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13/12/2010 | BELGIQUE | N°C.09.0612.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 13 décembre 2010, C.09.0612.F


Cour de cassation de Belgique

Arret

NDEG C.09.0612.F

1. B. G. et

2. D. D.,

demandeurs en cassation,

representes par Maitre Franc,ois T'Kint, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Charleroi, rue de l'Athenee, 9, ou il estfait election de domicile,

contre

V. M.,

defenderesse en cassation,

representee par Maitre Jacqueline Oosterbosch, avocat à la Cour decassation, dont le cabinet est etabli à Liege, rue de Chaudfontaine, 11,ou il est fait election de domicile.

I. La procedure devant la Cour
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Par ordonnance du 1...

Cour de cassation de Belgique

Arret

NDEG C.09.0612.F

1. B. G. et

2. D. D.,

demandeurs en cassation,

representes par Maitre Franc,ois T'Kint, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Charleroi, rue de l'Athenee, 9, ou il estfait election de domicile,

contre

V. M.,

defenderesse en cassation,

representee par Maitre Jacqueline Oosterbosch, avocat à la Cour decassation, dont le cabinet est etabli à Liege, rue de Chaudfontaine, 11,ou il est fait election de domicile.

I. La procedure devant la Cour

Le pourvoi en cassation est dirige contre l'arret rendu le 23 juin 2009par la cour d'appel de Mons.

Par ordonnance du 18 novembre 2010, le premier president a renvoye lacause devant la troisieme chambre.

Le president Christian Storck a fait rapport.

L'avocat general delegue Philippe de Koster a conclu.

II. Le moyen de cassation

Les demandeurs presentent un moyen libelle dans les termes suivants :

Dispositions legales violees

- article 149 de la Constitution ;

- articles 745bis, 915bis, S: 3, alineas 1er et 2, et 1134 du Code civil;

- articles 1287, alineas 3 et 4, dans sa redaction anterieure àl'abrogation dudit alinea 4 par l'article 31 de la loi du 27 avril 2007,entree en vigueur le 1er septembre 2007, et 1288bis du Code judiciaire ;

- principe general du droit relatif à l'office du juge, qui impose àcelui-ci de faire application d'initiative de la regle juridique adequateau litige qui lui est soumis.

Decisions et motifs critiques

L'arret met à neant le jugement entrepris, sauf en ce qu'il a rec,u lademande de la defenderesse, et, reformant et statuant par voie dedispositions nouvelles, dit pour droit qu'il y a lieu de proceder auxcomptes, liquidation et partage de la succession de feu V. B., dit pourdroit que la defenderesse dispose de la reserve du conjoint survivant dansla succession du defunt, conformement à l'article 915bis, S: 1er, duCode civil, renvoie les parties devant les notaires Babusiaux et Brohypour proceder aux operations relatives à la succession de feu V. B. et,à defaut d'accord entre les parties, ordonne la vente des biens noncommodement partageables dependant de la succession, aux motifs, apresavoir admis que les epoux vivaient separes depuis le mois d'aout 2004,que, le 1er septembre 2004, feu V. B. avait exherede la defenderesse desa succession, que les parties avaient entame une procedure de divorce parconsentement mutuel par requete deposee le 31 mai 2005 et que V. B. s'estvolontairement donne la mort avant la premiere comparution en divorce, que

« Le principe des droits reservataires du conjoint survivant est fixe parl'article 915bis, S: 1er, du Code civil [...]. Cependant, ce principepeut recevoir exception dans les cas de figure vises par l'article 915bis,S: 3, alineas 1er et 2 [...] ;

Or, en l'espece, [les demandeurs] font etat, à la fois, du testamentolographe de V. B., date du 1er septembre 2004, precisant : `Jesoussigne, V. B., declare reduire au maximum l'usufruit revenant à mafemme. Si je suis dans les conditions legales, je le supprime totalement',et des conventions prealables conclues le 10 mars 2005 entre les epoux B.- V. stipulant : `en application du troisieme alinea de l'article 1287 duCode judiciaire, les epoux conviennent, pour le cas de deces de l'un d'euxavant le jugement prononc,ant definitivement leur divorce, que lesurvivant n'aurait dans la succession du premourant, à dater de lapremiere comparution, aucun des droits attribues au conjoint survivantpar les articles 745bis et 915bis du Code civil' ;

Il convient, cependant, de distinguer les situations respectives, viseespar l'article 915bis, S: 3, alineas 1er et 2, du Code civil, quiconcernent la possibilite d'exhereder tantot par le biais d'un testament,à certaines conditions de separation, et tantot par le biais deconventions prealables à un divorce par consentement mutuel. Dansl'hypothese, comme en l'espece, ou des conventions prealables à undivorce par consentement mutuel ont ete etablies, l'article 915bis, S: 3,alinea 2, du Code civil precise clairement que l'exheredationtestamentaire ne s'applique plus [...]. Il faut donc conclure, enl'espece, que le testament olographe de V. B., qui a exprime sa volonted'exhereder son conjoint, pour autant que la loi le permettait, ne peutsortir aucun effet [en raison] de la conclusion ulterieure de conventionsprealables à divorce par consentement mutuel au divorce, pour autant queces conventions puissent, elles-memes, sortir leurs effets [...] ;

