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05/01/2015 | BELGIQUE | N°S.14.0038.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 05 janvier 2015, S.14.0038.F


Cour de cassation de Belgique

Arret

826



NDEG S.14.0038.F

ETAT BELGE, represente par le ministre des Finances, dont les bureaux sontà Bruxelles, rue de la Loi, 12, en la personne a) du receveur descontributions directes de Binche, dont les bureaux sont etablis à Binche,rue de la Regence, 31, b) du receveur des contributions directes de Thuin,dont les bureaux sont etablis à Thuin, rue du Fosteau, 1, c) du receveurde la TVA de Charleroi 2, dont les bureaux sont etablis à Charleroi, rueJean Monnet, 14, d) du receveur des contributions directes de Lessines,do

nt les bureaux sont etablis à Lessines, rue Tramure, 12,

demandeur en cassation,...

Cour de cassation de Belgique

Arret

826

NDEG S.14.0038.F

ETAT BELGE, represente par le ministre des Finances, dont les bureaux sontà Bruxelles, rue de la Loi, 12, en la personne a) du receveur descontributions directes de Binche, dont les bureaux sont etablis à Binche,rue de la Regence, 31, b) du receveur des contributions directes de Thuin,dont les bureaux sont etablis à Thuin, rue du Fosteau, 1, c) du receveurde la TVA de Charleroi 2, dont les bureaux sont etablis à Charleroi, rueJean Monnet, 14, d) du receveur des contributions directes de Lessines,dont les bureaux sont etablis à Lessines, rue Tramure, 12,

demandeur en cassation,

represente par Maitre Franc,ois T'Kint, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Charleroi, rue de l'Athenee, 9, ou il estfait election de domicile,

contre

1. M. P. et

2. J. B.,

3. C. M. et

4. B. D.,

5. M. T.,

6. VILLE de Lessines, representee par son college communal, dont les bureaux sont etablis à Lessines, Grand'Place, 12,

7. Beobank, anciennement denommee Citibank Belgium, societe anonyme dontle siege social est etabli à Ixelles, boulevard General Jacques, 263 G,

8. Belgacom, societe anonyme de droit public, venant egalement aux droitset obligations de la societe anonyme Belgacom Mobile, dont le siege socialest etabli à Schaerbeek, boulevard du Roi Albert II, 27,

9. Institut de Pathologie et de Genetique, association sans but lucratif,dont le siege est etabli à Charleroi (Gosselies), avenue GeorgesLemaitre, 25,

10. P. C.,

11. Commune d'Erquelinnes, representee par son receveur communal, dontles bureaux sont etablis à Erquelinnes, rue Albert Ier, 53,

12. Region wallonne, representee par son gouvernement, en la personne duministre-president, dont le cabinet est etabli à Namur (Jambes), rueMazy, 25-27,

13. W. J.,

14. M. A.,

15. Vendor, societe anonyme dont le siege social est etabli à Tamise, Kapelanielaan, 33,

16. Etat belge, represente par le ministre des Finances, en la personne dureceveur de la TVA et de l'enregistrement de Tournai, dont les bureauxsont etablis à Tournai, rue du Rempart, 7/21,

17. SOCIETE BELGE DES AUTEURS, COMPOSITEURS ET EDITEURS, en abrege Sabam,societe civile ayant adopte la forme d'une societe cooperative àresponsabilite limitee, dont le siege social est etabli à Bruxelles, rued'Arlon, 75-77,

18. Etat belge, represente par le ministre de la Justice, Commission jeuxde hasard, dont les bureaux sont etablis à Bruxelles, Cantersteen, 47,

19. Belfius Banque, societe anonyme dont le siege social est etabli à Bruxelles, boulevard Pacheco, 44,

20. G. L.,

21. Le Peintre Portraitiste, societe privee à responsabilite limitee, dont le siege social est etabli à Walcourt (Thy-le-Chateau), rue L.Piret, 22/1 (pour autant que de besoin),

