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08/09/2014 | BELGIQUE | N°S.13.0116.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 08 septembre 2014, S.13.0116.F


Cour de cassation de Belgique

Arret

NDEG S.13.0116.F

1. Maitre Alain D'IETEREN, avocat au barreau de Bruxelles, dont lecabinet est etabli à Watermael-Boitsfort, chaussee de la Hulpe, 187,

2. Maitre Christian VAN BUGGENHOUT, avocat au barreau de Bruxelles, dontle cabinet est etabli à Bruxelles, avenue Louise, 106,

3. Maitre Ilse VAN DE MIEROP, avocat au barreau de Bruxelles, dont lecabinet est etabli à Bruxelles, avenue Louise, 106,

agissant tous trois en qualite de curateurs à la faillite de la societeanonyme Sabena,

demandeurs en cassation

,

representes par Maitre Huguette Geinger, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est...

Cour de cassation de Belgique

Arret

NDEG S.13.0116.F

1. Maitre Alain D'IETEREN, avocat au barreau de Bruxelles, dont lecabinet est etabli à Watermael-Boitsfort, chaussee de la Hulpe, 187,

2. Maitre Christian VAN BUGGENHOUT, avocat au barreau de Bruxelles, dontle cabinet est etabli à Bruxelles, avenue Louise, 106,

3. Maitre Ilse VAN DE MIEROP, avocat au barreau de Bruxelles, dont lecabinet est etabli à Bruxelles, avenue Louise, 106,

agissant tous trois en qualite de curateurs à la faillite de la societeanonyme Sabena,

demandeurs en cassation,

representes par Maitre Huguette Geinger, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Bruxelles, rue des Quatre Bras, 6, ou il estfait election de domicile,

contre

J.-C. R.,

defendeur en cassation.

I. La procedure devant la Cour

Le pourvoi en cassation est dirige contre l'arret rendu le 17 avril 2013par la cour du travail de Bruxelles.

Le 4 aout 2014, l'avocat general Jean Marie Genicot a depose desconclusions au greffe.

Le president de section Christian Storck a fait rapport et l'avocatgeneral Jean Marie Genicot a ete entendu en ses conclusions.

II. Les moyens de cassation

Les demandeurs presentent deux moyens libelles dans les termes suivants :

Premier moyen

Dispositions legales violees

- article 9, notamment alineas 1er et 2, de la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail ;

- article 824 du Code judiciaire ;

- principe general du droit relatif à la renonciation à un droit, selonlequel la renonciation à un droit est un acte juridique unilateral quine se presume pas et peut uniquement se deduire de faits qui ne sontsusceptibles d'aucune autre interpretation.

Decisions et motifs critiques

L'arret rec,oit l'appel et le declare partiellement fonde, reforme lejugement entrepris en ce qu'il a rejete la creance relative à l'indemnite compensatoire de preavis et, statuant à nouveau sur cettedemande, dit pour droit que le defendeur peut faire valoir une creanced'un montant brut de 836,49 euros à titre d'indemnite compensatoire depreavis à l'encontre de la societe Sabena en faillite. L'arret confirmele jugement entrepris pour le surplus, reserve les depens et renvoie lacause devant le tribunal de commerce de Bruxelles.

L'arret appuie sa decision sur les motifs suivants :

« III.2. Qualification du contrat

[...] Les [demandeurs] invoquent une convention collective de travailconclue le 5 novembre 1996 au sein de la sous-commission paritaire SabenanDEG 315.01, contenant des mesures de flexibilite applicables auxtravailleurs au sol et plus particulierement aux etudiants travaillant leweek-end et durant les jours feries. Cette convention collective detravail deroge à l'obligation de conclure un contrat ecrit pour chaque prestation en faisant expressement reference à l'article 9, alinea 3, dela loi [du 3 juillet 1978] relative aux contrats de travail ;

Cependant, il n'est pas conteste par les [demandeurs], et il ressortd'ailleurs de la piece 36 de leur dossier, que la convention collective detravail dont question n'a pas ete rendue obligatoire par arrete royal ;

