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06/05/2011 | BELGIQUE | N°C.10.0494.N

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 06 mai 2011, C.10.0494.N


Cour de cassation de Belgique

Arret

NDEG C.10.0494.N

M-L. B.,

Me Caroline De Baets, avocat à la Cour de cassation,

contre

AXA BANQUE EUROPE, societe anonyme,

Me Johan Verbist, avocat à la Cour de cassation.

I. La procedure devant la Cour

Le pourvoi en cassation est dirige contre un arret rendu le 30 mars 2010par la cour d'appel de Gand.

Le conseiller Eric Dirix a fait rapport.

L'avocat general Guy Dubrulle a conclu.

L'avocat general Guy Dubrulle a depose des conclusions le 11 avril 2011.

II. Le moyen d

e cassation

La demanderesse presente un moyen libelle dans les termes suivants :

Dispositions legales violees

- articles 118...

Cour de cassation de Belgique

Arret

NDEG C.10.0494.N

M-L. B.,

Me Caroline De Baets, avocat à la Cour de cassation,

contre

AXA BANQUE EUROPE, societe anonyme,

Me Johan Verbist, avocat à la Cour de cassation.

I. La procedure devant la Cour

Le pourvoi en cassation est dirige contre un arret rendu le 30 mars 2010par la cour d'appel de Gand.

Le conseiller Eric Dirix a fait rapport.

L'avocat general Guy Dubrulle a conclu.

L'avocat general Guy Dubrulle a depose des conclusions le 11 avril 2011.

II. Le moyen de cassation

La demanderesse presente un moyen libelle dans les termes suivants :

Dispositions legales violees

- articles 1186 et 1216 du Code civil ;

- articles 41, alinea 1er, et 108, 1DEG, de la loi 16 decembre 1854 sur larevision du regime hypothecaire ;

- articles 1494, alinea 1er, 1675/7, S:S: 1er et 2, et 1675/16bis, S:S:1er et 5, du Code judiciaire.

Decision et motifs critiques

L'arret attaque declare non fonde l'appel de la demanderesse et confirmele premier jugement du juge des saisies rejetant l'opposition de lademanderesse tendant à la levee de la saisie-execution pratiquee par ladefenderesse sur l'immeuble donne en hypotheque par la demanderesse engarantie d'une dette de Madame L. et d'elle-meme en tant que debiteursolidaire.

L'arret justifie sa decision sur la base des motifs suivants (...) :

« b) En ce qui concerne le bien-fonde de l'opposition de la demanderesse

5. La demanderesse demande la levee de la saisie que la defenderesse afait pratiquer le 8 decembre 2008 sur l'immeuble donne par elle enhypotheque au profit de la defenderesse. Elle soutient que lors de laconclusion du contrat d'ouverture de credit entre la defenderesse etMadame L., elle est intervenue en se constituant surete personnelle, desorte que - apres avoir declare que Madame L. etait admise à la procedureen reglement collectif de dettes le 6 novembre 2008 - la defenderesse nepouvait plus pratiquer une saisie-execution le 8 decembre 2008 et ne peutpoursuivre cette procedure des lors que la demanderesse a introduitelle-meme, le 15 decembre 2008, devant le tribunal du travail de Nivelles,une requete tendant à etre dechargee en tant que personne s'etantconstituee surete à titre gratuit.

La demanderesse fonde son opposition plus particulierement sur lesarticles 1675/7, S: 2, et 1675/16bis du Code judiciaire. Elle soutientque, suivant les travaux preparatoires, ces articles s'appliquent aussiaux codebiteurs solidaires au sens de l'article 1216 du Code civil et quel'hypotheque qu'elle a accordee ne constitue qu'une garantiecomplementaire.

La defenderesse estime que la protection contre une execution forcee decelui qui s'est constitue surete personnelle ne peut s'appliquer à lademanderesse que si, outre la surete personnelle, elle a consenti unegarantie hypothecaire, laquelle est contestee par la defenderesse.

