis pour apprecier l'existence d'une faute ou, encore, presentent dessituations marginales qui ne peuvent etre imputees à faute à la Regionwallonne [...]. La cour [d'appel] ne peut que constater que les partiessont contraires en fait quant aux pratiques de la Region wallonne ou desorganismes, dont la SOWAER, charges par elle de proceder au rachat ; onpeut d 'ailleurs relever que la plupart des riverains qui invoquent lefait que le rachat de leur immeuble n'est pas encore intervenu n'exposentpas precisement les difficultes intervenues quant à la procedure [...] ;plus precisement, quant aux prix obtenus pour les rachats, il n'est pasdemontre que la Region wallonne ou ceux qui ont ete charges par elle denegocier les prix commettraient des fautes ou auraient des attitudesabusives ; les riverains ne rapportent pas non plus la preuve des immensesdifficultes invoquees pour racheter un nouvel immeuble ; les ordonnancesde referes prononcees à Namur [...] accrediteraient plutot la theseinverse » ;

(8) Quant aux « premieres mesures en matiere d'insonorisation », ensubstance : la Region wallonne a fait proceder à des testsd'insonorisation sur des immeubles; les mesures ne sont pas fautives;« au surplus, le fait d'avoir ulterieurement confie la responsabilite dela realisation des travaux d'insonorisation à la SOWEAR n'est pas en soifautif dans la mesure ou la Region wallonne ne conteste pas que saresponsabilite globale dans la gestion des nuisances sonores peut toujoursetre invoquee » ;

(9) Quant à « la concordance des mesures avec le debut des vols denuit » : « Le ministre competent pour la gestion des affairesaeroportuaires a transmis au gouvernement wallon une note du 30 avril 1998[...], note qui contient le `programme-cadre visant à accompagner ledeveloppement des activites aeroportuaires en region wallonne' ; cettenote traite longuement du probleme du controle et de la maitrise du bruitdans les zones du PEB ; elle mentionne les indices, les limites theoriquesdes zones et les mesures urbanistiques à prendre ; cette note est soumiseau gouvernement wallon pour qu'il en approuve les principes ; ellementionne qu'elle est accompagnee d'un projet d'arrete delimitant lapremiere zone d'exposition au bruit, soit la zone A, et d'un projet depromesse unilaterale d'achat pour cette zone, projets à soumettre auxcolleges echevinaux concernes pour qu'ils soient associes rapidement auxdecisions à prendre [...] ; il resulte de cette note que l'administrationde la Region wallonne avait dejà elabore à ce moment, soit quasiconcomitamment avec le debut des vols de nuit, les lignes essentielles dela politique à suivre pour les mesures de gestion du bruit ; au surplus,les arretes pratiques pour les mesures de rachat ont ete pris le 10septembre 1998, soit à peine plus de six mois apres le debut des vols denuit ; ainsi, deux arretes de la meme date prevoyaient respectivement ladelimitation de la zone A et la procedure de rachat avec le concours denotaires pour la fixation du prix ; [...] il y a ainsi lieu de constaterque les mesures concretes les plus urgentes, soit celles qui sontrelatives à la gestion du trafic aerien et celles qui sont liees à lagestion du bruit dans la zone du PEB la plus exposee, etaient prises soitquasi concomitamment, soit dans un delai raisonnable au regard du debutdes activites de la [troisieme defenderesse] » ;

(10) Quant aux « mesures non executees en concordance avec le debut desvols de [la troisieme defenderesse] » : « Les mesures concretesrelatives aux insonorisations n'etaient pas pretes en concordance avec ledebut des vols de nuit ; neanmoins, la cour [d'appel] estime ne pas devoirretenir une faute à ce niveau aux motifs suivants : les mesuresd'insonorisation ne concernaient pas, à l'origine, la zone la plusexposee du PEB, pour laquelle seules des mesures de rachat etaientenvisagees ; la finalisation de ces travaux d'insonorisation devaitnecessiter des essais de faisabilite avant de les lancer sur une grandeechelle ; ce type de travaux demandait une participation active etpositive des riverains [...] ; si on compare la situation des riverains del'aeroport de Bierset par rapport à celle des riverains d'autresaeroports, il faut constater que des mesures concretes d'insonorisation nepeuvent raisonnablement que prendre un temps consequent avant d'etrerealisees [...] ; il resulte de cette analyse qu'une faute de concordancedes mesures ne peut etre retenue pour la periode du debut des vols de la[troisieme defenderesse] » ;

(11) « Quant la chronologie ulterieure, il y a lieu d'abord de releverqu'on ne peut pas reprocher à la Region wallonne une inactivitenormative ; en effet, on peut relever notamment [...], outre les multiplesmesures pour definir et organiser les travaux d'insonorisation : enapplication des deux arretes susvises du 24 septembre 1998 delimitant lazone A et etablissant une procedure de rachat, l'adoption, le 6 octobre1998, du reglement des notaires ; [...] des mesures d'accompagnement deslocataires, dont une prime de 150.000 francs ; [...] un decret modifiantla loi du 18 juillet 1973 relative à la lutte contre le bruit ; [...] unarrete etablissant des mesures d'accompagnement pour les troublescommerciaux ; [...] la nouvelle delimitation de la zone A [...] ; [...] ladelimitation de la zone B et une nouvelle procedure de rachat ; troisdecrets du 8 juin 2001, [...] un premier decret qui concerne les aeroportsregionaux et prevoit, notamment, l'ouverture 24h/24 heures de l'aeroportde Bierset, un deuxieme decret qui modifie la loi du 18 juillet 1973relative à la lutte contre le bruit, et un troisieme decret qui institueune autorite independante chargee du controle et du suivi en matiere denuisances aeroportuaires ; [...] la creation d'une procedured'insonorisation en zone B [...] ; un decret modifiant la loi du18 juillet 1973 susvisee et introduisant un principe d'egalite devant lesnuisances sonores ; [...] un arrete relatif à l'exercice des missionsconfiees à la SOWEAR ; [...] des nouvelles delimitations des zones A etB ; en novembre 2002, à la suite de l'annulation de la procedure derachat, la SOWEAR est chargee de negocier les rachats par une procedureclassique et individuelle de vente ; [...] une nouvelle delimitation de lazone A, le Conseil d'Etat ayant suspendu la precedente delimitation ; unarrete prevoyant des sanctions administratives pour les compagniesaeriennes qui depasseraient certains seuils de bruit ; le 28 avril 2004,le vote du nouveau decret de la Region wallonne qui modifie la loiprecitee du 18 juillet 1973 » ;

