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29/10/2009 | BELGIQUE | N°C.08.0448.N

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 29 octobre 2009, C.08.0448.N


Cour de cassation de Belgique

Arret

NDEG C.08.0448.N

1. ARGENTA SPAARBANK, societe anonyme,

2. ARGENTA ASSURANTIES, societe anonyme,

Me Jean-Marie Nelissen Grade, avocat à la Cour de cassation,

contre

B. R.,

Me Huguette Geinger, avocat à la Cour de cassation.

I. La procedure devant la Cour

Le pourvoi en cassation est dirige contre l'arret rendu le 10 mars 2008par la cour d'appel d'Anvers.

Le conseiller Eric Dirix a fait rapport.

L'avocat general delegue Andre Van Ingelgem a conclu.

II. Le moyen de cass

ation

Les demanderesses presentent un moyen libelle dans les termes suivants :

Dispositions legales violees

Articles 2.1 et ...

Cour de cassation de Belgique

Arret

NDEG C.08.0448.N

1. ARGENTA SPAARBANK, societe anonyme,

2. ARGENTA ASSURANTIES, societe anonyme,

Me Jean-Marie Nelissen Grade, avocat à la Cour de cassation,

contre

B. R.,

Me Huguette Geinger, avocat à la Cour de cassation.

I. La procedure devant la Cour

Le pourvoi en cassation est dirige contre l'arret rendu le 10 mars 2008par la cour d'appel d'Anvers.

Le conseiller Eric Dirix a fait rapport.

L'avocat general delegue Andre Van Ingelgem a conclu.

II. Le moyen de cassation

Les demanderesses presentent un moyen libelle dans les termes suivants :

Dispositions legales violees

Articles 2.1 et 3 de la loi du 2 aout 2002 concernant la lutte contre leretard de paiement dans les transactions commerciales.

Decisions et motifs critiques

L'arret declare l'appel incident du defendeur recevable et partiellementfonde, evoque la decision sur la demande du defendeur, declare cettedemande du defendeur en grande partie fondee et, des lors, condamne lesdemanderesses à payer notamment les interets de retard au taux directeurau sens des articles 4 et 5 de la loi du 2 aout 2002 concernant la luttecontre le retard de paiement dans les transactions commerciales sur lasomme de 25.198,96 euros (le solde de l'indemnite d'eviction encore du audefendeur) depuis le 31 juillet 2005 jusqu'à la date du paiementeffectif, ainsi que sur la somme de 128.505,03 euros (l'indemnited'eviction dejà payee au defendeur) depuis le 31 juillet jusqu'au 18novembre 2005.

A cet effet, l'arret considere qu'une indemnite d'eviction, indemnisantl'agent de l'apport ou de la restitution au commettant de la clientelequ'il a constituee, doit etre qualifiee de « transaction commerciale »au sens de la loi du 2 aout 2002 concernant la lutte contre le retard depaiement dans les transactions commerciales - soit une transaction quiconduit à la fourniture de biens (meubles ou immeubles) ou à laprestation de services contre remuneration, et considere, des lors, quecette loi est applicable ratione materiae.

Sur cette base, les juges d'appel ont finalement attribue au defendeur desinterets de retard sur l'indemnite d'eviction qui lui est due au tauxdirecteur au sens des articles 4 et 5 de la loi du 2 aout 2002 concernantla lutte contre le retard de paiement dans les transactions commerciales.

Ils ont principalement fonde cette decision sur les motifs suivants :

« 4. Quant à l'application de la loi du 2 aout 2002 concernant la luttecontre le retard de paiement dans les transactions commerciales et lesinterets/frais de poursuite/honoraires d'avocat/frais judiciairesreclames.

4.1. Le defendeur interjette appel incident en ce qui concernel'applicabilite de la loi du 2 aout 2002 concernant la lutte contre leretard de paiement dans les transactions commerciales (tant en ce quiconcerne les interets, que les frais de poursuite). A tout le moins, ilsoutient qu'il y a lieu d'attribuer les interets compensatoires legaux àpartir de la date de la mise en demeure du 1er juillet 2005 (et non àpartir du 5 aout 2005), ainsi que les honoraires du conseil en vertu del'arret de la Cour de cassation du 2 septembre 2004, à tout le moins envertu de l'arrete royal du 26 octobre 2007.

