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03/03/2011 | BELGIQUE | N°F.10.0039.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 03 mars 2011, F.10.0039.F


Cour de cassation de Belgique

Arret

4866



NDEG F.10.0039.F

ETAT BELGE, represente par le ministre des Finances, dont le cabinet estetabli à Bruxelles, rue de la Loi, 12,

demandeur en cassation,

represente par Maitre Franc,ois T'Kint, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Charleroi, rue de l'Athenee, 9, ou il estfait election de domicile,

contre

DUPONT MARTINE, societe privee à responsabilite limitee dont le siegesocial est etabli à Charleroi (Gilly), chaussee de Chatelet, 255,

defenderesse en cassat

ion,

ayant pour conseil Maitre Olivier D'Aout, avocat au barreau de Liege, dontle cabinet est etabli à Liege, r...

Cour de cassation de Belgique

Arret

4866

NDEG F.10.0039.F

ETAT BELGE, represente par le ministre des Finances, dont le cabinet estetabli à Bruxelles, rue de la Loi, 12,

demandeur en cassation,

represente par Maitre Franc,ois T'Kint, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Charleroi, rue de l'Athenee, 9, ou il estfait election de domicile,

contre

DUPONT MARTINE, societe privee à responsabilite limitee dont le siegesocial est etabli à Charleroi (Gilly), chaussee de Chatelet, 255,

defenderesse en cassation,

ayant pour conseil Maitre Olivier D'Aout, avocat au barreau de Liege, dontle cabinet est etabli à Liege, rue de Joie, 56.

I. La procedure devant la Cour

Le pourvoi en cassation est dirige contre l'arret rendu le 9 decembre 2009par la cour d'appel de Mons.

Le conseiller Martine Regout a fait rapport.

L'avocat general Andre Henkes a conclu.

II. Les moyens de cassation

Le demandeur presente deux moyens libelles dans les termes suivants :

Premier moyen

Disposition legale violee

Article 149 de la Constitution

Decisions et motifs critiques

L'arret declare l'appel du demandeur non fonde, confirme le jugemententrepris, qui avait annule la contrainte visee et rendue executoire le 17aout 2006 à charge de la defenderesse, et condamne le demandeur aux fraiset aux depens de l'appel, aux motifs que :

« La contrainte litigieuse a ete decernee le 11 aout 2006 par madame B.D., inspecteur principal ad interim, chef du premier bureau de la recettede la taxe sur la valeur ajoutee de Charleroi ; elle a ete visee et rendueexecutoire le 17 aout 2006 par madame C. P., inspecteur principal de lataxe sur la valeur ajoutee à Charleroi 5, fonctionnaire designe par ledirecteur regional de la taxe sur la valeur ajoutee, de l'enregistrementet des douanes de Mons ; il appartient à l'administration fiscale deprouver que le fonctionnaire qui a vise la contrainte et l'a rendueexecutoire etait bien designe par le directeur regional de la taxe sur lavaleur ajoutee au sens de l'article 85, S: 1er, alinea 1er, du Code de lataxe sur la valeur ajoutee (...) ; la delegation ne peut etre quepartielle et elle est d'interpretation stricte ; lorsqu'une delegation depouvoir est contestee par un administre, comme en l'espece, le juge doits'assurer, d'une part, que l'autorisation de deleguer est permiseexplicitement ou implicitement par un texte de loi et, d'autre part, ildoit verifier que l'autorite competente a reellement delegue ses pouvoirsdans les limites concedees par l'acte d'habilitation (...) ;l'administration de la taxe sur la valeur ajoutee, de l'enregistrement etdes douanes a pris, suite au vote de la loi du 8 aout 1980, uneinstruction administrative generale du 1er juin 1986 identifiee commeetant l'instruction B75 (poursuites) ; (...) par une note de service nDEG24 du 10 avril 2002, prise en execution de l'article 85, S: 1er, du Codede la taxe sur la valeur ajoutee et des numeros 38 et 39 de l'instructionB75 (...), (le) directeur regional ad interim de l'administration de lafiscalite des entreprises et des revenus - section taxe sur la valeurajoutee de Mons a donne `delegation aux inspecteurs principaux, titulairesou interimaires des offices de controle de la taxe sur la valeur ajouteepour viser et rendre executoires les contraintes autres que cellesrelatives :

- aux releves de regularisation de plus de 3.000 euros en taxe sur lavaleur ajoutee ;

- (...)