La circonstance qu'en l'espece, la demanderesse s'est constituee à lafois surete personnelle et reelle n'empeche pas, selon la defenderesse,que les deux suretes sont independantes l'une de l'autre et quel'execution forcee peut etre poursuivie sur la base de la surete reelle.Meme si la demanderesse pouvait etre dechargee en tant que personne ayantconsenti une surete personnelle, l'hypotheque ne pourrait suivre le memesort à peine de deroger au caractere reel de la surete.

6. Les articles 1675/7, S: 2, alineas 3 et 4, et 1675/16bis du Codejudiciaire ont ete inseres par la loi du 13 decembre 2005 pour regler lesort des personnes ayant consenti une surete personnelle à l'egard dedebiteurs qui ont ete admis à la procedure de reglement collectif dedettes (articles 7 et 19 de la loi du 13 decembre 2005, M.B. 21 decembre2005). Cette reglementation est inspiree par l'article 80 de la loi du 8aout 1997 sur les faillites qui, à son tour, est fortement influencee parla jurisprudence de la Cour constitutionnelle. Si la personne physique seconstitue, à titre gratuit, surete personnelle pour le failli, cettederniere disposition permet sa decharge totale ou partielle. Cettedecharge n'est possible que si le tribunal de commerce constate quel'obligation de toute personne ayant consenti une surete estdisproportionnee à ses revenus et son patrimoine.

7. L'article 1675/7, S: 2, alinea 3, du Code judiciaire dispose que ladecision d'admissibilite au reglement collectif de dettes suspend àl'egard de toute personne ayant consenti une surete personnelle pourgarantir une dette du debiteur, les voies d'execution jusqu'àl'homologation du plan amiable, jusqu'au depot du proces-verbal vise àl'article 1675/11, S: 1er, ou jusqu'au rejet du plan.

Selon le texte de l'article 1675/7, S: 2, alinea 3, du Code judiciaire, lasuspension n'est pas reservee aux personnes physiques ni à celui qui aconsenti une surete à titre gratuit. Le ministre a declare dans lestravaux preparatoires de la loi que la disposition concernerait aussi lecodebiteur solidaire (Doc. parl. Senat, 2005-2006, 3-1207/3, 29-30).Lorsqu'un plan amiable est homologue ou lorsque la requete est rejetee, lemontant qui est du par la personne qui a consenti une surete personnelleest fixe definitivement. Celui qui a consenti une surete personnelle pourla dette en question peut, en effet, aussi profiter de la liquidation àl'amiable.

8. L'article 1675/16bis du Code judiciaire dispose que, sans prejudice del'application de l'article 1287 du Code civil et sauf en casd'organisation frauduleuse d'insolvabilite, les personnes physiques qui,à titre gratuit, se sont constituees surete personnelle du requerantadmis au reglement collectif de dettes, peuvent etre dechargees en tout ouen partie de leur engagement si le juge constate que leur obligation estdisproportionnee à leurs revenus ou à leur patrimoine.

Pour beneficier de cette decharge, la personne physique qui s'estconstituee à titre gratuit surete personnelle du requerant depose augreffe de la juridiction saisie de la demande en reglement collectif dedettes une declaration attestant que son obligation est disproportionneeà ses revenus et à son patrimoine. (article 1675/16bis, S: 2, du Codejudiciaire).

A l'egard de la personne qui a fait la declaration visee à l'article1675/16bis, S: 2, les voies d'execution sont suspendues jusqu'à ce que lejuge statue sur la decharge (article 1675/16bis, S: 2, alinea 4, du Codejudiciaire).