4.2. Le premier juge a considere que des lors que l'article 3 de la loi du2 aout 2002 n'est applicable qu'aux paiements effectues en remuneration detransactions commerciales et que l'indemnite d'eviction ne resulte pasd'une transaction commerciale mais de la loi, cette loi n'est pasapplicable ratione materiae.

Contrairement au premier juge, la cour d'appel considere que la loi du 2aout 2002 est applicable ratione materiae : il y a lieu de qualifier uneindemnite d'eviction de transaction commerciale au sens de la loi du 2aout 2002. Toute transaction qui conduit à la fourniture de biens(meubles ou immeubles) ou à la prestation de services contre remunerationest une transaction commerciale au sens de la loi. L'indemnite d'evictionindemnise l'agent pour l'apport (ou la restitution) au commettant de laclientele qu'il a constituee, de sorte que la loi est materiellementapplicable.

4.3. Des interets de retard au taux directeur au sens des articles 4 et 5de la loi du 2 aout 2002 sont des lors attribues au defendeur à partir du30e jour suivant la date de la mise en demeure du 1er juillet 2005, soitle 31 juillet 2005 et donc pas à partir de la date du 5 aout 2005 commel'avait decide le premier juge. Si le debiteur ne paye pas dans les 30jours suivant le delai de paiement legal, des interets sont dus de pleindroit et sans mise en demeure à partir du jour suivant. Le delai depaiement legal compte 30 jours à partir de la reception par le debiteurd'une facture ou d'une demande similaire de paiement ».

Griefs

Aux termes de l'article 2.1 de la loi du 2 aout 2002 concernant la luttecontre le retard de paiement dans les transactions commerciales, pourl'application de la presente loi, on entend par « transactioncommerciale » : toute transaction entre entreprises ou entre desentreprises et des pouvoirs adjudicateurs ou des entites adjudicatricesqui conduit à la fourniture de biens ou à la prestation de servicescontre remuneration.

Conformement à l'article 3, alinea 1er, de la loi du 2 aout 2002, lapresente loi s'applique à tous les paiements effectues en remuneration detransactions commerciales.

En l'espece, les juges d'appel ont attribue des interets de retard au tauxdirecteur au sens des articles 4 et 5 de la loi du 2 aout 2002 surl'indemnite d'eviction due au defendeur, au motif qu'il y a lieu dequalifier une indemnite d'eviction, laquelle indemnise l'agent de l'apportou de la restitution au commettant de la clientele qu'il a constituee, de`transaction commerciale' au sens de la loi du 2 aout 2002, de sorte quecette loi est applicable ratione materiae.

En qualifiant de transaction commerciale une indemnite d'eviction, qu'ilsdecrivent comme une indemnite (legale) « indemnisant l'agent de l'apportou de la restitution au commettant de la clientele qu'il a constituee »,les juges d'appel ont toutefois accorde une portee trop large à la notionde « transaction commerciale » au sens de la loi du 2 aout 2002, deslors que cette notion legale demeure limitee, en vertu de sa descriptioncontenue à l'article 2.1 de cette loi, à une « transaction », au sensde « convention », qui conduit à « la fourniture de biens ou à laprestation de services contre remuneration ».

En considerant que la loi du 2 aout 2002 concernant la lutte contre leretard de paiement dans les transactions commerciales est applicableratione materiae au paiement d'une indemnite d'eviction, les juges d'appelont, en outre, ignore que cette loi, sauf derogation conventionnelle,n'est pas applicable aux obligations pecuniaires qui decoulent detransactions commerciales autres que le paiement du prix de l'objet de latransaction, de sorte que le paiement d'une indemnite, telle qu'uneindemnite d'eviction pour un agent commercial, ne releve pas du champd'application de cette loi.

Dans la mesure ou la condamnation des demanderesses à payer des interetsde retard au sens des articles 4 et 5 de la loi du 2 aout 2002 surl'indemnite d'eviction due au defendeur se fonde, ainsi, sur unemeconnaissance, tant de la portee de la notion de « transactioncommerciale » au sens de cette loi, que du champ d'application rationemateriae de cette loi, cette decision n'est pas legalement justifiee(violation des articles 2.1 et 3 de la loi du 2 aout 2002 concernant lalutte contre le retard de paiement dans les transactions commerciales).