- aux proces-verbaux non approuves par la direction.

Il appartient à l'inspecteur principal de l'office de controle des'assurer de sa competence avant tout visa de la contrainte. Dans lanegative, il transmet immediatement cette derniere à la direction enformulant, le cas echeant, ses avis et conseils' (...) ; il ressort decette note de service que le directeur regional de la taxe sur la valeurajoutee de Mons, autorite administrative competente ratione materiae etratione loci, a bien delegue son pouvoir de viser et de rendre executoiresles contraintes aux fonctionnaires territorialement competents des officesde controle de la taxe sur la valeur ajoutee ayant le grade d'inspecteursprincipaux, titulaires ou interimaires sous la condition imposee à cesderniers de s'assurer de leur competence avant tout visa de la contrainteet hormis certains cas ; il est constant que madame V. M. (...) a effectueun controle (de la comptabilite de la defenderesse) ; à la suite de cecontrole, un releve de regularisation a ete envoye selon la pratiqueadministrative, le 9 decembre 2005 (...), par lequel l'administrationfiscale competente declare (la defenderesse) redevable d'une somme de4.855,82 euros à titre de taxe sur la valeur ajoutee ; en l'absence dereponse de l'assujetti à ce `releve de regularisation' dans les vingtjours de son envoi, le fonctionnaire taxateur a etabli le 17 janvier 2006un proces-verbal des infractions constatees ; le chef du premier bureau dela recette de la taxe sur la valeur ajoutee de Charleroi a decerne le 11aout 2006 une contrainte à charge de (la defenderesse), laquelle a etevisee et rendue executoire le 17 aout 2006 par madame C. P., fonctionnairedesignee par le directeur de la taxe sur la valeur ajoutee de Mons ; iln'est pas conteste que madame C. P. etait titulaire du grade de controleuren chef et a ete nommee d'office à partir du 1er juillet 1997 au graded'inspecteur principal d'administration fiscale en application de l'arreteroyal du 6 juillet 1997 relatif à la simplification de la carriere decertains agents du ministere des Finances appartenant aux niveaux 1 et 2(...) ; en vertu de la note de service nDEG 24 du 10 avril 2002 (...),madame C. P. (...) ne pouvait pas viser et rendre executoire le 17 aout2006, en sa qualite de fonctionnaire designe par le directeur regional dela taxe sur la valeur ajoutee de Mons, la contrainte emise à charge de(la defenderesse), à peine d'exces de pouvoir, puisqu'elle etait relativeà `un releve de regularisation de plus de 3.000 euros de taxe' ; lacontrainte litigieuse, visee et rendue executoire par un fonctionnairedesigne par le directeur regional en dehors des conditions d'habilitationprecisee par l'autorite delegante, n'a pas de force executoire et ne peutdonc produire aucun effet juridique, puisqu'elle procede d'un exces depouvoir ».

Griefs

Par ses conclusions « principales » d'appel, le demandeur, apres avoirexpose les conditions d'application et la nature des delegations viseespar l'article 85, S: 1er, du Code de la taxe sur la valeur ajoutee,faisait valoir que, « dans cette affaire, la solution [de]favorabledegagee par le juge de Mons decoule notamment d'une interpretationcontestable de la note de service nDEG 27^2, precitee.

Il apparait en effet que le juge ne nie pas explicitement l'existence, nila recevabilite en justice de cette note de service, mais qu'en luidonnant une portee limitee (la delegation ne serait valable que pour leslitiges autres que ceux relatifs notamment aux releves de regularisationd'un montant de [moins de 3.000 euros]), il a estime que, dans le casd'espece, la contrainte concerne un releve de regularisation de plus de3.000 euros et qu'en consequence, madame C. P. n'avait pas le pouvoir dedecerner la contrainte en vertu de la note de service nDEG 24.