Quant à la question de savoir si l'article 1675/16bis du Code judiciaireviole le principe d'egalite dans la mesure ou il ne prevoit pas dedecharge pour les personnes physiques qui, à titre gratuit, ont consentiune hypotheque à titre de garantie (propter rem), on remarquera que laCour constitutionnelle (alors Cour d'arbitrage) a decide dans son arret du25 janvier 2006 à propos de l'article 82 analogue de la loi du 8 aout1997 sur les faillites, tel qu'il a ete remplace par la loi du 4 septembre2002, que l'exclusion des personnes qui ont consenti une hypotheque neviole pas la Constitution (arret 12/2006). Ce point de vue a ete confirmepar la Cour constitutionnelle dans son arret du 15 mars 2006 (arret42/2006).

9. La declaration visee à l'article 1675/16bis, S: 2, du Code judiciairene peut etre effectuee que par les personnes physiques qui se sontconstituees, à titre gratuit, surete personnelle. Contrairement auxconsequences liberatoires d'une liquidation à l'amiable, le champd'application personnel de la decharge visee à l'article 1675/16bis duCode judiciaire est clairement plus limite. Parallelement, le champd'application personnel de la suspension des voies d'execution visee àl'article 1675/7, S: 2, alinea 4, du Code judiciaire sera plus limite.Cette derniere disposition reserve la suspension des mesures d'executionjusqu'à ce que le juge ait statue sur la decharge aux personnes ayanteffectue la declaration visee à l'article 1675/16bis, S: 2. Ce n'estqu'au moment ou la decision sur la decharge est rendue que l'on connait lemontant definitif auquel les personnes qui ont consenti une suretepersonnelle sont encore tenues et dans quelle mesure la decharge totale oupartielle leur est accordee.

L'article 1675/16bis, S: 2, alinea 4, du Code judiciaire protege lespersonnes ayant effectue la declaration visee à l'article 1675/16bis, S:2, jusqu'à ce que le juge ait statue sur la decharge. Les mesuresd'execution seront suspendues de facto des que la personne qui s'estconstituee surete personnelle a depose la declaration de decharge, meme sielle ne releve pas du champ d'application personnel de la decharge, parexemple parce qu'elle n'a pas agi à titre gratuit.

Actuellement, ces principes doivent etre apprecies à la lumiere desdonnees du litige afin d'examiner le bien-fonde de l'opposition de lademanderesse.

Le noeud du present litige est la question de savoir si la demanderesse,qui a agi de maniere cumulative lors de l'octroi du credit en tant quecodebiteur solidaire et en tant que personne ayant consenti unehypotheque, peut empecher la discussion de l'hypotheque en raison de laprotection contre l'execution forcee prevue par les articles 1675/7, S: 2,et 1675/16bis, du Code judiciaire dont elle estime pouvoir beneficier entant que personne ayant consenti une surete personnelle apres ladeclaration d'admissibilite de son codebiteur L. à la procedure dereglement collectif de dettes et sa demande de decharge en tant quepersonne ayant, à titre gratuit, consenti une surete personnelle.

10. Il ne peut etre conteste que les articles 1675/16bis, S: 1er, et1675/7, S: 2, du Code judiciaire concernent exclusivement les personnesqui ont consenti une surete personnelle.

Ils empechent qu'un creancier procede immediatement à une executionforcee à charge de la personne qui a consenti une surete personnelleapres que le debiteur principal a ete admis à la procedure de reglementcollectif de dettes (article 1675/7, S: 2, alinea 3) et certainement apresque la personne ayant consenti une surete personnelle a depose une demandede decharge de son obligation. (article 1675/16bis).

Sur la base de ces dispositions legales la demanderesse est exclusivementprotegee contre l'execution forcee, pour autant que celle-ci soit exerceecontre elle en sa qualite de personne ayant consenti une suretepersonnelle.

Toutefois, en l'espece, la demanderesse a, de maniere cumulative :

- d'une part, consenti une surete personnelle, à savoir son obligationsolidaire dans l'emprunt, dont elle tente d'etre dechargee conformement àl'article 1675/16bis du Code judiciaire, devant le tribunal du travail deNivelles,

- d'autre part, consenti une surete reelle en garantie d'une obligationprincipale, à savoir l'obligation solidaire de la demanderesse, en vertude l'acte notarie d'ouverture de credit.

