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19/03/2014 | BELGIQUE | N°P.14.0157.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 19 mars 2014, P.14.0157.F


Cour de cassation de Belgique

Arret

P.14.0157.F

C. D.,

demandeur en reouverture de la procedure,

ayant pour conseils Maitres Alexandre Wilmotte, avocat au barreau de Huyet Catherine Toussaint, avocat au barreau de Bruxelles.

I. la procedure devant la cour

Par requete remise au greffe le 24 janvier 2014, signee par un avocatinscrit au barreau depuis plus de dix ans et annexee au present arret, encopie certifiee conforme, le demandeur sollicite la reouverture de laprocedure ayant fait l'objet de l'arret de la Cour du 27 juin 2007.

Le conse

iller Pierre Cornelis a fait rapport.

L'avocat general delegue Michel Palumbo a conclu.

II. l...

Cour de cassation de Belgique

Arret

P.14.0157.F

C. D.,

demandeur en reouverture de la procedure,

ayant pour conseils Maitres Alexandre Wilmotte, avocat au barreau de Huyet Catherine Toussaint, avocat au barreau de Bruxelles.

I. la procedure devant la cour

Par requete remise au greffe le 24 janvier 2014, signee par un avocatinscrit au barreau depuis plus de dix ans et annexee au present arret, encopie certifiee conforme, le demandeur sollicite la reouverture de laprocedure ayant fait l'objet de l'arret de la Cour du 27 juin 2007.

Le conseiller Pierre Cornelis a fait rapport.

L'avocat general delegue Michel Palumbo a conclu.

II. les faits

Par un arret rendu le 15 mars 2007, sous le numero 1024, par la courd'assises de la province de Liege, le demandeur a ete condamne à unepeine de reclusion de vingt ans du chef d'assassinat et de tentative demeurtre, comme auteur ou coauteur.

Le pourvoi forme par le demandeur contre cet arret fut rejete le 27 juin2007 par la Cour.

Il est demande à la Cour de retirer cet arret et de statuer à nouveausur les merites du pourvoi. La demande en reouverture se fonde sur unarret rendu le 25 juillet 2013 par la Cour europeenne des droits del'homme (ci-apres la Cour europeenne). L'arret invoque dit qu'il y a euviolation de l'article 6.1 de la Convention de sauvegarde des droits del'homme et des libertes fondamentales (ci-apres la Convention). Il ditegalement qu'il n'y a pas lieu de statuer separement sur le grief tire dela violation de l'article 6.3, d, celui-ci devant etre declare recevableet etant etroitement lie aux faits qui ont amene la Cour europeenne àconclure à une violation de l'article 6.1.

III. la decision de la cour

A. Sur la demande en reouverture de la procedure :

En vertu des articles 442bis et 442ter, 1DEG, du Code d'instructioncriminelle, s'il a ete etabli par un arret definitif de la Cour europeenneque la Convention a ete violee, le condamne peut demander la reouverturede la procedure qui a conduit à sa condamnation sur l'action publiqueexercee à sa charge dans l'affaire portee devant la cour precitee.

Aucune violation de l'article 6.3, d, lu isolement ou combine avecl'article 6.1 n'ayant ete affirmee par la Cour europeenne, la requeten'est donc recevable qu'en tant qu'elle prend appui sur la violation duditarticle 6.1 de la Convention.

Dans son arret du 25 juillet 2013, la Cour europeenne rappelle le principeque le respect des exigences du proces equitable s'apprecie sur la base dela procedure dans son ensemble et dans le contexte specifique du systemejuridique concerne. Elle considere que sa tache, face à un verdict nonmotive, consiste à examiner si, à la lumiere de toutes les circonstancesde la cause, la procedure suivie a offert suffisamment de garanties contrel'arbitraire et a permis à l'accuse de comprendre sa condamnation.

La Cour europeenne considere, d'une part, que l'acte d'accusation, memes'il designait chacun des crimes dont le demandeur etait accuse, nedemontrait pas les elements à charge qui, pour l'accusation, pouvaientetre retenus contre lui. D'autre part, elle releve que les questionssoumises au jury etaient laconiques et identiques pour tous les personnesaccusees dans l'affaire et qu'elles ne se referaient à aucunecirconstance concrete et particuliere qui aurait pu permettre au demandeurde comprendre le verdict de condamnation.

Elle en deduit que, meme combinees avec l'acte d'accusation, les questionsposees en l'espece ne permettaient pas au demandeur de savoir quelselements de preuve et circonstances de fait, parmi tous ceux ayant etediscutes durant le proces, avaient en definitive conduit les jures àrepondre par l'affirmative aux trois des quatre questions le concernant.Elle souligne egalement la complexite de l'affaire et l'absence de toutepossibilite d'appel.

