La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

22/10/2012 | BELGIQUE | N°S.12.0054.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 22 octobre 2012, S.12.0054.F


Cour de cassation de Belgique

Arret

8271



NDEG S.12.0054.F

FRESH CONCEPT, societe anonyme dont le siege social est etabli àCharleroi (Marcinelle), rue Hoyas, 51,

demanderesse en cassation,

representee par Maitre Michel Mahieu, avocat à la Cour de cassation, dontle cabinet est etabli à Watermael-Boitsfort, boulevard du Souverain, 36,ou il est fait election de domicile,

contre

J. P.,

defendeur en cassation.

I. La procedure devant la Cour

Le pourvoi en cassation est dirige contre l'arret rendu le 14 septembre

2011 par la cour du travail de Mons.

Le president Christian Storck a fait rapport.

L'avocat general Jean Marie Genicot a...

Cour de cassation de Belgique

Arret

8271

NDEG S.12.0054.F

FRESH CONCEPT, societe anonyme dont le siege social est etabli àCharleroi (Marcinelle), rue Hoyas, 51,

demanderesse en cassation,

representee par Maitre Michel Mahieu, avocat à la Cour de cassation, dontle cabinet est etabli à Watermael-Boitsfort, boulevard du Souverain, 36,ou il est fait election de domicile,

contre

J. P.,

defendeur en cassation.

I. La procedure devant la Cour

Le pourvoi en cassation est dirige contre l'arret rendu le 14 septembre2011 par la cour du travail de Mons.

Le president Christian Storck a fait rapport.

L'avocat general Jean Marie Genicot a conclu.

II. Le moyen de cassation

La demanderesse presente un moyen libelle dans les termes suivants :

Disposition legale violee

Article 63 de la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail

Decisions et motifs critiques

Statuant sur l'appel du defendeur, l'arret « declare l'appel recevable etfonde ; reforme le jugement entrepris en ce qu'il a declare la demandeoriginaire d'indemnite pour licenciement abusif non fondee ; declare lademande originaire d'indemnite pour licenciement abusif [du defendeur]fondee ; par consequent, condamne à ce titre [la demanderesse] à payer[au defendeur] la somme de 10.296,48 euros, majoree des interets legaux,moratoires et judiciaires à dater du 7 janvier 2008 ; condamne [lademanderesse] à payer [au defendeur] les frais et depens des deuxinstances liquides à 2.200 euros ».

L'arret justifie ces decisions par tous ses motifs, censes iciintegralement reproduits, en particulier par les motifs suivants, sur lefondement desquels il considere que « [la demanderesse] reste en defautde renverser la presomption instituee par l'article 63 de la loi du 3juillet 1978 relative aux contrats de travail » :

« [Le defendeur] a ete occupe au service de [la demanderesse] du mardi1er au lundi 7 janvier 2008. Tenant compte que le 1er janvier etait unjour ferie, il a ete occupe effectivement par [la demanderesse] durantquatre jours, ce que la fiche de paie produite confirme ;

Il s'ensuit que, si un comportement inadequat [du defendeur] justifiaitson licenciement, celui-ci devait imperativement se produire durant cetteperiode ;

Or, les attestations des denommes G., C., L. V. et E. ne permettent pasd'etablir que les comportements incrimines se soient produits durant cetteperiode ;

Leur contenu (`regulierement', `à plusieurs reprises') laisse aucontraire croire que les comportements incrimines - à les supposeretablis - sont bien anterieurs au 1er janvier 2008, soit à l'epoque ou[le defendeur] et les auteurs des attestations prestaient au service de las.p.r.l. Charleroi Salaisons ;

[La demanderesse] reconnait qu'à dater du 1er janvier 2008, une grandepartie du personnel de la societe Charleroi Salaisons, dont [ledefendeur], a ete reprise par sa societe ;

La preuve d'un comportement inadequat durant la periode litigieuse n'estdonc nullement rapportee par les attestations des denommes G., C., L. V.et E. ».

Griefs

L'article 63 de la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travaildispose que :

« Est considere comme licenciement abusif pour l'application du presentarticle, le licenciement d'un ouvrier engage pour une duree indetermineeeffectue pour des motifs qui n'ont aucun lien avec l'aptitude ou laconduite de l'ouvrier ou qui ne sont pas fondes sur les necessites dufonctionnement de l'entreprise, de l'etablissement ou du service.

En cas de contestation, la charge de la preuve des motifs du licenciementinvoques incombe à l'employeur.

Sans prejudice de l'article 39, S: 1er, l'employeur qui licencieabusivement un ouvrier engage pour une duree indeterminee est tenu depayer à cet ouvrier une indemnite correspondant à la remuneration de sixmois, sauf si une autre indemnisation est prevue par une conventioncollective de travail rendue obligatoire par le Roi.