III. La decision de la Cour

Sur la fin de non-recevoir :

1. Le defendeur oppose au moyen une fin de non-recevoir deduite de cequ'il omet d'invoquer la violation des articles 4 et 5 de la loi du 2 aout2002 concernant la lutte contre le retard de paiement dans lestransactions commerciale, ce qui etait necessaire, selon lui, pour pouvoirconclure à la cassation de la decision relative au droit aux interets deretard au taux directeur majore.

2. Le moyen s'oppose à la decision des juges d'appel de qualifierl'indemnite d'eviction reclamee par le defendeur de transactioncommerciale au sens de la loi du 2 aout 2002, de sorte que cette loi estapplicable ratione materiae.

3. Les articles 2.1 et 3 de la loi precitee, indiques comme etant violes,concernent le grief invoque, de sorte qu'il est satisfait à l'exigence del'article 1080 du Code judiciaire.

La fin de non-recevoir ne peut etre accueillie.

Sur le moyen :

4. Aux termes de l'article 3 de la loi du 2 aout 2002 concernant la luttecontre le retard de paiement dans les transactions commerciales, cette lois'applique à tous les paiements effectues en remuneration de transactionscommerciales.

L'article 2.1 de cette loi definit la « transaction commerciale » commeetant toute transaction entre entreprises ou entre des entreprises et despouvoirs adjudicateurs ou des entites adjudicatrices qui conduit à lafourniture de biens ou à la prestation de services contre remuneration.

Cette loi vise à resorber le retard dans les obligations contractuellesde paiement qui tendent à la remuneration de fournitures de biens et deprestations de services. Ses dispositions ne s'appliquent des lors pas auxobligations de paiement qui tendent à l'indemnisation d'un dommage duchef de resolution ou de cessation de conventions qui ont pour objet detelles transactions.

5. En vertu de l'article 20, alinea 1er, de la loi du 13 avril 1995relative au contrat d'agence commerciale, apres la cessation du contrat,l'agent commercial a droit à une indemnite d'eviction lorsqu'il a apportede nouveaux clients au commettant ou a developpe sensiblement les affairesavec la clientele existante, pour autant que cette activite doive encoreprocurer des avantages substantiels au commettant.

L'article 21 de cette loi dispose que pour autant que l'agent commercialait droit à l'indemnite d'eviction et que le montant de cette indemnitene couvre pas l'integralite du prejudice reellement subi, l'agentcommercial peut, mais à charge de prouver l'etendue du prejudice allegue,obtenir en plus de cette indemnite des dommages et interets à concurrencede la difference entre le montant du prejudice reellement subi et celui decette indemnite.

L'indemnite d'eviction visee à ces articles tend à compenser la perte declientele et a, des lors, un caractere compensatoire.

6. L'indemnite d'eviction, legalement due à l'agent commercial apres lacessation du contrat d'agence commerciale, n'est, des lors, pas soumiseaux dispositions imperatives de la loi du 2 aout 2002 concernant la luttecontre le retard de paiement dans les transactions commerciales.

7. En considerant que la loi du 2 aout 2002 concernant la lutte contre leretard de paiement dans les transactions commerciales est applicable àl'indemnite d'eviction de l'agent commercial, l'arret attaque viole lesdispositions legales indiquees au moyen.

Le moyen est fonde.

Par ces motifs,

La Cour

Casse l'arret attaque en tant qu'il condamne les demanderesses à payerdes interets de retard au taux directeur depuis le 31 juillet 2005jusqu'au 18 novembre 2005 sur la somme de 128.505,03 euros et statue surles depens ;

Ordonne que mention du present arret sera faite en marge de l'arretpartiellement casse ;

Reserve les depens pour qu'il soit statue sur ceux-ci par le juge du fond.

Renvoie la cause, ainsi, limitee, devant la cour d'appel de Gand.

Ainsi juge par la Cour de cassation, premiere chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le premier president Ghislain Londers, president, lesconseillers Eric Dirix, Eric Stassijns, Beatrijs Deconinck et GeertJocque, et prononce en audience publique du vingt-neuf octobre deux milleneuf par le premier president Ghislain Londers, en presence de l'avocatgeneral delegue Andre Van Ingelgem, avec l'assistance du greffier JohanPafenols.

Traduction etablie sous le controle du conseiller Christine Matray ettranscrite avec l'assistance du greffier Fabienne Gobert.

Le greffier, Le conseiller,

29 OCTOBRE 2009 C.08.0448.N/1


Synthèse
Numéro d'arrêt : C.08.0448.N
Date de la décision : 29/10/2009

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2009-10-29;c.08.0448.n ?
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