Il en resulte que la derogation à l'article 9, alineas 1er et 2, de laloi du 3 juillet 1978 n'est pas valable ;

A tort, le jugement entrepris a decide que [le defendeur] avait renonce,tacitement mais de maniere certaine, à se prevaloir de la protection del'article 9 de la loi du 3 juillet 1978 ;

La Cour de cassation enseigne que l'article 9 est une dispositionimperative au benefice du travailleur et que celui-ci ne peut pasrenoncer à la protection qu'elle etablit en sa faveur aussi longtempsque la raison d'etre de cette protection subsiste ;

En l'occurrence, [le defendeur] n'aurait pu renoncer à la protectionlegale qu'apres la rupture de la relation contractuelle. Des lors, lefait que, durant son occupation, il semble avoir accepte sanscontestation de prester à de nombreuses reprises comme `week-endiste'sans contrat de travail ecrit ne peut etre considere comme unerenonciation à se prevaloir de l'article 9, alineas 1er et 2 ;

En consequence, les contrats de travail à duree determinee conclusverbalement entre [le defendeur] et la Sabena pour les prestations durantles week-ends et jours feries sont soumis aux memes conditions que lescontrats conclus pour une duree indeterminee à defaut de repondre auxconditions fixees par l'article 9, alinea 1er ;

III.3. Indemnite de preavis

III.3.1. [...] [Le defendeur] a sollicite les `indemnites legales etconventionnelles' lors de sa declaration de creance du 1er decembre2001. Il y a lieu de considerer que cette demande porte sur une indemnitecompensatoire de preavis ;

Les [demandeurs] admettent, à titre subsidiaire, que la creance [dudefendeur] à ce titre s'eleve à 526,24 euros (montant net). La creancedoit cependant etre etablie en brut, soit la somme de 836,49 euros,suivant le decompte etabli par [les demandeurs] ».

Griefs

Aux termes de l'article 9, alinea 1er, de la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail, le contrat de travail conclu pour uneduree determinee ou pour un travail nettement defini doit etre constatepar ecrit pour chaque travailleur individuellement, au plus tard aumoment de l'entree en service de celui-ci.

L'alinea 2 dudit article dispose qu'à defaut d'ecrit etablissant qu'il est conclu pour une duree determinee ou pour un travail nettement defini,le contrat est soumis aux memes conditions que les contrats conclus pourune duree indeterminee.

L'article 9 est une disposition imperative en faveur du travailleur, quietablit au benefice de celui-ci une protection à laquelle il ne peutrenoncer aussi longtemps que subsiste sa raison d'etre, soit au plus tot au moment ou le contrat est rompu.

Selon le principe general du droit relatif à la renonciation à un droit, celle-ci constitue un acte unilateral qui ne se presume pas. Commele precise l'article 824 du Code judiciaire, la renonciation peut etrefaite de maniere implicite mais peut uniquement se deduire de faits quine sont susceptibles d'aucune autre interpretation.

L'arret constate que, selon [les demandeurs], le dernier contrat detravail d'etudiant conclu entre la Sabena et le defendeur a pris fin enjuillet 2001 et que le defendeur a encore travaille comme « week-endiste» durant le mois d'aout 2001, ses dernieres prestations ayant eteeffectuees durant le week-end des 18 et 19 aout 2001.