L'indemnite visee à l'alinea 3 est due independamment du fait quel'ouvrier a ete licencie avec ou sans preavis ; elle ne peut etre cumuleeavec les indemnites prevues à l'article 39, S:S: 2 et 3, de la presenteloi, aux articles 16 à 18 de la loi du 19 mars 1991 portant un regime delicenciement particulier pour les delegues du personnel aux conseilsd'entreprise et aux comites de securite, d'hygiene et d'embellissement deslieux de travail, ainsi que pour les candidats-delegues du personnel, ouà l'article 118, S: 3, de la loi de redressement du 22 janvier 1985portant des dispositions sociales ».

Pour que le licenciement d'un ouvrier ne soit pas abusif au sens del'article 63 de la loi du 3 juillet 1978, il doit etre motive par laconduite de l'ouvrier, son aptitude ou les necessites de l'entreprise, del'etablissement ou du service. La charge de la preuve des motifs dulicenciement repose sur l'employeur.

Le licenciement de l'ouvrier en lien avec sa conduite, meme non fautive,n'est pas abusif pour autant que ce motif ne soit pas manifestementderaisonnable.

L'arret decide que l'employeur n'apporte pas la preuve de la conduitejustifiant le licenciement, au motif que les temoignages produits nepermettent pas d'etablir que les comportements reproches se sont produitsentre le 1er et le 7 janvier 2008, soit la periode d'occupation souscontrat de travail du defendeur au service de la demanderesse.

L'arret viole l'article 63 de la loi du 3 juillet 1978 relative auxcontrats de travail en y ajoutant une condition qui n'y figure pas, savoirque le comportement inadequat de l'ouvrier invoque pour justifier lelicenciement se soit produit durant la periode d'occupation sous contratde travail.

L'arret ne justifie des lors pas legalement la condamnation de lademanderesse à payer au defendeur une indemnite de licenciement abusifd'ouvrier (violation de l'article 63 de la loi du 3 juillet 1978).

III. La decision de la Cour

En vertu de l'article 63, alinea 1er, de la loi du 3 juillet 1978 relativeaux contrats de travail, est considere comme abusif, pour l'application decet article, le licenciement d'un ouvrier engage pour une dureeindeterminee qui est effectue pour des motifs qui n'ont aucun lien avecl'aptitude ou la conduite de l'ouvrier ou qui ne sont pas fondes sur lesnecessites du fonctionnement de l'entreprise, de l'etablissement ou duservice.

Cette disposition ne limite pas au cadre strict des relationscontractuelles les motifs qui, presentant un lien avec la conduite ou lecomportement de l'ouvrier, sont de nature à exclure le caractere abusifdu licenciement.

Pour decider que la demanderesse « reste en defaut de renverser lapresomption instituee par l'article 63 » precite, l'arret, qui admetqu'elle impute au defendeur un « comportement inadequat », releve que cedernier « a ete occupe au service de [la demanderesse] du mardi 1er aulundi 7 janvier 2008 », et que, « tenant compte que le premier janvier[est] un jour ferie, il a ete occupe effectivement par [la demanderesse]durant quatre jours », et considere que, « si un comportement inadequat[du defendeur] justifiait son licenciement, [ce comportement] devaitimperativement se produire durant cette periode ».

En restreignant l'examen du comportement du defendeur à la seule periodeou les parties ont ete liees par le contrat de travail, l'arret violel'article 63, alinea 1er, de la loi du 3 juillet 1978.

Le moyen est fonde.

Par ces motifs,

La Cour

Casse l'arret attaque, sauf en tant qu'il rec,oit l'appel ;

Ordonne que mention du present arret sera faite en marge de l'arretpartiellement casse ;

Reserve les depens pour qu'il soit statue sur ceux-ci par le juge dufond ;

Renvoie la cause, ainsi limitee, devant la cour du travail de Liege.

Ainsi juge par la Cour de cassation, troisieme chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le president Christian Storck, les conseillers Didier Batsele,Alain Simon, Mireille Delange et Michel Lemal, et prononce en audiencepublique du vingt-deux octobre deux mille douze par le president ChristianStorck, en presence de l'avocat general Jean Marie Genicot, avecl'assistance du greffier Patricia De Wadripont.

+--------------------------------------------+
| P. De Wadripont | M. Lemal | M. Delange |
|-----------------+------------+-------------|
| A. Simon | D. Batsele | Chr. Storck |
+--------------------------------------------+

22 octobre 2012 S.12.0054.F/7


Synthèse
Numéro d'arrêt : S.12.0054.F
Date de la décision : 22/10/2012

Origine de la décision
Date de l'import : 08/11/2012
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2012-10-22;s.12.0054.f ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award