(12) « Certes, il y a lieu, ensuite, de s'interroger sur le fait desavoir si la circonstance que certaines mesures ont ete annulees,reprises, modifiees et que, meme, certaines mesures concretes ne sonttoujours pas perceptibles sur le terrain est imputable à faute à laRegion wallonne ; sur ce point, à defaut de faute prealable retenue de la[premiere defenderesse], les circonstances susvisees ne peuvent etreappreciees sans tenir compte de l'attitude des riverains ; sur ce pointprecis, on peut relever les elements suivants : bien avant meme le debutdes vols de nuit, certains riverains avaient dejà assigne en refere,devant les juridictions bruxelloises, la Region wallonne, l'Etat belge etla societe SAB pour, notamment, obtenir l'interdiction de ces vols [...] ;une nouvelle demande d'interdiction de ces vols a ete postulee devant lejuge des referes de Liege, parallelement à des demandes en matiered'expertise [...] ; le juge des referes de Namur a ete saisi d'une demandesimilaire d'interdiction des vols [...] ; la quasi totalite des mesuresprises par la Region wallonne ont ete ou sont attaquees devant le Conseild'Etat ou la Cour d'arbitrage, selon le type de la norme en cause ; selonles chiffres non contestes mentionnes dans un rapport environnemental deSERINFO-Liege, en avril 2003, soit cinq ans apres le debut des vols de la[troisieme defenderesse], on peut relever que, pour la zone A, soit pourla procedure de rachat, 557 dossiers pour les maisons sur 1412 possiblesn'etaient pas encore rentres dans la procedure, 128 des maisons acquisesetaient toujours occupees par l'ancien vendeur ou locataire, et que, pourles insonorisations de la zone B, sur 1960 dossiers possibles, 1149n'etaient pas rentres dans la procedure et 399 n'avaient pas encoreretourne le formulaire d'aides delivre [...] ; certes, cette attitude desriverains ou de certains d'entre eux ne peut leur etre reprochee àfaute ; neanmoins, cette attitude negative de blocage ou d'oppositionsystematique à toutes les mesures prises par la Region wallonne peutavoir pour effet de considerer que le fait que les mesures ont etemodifiees et meme que certaines n'ont toujours pas rec,u d'application surle terrain n'est pas constitutif de faute dans le chef de la Regionwallonne, qui s'est trouvee acculee dans de multiples procedures dont lalogique globale etait loin d'etre evidente à suivre ; on souligneraencore, sur ce dernier point, qu'alors que certains riverains avaientobtenu la suspension de toutes les procedures de rachat en cours souspeine d'une astreinte tres importante à charge de la Region wallonne,d'autres riverains assignaient cette meme region pour obtenir sacondamnation, sous astreinte, à leur payer le prix convenu dans le cadrede cette procedure de rachat [...] ; cette attitude de blocage peutd'ailleurs etre couplee à l'attitude attentiste [...] de beaucoup deriverains, attitude qui peut etre reprise comme un element objectifd'appreciation meme si elle n'est nullement reprochable en soi et peuts'expliquer par des considerations humaines, affectives et sentimentales[...] ; cette attitude attentiste etait d'autant plus problematique queles mesures de gestion de la nuisance sonore impliquaient la necessited'une cooperation des riverains quant aux mesures d'insonorisation àfaire dans leurs habitations et quant à la procedure de rachat qui reposesur un mode volontaire ; il faut aussi reconnaitre que l'attitude ou lasituation de certains riverains est assez surprenante, si pascontradictoire, avec la these generale defendue des nuisancesinsupportables, de 1'inhabitabilite et de l'impossibilite de faire destravaux d'isolation dans la zone A [...] ; au surplus, [...] le seul faitque des mesures aient ete modifiees par la Region wallonne n'est pas ensoit fautif [...] ; l'attitude de la Region wallonne, dans le cadre desmultiples procedures introduites contre elle, n'a ete fautive ni dans ladiligence mise à corriger les mesures ni dans sa volonte de continuer àappliquer des mesures de gestion de la nuisance sonore ; ainsi : [...] laRegion wallonne a toujours poursuivi les rachats d'habitation qui n'ontete stoppes que pour une courte periode et ceci, en raison de la menaced'une astreinte d'un montant particulierement dissuasif ; il n'est pasdemontre que la Region wallonne soit restee inactive de maniere fautiveapres des annulations du Conseil d'Etat ou l'arret nDEG 51/2003 de la Courd'arbitrage ; le processus d'elaboration du decret du 29 avril 2004 estreste raisonnable [...] ; le rythme des travaux d'insonorisation s'estaccelere, le ministre Kubla ayant indique, au cours des travauxpreparatoires du nouveau decret, qu'à la fin mars 2004, plus de deuxcents maisons ont ete completement isolees » ;

(13) « La cour [d'appel] n'a nullement envisage l'attitude des riverainsou de certains d'entre eux comme constituant une faute ou comme pouvantempecher, en application de la theorie de l'abus de droit, la reparationdes dommages pretendument causes par la faute de la Region wallonne, maisa uniquement envisage cette attitude dans le cadre tres restreint de laquestion si le retard dans la mise en oeuvre concrete de certaines mesuresetait imputable à faute à la Region wallonne ; [...] s'il seraitinadmissible de pretendre que les riverains commettraient des fautes enayant mene des procedures judiciaires qu'ils ont gagnees, il estinadmissible de pretendre que la Region wallonne profiterait `en realitede l'existence de decisions qui lui sont defavorables pour retarder laprise de mesures en faveur des riverains' : le fait, notamment mentionneci-dessus quant à la continuite des rachats, demontrant l'inverse decette affirmation » ;

(14) Quant aux articles 8 de la convention et 1er du Premier protocoleadditionnel, « la Region wallonne [...] ne conteste pas que des nuisancessonores telles celles qui sont generees par les activites de l'aeroport deBierset peuvent constituer une ingerence au regard du droit au respect dela vie privee et familiale ou une atteinte au droit de propriete ; [...]pour rappel, le probleme de la prise en compte d'illegalites a dejà eteanalyse et aucune illegalite utile n'a ete retenue pour l'applicationspecifique des articles de la convention et du Premier protocoleadditionnel etudies à ce stade, soit que l'illegalite invoquee n'etaitpas retenue comme telle, soit que l'illegalite en cause n'etait pas uneillegalite des mesures creant l'ingerence mais une illegalite touchantseulement aux mesures destinees à gerer les nuisances sonores, soit quel'illegalite vantee n'etait pas en lien causal suffisant avec le dommageinvoque ; la notion de faute a ete ecartee, y compris une faute dechronologie dans les mesures prises ; sur ce point, il y a lieu deconsiderer comme reprise à ce stade toute l'analyse faite ci-dessus quantà la faute ; en consequence, le seul probleme qui peut encore etreexamine à ce stade est la question si l'ingerence dans la vie privee etl'atteinte au droit de propriete sont des mesures proportionnelles enfonction du but poursuivi et ceci, en prenant en compte les mesuresprevues par la Region wallonne pour la gestion des nuisances sonores ».En ce qui concerne particulierement l'article 8 de la Convention, ensubstance, la Region wallonne reconnait l'existence du droit à laprotection d'un environnement sain. Quant à l'appreciation du justeequilibre entre les interets economiques et les interets« environnementaux », « l'analyse à faire est celle de la marged'appreciation de la Region wallonne dans le cadre du juste equilibre àrespecter entre les ingerences subies par les riverains et les interetseconomiques du developpement de l'activite en cause et ceci, en regardantaussi les mesures mises en place pour la gestion du bruit [...] ; dans cecadre, il y a lieu de relever les elements suivants : [...] les mesuresprises pour la gestion des nuisances sont assez nombreuses, soitreglementation des routes aeriennes, reglementation du type d'avionsutilises, reglementation pour l'elaboration d'un PEB, reglementation pourle rachat de certains immeubles et reglementation pour desinsonorisations ». Quant à l'article 1er du Premier protocoleadditionnel, « pour rappel, la violation doit s'apprecier en fonction desmesures prises par la Region wallonne pour la gestion des nuisances ;[...] ; il y a lieu de souligner, quant au respect du droit de propriete,l'existence des mesures specifiques de rachat et d'insonorisation prevuespar la Region wallonne ; [...] pour les cas qui peuvent etre considerescomme des violations du droit de propriete en raison du caractereparticulierement eleve des nuisances, il leur est loisible d'obtenir lerachat de leur immeuble ; quant aux procedures concretes de rachat, cesmesures n'ont pas ete jugees fautives et la preuve n'est pas rapportee queles sommes octroyees par la Region wallonne dans ce cadre seraientinsuffisantes pour considerer qu'une juste indemnisation n'a pas etedonnee aux riverains concernes ; quant aux mesures d'insonorisation, iln'est pas prouve que ces mesures ne seraient pas satisfaisantes ou qu'il yaurait une atteinte suffisamment grave au droit de propriete des riverainsconcernes » ;