Les articles 1675/7, S: 2, et 1675/16bis du Code judiciaire ne protegentpas la demanderesse en sa qualite d'affectant hypothecaire. Dans la mesureou la demanderesse a consenti une hypotheque en plus d'une suretepersonnelle, cette hypotheque peut etre discutee independamment du sortreserve à la surete personnelle dont elle peut encore etre dechargee lecas echeant. La defenderesse a pu, à juste titre, pratiquer une saisiesur la base de cette hypotheque.

Il est inconcevable de soutenir que lorsqu'un codebiteur solidaire cumuleles qualites d'une personne ayant consenti une surete personnelle et celled'un affectant hypothecaire, une decharge de la surete personnelleimplique aussi une decharge de la surete reelle.

Une telle interpretation minerait le regime des suretes reelles etdonnerait lieu à une discrimination injustifiee entre les tiersaffectants hypothecaires qui n'ont pas simultanement consenti une suretepersonnelle (comme la demanderesse) et contre lesquels l'hypotheque peuttoujours etre discutee des lors que la loi n'a pas prevu leur protection,meme si le debiteur principal est admis au reglement collectif de detteset est decharge ulterieurement totalement ou partiellement de sa dette etles personnes ayant consenti une surete personnelle en plus de leur suretereelle.

11. La loi a expressement limite la possibilite de decharge aux suretespersonnelles. La decharge de telles suretes ne peut s'etendre à l'egarddes suretes reelles.

Le fait que la possibilite de decharge - y compris la possibilite desuspension de l'execution forcee - a ete explicitement limitee à lasurete personnelle par l'employeur dans le cadre du reglement collectif dedettes à la surete personnelle et ne peut etre invoquee par la personnequi a consenti une surete reelle, meme pas lorsqu'elle cumule les deuxqualites, comme en l'espece, peut aussi etre fonde sur la jurisprudenceprecitee de la Cour d'arbitrage (actuellement Cour constitutionnelle) lorsde l'application de dispositions analogues de la loi du 8 aout 1994 surles faillites. Dans un arret du 25 janvier 2006, la Cour a precise quel'article 82 de la loi du 8 aout 1994 sur les faillites, qui concerneaussi la decharge de la personne qui a consenti une surete personnelle,vise un juste equilibre entre les interets du debiteur et ceux descreanciers.

La declaration d'excusabilite constitue pour le failli une mesure defaveur qui lui permet de reprendre ses activites sur une base assainie,tout en respectant l'equilibre entre les interets de la personne du failliet aussi des creanciers, des travailleurs et de l'economie dans sonensemble. Afin de preciser l'efficacite de cette mesure, le legislateur avoulu faire beneficier certaines personnes engagees avec le failli del'excusabilite reconnue au failli. Il a deroge ainsi aux principes del'article 1134 du Code civil et de l'article 7 de la loi hypothecaire. Lesacrifice, en matiere economique, de l'interet des creanciers au profit decertaines categories de debiteurs, s'inscrit dans la politiquesocio-economique dans laquelle s'insere la mesure. Un critere objectif apour effet que l'affectant hypothecaire ne beneficie pas de la decharge.Il court uniquement le risque de perdre l'immeuble mis en garantie. Il enresulte que le legislateur considere que les personnes qui ont engagel'ensemble de leur patrimoine sont de prime abord plus vulnerables. Laquestion de savoir si les personnes qui ne sont engagees qu'à concurrencede leur bien immeuble doivent aussi etre protegees releve du pouvoird'appreciation du legislateur et l'absence d'une telle protection ne violepas la Constitution, et, selon la Cour d'arbitrage (actuellement Courconstitutionnelle), l'absence d'une telle protection ne viole pas laConstitution.