En leurs conclusions de synthese d'appel, les demandeurs avaient allegueque, « comme l'avait constate à juste titre le premier juge :

`Au vu des elements du dossier, et en particulier du nombre peu eleve des contrats de travail ecrits deposes par [le defendeur], il peut etresoutenu que [celui-ci] a tacitement, c'est-à-dire de maniere implicitemais certaine, renonce à se prevaloir de la protection de l'article 9 dela loi du 3 juillet 1978 ;

[Le defendeur] a, à de fort nombreuses reprises, preste de maniere toutà fait ponctuelle, sans contrat de travail ecrit, sans aucunecontestation de sa part ;

Un tel comportement ne peut etre interprete autrement que comme sonassentiment à cette maniere de proceder ;

La conclusion, à quelques rares occasions, d'un contrat de travail peutetre explique par les periodes auxquelles ils se rapportaient (soit uneduree un peu plus longue, soit des periodes de blocus ou d'examen -decembre 2000, mai ou juin 2001) ;

Ces elements ne sont pas de nature à permettre de penser que [ledefendeur] n'aurait pas accepte que ses prestations de week-endinterviennent sans qu'un contrat de travail constatant cette occupationpar ecrit soit signe prealablement ;

Il decoule de ce qui precede que c'est à juste titre que [les demandeurs]retiennent la date du 19 aout 2001, voire le 31 aout 2001, comme etant ledernier jour de prestation [du defendeur] ;

[...] En outre, à suivre le raisonnement [du defendeur], le tribunal [dutravail] s'interroge sur l'absence de toute prestation en septembre etoctobre 2001 et sur l'absence de reaction [du defendeur] face aumanquement de son employeur de lui fournir du travail ;

C'est en vain que [le defendeur] invoque un statut qui devrait etredifferent de celui qui est decrit dans la convention collective detravail du 5 novembre 1996 au sujet des week-endistes, et ce, meme sielle n'a pas ete rendue obligatoire par arrete royal' ;

[...] Par consequent, c'est à tort que [le defendeur] pretend qu'avant le9 novembre 2001, date à laquelle il estime que son contrat de travail apris fin, il ne pouvait pas renoncer à son droit tire de l'article 9, S:1er, de la loi sur le contrat de travail ;

Force est, en effet, de constater qu'à aucun moment, à l'issue desdiverses prestations qu'il a effectuees sans contrat de travail ecrit,[le defendeur] n'a emis la moindre contestation à cet egard ;

C'est, des lors, à bon droit que le jugement entrepris a considere que[le defendeur] a donc valablement renonce à se prevaloir de la protectionde l'article 9 de la loi du 3 juillet 1978 ».

Ainsi les demandeurs, par approbation des motifs enonces par le tribunaldu travail, faisaient valoir 1. que le defendeur avait à de nombreuses reprises preste de maniere ponctuelle (c'est-à-dire, principalement, lesweek-ends), 2. que le travail etait execute sans contrat de travailecrit, et 3. sans que cela suscitat une contestation de la part dudefendeur.

Les demandeurs precisaient ainsi que les prestations du defendeur etaientseparees d'une periode sans travail, les prestations etant ponctuelles, que ces prestations ne faisaient pas l'objet d'un contrat de travail ecritet que le defendeur n'avait jamais, à l'issue des diverses prestations,emis une contestation quelconque, pour en deduire qu'il avait ainsirenonce à se prevaloir de la protection de l'article 9 de la loi du 3juillet 1978.

La circonstance qu'à l'issue d'un travail pour une periode determinee, execute sans qu'il y ait un contrat de travail ecrit, le travailleurn'emet aucune contestation et ne reclame pas la continuation du travail,et la circonstance que, par apres, il reprend, à nouveau, un travailpour une periode determinee, sans qu'il y ait un contrat de travailecrit, et qu'à l'issue de cette nouvelle periode de travail, il n'emetaucune contestation, constituent des elements qui peuvent etre pris encompte pour apprecier si le travailleur a ainsi renonce à se prevaloirde la protection de l'article 9 de la loi sur les contrats de travail, letravailleur n'etant, à l'issue des contrats respectifs et jusqu'àl'execution d'un nouveau contrat, plus occupe par l'employeur.

Apres avoir considere que le defendeur ne pouvait renoncer à la protection legale qu'apres la rupture de la relation contractuelle, lacour du travail n'a pu legalement considerer que, « des lors », le faitque, « durant son occupation », le defendeur semblait avoir acceptesans contestation de prester à de nombreuses reprises comme « week-endiste » sans contrat de travail ecrit, « ne pouvait » etreconsidere comme une renonciation.