(15) Quant à la theorie des troubles de voisinage : « Il n'estevidemment pas question de nier l'importance des nuisances sonores causeespar l'activite realisee sur le site de Bierset mais de voir si la theorieinvoquee peut etre appliquee au cas d'espece ; la theorie des troubles devoisinage repose sur la notion d'une rupture de l'equilibre, soit entredes fonds voisins, soit vis-à-vis des charges publiques ; il y a donclieu de s'interroger sur l'equilibre et sur la rupture de l'equilibre ;quant aux circonstances de fait pour definir l'equilibre, il y a lieu deconstater la caracteristique de la cause qui est la presence d'un aeroportqui est particulierement ancien puisqu'il a ete construit durant lesannees 1914-1918 ; les riverains ne contestent evidemment pas cettepresence particulierement ancienne de l'aeroport mais font etat du faitque cet aeroport n'avait qu'une activite reduite au debut des annees1990 ; ce fait est exact mais ne demontre pas que c'est precisement cesannees qui doivent etre prises en compte pour apprecier l'equilibre[...] ; on peut aussi poser le probleme d'une maniere beaucoup plusgenerale, savoir : quel est le trouble normal auquel on peut s'attendre àla proximite d'un aeroport ? [...] Au surplus, quant à l'appreciation dela rupture et quant au caractere excessif du trouble, il faut s'interrogersur la situation precise qui doit etre prise en compte ; sur ce point, ily a lieu de tenir compte des mesures prises par la Region wallonne pourremedier aux nuisances sonores ; dans la mesure ou aucune faute n'afinalement ete retenue à charge de la Region wallonne, on ne peutapprecier les elements utiles susvises en omettant ces mesures ; onpourrait encore rappeler ici les chiffres importants susmentionnes deriverains qui ont, pendant des annees, neglige de rentrer dans lesprocedures prevues par la Region wallonne et qui ne pourraient, ainsi,invoquer, dans le cadre de la theorie des troubles de voisinage, untrouble dont ils n'ont pas cherche à eviter ou à diminuer les nuisancesalors que des mesures leur etaient proposees dans ce sens ; [...] tresrapidement apres le debut des vols, les riverains qui supportaient lesnuisances les plus graves pouvaient demander le rachat de leur immeuble etdemenager ; les hypotheses de nuisance dans lesquelles le rachat estpossible ont ete etendues, notamment, dans le nouveau decret vote le 28avril 2004 ; sur ce point precis en rapport avec les troubles devoisinage, la Region wallonne a ecrit dans ses conclusionscomplementaires, sans que les autres parties contestent ensuiteformellement ces affirmations, que : 'Le decret du 28 avril 2004 ameliorela situation des riverains puisqu'il vise à mettre les riverains situesen zone B sur le meme pied que ceux situes en zone A en leur permettant devendre leur immeuble à la Region wallonne. Les riverains situes en zone Bbeneficient ainsi du regime juridique prevu en cas de nuisancesinsupportables alors qu'aux termes du rapport Plom, notamment, bon nombred'entre eux ne subissent que des nuisances qualifiees de graves - et doncnon excessives aux alentours immediats d'un aeroport. Ces riverains vontdonc ainsi recevoir une juste et adequate compensation du troubleeffectivement subi, qui excede, pour tous les riverains, un trouble normalde voisinage ; [...] quant aux autres riverains qui subissent desnuisances nettement moindres, il n'est pas suffisamment prouve que lestravaux d'insonorisation dont ils peuvent beneficier ne sont pas de natureà supprimer le trouble subi, à supposer, quod non, que ce trouble seraitexcessif ; il y a lieu, en consequence, de retenir qu'outre la difficultespecifique de definir, à proximite d'un aeroport, un equilibre devoisinage ou de charges publiques, les riverains qui pourraient invoquerune nuisance non admissible dans le cadre de la theorie en cause peuventbeneficier de mesures prevues par la Region wallonne et qui sontsusceptibles, soit d'attenuer le trouble de telle maniere qu'il ne soitplus excessif, soit par le rachat ou le payement d'indemnites dedemenagement, de supprimer le trouble en quittant les zones denuisance » ;

(16) « La cour [d'appel] ne peut entendre des temoins pour savoir 'dansquel delai' les mesures utiles et indispensables pour la gestion desnuisances sonores `pourraient se concretiser de maniere effective sur leterrain' ; on peut seulement relever, sur ce point, que l'adoption dudecret du 29 avril 2004 est, certes, un pas franchi, mais qu'il devra y enavoir encore d'autres, bien plus considerables sur le plan del'effectivite, qui devront rapidement etre pleinement executes, ce quinecessitera, compte tenu de la nature des mesures en cause, unecollaboration entre, d'une part, les riverains concernes, et, d'autrepart, la Region wallonne et les organes designes par elle pour la mise enoeuvre de ces mesures ».

Griefs

Premiere branche

En vertu des articles 1382 et 1383 du Code civil, le juge ne peut ecartertout lien causal entre une faute qu'il constate et un dommage dont il estdemande reparation que s'il ressort de ses constatations que, sans lafaute, le dommage se serait produit de la meme fac,on.

En l'espece, l'arret attaque constate : A) que les demandeurs ou, à toutle moins, un certain nombre de riverains que l'arret n'identifie passubissent depuis le debut des vols de nuit autorises par la Regionwallonne au depart de l'aeroport de Bierset, soit depuis le mois de mars1998, des nuisances sonores insupportables ou graves, telles que seul lerachat de leur habitation puisse y mettre fin ou telles qu'uneinsonorisation de leur immeuble doit etre realisee pour que celui-cipuisse etre habitable ; B) que, autorisant et favorisant les vols de nuità l'aeroport de Bierset, la Region wallonne est tenue de prendre desmesures pour ameliorer la situation des riverains subissant cesnuisances ; C) que des illegalites commises par la Region wallonne ontempeche que les mesures decretales ou reglementaires decidees en vue dereduire les nuisances subies par les riverains aient pu entrer envigueur ; qu'en effet, l'arret attaque constate que les mesures prises parles arretes de la Region wallonne visant à gerer ou à reduire lesnuisances sonores soit ont vu leur application suspendue par des arrets duConseil d'Etat, soit ont ete annules en raison d'illegalites commises parla Region wallonne, qu'il s'agisse de defaut d'habilitation ou denon-respect des formalites prescrites à peine de nullite, et que lesmesures prises par decret, modifiant la loi du 18 juillet 1973 relative àla lutte contre le bruit, ont ete partiellement annulees par la Courd'arbitrage. Ces constatations impliquent que les differentes zonesd'exposition au bruit n'ont, au jour de l'arret, pas encore etedelimitees, qu'elles ne le seront que lors de la future mise en oeuvre dudecret de la Region wallonne du 29 avril 2004, que les droits desriverains qui dependent de la situation de leur habitation dans l'une oul'autre de ces zones ne sont toujours pas definis et que, des lors, lesnuisances concretes n'ont pas ete attenuees par la mise en oeuvre desmesures decidees par la Region wallonne.

L'arret attaque ne denie pas que les illegalites ayant conduit à cesannulations ou suspensions constituent des fautes de la Region wallonne.L'arret attaque decide toutefois que la Region wallonne ne doit pasreparer le dommage subi par les riverains, lesquels n'ont jouit d'aucuneattenuation concrete des nuisances qu'ils subissent depuis 1998, pour lemotif qu'il n'y a pas de lien causal entre les illegalites relevees et lesdommages des riverains, des lors que ces illegalites ne concernent pas desactes ou des decisions pris pour creer ou faciliter les vols de nuit maisdes actes ou des decisions qui ont pour but de remedier aux nuisancesgenerees par les vols de nuit, que les mesures annulees pouvaient etrereprises telles quelles par la Region wallonne et que, si elles avaientete appliquees, elles n'auraient pu qu'ameliorer la situation desriverains.