Les conventions prealables du 10 mars 2005 ayant ete conclues, et memedeposees au greffe de la juridiction saisie, avant le deces, elles doiventsortir leurs effets, en ce qui concerne le reglement successoral, mais enconformite avec le texte meme insere dans celles-ci. Or, precisement, enl'espece, l'exheredation du conjoint survivant, suivant le texte desconventions prealables, ne doit etre effective que si le deces d'un desconjoints survient `à dater de la premiere comparution' ;

Il faut donc conclure que [la defenderesse] n'aurait pu etre privee de sesdroits reservataires de conjoint survivant que si le deces etait survenu,au plus tot, le 4 juillet 2005 et non, comme en l'espece, deux jours plustot »,

et encore que

« Les termes utilises [par les conventions prealables] semblentd'ailleurs assez conformes à la volonte de V. B., dont le suicidedemontrerait qu'il ne supportait pas le divorce envisage, en maniere tellequ'il n'aurait pas voulu que celui-ci sortisse ses effets successorauxavant que la procedure soit devenue ineluctable, soit à la date de lapremiere comparution ».

Griefs

L'article 745bis, S: 1er, du Code civil prevoit que :

« Lorsque le defunt laisse des descendants, des enfants adoptifs ou desdescendants de ceux-ci, le conjoint survivant recueille l'usufruit detoute la succession.

Lorsque le defunt laisse d'autres successibles, le conjoint survivantrecueille la pleine propriete de la part du premourant dans le patrimoinecommun et l'usufruit du patrimoine propre du defunt ».

L'article 915bis du meme code porte, pour sa part, que :

« S: 1er. Nonobstant toute disposition contraire, le conjoint survivant adroit à l'usufruit de la moitie des biens de la succession.

S: 2. [...] En cas de separation de fait des epoux, [l'] usufruit [surl'immeuble affecte au logement principal de la famille et sur les meublesmeublants le garnissant] porte sur l'immeuble ou les epoux avaient etablileur derniere residence conjugale et sur les meubles meublants qui legarnissent à condition que le conjoint survivant y ait maintenu saresidence ou ait ete contre sa volonte [empeche] de le faire et quel'attribution de cet usufruit soit conforme à l'equite [...].

S: 3. Le conjoint survivant peut etre prive par testament des droitsprevus aux paragraphes 1er et 2 lorsque, au jour du deces, les epouxetaient separes depuis plus de six mois et que, par un acte judiciaire,soit en demandant, soit en defendant, le testateur a reclame une residenceseparee de celle de son conjoint et pour autant que, depuis cet acte, lesparties n'aient plus repris la vie commune.

Cette disposition n'est pas applicable lorsque les epoux ont etabli laconvention prevue à l'article 1287, alinea 3, du Code judiciaire ».

Cette derniere disposition porte que les epoux qui sont determines àdivorcer par consentement mutuel sont tenus d'arreter des conventionsprealables à ce divorce aux termes desquelles ils doivent, notamment,constater leurs conventions au sujet de l'exercice des droits prevus parles articles 745bis et 915bis du Code civil pour le cas ou l'un d'euxdecederait avant le jugement ou l'arret prononc,ant definitivement leurdivorce.

Mais le meme article 1287 prevoyait encore, par un alinea 4 qui a eteabroge seulement par l'article 31 de la loi du 27 avril 2007 entre envigueur le 1er septembre 2007, en sorte que cette dispositions'appliquait au litige des parties, que « ces conventions sont sans effetsi la procedure est abandonnee ».

Cette procedure est introduite et partant engagee, selon l'article1288bis, alineas 1er, 2 et 6, du meme code, par la requete deposee augreffe du tribunal de premiere instance par les epoux et signee par chacund'eux, ou par un avocat ou un notaire.

Premiere branche

Les dispositions des conventions prealables, specialement en ce qu'ellesreglent l'exercice des droits successoraux des conjoints prevus par lesarticles 745bis et 915bis du Code civil, sont caduques et ne peuventproduire aucun effet, et ce ab initio, des lors que la procedure endivorce par consentement mutuel, engagee par le depot de la requete endivorce au greffe du tribunal competent, accompagnee des pieces requises,est abandonnee, c'est-à-dire n'est pas poursuivie, pour quelque raisonque ce soit, l'article 1287, alinea 4, du Code judiciaire ne faisantaucune distinction à cet egard.

D'autre part, la conclusion des conventions prealables visees à l'alinea3 de cette disposition n'a pas pour effet de rendre caduque un testamentanterieur exheredant un conjoint de tous droits sur la succession del'epoux testateur mais simplement de remplacer ces dispositionstestamentaires, pour autant que ces conventions restent aptes à sortirleurs effets, ce qui est exclu lorsque, à quelque stade que ce soit, laprocedure en divorce par consentement mutuel n'est pas poursuivie ; il enva ainsi lorsque la premiere comparution ne peut avoir lieu, apres introduction de la cause, quelle que puisse etre la raison du defaut decomparution.