Ainsi la cour du travail n'a pas apprecie si, comme le soutenaient lesdemandeurs, les faits invoques constituaient une renonciation implicite mais a decide que ces faits « ne pouvaient » pas constituer une tellerenonciation parce qu'ils s'etaient produits « durant l'occupation dudefendeur » et donc pas apres la rupture de la relation contractuelle,alors que le defendeur n'etait pas occupe pendant les jours de travail dela semaine, separant les week-ends pendant lesquels il avait preste.

La renonciation à se prevaloir de l'article 9, alineas 1er et 2, de la loi du 3 juillet 1978 ne pouvant etre faite durant l'occupation dutravailleur, c'est-à-dire lorsque l'interesse se trouve encore sousl'autorite de l'employeur, rien ne s'oppose cependant à ce que cetterenonciation se deduise de faits, et notamment du comportement dutravailleur, qui se produisent à l'issue du contrat à duree determineeet pendant la periode qui suit ce contrat à duree determinee et avantqu'un nouveau contrat de travail soit conclu.

L'arret, qui decide qu'en l'espece le defendeur n'a pas pu renoncer à laprotection legale en considerant que les faits invoques par les demandeursse situaient « durant son occupation » et qui conclut que « lescontrats de travail à duree determinee conclus verbalement entre [ledefendeur] et la Sabena pour les prestations durant les week-ends et joursferies sont soumis aux memes conditions que les contrats conclus pour uneduree indeterminee à defaut de repondre aux conditions fixees parl'article 9, alinea 1er», viole les articles 9, notamment alineas 1er et2, de la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail et 824 duCode judiciaire, ainsi que le principe general du droit relatif à larenonciation à un droit, selon lequel la renonciation à un droit est unacte juridique unilateral qui ne se presume pas et qui peut uniquement sededuire de faits qui ne sont susceptibles d'aucune autre interpretation.

Second moyen

Dispositions legales violees

- article 1315 du Code civil ;

- article 870 du Code judiciaire ;

- article 39, S: 1er, de la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats detravail.

Decisions et motifs critiques

L'arret rec,oit l'appel et le declare partiellement fonde, reforme lejugement entrepris en ce qu'il a rejete la creance relative à l'indemnite compensatoire de preavis et, statuant à nouveau sur cettedemande, dit pour droit que le defendeur peut faire valoir une creanced'un montant brut de 836,49 euros à titre d'indemnite compensatoire depreavis à l'encontre de la societe Sabena en faillite. L'arret confirmele jugement entrepris pour le surplus, reserve les depens et renvoie lacause devant le tribunal de commerce de Bruxelles.

L'arret fonde sa decision sur les motifs enonces ci-apres :

« III.2. Qualification du contrat

[...] En consequence, les contrats de travail à duree determinee conclusverbalement entre [le defendeur] et la Sabena pour les prestations durantles week-ends et jours feries sont soumis aux memes conditions que lescontrats conclus pour une duree indeterminee à defaut de repondre auxconditions fixees par l'article 9, alinea 1er ;

III.3. Indemnite de preavis

III.3.1. A tort, le jugement entrepris decide qu'il ressort de l'ensembledes elements de la cause que les prestations [du defendeur] ont bien prisfin le 19, voire le 31 aout 2001, et que rien n'indique qu'il ne s'agissepas d'une decision prise de commun accord ;

La rupture de commun accord doit etre prouvee et ne peut se deduire de l'absence d'elements en sens contraire ;

C'est [aux demandeurs], qui, du reste, se prevalent d'un conge (et nond'une rupture de commun accord), qu'il appartient d'etablir l'existenceet la date de la rupture ;