Il ne ressort toutefois ni de ces motifs ni d'aucun autre motif de l'arretattaque que, sans les illegalites commises par la Region wallonne qui ontempeche que les mesures destinees à ameliorer le sort des riverains aientpu trouver application en tout cas jusqu'au jour de l'arret, le dommagedont les demandeurs demandaient la reparation aurait ete le meme. Aucontraire, l'arret constate que, si les actes et decisions de la Regionwallonne contenant les differentes mesures de gestion des nuisancessonores n'avaient pas ete annules en raison des illegalites commises parla Region, la situation des riverains aurait ete amelioree. Des lors, enrefusant toute indemnisation du dommage resultant des nuisances sonoressubies par les demandeurs pour le motif qu'un lien causal n'existe pasentre ces dommages et les illegalites commises par la Region wallonne quiconstituent des fautes, l'arret n'est pas legalement justifie (violationdes articles 1382 et 1383 du Code civil).

En outre, l'arret, qui ne determine pas quels riverains n'auraient en toutcas pas subi de nuisances graves ou insupportables, ne permet pas à laCour de controler la legalite de sa decision, en sorte qu'il n'est pasregulierement motive (violation de l'article 149 de la Constitution).L'arret laisse en outre sans reponse le moyen des pages 110 et 111 desconclusions de synthese de MMes `t Serstevens et Cambier enumerant lesdemandeurs qui doivent etre reconnus, sur la base du rapport de l'expertPlom, comme habitant des zones de nuisances insupportables et ceux quisont domicilies à proximite immediate de ces zones. A ce titre egalement,l'arret n'est pas regulierement motive (violation de l'article 149 de laConstitution).

Deuxieme branche

Saisi d'une demande de reparation du dommage cause par une fauteextracontractuelle, le juge ne peut debouter le demandeur en reparation detoute indemnite que s'il constate, sur la base des donnees concretes de lacause, que sans la faute commise le dommage ne se serait pas produit telqu'il s'est realise.

En l'espece, l'arret attaque decide de ne pas allouer d'indemnites auxdemandeurs pour le prejudice resultant des nuisances sonores auxquelles laRegion wallonne n'a pas remedie alors qu'elle en avait l'obligation, pourles motifs que les mesures prises par la Region wallonne n'etaient pascritiquables quant au fond, specialement en ce qui concerne les premieresdelimitations des zones d'exposition au bruit et les delimitationssuivantes, meme s'il y a eu des tatonnements de l'administration à cetegard, les premieres mesures de rachat des immeubles et les premieresmesures en matiere d'insonorisation, que ces premieres mesuresconcordaient avec les premiers vols de nuit et que la Region wallonnen'est pas restee dans une inactivite normative. L'arret attaque fait fi,par contre, de la circonstance que les mesures de gestion des nuisancessonores n'ont, pour la plupart, pas pu recevoir d'application concrete enraison des illegalites commises par la Region wallonne qui sont à la basede leur suspension et de leur annulation et de la circonstance que lesriverains ont ete, en droit, empeches de revendiquer le benefice desmesures, aucune delimitation legale des zones d'exposition au bruitn'existant avant que le decret du 29 avril 2004 soit mis en oeuvre.

En considerant que la Region wallonne ne doit pas reparation des dommagescauses par l'absence de mesures concretes de gestion des nuisancessonores, eu egard aux annulations ou suspensions de ces mesures, pour lesmotifs que les mesures de gestion envisagees par la Region wallonnen'etaient pas fautives quant au fond, l'arret ne tient pas compte desdonnees concretes du litige et ne constate pas legalement que, sans lesfautes de la Region wallonne à l'origine de ces annulations etsuspensions, les dommages subis par les demandeurs jusqu'au jour del'arret se seraient produits tels qu'ils se sont realises. L'arret attaqueviole, des lors, les articles 1382 et 1383 du Code civil.

En outre, en examinant la situation comme si les mesures de gestion desnuisances prises par la Region wallonne n'avaient pas ete suspendues ouannulees, l'arret attaque denie que les arretes de la Region wallonnesuspendus ou annules par le Conseil d'Etat et les decrets de la Regionwallonne annules partiellement par la Cour d'Arbitrage ne pouvaientrecevoir d'application concrete. Il meconnait ainsi les effets des arretsd'annulation ou de suspension du Conseil d'Etat et des arrets d'annulationde la Cour d'arbitrage (violation des articles 14 et 17, S:S: 1er et 2,des lois coordonnees le 12 janvier 1973 sur le Conseil d'Etat et desarticles 1er, 2 et 9, S: 1er, de la loi speciale du 6 janvier 1989 sur laCour d'arbitrage).

Troisieme branche

La cause d'exoneration ou la cause etrangere qui permet à l'auteurapparent d'un dommage de se degager de toute responsabilite doit etreexempte de toute faute dans son chef.

De la circonstance que les riverains ont « accule » la Region wallonne« dans de multiples procedures dont la logique globale etait loin d'etreevidente à suivre », il ne se deduit pas que la Region wallonne n'acommis aucune faute qui soit à l'origine de ce que les mesures de gestiondes nuisances sonores n'ont pour la plupart pas pu recevoir d'applicationconcrete. Au contraire, l'arret attaque reconnait que ce sont desillegalites commises par la Region wallonne qui sont à l'origine desrecours en annulation ou en suspension qui ont ete declarees fondes et queces illegalites sont constitutives de fautes. Des lors, l'arret attaquen'a pu legalement decider que la Region wallonne n'a pas commis de fautedans la gestion des nuisances sonores eu egard à l'attitude decontestation adoptee par un certain nombre de riverains. En refusant pourle motif precite d'indemniser les demandeurs du prejudice qu'ils subissenten raison de l'absence d'effet sur le terrain des mesures de gestion desnuisances prises par la Region wallonne, l'arret attaque meconnait lanotion legale de faute et viole les articles 1382 et 1383 du Code civil.

Quatrieme branche

En vertu des articles 1382 et 1383 du Code civil, le droit à lareparation du dommage subi par la victime d'un acte fautif commis par untiers ne peut etre restreint que si la victime a elle-meme commis unefaute sans laquelle son dommage ne se serait pas realise tel qu'il s'estproduit.

De la seule circonstance que des riverains, du reste non identifies, ontintroduit au Conseil d'Etat ou à la Cour d'arbitrage des recours ensuspension ou en annulation des actes de la Region wallonne contenant desmesures de gestion des nuisances sonores ou ont forme des recours devantles juridictions de l'ordre judiciaire pour obtenir l'interdiction desvols de nuit ou pour contester les mesures appliquees par la Regionwallonne, il ne se deduit pas que les demandeurs aient commis des fautesde nature à les priver de la reparation du prejudice qu'ils ont subi,resultant de l'absence d'amelioration de leur sort en tout cas jusqu'aujour ou l'arret attaque a ete prononce. Au contraire, l'arret attaqueadmet que l'attitude de contestation par la voie des juridictionsadministratives ou judiciaires « ne peut leur etre reprochee à faute ».De meme, de la circonstance que de nombreux riverains ont eu une« attitude attentiste » en n'introduisant pas immediatement une demanderachat ou d'insonorisation de leur habitation, l'arret ne deduit pas queles demandeurs auraient commis des fautes, reconnaissant au contraire quecette attitude n'est « nullement reprochable en soi ».