Estimant, ainsi qu'il a ete expose, qu'il n'y a pas lieu de statuerdistinctement sur le grief fonde sur la violation de l'article 6.3.d, dela Convention qu'elle rattache à la violation de l'article 6.1, l'arretde la cour europeenne considere enfin qu'en l'absence de motivation duverdict, il s'avere impossible de savoir si la condamnation du demandeurs'est fondee ou non sur les informations contenues dans des pieces ou dansdes declarations d'un temoin anonyme qu'il n'a pu contredire.

Des lors, le fait, constate par la Cour europeenne, qu'en ne livrant pas,à son terme, les raisons du verdict de condamnation, la procedure n'a pasoffert de garanties suffisantes contre l'arbitraire, constitue unedefaillance de procedure d'une gravite telle qu'un doute serieux est jetesur le resultat de la procedure attaquee.

La Cour est appelee à apprecier, au vu des circonstances concretes de lacause, si le requerant continue à souffrir des consequences negativestres graves que seule une reouverture de la procedure peut reparer.

Le fait pour le demandeur de continuer à executer sa peine sous lamodalite d'une liberation conditionnelle et d'etre soumis à unesurveillance stricte exercee par la Maison de Justice et à un suivipsychologique constituent des consequences tres graves et actuelles quijustifient la reouverture de la procedure.

Les conditions visees par l'article 442quinquies, alinea 1er, du Coded'instruction criminelle etant reunies en l'espece, il y a lieu àreouverture de la procedure.

B. Sur le pourvoi du demandeur contre l'arret rendu le 15 mars 2007, sousle numero 1024, par la cour d'assises de la province de Liege :

Sur le moyen pris, d'office, de la violation de l'article 6.1 de laConvention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertesfondamentales :

Le droit à un proces equitable garanti par l'article 6.1 de la Conventionde sauvegarde des droits de l'homme et des libertes fondamentalesimplique, en ce qui concerne la cour d'assises, que la decision rendue surl'accusation mette en avant les considerations qui ont convaincu le juryde la culpabilite ou de l'innocence de l'accuse et indique les raisonsconcretes pour lesquelles il a ete repondu positivement ou negativement àchacune des questions.

L'arret du 15 mars 2007 de la cour d'assises precite condamne lesdemandeur à une peine de reclusion de vingt ans du chef d'assassinat etde tentative de meurtre, comme auteur ou coauteur, sans motiver ladeclaration de culpabilite autrement que par la reponse affirmative auxquestions posees dans les termes de la loi.

La seule affirmation que les demandeurs sont coupables des faits dont ilsetaient accuses dans les circonstances declarees etablies, ne leur permetpas de connaitre les raisons concretes pour lesquelles les jures sontarrives à cette conclusion.

L'arret attaque viole ainsi la disposition visee au moyen.

Etendue de la cassation

Le moyen entrainant l'annulation de la decision sur la culpabilite, lacassation s'etend à l'ensemble des debats ainsi qu'à la declaration dujury.

Il n'y a pas lieu d'avoir egard aux moyens invoques par le demandeur quine peuvent entrainer une cassation sans renvoi.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR

Ordonne la reouverture de la procedure ;

Retire l'arret rendu par la Cour le 27 juin 2007, sous le numeroP.07.0601.F, en tant qu'il statue sur le pourvoi forme par le demandeurcontre l'arret rendu le 15 mars 2007, sous le numero 1024, par la courd'assises de la province de Liege ;

Ordonne que mention du present arret sera faite en marge de l'arretpartiellement retire ;

Casse l'arret susdit rendu le 15 mars 2007 par ladite cour d'assises encause du demandeur et annule les debats et la declaration du jury ;

Ordonne que le present arret sera transcrit sur les registres de la courd'assises de la province de Liege et que mention du present arret serafaite en marge de l'arret casse ;

Laisse les frais à charge de l'Etat ;

Renvoie la cause, ainsi limitee, à la cour d'assises de la province deNamur.

Lesdits frais taxes à la somme de cent septante euros nonante-quatrecentimes dus.

Ainsi juge par la Cour de cassation, deuxieme chambre, à Bruxelles, ousiegeaient Paul Maffei, president de section, Pierre Cornelis, Filip VanVolsem, Franc,oise Roggen et Marie-Claire Ernotte, conseillers, etprononce en audience publique du dix-neuf mars deux mille quatorze parPaul Maffei, president de section, en presence de Michel Palumbo, avocatgeneral delegue, avec l'assistance de Tatiana Fenaux, greffier.

+-------------------------------------------+
| T. Fenaux | M-Cl. Ernotte | F. Roggen |
|---------------+---------------+-----------|
| F. Van Volsem | P. Cornelis | P. Maffei |
+-------------------------------------------+

19 MARS 2014 P.14.0157.F/7


Synthèse
Numéro d'arrêt : P.14.0157.F
Date de la décision : 19/03/2014

Origine de la décision
Date de l'import : 07/04/2014
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2014-03-19;p.14.0157.f ?
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