Cette note de service nDEG 27^2 doit etre interpretee differemment, parune lecture conjointe de son premier paragraphe et du premier tiret de sondeuxieme paragraphe, en ce sens que cette delegation `est donnee auxcontroleurs en chef, titulaires ou interimaires, de viser et rendreexecutoires les contraintes qui ont pour objet des sommes dues en vertud'un proces-verbal dont le projet a ete approuve par les services dudirecteur regional de la taxe sur la valeur ajoutee de Mons', quel qu'ensoit le montant à titre de droits. Le tribunal ne conteste pas enl'espece que ce proces-verbal a ete approuve par les services du directeurregional de la taxe sur la valeur ajoutee de Mons ».

De la sorte, apres avoir soutenu que la delegation de competence pourviser et rendre executoires les contraintes avait ete valablement confereepar le directeur regional de la taxe sur la valeur ajoutee de Mons àmadame C. P., inspecteur principal d'administration fiscale, ce quel'arret admet expressement, le demandeur faisait valoir que, s'il etaitexact que le releve de regularisation dont la defenderesse avait faitl'objet et qui avait donne lieu à la contrainte litigieuse, portait surun montant superieur à 3.000 euros, il ne pouvait s'en deduire,contrairement à ce qu'avait decide le premier juge, que la contrainten'etait pas valable, des lors que le proces-verbal du 17 janvier 2006constatant les infractions mises à charge de la defenderesse « avait eteapprouve par les services du directeur regional de la taxe sur la valeurajoutee à Mons », ce qui suffisait à conferer pouvoir et competence aufonctionnaire qui avait delivre la contrainte, en vertu de la note deservice nDEG 24, qui, selon les enonciations de l'arret, conferaitdelegation aux inspecteurs principaux, pour toutes les contraintes, quelque soit le montant de la taxe sur la valeur ajoutee reclamee à titre deregularisation, des lors que le proces-verbal avait ete approuve par ladirection regionale.

L'arret, qui ne denie pas que tel aurait ete le cas, ne rencontre paraucun de ses motifs cette defense circonstanciee presentee par ledemandeur. Partant, il n'est pas regulierement motive et viole l'article149 de la Constitution.

Second moyen

Dispositions legales violees

- articles 85, S:S: 1er et 2, et 89 de la loi du 3 juillet 1969 creant leCode de la taxe sur la valeur ajoutee ;

- articles 2, 860, 861, 862 et 867 du Code judiciaire.

Decisions et motifs critiques

L'arret declare l'appel du demandeur non fonde et confirme le jugemententrepris qui avait annule la contrainte visee et rendue executoire le 17aout 2006 à charge de la defenderesse, condamnant le demandeur aux fraiset aux depens de l'appel, aux motifs que :

« C'est en vain que (le demandeur) soutient que la nullite de lacontrainte ne pourrait pas etre prononcee, au motif que l'irregularite n'apas nui aux interets de l'assujetti (violation des articles 2, 860, 861 etsuivants du Code judiciaire) ; la contrainte n'est pas un acte deprocedure au sens de l'article 860 du Code judiciaire, c'est-à-dire unacte accompli dans le cadre d'une procedure mue en justice ou sous lecontrole de la justice emanant des parties, de leurs mandataires ou desauxiliaires du juge (Cass., 28 avril 1988, Pas. 1988, I, p. 1023), mais unacte administratif auquel les regles du Code judiciaire ne sont pasapplicables ; l'administration fiscale enseigne d'ailleurs à juste titreau numero 632 de son excellent Manuel de la taxe sur la valeur ajoutee, àjour au 1er octobre 2007, ce qui suit :

`La contrainte est un acte extrajudiciaire (...) qui est destine à servirde titre executoire au recouvrement des deniers publics et par lequel lefonctionnaire competent determine le montant de la dette, la cause decelle-ci et la personne qui en est redevable. La contrainte permetl'execution forcee de la creance de l'administration. Elle permet aussil'adoption de mesures qui tendent à sauvegarder ou à assurer lerecouvrement (mesures executoires, inscription hypothecaire, etc.).

La contrainte decernee par le fonctionnaire charge du recouvrement, viseeet rendue executoire par le directeur regional de l'administration de lataxe sur la valeur ajoutee, de l'enregistrement et des domaines ou par lefonctionnaire designe par lui, constitue egalement un titre authentique'.