En deboutant cependant les demandeurs de leur demande de reparation deleur prejudice pour le motif que la Region wallonne s'est trouvee acculeedans de multiples procedures introduites par les riverains dont la logiqueglobale n'etait pas evidente à suivre et qu'elle n'est pas resteeinactive en depit de l'attitude attentiste de nombreux riverains ou deleur manque de cooperation, l'arret attaque viole les articles 1382 et1383 du Code civil.

A tout le moins, l'arret attaque ne constate pas que ce sont lesdemandeurs qui ont conteste les mesures de gestion de nuisances sonores ouont eu une attitude attentiste. Des lors, les motifs de l'arret nepermettent pas à la Cour de controler la legalite de la decision, ensorte qu'il n'est pas regulierement motive (violation de l'article 149 dela Constitution).

Cinquieme branche

L'article 10 de la Constitution enonce que « les Belges sont egaux devantla loi ». Selon l'article 11 de la Constitution, « la jouissance desdroits et des libertes reconnus aux Belges doit etre assuree sansdiscrimination ». L'article 16 de la Constitution dispose : « nul nepeut etre prive de sa propriete que pour cause d'utilite publique, dansles cas et de la maniere etablis par la loi et moyennant une juste etprealable indemnite ». Le principe de l'egalite devant les chargespubliques qui decoule de ces dispositions implique que l'autorite publiquene peut, sans compensation, imposer des charges qui excedent celles qu'unparticulier doit supporter dans l'interet collectif.

L'article 1er, alinea 1er, du Premier protocole additionnel à laConvention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertesfondamentales dispose : « Toute personne physique ou morale a droit aurespect de ses biens. Nul ne peut etre prive de sa propriete que pourcause d'utilite publique et dans les conditions prevues par la loi et lesprincipes generaux du droit international ». Selon le second alinea decet article, « les dispositions precedentes ne portent pas atteinte audroit que possedent les Etats de mettre en vigueur les lois qu'ils jugentnecessaires pour reglementer l'usage des biens conformement à l'interetgeneral ou pour assurer le paiement des impots ou d'autres contributionsou des amendes ». Des lors, lorsque l'autorite publique decide, dansl'interet de l'economie generale du pays, de permettre le developpementd'une activite economique qui aura pour effet de porter une atteinteexorbitante au droit de propriete d'autrui, elle ne peut le faire sansapporter une juste compensation à la charge imposee au particulier dontle droit de propriete est atteint.

En l'espece, l'arret attaque ne denie pas qu'une atteinte exorbitante aete portee au droit de propriete des riverains de l'aeroport, specialementde ceux dont les habitations sont situees dans la zone A et dans la zone Bdu premier plan d'exposition au bruit et qui sont rendues inhabitables parles nuisances sonores resultant des vols de nuit, à moins de proceder àdes travaux d'insonorisation sonore, lesquels ne sont d'ailleurs passuffisamment efficaces pour les habitations qui doivent etre rachetees parla Region wallonne. L'arret attaque considere que cette atteinte au droitde propriete des riverains est justifiee, car elle est proportionnelle aubut economique poursuivi, « ceci en prenant en compte les mesures prevuespar la Region wallonne pour la gestion des nuisances sonores ». L'arretestime en outre que le juste equilibre est assure des lors que la Regionwallonne a prevu des mesures specifiques telles que le rachat etl'insonorisation des immeubles des riverains affectes dans leur droit depropriete.

Or, il ressort des constatations de l'arret et des motifs cites sub 1, 3et 12 notamment, que les actes de la Region wallonne par lesquels lesditesmesures de rachat et d'insonorisation ont ete decidees ont fait l'objet desuspension par le Conseil d'Etat ou d'annulation totale ou partielle parle Conseil d'Etat ou par la Cour d'arbitrage et qu'aucune reglementationn'existait dans la realite des faits sur base de laquelle le rachat oul'insonorisation devaient etre accordes aux riverains ; que, d'ailleurs,les actes par lesquels les zones d'exposition au bruit, en fonctiondesquelles le droit au rachat ou à l'insonorisation se determine, ontegalement ete annules en tout ou en partie. Des lors, en tout cas jusqu'àla mise en oeuvre du decret de la Region wallonne du 29 avril 2004, nonrealisee au jour de l'arret, aucun droit au rachat ou à l'isolationn'etait reconnu dans le chef des riverains, seules subsistant desprocedures informelles et non reglementaires par lesquelles les riverainspouvaient obtenir le rachat de leur immeuble ou son insonorisation, selonce que la Region wallonne voulait bien admettre, l'attitude attentiste decertains riverains etant d'ailleurs jugee non fautive. Il ressort de cesmotifs qu'en tout cas jusqu'au jour de l'arret, aucune indemnite oucompensation n'etait accordee aux riverains qui n'avaient pas obtenu, àl'amiable, de la Region wallonne, le rachat de leur immeuble ou soninsonorisation.

Des lors, l'arret attaque, qui estime que le juste equilibre etait realiseentre les interets economiques generaux et les interets particuliers desdemandeurs, riverains de l'aeroport de Bierset, en raison des mesures derachat et d'insonorisation prises par la Region wallonne, viole lesarticles 10, 11 et 16 de la Constitution, le principe general du droit del'egalite devant les charges publiques consacre par ces articles de laConstitution, ainsi que l'article 1er du Premier protocole additionnel àla Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertesfondamentales.

En outre, en refusant toute indemnisation aux demandeurs en raison de« l'attitude negative de blocage ou d'opposition systematique » decertains riverains, d'ailleurs non identifies, qui se trouve à l'originede l'absence de mesures effectives pour remedier, sur le terrain, auxnuisances dont resultent des atteintes au droit de propriete, l'arretattaque denie aux riverains le droit de soumettre leurs contestations auxjuridictions administratives ou de l'ordre judiciaire (violation desarticles 142, 144 et 145 de la Constitution, 1er et 2 de la loi specialedu 6 janvier 1989 sur la Cour d'Arbitrage, 14 des lois coordonnees du 12janvier 1973 sur le Conseil d'Etat, 17 et 18 du Code judiciaire).

Sixieme branche

Aux termes de l'article 22 de la Constitution, « chacun a droit aurespect de sa vie privee et familiale, sauf dans les cas et conditionsfixees par la loi », la loi ou le decret garantissant la protection de cedroit. Selon l'article 23 de la Constitution, « chacun a le droit demener une vie conforme à la dignite humaine », ce qui comprend le droità la protection de la sante, le droit à un logement decent et le droità la protection d'un environnement sain. L'article 8 de la Conventioneuropeenne des droits de l'homme dispose : « 1. Toute personne a droit aurespect de sa vie privee et familiale, de son domicile et de sacorrespondance. 2. Il ne peut y avoir d'ingerence d'une autorite publiquedans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingerence est prevuepar la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une societedemocratique, est necessaire à la securite nationale, à la suretepublique, au bien etre economique du pays, à la defense de l'ordre et àla prevention des infractions penales, à la protection de la sante ou dela morale, ou à la protection des droits et libertes d'autrui ».

En l'espece, l'arret attaque ne denie pas que les vols de nuit, autorisesà l'aeroport de Bierset par la Region wallonne pour des motifseconomiques, ont porte atteinte au respect de la vie privee et familialedes riverains et ont rendu les habitations de nombre d'entre euxinhabitables sous reserve pour certaines de ces habitations de fairel'objet de travaux d'insonorisation, en sorte que les riverains, oucertains d'entre eux, ont subi une atteinte exorbitante aux droitsconsacres par les articles 22 et 23 de la Constitution et par l'article8.1 de la Convention europeenne des droits de l'homme. L'arret attaqueconsidere qu'un juste equilibre a cependant ete trouve entre les interetseconomiques generaux qui ont conduit la Region wallonne à autoriser lesvols de nuit à l'aeroport de Bierset et les interets des riverains quiont subi une atteinte à leur droit au respect de la vie privee etfamiliale et à la protection d'un environnement sain, des lors que laRegion wallonne a prevu des mesures specifiques de rachat oud'insonorisation des immeubles.