Dans son arret du 15 mars 2006, la Cour d'arbitrage a confirme ce point devue. La Cour a confirme que l'article 82, alinea 1er, de la loi du 8 aout1994 sur les faillites, tel qu'il a ete remplace par la loi du 4 septembre2002, ne viole pas les articles 10 et 11 de la Constitution dans la mesureou il ne s'applique pas aux personnes physiques qui, à titre gratuit, ontconsenti, en tant que garantie, une hypotheque sur un immeuble.

12. Des lors que dans le cadre du reglement collectif de dettes, il peutetre admis, pour les memes motifs, que la personne qui a consenti unehypotheque, contrairement à la personne qui a consenti une suretepersonnelle, ne peut pretendre à la decharge visee à l'article1675/16bis du Code judiciaire, l'affectant hypothecaire ne doit pasdavantage beneficier de la suspension des voies d'execution visee àl'article 1675/7, S: 2, dernier alinea, du Code judiciaire.

La cour d'appel estime, sur la base de ce qui precede, que, independammentde la reponse à la question de savoir si M-L B. peut etre considereecomme `une personne qui a constitue surete personnelle' au sens del'article 1675/16bis du Code judiciaire, nonobstant le fait qu'elle s'estengagee en tant que co-emprunteuse à l'egard de la defenderesse, celle-cipouvait pratiquer une saisie execution sur l'immeuble en vertu d'unesurete reelle consentie par M-L B., à savoir une hypothequeconventionnelle.

A la lumiere de ce qui precede, la cour d'appel estime qu'il n'y a paslieu de donner suite aux deux questions prejudicielles proposees par lademanderesse ».

Griefs

Premiere branche

L'article 1675/7, S: 1er, du Code judiciaire dispose que « sans prejudicede l'application du S: 3, la decision d'admissibilite fait naitre unesituation de concours entre les creanciers et a pour consequence lasuspension du cours des interets et l'indisponibilite du patrimoine durequerant ».

En vertu de l'article 1675/7, S: 2, alinea 1er, du Code judiciaire« toutes les voies d'execution qui tendent au paiement d'une sommed'argent sont suspendues. Les saisies dejà pratiquees conserventcependant leur caractere conservatoire ».

L'article 1675/7, S: 2, alineas 3 et 4, precise ce qui se passe en cas deconcours à l'egard des personnes ayant consenti une surete personnellepour garantir une dette du debiteur. L'alinea 3 dispose ainsi que « lesvoies d'execution sont suspendues jusqu'à l'homologation du plan amiable,jusqu'au depot du proces-verbal vise à l'article 1675/11, S: 1er oujusqu'au rejet du plan ».

L'alinea 4 de l'article 1675/7, S: 2, precite vise les personnes ayantconsenti une surete personnelle qui ont effectue la declaration visee àl'article 1675/16bis. A leur egard, les voies d'execution sont suspenduesjusqu'à ce que le juge ait statue sur la decharge (voir aussi article1675/16bis, S: 5, dernier alinea, du Code judiciaire).

Il resulte de l'ensemble de ces dispositions legales qu'il y a lieud'entendre par « voies d'execution » tous les moyens auxquels uncreancier a recours sur le patrimoine de son debiteur pour obtenir lepaiement de sa creance, c'est-à-dire tant le debiteur principal que lecodebiteur, caution personnelle pour le debiteur principal.

Il s'ensuit que ladite suspension touche aussi les creanciershypothecaires de ces debiteurs.

L'arret attaque constate que « par ordonnance du 6 novembre 2008 renduepar le tribunal du travail de Nivelles, Madame J.L. a ete admise à laprocedure de reglement collectif de dettes ».