Contrairement à ce qu'affirme (le demandeur), il ne peut etre decrete quela theorie des nullites contenue dans le Code judiciaire doit etreappliquee en l'espece au motif que l'article 85 du Code de la taxe sur lavaleur ajoutee n'a prevu aucune disposition quant à la nullite descontraintes, pas meme lorsque la contrainte a ete visee par unfonctionnaire designe depassant les limites de son habilitation à agir ;la contrainte en matiere de taxe sur la valeur ajoutee constitue, nonseulement le titre de la taxation concretisant la dette fiscale à defautde paiement spontane, mais aussi l'acte valant titre executoire necessaireau recouvrement de la dette fiscale (Cass., 9 mars 2006, R.G. nDEGC.04.0284.N), sans que celle-ci puisse etre qualifiee d'acte de procedureau sens de l'article 860 du Code judiciaire.

La circonstance que l'irregularite denoncee n'ait pas empeche de faireconnaitre à l'assujetti les preventions du fisc et n'ait pas porteprejudice à son droit d'introduire son opposition à contrainte est sansincidence sur l'appreciation de la validite et de la force executoire dela contrainte ; le premier juge ne devait pas davantage declarer nonfondee la demande d'annulation de la contrainte, au motif que lasignification de celle-ci et le commandement de payer avaient atteint lebut que la loi leur assignait.

Contrairement à ce que soutient (le demandeur), (...) le premier juge n'apas constate (...) ; le jugement entrepris (a emis un grief) seulement surl'etendue des pouvoirs (du fonctionnaire), c'est-à-dire sur sa capacited'agir en tant qu'agent revetu d'une parcelle de la puissance publique(imperium) au regard de l'acte explicite de delegation contenu dans lanote de service nDEG 24 (...) ; pour regulierement motiver l'annulation dela contrainte, le jugement entrepris ne devait pas constater prealablementque l'assujetti a ou doit avoir interet à invoquer l'illegalite alleguee,au motif qu'elle lui aurait cause un quelconque grief ; en effet, meme sila delegation est edictee dans l'interet du tresor public dans un soucilegitime d'efficacite du fonctionnement du service public par un transfertde certaines competences, force est de constater que le directeur regionalde la taxe sur la valeur ajoutee de Mons a exclu toute faculte dedelegation de ses pouvoirs de viser et de rendre executoires lescontraintes en cas de releve de regularisation d'un montant superieur à3.000 euros ; à l'egard de cet acte administratif d'une importanceparticuliere, il a souhaite conserver personnellement l'exercice de cettecompetence jugee essentielle ; l'assujetti a donc aussi un interet à ceque cette attribution demeure personnellement exercee par ce hautfonctionnaire, sans possibilite de delegation ; l'administre aura ainsi lagarantie que les actes administratifs les plus essentiels seront etablispersonnellement par ce haut fonctionnaire à qui la competence a eteprincipalement reconnue, ce qui constitue une protection contrel'arbitraire et les exces de pouvoir.

Le premier juge n'a pas meconnu les regles relatives à la charge de lapreuve en matiere civile : des lors que l'administration fiscale, dans lecorps meme de la contrainte et au cours de la procedure fiscalecontentieuse, soutient que le directeur regional a delegue sa competence,il appartient à cette meme administration, en cas de contestation, deproduire un acte de delegation regulier ou tout element permettantd'attester de son existence et de son etendue, obligation dont elle s'estacquittee ».

Griefs

L'article 85, S: 1er, du Code de la taxe sur la valeur ajoutee disposequ'« en cas de non-payement de la taxe, des interets, des amendesfiscales et des accessoires, une contrainte est decernee par lefonctionnaire charge du recouvrement ; elle est visee et rendue executoirepar le directeur regional de l'administration de la taxe sur la valeurajoutee, de l'enregistrement et des domaines ou par un fonctionnairedesigne par lui et, dans tous les cas determines par le Roi, par ledirecteur regional de l'administration des douanes et accises ou unfonctionnaire designe par lui ».

Et, surtout, le paragraphe 2 de cette disposition, specialement en son3DEG, porte que cette notification « permet au redevable de faireopposition à l'execution de la contrainte de la maniere prevue parl'article 89 », cet article disant que, « sous reserve de ce qui a eteprevu par les articles 85, S:S: 1er et 2, et 85bis, l'execution de lacontrainte a lieu compte tenu de la cinquieme partie, titre III, du Codejudiciaire relatif à l'execution forcee ».