Or, il resulte des constatations et des motifs de l'arret qu'à la suitedes annulations ou suspensions de ces mesures qui ont fait l'objet derecours de riverains devant le Conseil d'Etat ou la Cour d'arbitrage,aucune reglementation n'existait dans la realite des fait pour attenuerles atteintes subies par les riverains dans leur droit au respect de lavie privee et familiale, à un logement decent et à la protection de lasante et d'un environnement sain, ou pour compenser ces atteintes. Deslors, l'arret attaque viole les articles 22 et 23 de la Constitution et 8de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertesfondamentales.

Septieme branche

En vertu de l'article 544 du Code civil, le proprietaire d'un immeublequi, par un fait non fautif, rompt l'equilibre entre les proprietesvoisines et impose ainsi au proprietaire voisin un trouble excedant lamesure des inconvenients normaux du voisinage, lui doit une juste etadequate compensation. En vertu de l'article 16 de la Constitution,l'autorite publique ne peut imposer, sans compensation, des charges quiexcedent celles qu'un particulier doit supporter dans l'interet collectif.

En l'espece, l'arret attaque ne denie pas que les riverains des zones A etB du PEB prevu par le decret de la Region wallonne du 29 avril 2004subissent des nuisances graves ou insupportables du fait de l'activiteautorisee de jour comme de nuit par la Region wallonne à l'aeroport deBierset, ce qui constitue necessairement un trouble anormal du voisinageou une charge excessive supportee dans l'interet general. L'arret leurrefuse neanmoins toute compensation pour le motif qu'ils « vont recevoirune juste et adequate compensation du trouble effectivement subi enobtenant le rachat ou l'insonorisation de leur immeuble ». Toutefois,l'arret attaque reconnait que le decret du 29 avril 2004 devra encorefaire l'objet de mesures d'execution pour etre effectif. Des lors, ilressort de ces motifs que les riverains qui subissent ces troublesexcessifs et ces charges excessives n'ont jusqu'au jour de l'arret rec,uaucune compensation.

Des lors, en refusant aux demandeurs toute compensation du trouble causepar les vols de nuit autorises à l'aeroport de Bierset par la Regionwallonne, l'arret attaque viole les articles 544 du Code civil et 16 de laConstitution.

De plus, le droit à la juste compensation due en vertu des articles 544du Code civil et 16 de la Constitution ne peut se voir paralyse ni parl'exercice, par celui qui subit le trouble excessif ou la chargeexcessive, du droit d'agir devant les juridictions administratives ou del'ordre judiciaire pour contester les decisions à l'origine de cestroubles ou charges ou pour contester les mesures prises parl'administration pour reduire ces troubles ou charges, sauf le cas del'abus de droit, qui constitue une faute.

Des lors que l'arret attaque constate qu'il n'etait pas fautif pour lesriverains de contester en justice les mesures prises par la Regionwallonne ou d'adopter une attitude « attentiste », il ne pouvaitlegalement refuser toute compensation aux riverains subissant ces troublespour le motif que de nombreux riverains « ont, pendant de nombreusesannees, neglige de rentrer dans les procedures prevues par la Regionwallonne » et « n'ont pas cherche à eviter ou diminuer les nuisances,alors que des mesures leur etaient proposees en ce sens ». L'arretattaque viole ainsi les articles 544, 1382 et 1383 du Code civil et 16 dela Constitution.

En outre, l'arret, qui ne determine pas quels sont les riverains qui nesubissent pas de trouble anormal du voisinage, ne permet pas à la Cour deverifier la legalite de sa decision de refuser toute compensation auxdemandeurs. L'arret n'est donc pas regulierement motive (violation del'article 149 de la Constitution).

Enfin, l'arret attaque se pose la question, sans la resoudre, de savoir« quel est le trouble normal auquel on peut s'attendre à la proximited'un aeroport » ; ce motif ne permet pas à la Cour de verifier lalegalite de la decision de refuser aux demandeurs toute compensation pourtrouble anormal du voisinage. L'arret n'est donc pas regulierement motive(violation de l'article 149 de la Constitution).

A l'appui du pourvoi inscrit au role general sous le numero C.05.0133.F,les demandeurs presentent quatre moyens dans la requete jointe au presentarret en copie certifiee conforme.

III. La decision de la Cour

Sur le surplus du deuxieme moyen de chacun des pourvois, à l'exclusiondes pourvois C.05.0129.F et C.05.0133.F :

Quant à la premiere branche :

1. La directive 85/337/CEE du Conseil du 25 juin 1985 dispose en sonarticle 1er qu'elle concerne l'evaluation des incidences surl'environnement des projets publics et prives susceptibles d'avoir desincidences notables sur l'environnement.

En vertu de l'article 1er, S: 2, on entend par projet, notamment, larealisation de travaux de construction ou d'autres installations ououvrages.

L'article 2, S: 1er, oblige les Etats membres à prendre les dispositionsnecessaires pour que, avant l'octroi de l'autorisation, les projetssusceptibles d'avoir des incidences notables sur l'environnement,notamment en raison de leur nature, de leurs dimensions ou de leurlocalisation, soient soumis à une evaluation en ce qui concerne leursincidences.

L'article 4 distingue deux categories de projets : a) ceux quiappartiennent aux classes enumerees à l'annexe I et qui sont d'officesoumis à une evaluation des incidences, conformement aux articles 5 à10 ; b) ceux qui appartiennent aux classes enumerees à l'annexe II, quisont soumis à une evaluation, conformement aux articles 5 à 10, lorsqueles Etats membres considerent que leurs caracteristiques l'exigent.

Parmi les projets repris à l'annexe I figure, au point 7, la constructiond'un aeroport dont la piste de decollage et d'atterrissage a une longueurde 2.100 metres ou plus.

L'annexe II, au point 12, mentionne la modification des projets figurantà l'annexe I.

Les dispositions de la directive ont, comme l'observe l'arret attaque, etetransposees par le decret de la Region wallonne du 1l septembre 1985organisant l'evaluation des incidences sur l'environnement dans la Regionwallonne et par l'arrete d'execution de ce decret du 31 octobre 1991.

2. Repondant aux deuxieme et troisieme questions qui lui ont ete poseespar l'arret de la Cour du 14 decembre 2006, la Cour de justice desCommunautes europeennes, dans son arret du 28 fevrier 2008, a dit pourdroit que :

- Les dispositions du point 12 de l'annexe II lues en combinaison aveccelles du point 7 de l'annexe I de la directive 85/337, dans leurredaction d'origine, visent egalement les travaux de modification apportesà l'infrastructure d'un aeroport existant sans allongement de la piste dedecollage et d'atterrissage des lors qu'il peuvent etre regardes,notamment par leur nature, leur importance et leurs caracteristiques,comme une modification de l'aeroport lui-meme. Il en va notamment ainsides travaux destines à augmenter de maniere significative l'activite del'aeroport et le trafic aerien. Il appartient à la juridiction de renvoide s'assurer que les autorites competentes ont correctement apprecie siles travaux en cause dans le litige au principal devaient etre soumis àune evaluation de leur incidence sur l'environnement ;

- Les autorites competentes doivent tenir compte de l'augmentationprojetee de l'activite d'un aeroport lorsqu'elles examinent l'effet surl'environnement des modifications apportees à ses infrastructures en vued'accueillir ce surcroit d'activite.