L'arret attaque constate aussi que la demanderesse « a, d'une part,consenti une surete personnelle à savoir son obligation solidaire dansl'emprunt (...) et d'autre part, « qu'une surete reelle a ete consentieen garantie de l'obligation principale, à savoir l'obligation solidairede la demanderesse (...) ». Il est, en outre, constate que lademanderesse a introduit une requete tendant à etre dechargee en tantcaution personnelle.

Enfin, l'arret constate que « le 8 decembre 2008, la defenderesse a faitpratiquer une saisie-execution sur le bien immeuble sur lequel lademanderesse avait consenti une hypotheque ».

Il est ainsi etabli que la saisie-execution litigieuse sur un immeubleconcerne une voie d'execution tendant au paiement de la dette de Madame L.et de la demanderesse en tant que cosignataire de l'acte authentiqued'ouverture de credit du 28 janvier 2006.

Il en resulte que l'arret attaque ne pouvait refuser le benefice de lasuspension de la saisie-execution sur l'immeuble de la demanderesse par lemotif que les regles de suspension contenues à l'article 1675/7, S: 2 età l'article 1675/16bis, S: 5 ne protegent pas la demanderesse en saqualite d'affectant hypothecaire.

En statuant ainsi, l'arret attaque limite de maniere illegale la porteedes dispositions legales precitees et n'est, des lors, pas legalementjustifie (violation des articles 1675/7, S:S: 1er et 2 et 1675/16bis, S:5, du Code judiciaire).

Seconde branche

Il ressort des articles 41 et 108, 1DEG, de la loi du 16 decembre 1851 surla revision du regime hypothecaire que l'hypotheque est un droitaccessoire dont le sort depend du sort de la creance garantie.

Il s'ensuit que le bien hypotheque ne peut etre l'objet de l'executionforcee que lorsque la creance est certaine, liquide et exigible commerequis par les articles 1494, alinea 1er, du Code judiciaire et 1186 duCode civil.

La creance n'est exigible que lorsque le creancier peut en reclamerl'execution immediate (article 1186 du Code civil).

Il ressort de l'article 1675/7, S: 2, alinea 1er, du Code judiciaire, envertu duquel toutes les voies d'execution qui tendent au paiement d'unesomme d'argent sont suspendues par l'ordonnance admettant le debiteur àla procedure en reglement de dettes que cette procedure fait obstacle àl'exigibilite de la dette.

Cela vaut egalement pour la dette du codebiteur solidaire qui, en tant quecaution personnelle, beneficie aussi, en vertu de l'article 1675/7, S: 2,alinea 3, de la suspension des voies d'execution qui tendent au payementde sa dette.

C'est d'autant plus le cas lorsque cette caution personnelle a introduitune demande tendant à etre decharge comme prevu à l'article 1675/16bisdu Code judiciaire. En vertu des articles 1675/7, S: 2, alinea 4, et1675/16bis, S: 5, dernier alinea, du Code judiciaire, toutes les voiesd'execution sont suspendues à l'egard de celui qui a consenti une suretepersonnelle jusqu'à ce que le juge ait statue definitivement sur ladecharge.

L'arret attaque constate que « par ordonnance rendue le 6 novembre 2008par le tribunal du travail de Nivelles, Madame J.L. a ete admise à laprocedure de reglement collectif de dettes » (...). Toutes les voiesd'execution qui tendent au paiement de la dette de Madame L. ont ainsi etesuspendues (article 1675/7, S: 2, alinea 1er, du Code judiciaire).

Il ressort, en outre, aussi des constatations de l'arret que l'ouverturede credit pour laquelle la demanderesse s'etait engagee solidairement avecMadame L. n'a ete accordee qu'au seul benefice de madame L., de sorte quela demanderesse avait la qualite de caution personnelle pour Madame L.(...). Toutes les voies d'execution ont ainsi ete suspendues à l'egard dela demanderesse (article 1675/7, S: 2, alinea 3, du Code judiciaire).