Premiere branche

Si l'arret doit etre interprete comme decidant que la contraintelitigieuse est nulle en raison d'un vice de forme qui l'entacherait parcequ'il n'en decoulerait pas que le fonctionnaire signataire auraitbeneficie de la delegation necessaire à cette fin, alors il viole lesarticles 2, 860, 861, 862 et 867 du Code judiciaire.

Car la contrainte, en matiere de taxe sur la valeur ajoutee, visee etrendue executoire conformement à l'article 85 du Code de la taxe sur lavaleur ajoutee, constitue l'acte de procedure initial qui permet, d'unepart, à l'administration de poursuivre le recouvrement des taxes,amendes, interets et frais dont elle estime que l'assujetti est redevableet qui, d'autre part, autorise celui-ci, et lui seul, à s'opposer à cespretentions ; elle constitue donc incontestablement un acte de procedurequi, à defaut de regles particulieres imposees par le Code de la taxe surla valeur ajoutee ou une autre loi, est soumis entierement, en vertu del'article 2 du Code judiciaire, aux regles edictees par celui-ci en sesarticles 860 et suivants ; la contrainte ne peut donc etre declaree nulleque si 1DEG cette nullite est formellement prevue par la loi (article 860du Code judiciaire), 2DEG l'omission denoncee porte atteinte aux interetsde l'assujetti et lui cause un prejudice effectif et non theorique, cequ'il lui incombe de demontrer (article 861), et 3DEG la contrainte n'a,quelle que soit la cause de nullite qui a pu l'entacher, malgre le vicedenonce, pas atteint le but que la loi lui assignait, à savoir faireconnaitre à l'assujetti les pretentions du fisc et lui permettre de s'yopposer efficacement.

Or, ni l'article 85 du Code de la taxe sur la valeur ajoutee, ni aucuneautre disposition legale ne frappe de nullite la contrainte qui aurait etevisee et rendue executoire par un fonctionnaire designe depassant leslimites de son habilitation à agir, tandis que l'arret ne pretend pas quela contrainte, sa signification et le commandement n'auraient pas realisele but que la loi leur assignait et que la defenderesse aurait eteempechee d'exercer son droit d'opposition en parfaite connaissance decause et que ses interets auraient ete concretement leses, en sortequ'elle aurait subi un prejudice.

L'arret, qui se borne à affirmer que la contrainte ne constitue pas unacte de procedure mais un acte administratif extrajudiciaire auquel leCode judiciaire et la theorie des nullites qu'il comporte nes'appliqueraient pas et qui decide que, compte tenu de l'importance et dela specificite de cet acte, qui constitue le titre de la taxationconcretisant la dette fiscale à defaut de paiement spontane ainsi quel'acte valant titre executoire necessaire au recouvrement de la dettefiscale, « la circonstance que l'irregularite denoncee n'ait pas empechede faire connaitre à l'assujetti les pretentions du fisc et n'ait pasporte prejudice à son droit d'introduire une opposition à contrainte estsans incidence sur l'appreciation de la validite et de la force executoirede la contrainte » et que « le premier juge ne devait pas davantagedeclarer non fondee la demande d'annulation de la contrainte, au motif quela signification de celle-ci et le commandement de payer avaient atteintle but que la loi leur assignait », viole les articles 85, S: 1er, et 89du Code de la taxe sur la valeur ajoutee et les articles 2, 860, 861, 862et 867 du Code judiciaire.

Seconde branche

En toute hypothese, tant par application de l'article 860 du Codejudiciaire qu'au regard des regles qui regissent, en droit administratif,la nullite des actes, pareille nullite ne peut etre prononcee que si elleest expressement prevue par la loi, si elle fait grief au destinataire del'acte et si elle revet une certaine gravite.

Or, aucun texte legal, et singulierement pas les articles 85, S: 1er, et89 du Code de la taxe sur la valeur ajoutee, ne prevoit que la contrainteserait frappee de nullite des lors qu'elle aurait ete visee et rendueexecutoire par le fonctionnaire auquel pareil pouvoir aurait ete deleguemais au-delà de cette delegation.