3. L'arret attaque releve que « la piste de l'aeroport de Biersetpresente une longueur largement superieure à 2.100 metres, qu'elleexistait bien avant l'entree en vigueur de la directive et du decret detransposition et qu'elle n'a pas ete allongee pour permettre l'arrivee desvols de nuit en 1996 et 1998 ».

L'arret considere qu' « il est evident que tant la directive que ledecret envisagent et definissent la notion d'aeroport par rapport à lalongueur de la piste et non par rapport aux installations annexes à lapiste, tels des hangars ou meme une tour de controle ».

Il considere « qu'en l'espece, il n'y a eu ni construction nimodification de la construction d'un aeroport au sens des dispositionsinvoquees dans la mesure ou la piste de l'aeroport n'a pas ete modifieedans sa longueur » et en deduit qu' « il n'y a pas non plus d'illegaliteformelle quant à l'absence d'etude d'incidence ».

L'arret viole les dispositions precitees de la directive du 25 juin 1985,les articles 1er à 5, 9 et 10 du decret de la Region wallonne du 11septembre 1985, ainsi que son annexe I, et les articles 3 à 6 et 8 del'arrete de l'Executif regional wallon du 31 octobre 1991, ainsi que sonannexe II.

Dans cette mesure, le moyen, en cette branche, est fonde.

Sur le deuxieme moyen des pourvois C.05.0129.F et C.05.0133.F :

Sur la recevabilite du moyen à l'egard des troisieme et sixiemedefenderesses :

L'arret considere que la troisieme defenderesse n'a viole aucuneobligation legale ni meconnu son devoir general de prudence et que lasixieme defenderesse n'a pas commis de faute.

Le moyen ne critique pas ces considerations, qui suffisent à justifier ladecision de l'arret de debouter les demandeurs de leur action enresponsabilite contre ces defenderesses.

Dirigee contre celles-ci, le moyen est denue d'interet, partant,irrecevable.

Sur le fondement du moyen en sa deuxieme branche :

Il suit de la reponse à la premiere branche du deuxieme moyen des autrespourvois que le moyen, en cette branche, est fonde.

Quant à la premiere branche du quatrieme moyen de chacun des pourvois, àl'exclusion des pourvois C.05.0129.F et C.05.0133.F :

Sur la recevabilite du moyen, en cette branche, en tant qu'il est dirigecontre les troisieme et sixieme defenderesses :

Pour les memes raisons que celles qui ont ete enoncees en reponse audeuxieme moyen, le moyen, en cette branche, est, à l'egard de cesdefenderesses, irrecevable.

Sur le fondement du moyen, en cette branche :

Aux termes de l'article 8 de la Convention de sauvegarde des droits del'homme et des libertes fondamentales, toute personne a droit au respectde sa vie privee et familiale, de son domicile et de sa correspondance ;il ne peut y avoir ingerence d'une autorite publique dans l'exercice de cedroit que pour autant que cette ingerence constitue une mesure qui, dansune societe democratique, est necessaire à la securite nationale, à lasurete publique, au bien-etre economique du pays, à la defense de l'ordreet à la prevention des infractions penales, à la protection de la santeou de la morale, ou à la protection des droits et libertes d'autrui.

L'arret attaque releve que « la Region wallonne, dans ses conclusions desynthese, ne conteste pas que des nuisances sonores telles que celles quisont generees par les activites de l'aeroport de Bierset puissentconstituer une ingerence au regard du droit au respect de la vie privee etfamiliale ».

Il considere que « l'analyse à faire est celle de la marged'appreciation de la Region wallonne dans le cadre du juste equilibre àrespecter entre les ingerences subies par les riverains et les interetseconomiques du developpement de l'activite en cause et ceci, en regardantaussi les mesures mises en place pour la gestion du bruit et en verifiantsi les decisions prises l'ont ete sur la base d'enquetes et d'etudesappropriees ».

L'arret releve à cet egard que la Region wallonne avait à sa dispositionun certain nombre d'enquetes et d'etudes qu'il cite, mais omet de preciserle moment auquel se situe l'ingerence au sens de l'article 8 de laConvention precitee, et ne permet des lors pas à la Cour de controler lalegalite de la decision qu'il n'y a pas de violation de cette disposition.

L'arret n'est, partant, pas regulierement motive.

Dans cette mesure, le moyen, en cette branche, est fonde.

Quant à la deuxieme branche du troisieme moyen des pourvois C.05.0129.Fet C.05.0133.F :

Sur la recevabilite du moyen, en cette branche, en tant qu'il est dirigecontre les troisieme et sixieme defenderesses :

Pour les memes raisons que celles qui ont ete enoncees en reponse audeuxieme moyen de ces pourvois, le moyen, en cette branche, est, àl'egard de ces defenderesses, irrecevable.

Sur le fondement du moyen, en cette branche :

Il suit de la reponse donnee à la premiere branche du quatrieme moyen desautres pourvois que le moyen, en cette branche, est, dans la mesureprecisee dans cette reponse, fonde.

Sur le cinquieme moyen de chacun des pourvois, à l'exclusion des pourvoisC.05.0129.F et c.05.0133.F :

1. Si des nuisances sonores peuvent constituer une restriction à l'usagedu droit de propriete des riverains, elles n'emportent pas unedepossession effective de leurs biens.

Dans la mesure ou il invoque la violation de l'article 16 de laConstitution, qui s'applique en cas d'expropriation pour cause d'utilitepublique, laquelle suppose un transfert de propriete forcee ayant poureffet une perte de propriete, partant, une depossession effective d'unbien, le moyen, qui repose sur une interpretation inexacte de cettedisposition constitutionnelle, manque en droit.

2. Aux termes de l'article 1er du Premier Protocole additionnel à laConvention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertesfondamentales, toute personne physique ou morale a droit au respect de sesbiens et nul ne peut etre prive de sa propriete que pour cause d'utilitepublique et dans les conditions prevues par la loi et les principesgeneraux du droit international.

En vertu de l'article 1er, alinea 2, dudit protocole, les dispositionsprecedentes ne portent pas atteinte au droit que possedent les Etats demettre en vigueur les lois qu'ils jugent necessaires pour reglementerl'usage des biens conformement à l'interet general ou pour assurer lepaiement des impots ou d'autres contributions, ou des amendes.

3. Sous reserve de circonstances exceptionnelles, une atteinte aux droitsgarantis par l'article 1er exige une compensation consistant dans lepaiement d'une indemnite.

Pour apprecier si un juste equilibre a ete respecte entre les diversinterets en cause et, entre autres, si une charge demesuree n'a pas eteimposee à la personne privee de sa propriete, il faut avoir egard auxconditions de dedommagement.

Sans le versement d'une somme raisonnablement en rapport avec la valeur dela privation de propriete, celle-ci constituerait une atteinte excessivequi ne saurait se justifier sur le terrain de l'article 1er.

Ce dernier ne garantit pourtant pas dans tous les cas le droit à unecompensation integrale.

En outre, l'indemnite ne doit etre ni prealable ni concomitante àl'atteinte portee à la propriete.

Dans la mesure ou il soutient que la compensation ne peut intervenir aprescette atteinte, le moyen manque en droit.

4. L'arret enonce que la cour d'appel a considere qu'elle « n'a nullementenvisage l'attitude des riverains ou de certains d'entre eux commeconstituant une faute ou comme pouvant empecher, en application de latheorie de l'abus de droit, la reparation des dommages pretendument causespar la faute de la Region wallonne, mais a uniquement envisage cetteattitude dans le cadre tres restreint de la question si le retard dans lamise en oeuvre concrete de certaines mesures etait imputable à faute àla Region wallonne ».