Les demandeurs ne produisent aucune lettre de licenciement, aucunformulaire C4, aucun element dont il resulterait que la Sabena auraitmanifeste sa volonte de rompre le contrat de travail [du defendeur]. Celas'explique par le fait que la Sabena se basait sur la conventioncollective de travail litigieuse pour considerer que le dernier contratde `week-endiste' conclu verbalement pour un travail à fournir durant leweek-end des 18 et 19 aout 2001 avait pris fin de plein droit àl'expiration du terme, soit le 19 aout 2001 ;

Des lors que la cour du travail decide que cette convention collective detravail ne permettait pas de deroger aux obligations de l'article 9 de laloi du 3 juillet 1978, le dernier contrat conclu verbalement entre lesparties pour une duree determinee (de meme que les precedents) n'est pasvalable et est soumis aux memes conditions que les contrats conclus pourune duree indeterminee ;

[Le defendeur] n'avait pas l'obligation de mettre son employeur en demeurede lui fournir du travail ou de constater la rupture tacite de son contratde travail. C'est l'employeur qui devait lui notifier un conge en seconformant aux articles 39 et 59 de la loi du 3 juillet 1978 ;

[Le defendeur] a sollicite les `indemnites legales et conventionnelles' lors de sa declaration de creance du 1er decembre 2001. Il y a lieu deconsiderer que cette demande porte sur une indemnite compensatoire depreavis ;

Les demandeurs admettent, à titre subsidiaire, que la creance [dudefendeur] à ce titre s'eleve à 526,24 euros (montant net). La creancedoit cependant etre etablie en brut, soit la somme de 836,49 euros,suivant le decompte etabli par [les demandeurs] ».

Griefs

L'arret constate 1. que le defendeur avait travaille au service de laSabena en qualite d'ouvrier dans le cadre d'une serie de contrats detravail d'etudiant conclus pour une duree determinee ou comme « week-endiste », 2. que la faillite de la Sabena avait ete prononceepar le tribunal de commerce de Bruxelles par jugement du 7 novembre 2001,3. que le defendeur avait introduit une declaration de creance, 4. qu'il yavait lieu de considerer que cette demande portait sur une indemnitecompensatoire de preavis, et 5. que le defendeur, demandeur originaire,soutenait qu'il avait ete lie par un contrat de travail à dureeindeterminee.

Ainsi l'arret reconnait que [le defendeur] etait demandeur en paiementd'une indemnite compensatoire de preavis à charge de la faillite de laSabena, invoquant la rupture, sans preavis ni motif grave, de son contratde travail à duree indeterminee.

En vertu des articles 1315 du Code civil et 870 du Code judiciaire, letravailleur qui, en tant que demandeur, invoque le conge qui lui a etedonne, doit prouver que l'employeur a mis fin au contrat de maniere unilaterale.

L'arret considere que « c'est [aux demandeurs] [...] qu'il appartient d'etablir l'existence et la date de la rupture ».

L'arret meconnait ainsi les regles de la charge de la preuve ainsi queles dispositions legales precitees (violation des articles 1315 du Codecivil et 870 du Code judiciaire) et n'a pu, par consequent, legalement reconnaitre le droit à une indemnite compensatoire de preavis (violationde l'article 39, S: 1er, de la loi du 3 juillet 1978 relative auxcontrats de travail).

III. La decision de la Cour

Sur le premier moyen :

Aux termes de l'article 9, alinea 1er, de la loi du 3 juillet 1978relative aux contrats de travail, le contrat de travail conclu pour uneduree determinee ou pour un travail nettement defini doit etre constatepar ecrit pour chaque travailleur individuellement au plus tard au momentde l'entree en service de celui-ci.

L'alinea 2 de cet article dispose qu'à defaut d'ecrit etablissant qu'ilest conclu pour une duree determinee ou pour un travail nettement defini,le contrat est soumis aux memes conditions que les contrats conclus pourune duree determinee.

L'article 9 est une disposition imperative qui etablit au benefice dutravailleur une protection à laquelle il ne peut renoncer aussi longtempsque subsiste sa raison d'etre.

