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07/12/2010 | BELGIQUE | N°P.10.1460.N

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 07 décembre 2010, P.10.1460.N


Cour de cassation de Belgique

Arret

NDEG P.10.1460.N

C. R.,

accuse,

Mes Nathalie Aernoudts et Caroline Verschuere, avocats au barreau de Gand,

contre

1. H. S.,

2. M. S.,

parties civiles,

defenderesses.

I. La procedure devant la Cour

Le pourvoi en cassation numero 2010/67 est dirige contre l'arret rendu le14 mai 2010 sous le numero 2010/24 par la cour d'assises de la province deFlandre orientale.

Le pourvoi en cassation numero 2010/68 est dirige contre l'arret rendu le20 mai 2010 sous le numero 2010/25 pa

r la cour d'assises de la province deFlandre orientale.

Le pourvoi en cassation numero 2010/69 est dirige contre l'arret ren...

Cour de cassation de Belgique

Arret

NDEG P.10.1460.N

C. R.,

accuse,

Mes Nathalie Aernoudts et Caroline Verschuere, avocats au barreau de Gand,

contre

1. H. S.,

2. M. S.,

parties civiles,

defenderesses.

I. La procedure devant la Cour

Le pourvoi en cassation numero 2010/67 est dirige contre l'arret rendu le14 mai 2010 sous le numero 2010/24 par la cour d'assises de la province deFlandre orientale.

Le pourvoi en cassation numero 2010/68 est dirige contre l'arret rendu le20 mai 2010 sous le numero 2010/25 par la cour d'assises de la province deFlandre orientale.

Le pourvoi en cassation numero 2010/69 est dirige contre l'arret rendu le21 mai 2010 sous le numero 2010/26 par la cour d'assises de la province deFlandre orientale.

Le demandeur presente huit moyens dans un memoire annexe au present arret,en copie certifiee conforme.

Le conseiller Paul Maffei a fait rapport.

L'avocat general Marc Timperman a conclu.

II. La decision de la Cour

(...)

Sur le huitieme moyen :

26. Le moyen invoque la violation de l'article 6.3.c. de la Convention desauvegarde des droits de l'homme et des libertes fondamentales : lors deson premier interrogatoire par la police, le demandeur n'a pas beneficiede l'assistance d'un avocat et lors du reglement de la procedure par lachambre des mises en accusation, l'avocat du demandeur a declare etre sansinstructions ; en consequence, les droits de defense du demandeur ont eteirremediablement violes ; c'est à tort que l'arret attaque du 14 mai 2010rejette ce moyen de defense.

27. En tant qu'il fait grief de la procedure devant la chambre des misesen accusation, le moyen n'est pas dirige contre l'arret et, enconsequence, est irrecevable.

28. Le droit à l'assistance d'un avocat consacre à l'article 6.3 de laConvention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertesfondamentales, tel qu'il est interprete par la Cour europeenne des droitsde l'homme, implique l'acces à un avocat pendant toute la duree del'instruction preparatoire, pour autant qu'il ne soit pas etabli qu'enraison de motifs imperatifs propres aux circonstances de la cause, cedroit doit etre restreint. Meme dans cette hypothese, cette restriction,quelle que soit sa justification, ne peut restreindre illicitement lesdroits du prevenu consacres aux articles 6.1 et 6.3 de la Convention desauvegarde des droits de l'homme et des libertes fondamentales.

29. En regle, il est nui au droit de defense et au droit à un procesequitable lorsqu'un inculpe fait des declarations au cours d'uninterrogatoire de police sans avoir la possibilite de beneficier del'assistance d'un avocat.

30. Toutefois, cette circonstance n'a pas automatiquement pour consequencede rendre definitivement impossible l'examen equitable de la cause del'inculpe, ulterieurement prevenu ou accuse. Le proces reste equitablelorsque le juge ne considere pas ces declarations comme des elements depreuve determinants, lorsque ces declarations n'ont pas ete detournees niextorquees et lorsque le prevenu ne s'est pas trouve en position devulnerabilite au cours de l'interrogatoire ou de l'instruction ou qu'il aete remedie de maniere efficace et appropriee à sa position devulnerabilite.

31. Le fait que la legislation belge ne prevoit pas l'assistance d'unavocat au cours d'un interrogatoire de police, doit etre apprecie à lalumiere de l'ensemble des garanties legales offertes par cette legislationau prevenu ou à l'accuse afin de sauvegarder ses droits de defense et sondroit à un proces equitable.