Il constate que, « malgre les annulations prononcees par [le Conseild'Etat et la Cour d'arbitrage], la Region wallonne a poursuivi la mise enplace des mesures qu'elle voulait prendre » et que « les rachatsd'habitations [...] n'ont ete stoppes que pour une courte periode et ceci,en raison de la menace d'une astreinte d'un montant particulierementdissuasif ».

Il considere que « les mesures de gestion de la nuisance sonoreimpliquaient la necessite d'une cooperation des riverains quant auxmesures d'insonorisation à faire dans leurs habitations et quant à laprocedure de rachat qui repose sur un mode volontaire » et que1'« attitude negative de blocage ou d'opposition systematique à toutesles mesures prises par la Region wallonne par des riverains ou certainsd'entre eux ne peut leur etre reprochee à faute » mais « peut avoirpour effet de considerer que le fait que les mesures ont ete modifiees etmeme que certaines n'ont toujours pas rec,u d'application sur le terrainn'est pas constitutif de faute de la Region wallonne ».

L'arret, qui ne fait pas grief aux riverains qui n'ont pas pu etreindemnises de leur attitude mais considere que l'autorite publique a prisles mesures propres à compenser les atteintes alleguees au droit protegepar l'article 1er du Premier Protocole sans que les retards constates dansla mise en oeuvre de cette compensation puissent lui etre reproches,decide legalement, sans creer au surplus une rupture d'egalite desriverains devant les charges publiques, que cette dispositionconventionnelle n'a pas ete meconnue.

Ne se fondant pas sur une faute des riverains ayant conteste les mesuresde compensation arretees par la Region wallonne, la cour d'appel n'etaitdes lors pas tenue, pour motiver regulierement sa decision, de preciserl'identite de ces riverains.

Dans cette mesure, le moyen ne peut etre accueilli.

Quant à la cinquieme branche du quatrieme moyen des pourvois C.05.0129.Fet C.05.0133.F :

1. Certes, l'arret constate que « la quasi-totalite des mesures prisespar la Region wallonne ont ete ou sont attaquees devant le Conseil d'Etatou la Cour d'arbitrage selon le type de la norme en cause » et que« certaines mesures ont ete annulees, reprises, modifiees ».

Il releve toutefois que « les riverains n'ont pas presente [...] uneanalyse detaillee de chaque arret » d'annulation du Conseil d'Etat et que« l'annulation retenue par la Cour d'arbitrage dans son arret nDEG 51 du30 avril 2003 » est « tout à fait marginale par rapport à l'ensembledes moyens soutenus » devant elle.

L'arret ajoute que « les parties n'ont pas fait une etude juridiquedirecte et exhaustive des modifications des premieres mesures [de gestiondu bruit] jusqu'au decret du 29 avril 2004 » et que « la cour [d'appel]ne procedera pas non plus à une telle etude ».

Contrairement à ce que soutient le moyen, en cette branche, il ne ressortde l'arret ni qu'il n'existait que des procedures informelles et nonreglementaires permettant aux riverains d'obtenir le rachat oul'insonorisation de leur immeuble, selon le bon vouloir de la Regionwallonne, ni qu'au jour de l'arret, les riverains qui n'avaient pas obtenude celle-ci ce rachat ou cette insonorisation à l'amiable ne pouvaientplus obtenir d'indemnite ou de compensation.

2. Ainsi qu'il a ete dit, l'arret ne considere pas « l'attitude desriverains ou de certains d'entre eux comme constituant une faute ou commepouvant empecher, en application de la theorie de l'abus de droit, lareparation des dommages pretendument causes par la faute de la Regionwallonne », mais prend cette attitude en consideration « dans le cadretres restreint de la question si le retard dans la mise en oeuvre concretede certaines mesures etait imputable à faute à la Region wallonne ».

L'arret releve egalement la « volonte [de la Region wallonne] decontinuer à appliquer des mesures de gestion de la nuisance sonore » etconstate que cette region « a toujours poursuivi les rachats d'habitationqui n'ont ete stoppes que pour une courte periode et ceci, en raison de lamenace d'une astreinte d'un montant particulierement dissuasif ».

Le moyen, qui soutient que l'arret refuse toute indemnisation auxdemandeurs en raison de l'attitude negative de blocage ou d'oppositionsystematique de certains riverains, repose sur une lecture inexacte del'arret.

Le moyen manque en fait.

Sur le sixieme moyen de chacun des pourvois, à l'exclusion des pourvoisC.05.0129.F et C.05.0133.F, et sur la septieme branche du quatrieme moyende ces derniers pourvois :

L'article 544 du Code civil oblige l'auteur d'un trouble excedant lamesure des inconvenients ordinaires du voisinage à compenser la ruptured'equilibre causee par ce trouble.

Lorsque l'auteur est un pouvoir public, le juge doit, en vue d'apprecierl'importance du trouble, tenir compte des charges qu'un particulier doitsupporter dans l'interet collectif.

L'arret, qui ne denie pas « l'importance des nuisances sonores causeespar l'activite realisee sur le site de Bierset » mais releve « ladifficulte specifique de definir, à proximite d'un aeroport, un equilibrede voisinage ou de charges publiques », ne motive pas regulierement et nejustifie pas legalement sa decision de rejeter les demandes des riverainsreposant sur l'existence d'un trouble de voisinage.

Dans cette mesure, le moyen est fonde.

Sur les autres griefs :

Il n'y a pas lieu d'examiner les autres griefs, qui ne sauraient entrainerune cassation plus etendue.

Sur les demandes en declaration d'arret commun :

Les demandeurs ont interet à ce que le present arret soit declare communaux parties à l'egard desquelles leurs pourvois ont ete jugesirrecevables.

Par ces motifs,

La Cour

Casse l'arret attaque en tant que, statuant entre les demandeurs et lesdeux premieres defenderesses, il dit les demandes non fondees dans lamesure ou elles s'appuient sur l'article 1382 du Code civil et surl'article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et deslibertes fondamentales, en tant que, statuant entre les demandeurs et lespremiere, deuxieme, troisieme et sixieme defenderesses, il dit non fondeela demande prenant appui sur un trouble de voisinage, en tant qu'il ditsans objet la demande subsidiaire de la deuxieme defenderesse et en tantqu'il statue sur les depens entre ces parties ;

Rejette les pourvois pour le surplus ;

Ordonne que mention du present arret sera faite en marge de l'arretpartiellement casse ;

Declare le present arret commun à la Societe nationale des voiesaeriennes-Belgocontrol et à l'Etat belge, represente par le ministre dela Defense nationale ;

Reserve les depens sur lesquels il n'a pas ete statue par l'arret du14 decembre 2006 pour qu'il y soit statue par le juge du fond ;

Renvoie la cause, ainsi limitee, devant la cour d'appel de Bruxelles.

Ainsi juge par la Cour de cassation, premiere chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le president Christian Storck, le president de section ClaudeParmentier, les conseillers Didier Batsele, Albert Fettweis et Daniel Plaset prononce en audience publique du quatre decembre deux mille huit par lepresident Christian Storck, en presence de l'avocat general ThierryWerquin, avec l'assistance du greffier Marie-Jeanne Massart.

4 DECEMBRE 2008 C.04.0582.F-C.05.0129.F

C.05.0130.F-C.05.0131.F

C.05.0132.F-C.05.0133.F

C.05.0134.F-C.05.0135.F

C.05.0136.F-C.05.0222.F

C.05.0224.F/154


Synthèse
Numéro d'arrêt : C.04.0582.F
Date de la décision : 04/12/2008

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2008-12-04;c.04.0582.f ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award