L'arret constate que les parties produisent divers contrats de travaild'etudiant relatifs à des periodes comprises entre le 30 juin 2000 et le1er aout 2001, que « les bons de prestations produits par [lesdemandeurs] etablissent que [le defendeur] a egalement ete occupe lesweek-ends et jours feries durant la periode allant du 1er juillet 2000 au31 aout 2001 » et que « les parties s'accordent sur le fait qu'il n'y aplus eu aucune prestation [...] apres le 31 aout 2001 ».

Il releve que, « selon [les demandeurs], le dernier contrat de travailetudiant conclu entre la Sabena et [le defendeur] a pris fin en juillet2001 et que [celui-ci] a encore travaille comme `week-endiste' durant lemois d'aout 2001, ses dernieres prestations ayant ete effectuees durant leweek-end des 18 et 19 aout 2001 ».

Des lors que le premier contrat de travail conclu par les parties pour uneduree determinee sans avoir ete prealablement constate par ecrit estsoumis aux memes conditions qu'un contrat à duree indeterminee, quisubsiste aussi longtemps qu'il n'y a pas ete mis fin, l'arret decidelegalement que « [le defendeur] n'aurait pu renoncer à la protectionlegale qu'apres la rupture de la relation contractuelle » et que « lefait que, durant son occupation, il semble avoir accepte sanscontestations de prester à de nombreuses reprises comme `week-endiste'sans contrat de travail ecrit ne peut etre considere comme unerenonciation implicite à se prevaloir de l'article 9, alineas 1er et2 ».

Le moyen ne peut etre accueilli.

Sur le second moyen :

En vertu de l'article 39, S: 1er, alinea 1er, de la loi du 3 juillet 1978,si le contrat a ete conclu pour une duree indeterminee, la partie quiresilie le contrat sans motif grave ou sans respecter le delai de preavisest tenue de payer à l'autre une indemnite egale à la remuneration encours correspondant soit à la duree du delai de preavis, soit à lapartie de ce delai restant à courir.

L'arret constate que « le dernier contrat de `week-endiste' [du defendeura ete] conclu verbalement pour un travail à fournir durant le week-enddes 18 et 19 aout 2001 » et qu'il n'a ensuite plus ete fourni de travailau defendeur, et considere que ce « dernier contrat [...], de meme queles precedents, n'est pas valable et est soumis aux memes conditions queles contrats conclus pour une duree indeterminee ».

Ces enonciations, d'ou il ressort que l'employeur a irregulierement rompule contrat de travail à duree determinee requalifie en contrat de travailà duree indeterminee en ne le renouvelant pas à son terme, suffisent àjustifier legalement la decision de l'arret de reconnaitre au defendeur ledroit a l'indemnite compensatoire de preavis qu'il reclamait.

Les autres considerations de l'arret que critique le moyen sont, des lors,surabondantes.

Le moyen ne peut etre accueilli.

Par ces motifs,

La Cour,

Rejette le pourvoi ;

Condamne les demandeurs aux depens.

Les depens taxes à la somme de cent trente-six euros treize centimesenvers les parties demanderesses.

Ainsi juge par la Cour de cassation, troisieme chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le president de section Christian Storck, les conseillersDidier Batsele, Mireille Delange, Michel Lemal et Marie-Claire Ernotte, etprononce en audience publique du huit septembre deux mille quatorze par lepresident de section Christian Storck, en presence de l'avocat generalJean Marie Genicot, avec l'assistance du greffier Lutgarde Body.

+-------------------------------------------+
| L. Body | M.-Cl. Ernotte | M. Lemal |
|------------+----------------+-------------|
| M. Delange | D. Batsele | Chr. Storck |
+-------------------------------------------+

8 SEPTEMBRE 2014 S.13.0116.F/1


Synthèse
Numéro d'arrêt : S.13.0116.F
Date de la décision : 08/09/2014

Origine de la décision
Date de l'import : 26/09/2014
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2014-09-08;s.13.0116.f ?
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