32. Dans leur ensemble, les formalites requises à l'article 47bis du Coded'instruction criminelle quant à l'audition du prevenu, la brievete dudelai prevu par la Constitution en matiere de privation de liberte, laremise immediate à l'inculpe, au moment de la signification du mandatd'arret, de toutes les pieces visees aux articles 16, S: 7 et 18, S: 2, dela loi du 20 juillet 1990 relative à la detention preventive, le droit del'inculpe de communiquer immediatement et librement avec son avocat prevuà l'article 20, S:S: 1er et 5, de la loi precitee, la mise à ladisposition du dossier avant la comparution devant la juridictiond'instruction prevue à l'article 21, S: 3, de la meme loi, ainsi que lesdroits vises notamment aux articles 61ter, 61quater, 61quinquies, 127,135, 136 et 235bis du Code d'instruction criminelle, la mise à ladisposition du dossier et la libre communication du prevenu ou de l'accuseavec son avocat au cours de la procedure au fond, sont susceptibles deconstituer des remedes efficaces et appropries au defaut d'assistance d'unavocat au cours d'un interrogatoire de police. En effet, ces elementspermettent au prevenu ou à l'accuse d'exercer pleinement son droit dedefense et garantissent son droit à un proces equitable.

33. En tant qu'il fait valoir que le defaut d'assistance d'un avocat aucours d'un interrogatoire de police porte toujours une atteinteirremediable au droit de defense et au droit à un proces equitable, lemoyen manque en droit.

34. Il appartient en outre au juge d'apprecier à la lumiere des elementsconcrets de la cause si le defaut d'assistance d'un avocat lors d'uninterrogatoire par la police ou d'une audition par le juge d'instruction airremediablement porte atteinte au droit à un proces equitable ou audroit de defense de l'inculpe, ulterieurement prevenu ou accuse.

35. L'arret du 14 mai 2010 a considere que :

- eu egard à l'etat actuel de la legislation, il est exclu que lesverbalisateurs aient « sciemment agi de maniere illicite » ;

- durant l'audition, le juge d'instruction a veille à garantir audemandeur toutes les possibilites de faire connaitre ses moyens et sesgriefs ainsi que ses requetes tendant à entendre ordonner des actesd'instruction complementaires ;

- apres son arrestation, le demandeur a amplement eu l'occasion deconsulter son avocat et a effectivement consulte son avocat ;

- au cours des interrogatoires, le demandeur a annonce à plusieursreprises vouloir faire usage de son droit au silence ou vouloir consulterson avocatavant de se decider à parler ; ainsi, durant l'instruction preparatoire,il a eu à plusieurs reprises l'occasion de se concerter avec son avocatquant à ses moyens de defense, sa position juridique et son proces ;

- au cours des debats au fond, le demandeur aura l'occasion d'exposer sesgriefs et ses observations quant à l'administration de la preuve ;

- la procedure devant la cour d'assises est une procedure à caractereoral ; elle offre à l'accuse, assiste de son avocat, la possibilite depreciser, de rectifier ou de completer ses declarations et de determineret communiquer son point de vue definitif avant la cloture des debats ; ila egalement la possibilite d'interroger les temoins et de refuter oucontester leurs temoignages ;

- au cours des debats au fond, l'accuse a toujours la possibilited'expliciter ou de preciser les motifs de ses declarations.

36. Par ces motifs, la decision de l'arret du 14 mai 2010 suivant laquellele droit de defense et le droit à un proces equitable du demandeur n'ontpas ete violes, est legalement justifiee.

Dans cette mesure, le moyen ne peut etre accueilli.

37. Finalement, il y a egalement lieu d'examiner si les declarationsfaites par le demandeur sans l'assistance d'un avocat ont produit sur lederoulement ulterieur du proces penal un effet tel que celui n'a plus eteequitable.

Il ressort des motifs precites, releves dans l'arret du 14 mai 2010 etdans l'arret de declaration de culpabilite du 20 mai 2010, qu'aucun deselements sur lesquels la cour d'assises fonde la condamnation du demandeurn'a ete soustrait à la contradiction des parties. Ainsi, au cours de laprocedure devant la cour d'assises, le demandeur a egalement eu lapossibilite d'interpreter, de preciser et de rectifier les declarationsfaites sans l'assistance de son avocat et d'exercer effectivement etpleinement son droit de defense. En consequence, les arrets attaques neviolent pas l'article 6 de la Convention de sauvegarde des droits del'homme et des libertes fondamentales.

Dans cette mesure, le moyen ne peut davantage etre accueilli.

Sur le controle d'office des decisions rendues sur l'action publique :

38. Les formalites substantielles ou prescrites à peine de nullite ontete observees et la decision est conforme à la loi.

Par ces motifs,

La Cour

Rejette les pourvois ;

Condamne le demandeur aux frais.

(...)

Ainsi juge par la Cour de cassation, deuxieme chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le president de section Edward Forrier, president, le presidentde section Etienne Goethals et les conseillers Paul Maffei, Koen Mestdaghet Filip Van Volsem, et prononce en audience publique du sept decembredeux mille dix par le president de section Edward Forrier, en presence del'avocat general Marc Timperman, avec l'assistance du greffier FrankAdriaensen.

Traduction etablie sous le controle du conseiller Paul Maffei ettranscrite avec l'assistance du greffier Fabienne Gobert.

Le greffier, Le conseiller,

7 DECEMBRE 2010 P.10.1460.N/1



Références :

Origine de la décision
Date de la décision : 07/12/2010
Date de l'import : 14/10/2011

Numérotation
Numéro d'arrêt : P.10.1460.N
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2010-12-07;p.10.1460.n ?
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