En vertu du principe general du droit de l'office du juge, celui-ci est tenu d'appliquer, fut-ce de sa propre initiative, les dispositions legalesadequates au litige que les parties lui soumettent, sauf si elles en ontdecide formellement autrement et, en outre, si ces dispositions ne sont niimperatives ni d'ordre public.

Il s'ensuit que l'arret, qui constate que, d'une part, feu Vincent Baioavait exherede par testament la defenderesse et que, d'autre part, laprocedure de divorce par consentement mutuel introduite par requete du31 mai 2005 n'a pas ete poursuivie, les epoux n'ayant pas comparu devantle president du tribunal de premiere instance competent, le de cuiuss'etant volontairement donne la mort, decide neanmoins qu'en raison desconventions prealables à divorce par consentement mutuel les dispositionstestamentaires anterieures etaient privees definitivement d'effet,l'exheredation de la defenderesse etant supprimee jusqu'à la premierecomparution, viole les articles 745bis, 915bis, S: 3, alineas 1er et 2,1134 du Code civil, 1287, specialement alinea 4 (tel qu'il existait avantson abrogation par la loi du 27 avril 2007) et 1288bis du Code judiciaire,et meconnait le principe general du droit de l'office du juge, lesconventions prealables à divorce par consentement mutuel etant priveesd'effet en raison de l'abandon de la procedure et le testament olographeanterieur devant produire tous ses effets.

Seconde branche

Il est contradictoire de decider, d'une part, que l'exheredation porteepar le testament olographe du 1er septembre 2004 ne peut plus sortird'effet en raison de la conclusion des conventions prealables à divorcepar consentement mutuel et de l'intentement de la procedure de divorce,les conditions prevues pour l'exheredation admise par l'article 1287,alinea 3, du Code judiciaire, imposees par les conventions prealablessouscrites par les epoux, n'etant pas remplies, et d'admettre, parailleurs, que la procedure en divorce par consentement mutuel n'avait pasete poursuivie en raison de la volonte de feu V. B., manifestee par sonsuicide, de l'abandon, des lors « qu'il ne supportait pas le divorceenvisage », ce qui privait ces conventions prealables de tout effet.

Des lors, l'arret n'est pas regulierement motive et viole l'article 149 dela Constitution.

III. La decision de la Cour

Quant à la seconde branche :

Si l'arret constate que le suicide du fils des demandeurs « demontreraitqu'il ne supportait pas le divorce envisage, en maniere telle qu'iln'aurait pas voulu que celui-ci sortisse ses effets successoraux avant quela procedure ne soit devenue ineluctable, soit à la date de la premierecomparution », il n'admet en aucun de ses motifs que le defunt aurait eula volonte d'abandonner la procedure.

Le moyen, en cette branche, manque en fait.

Quant à la premiere branche :

En vertu de l'article 1287, alinea 3 du Code judiciaire, les epouxdetermines à operer le divorce par consentement mutuel doivent, dansl'acte par lequel ils reglent prealablement leurs droits respectifs,constater leurs conventions au sujet de l'exercice des droits prevus auxarticles 745bis et 915bis du Code civil pour le cas ou l'un d'euxdecederait avant le jugement ou l'arret prononc,ant definitivement ledivorce.

Dans sa redaction applicable au litige, le quatrieme alinea de l'article1287 dispose que ces conventions sont sans effet si la procedure estabandonnee.

Le deces de l'un des epoux, qui est l'evenement en consideration duquelceux-ci concluent lesdites conventions, ne constitue pas, quelle qu'ensoit la cause, un cas ou la procedure est abandonnee au sens de l'article1287, alinea 4.

Le moyen, qui soutient le contraire, manque en droit.

Par ces motifs,

La Cour

Rejette le pourvoi ;

Condamne les demandeurs aux depens.

Les depens taxes à la somme de six cent nonante-huit euros vingt-troiscentimes envers les parties demanderesses et à la somme de deux centcinquante-neuf euros trente-six centimes envers la partie defenderesse.

Ainsi juge par la Cour de cassation, troisieme chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le president Christian Storck, les conseillers ChristineMatray, Martine Regout, Alain Simon et Mireille Delange, et prononce enaudience publique du treize decembre deux mille dix par le presidentChristian Storck, en presence de l'avocat general delegue Philippe deKoster, avec l'assistance du greffier Marie-Jeanne Massart.

+-------------------------------------------+
| M.-J. Massart | M. Delange | A. Simon |
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| M. Regout | Chr. Matray | Chr. Storck |
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13 DECEMBRE 2010 C.09.0612.F/10


Synthèse
Numéro d'arrêt : C.09.0612.F
Date de la décision : 13/12/2010

Analyses

AMENDE ADMINISTRATIVE EN MATIERE FISCALE


Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2010-12-13;c.09.0612.f ?
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