Il ressort aussi de ces constatations que le 8 decembre 2008, au moment ouelle a fait pratiquer une saisie-execution sur l'immeuble donne enhypotheque par la demanderesse, la defenderesse n'etait plus titulaired'une creance exigible à l'egard de ses debiteurs et qu'elle ne pouvait,des lors, pas pratiquer une saisie-execution à leur charge.

En plus, le 15 decembre 2008, la demanderesse, conformement à l'article1675/16bis du Code judiciaire, avait introduit une demande tendant à etredechargee de son engagement en tant que caution personnelle à titregratuit (...). En cas de decharge de la demanderesse, la suretehypothecaire qu'elle a consentie serait annulee en raison de l'annulationde l'obligation principale (article 108, 1DEG, de la loi du 16 decembre1851 et article 1675/16bis, S:S: 1er et 5, dernier alinea, du Codejudiciaire).

Il ressort de ce qui precede qu'en rejetant l'opposition tendant à lalevee de la saisie-execution sur l'immeuble de la demanderesse, l'arretattaque accepte une saisie-execution immobiliere pour les creances qui nesont pas exigibles ni à l'egard de Madame L. ni à l'egard de lademanderesse.

L'arret attaque viole ainsi la condition legale relative à l'exigibilitede la creance et au caractere accessoire de l'hypotheque ; il viole, deslors, les articles 41 et 108, 1DEG, de la loi du 16 decembre 1851, 1186 et1216 du Code civil et 1494, alinea 1er, 1675/7, S: 2, et 1675/16bis, S:S:1er et 5, du Code judiciaire.

III. La decision de la Cour

Sur le moyen, en ses branches reunies :

1. En vertu de l'article 1675/7, S: 2, alinea 1er, du Code judiciaire,toutes les voies d'execution qui tendent au paiement d'une somme d'argentsont suspendues à la suite de l'ordonnance admettant le requerant à laprocedure de reglement collectif de dettes. En vertu de l'alinea 3 decette disposition, à l'egard de toute personne ayant consenti une suretepersonnelle pour garantir une dette du debiteur, les voies d'executionsont suspendues jusqu'au moment fixe par cet article.

L'alinea 4 de cette disposition suspend les voies d'execution à l'egarddes personnes physiques qui se sont constituees à titre gratuit suretepersonnelle du requerant et qui, conformement à l'article 1675/16bis, S:2, du meme code, ont depose une declaration attestant que leur obligationest disproportionnee à leurs revenus et à leurs patrimoines.

2. Il ne peut se deduire de ces dispositions que les voies d'executionsont aussi suspendues à l'egard de personnes qui ont constitue une suretereelle pour garantir une dette du requerant. Les motifs de suspensionvises par ces dispositions ne valent pas davantage lorsque celui qui aconstitue une surete reelle s'est aussi constitue caution personnelle auprofit du requerant et que l'execution concerne le ou les biens qui fontl'objet de la surete reelle.

Le moyen qui est fonde sur un soutenement juridique contraire, manque endroit.

Par ces motifs,

La Cour

Rejette le pourvoi ;

Condamne la demanderesse aux depens.

Ainsi juge par la Cour de cassation, premiere chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le president de section Edward Forrier, les conseillers EricDirix, Eric Stassijns, Albert Fettweis et Geert Jocque, et prononce enaudience publique du six mai deux mille onze par le president de sectionEdward Forrier, en presence de l'avocat general Guy Dubrulle, avecl'assistance du greffier Frank Adriaensen.

Traduction etablie sous le controle du conseiller Christine Matray ettranscrite avec l'assistance du greffier Marie-Jeanne Massart.

Le greffier, Le conseiller,

6 MAI 2011 C.10.0494.N/14



Références :

Origine de la décision
Date de la décision : 06/05/2011
Date de l'import : 14/10/2011

Numérotation
Numéro d'arrêt : C.10.0494.N
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2011-05-06;c.10.0494.n ?
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