Specialement, en droit administratif, la violation d'une formaliten'entraine pas automatiquement la nullite de l'acte considere car, pourqu'il en soit ainsi, il est requis que la formalite soit, ou bienprescrite à peine de nullite, ou bien substantielle, qu'elle soitprescrite dans l'interet de l'administre et non pas dans celui del'administration, que la violation revete une certaine gravite et, saufexception, qu'elle cause grief effectivement et non pas abstraitement àl'administre.

Or, aucun texte legal ne prevoit la nullite de la contrainte delivree envertu de l'article 85, S: 1er, du Code de la taxe sur la valeur ajouteetandis qu'il ne resulte ni des enonciations de l'arret ni d'aucune pieceà laquelle la Cour pourrait avoir egard que le vice retenu aurait causeà la defenderesse un prejudice effectif, l'interet theorique qu'auraitl'assujetti à ce que toute contrainte portant sur un redressementsuperieur à 3.000 euros soit visee et signee par le directeur regional del'administration de la taxe sur la valeur ajoutee etant purement theoriqueet sa meconnaissance n'emportant pas, sauf preuve contraire dont iln'etait pas soutenu que la defenderesse [l']aurait rapportee, l'existenced'un grief concret.

Il s'ensuit que l'arret qui, par les motifs qu'il avance, declare, parconfirmation du jugement entrepris, la contrainte decernee à charge de ladefenderesse nulle et sans effet, viole les articles 85, S: 1er, et 89 duCode de la taxe sur la valeur ajoutee, 2, 860, 861 et 867 du Codejudiciaire.

III. La decision de la Cour

Sur le premier moyen :

Apres avoir constate que la note de service nDEG 24 du 10 avril 2002annule et remplace toutes les directives anterieures, l'arret considereque « l'Etat belge ne peut tirer aucun moyen ou argument de la note deservice numero 27, exposant 2, du 1er juin 1997 du directeur regional dela taxe sur la valeur ajoutee de Mons, dans la mesure ou celle-ci a eteexpressement abrogee par la note de service nDEG 24 du 10 avril 2002precitee ».

Il repond ainsi au moyen pris par le demandeur, dans ses conclusionsprincipales d'appel, de l'interpretation de la note de service du 1er juin1997.

Le moyen manque en fait.

Sur le second moyen :

Quant à la premiere branche :

La contrainte visee et rendue executoire conformement à l'article 85 duCode de la taxe sur la valeur ajoutee est un acte administratif.

Le moyen qui, en cette branche, soutient qu'elle s'analyse en un acte deprocedure soumis aux articles 860 et suivants du Code judiciaire, manqueen droit.

Quant à la seconde branche :

D'une part, pour les motifs exposes en reponse à la premiere branche dumoyen, les articles 860 et suivants du Code judiciaire ne s'appliquent pasà la contrainte visee et rendue executoire conformement à l'article 85du Code de la taxe sur la valeur ajoutee.

D'autre part, contrairement à ce que soutient le moyen, en cette branche,la nullite d'un acte administratif deduite de la violation d'une formalitesubstantielle ou prescrite à peine de nullite ne requiert pas que cetteviolation ait cause à l'administre un grief concret.

Le moyen, en cette branche, manque en droit.

Par ces motifs,

La Cour

Rejette le pourvoi ;

Condamne le demandeur aux depens.

Les depens taxes à la somme de cent vingt-sept euros quatre-vingt-deuxcentimes envers la partie demanderesse et à la somme de deux centvingt-neuf euros sept centimes envers la partie defenderesse.

Ainsi juge par la Cour de cassation, premiere chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le president Christian Storck, les conseillers Didier Batsele,Sylviane Velu, Martine Regout et Gustave Steffens, et prononce en audiencepublique du trois mars deux mille onze par le president Christian Storck,en presence de l'avocat general Andre Henkes, avec l'assistance dugreffier Patricia De Wadripont.

+---------------------------------------------+
| P. De Wadripont | G. Steffens | M. Regout |
|-----------------+-------------+-------------|
| S. Velu | D. Batsele | Chr. Storck |
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3 MARS 2011 F.10.0039.F/1


Synthèse
Numéro d'arrêt : F.10.0039.F
Date de la décision : 03/03/2011

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2011-03-03;f.10.0039.f ?
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