22. Horeca Neighboring Rights Belgium, en abrege Honebel, societecooperative à responsabilite limitee, dont le siege social est etabli àBruxelles, rue Saint-Gery, 10,

23. Reseau Hospitalier de MEdecine Sociale, association sans butlucratif, dont le siege est etabli à Saint-Ghislain (Baudour), rue LouisCaty, 136,

24. AG Insurance, anciennement denommee Fortis Insurance Belgium, dont lesiege social est etabli à Bruxelles, boulevard Emile Jacqmain, 53,

25. Ebay Belgium, societe privee à responsabilite limitee, enliquidation, dont le siege social est etabli à Bruxelles, avenue desArts, 44,

26. Carrosserie VBL, societe anonyme dont le siege social est etabli à Soignies, chaussee de Braine, 112,

27. Etat belge, represente par le ministre des Finances, en la personne dureceveur des amendes penales de Bruxelles II, dont les bureaux sontetablis à Bruxelles, rue de la Regence, 54,

28. BPost Banque, anciennement denommee Banque de la Poste, societeanonyme dont le siege social est etabli à Bruxelles, boulevard Anspach,1,

29. Societe Wallonne des Eaux, societe civile ayant adopte la forme d'unesociete cooperative à responsabilite limitee, dont le siege social estetabli à Verviers, rue de la Concorde, 41,

30. Les Assures Reunis, societe anonyme dont le siege social est etabli à Bruxelles, rue Belliard, 53,

31. EDF Luminus, anciennement denommee SPE, societe anonyme dont le siege social est etabli à Bruxelles, rue du Marquis, 1,

32. Ville de Binche, representee par son receveur communal, dont les bureaux sont etablis à Binche, rue Saint-Paul, 14,

33. Les Amis DU CAMPING de Binche Plage, association sans but lucratif,dont le siege est etabli à Binche, rue de Balenfer, 1,

34. Centre Hospitalier Jolimont Lobbes, association sans but lucratif, enliquidation, dont le siege est etabli à La Louviere (Haine- Saint-Paul),rue Ferrer, 159,

35. Etat belge, represente par le ministre des Finances, en la personne dureceveur des domaines et des amendes penales de Vilvorde, dont les bureaux sont etablis à Vilvorde, Groenstraat, 51,

36. Operateur de reseaux d'energie, en abrege ORES, societe cooperativeà responsabilite limitee, dont le siege social est etabli à Ottignies-Louvain-la-Neuve, avenue Jean Monnet, 2,

37. C. N.,

defendeurs en cassation.

I. La procedure devant la Cour

Le pourvoi en cassation est dirige contre l'arret rendu le 21 janvier 2014par la cour du travail de Mons.

Le 11 decembre 2014, l'avocat general Jean Marie Genicot a depose desconclusions au greffe.

Le conseiller Michel Lemal a fait rapport et l'avocat general Jean MarieGenicot a ete entendu en ses conclusions.

II. Le moyen de cassation

Le demandeur presente un moyen libelle dans les termes suivants :

Dispositions legales violees

* articles 1390quinquies, specialement alinea 1er, 1627 à 1654, 1675/7,S: 4 et 1675/15, S: 3, du Code judiciaire ;

* articles 422 et 423 du Code des impots sur les revenus 1992 ;

* articles 86 et 87 du Code de la taxe sur la valeur ajoutee ;

* articles 7, 8 et 19 de la loi du 16 decembre 1851, dite loihypothecaire, inseree sous le livre 3, titre XVIII du Code civil.

Decisions et motifs critiques

Apres avoir constate que :

« Les [troisieme et quatrieme defendeurs] sont admis au benefice de laprocedure en reglement collectif de dettes par ordonnance du 12 novembre2009 designant [la trente-septieme defenderesse] en qualite de mediateurde dettes.

Le 23 mars 2011, les [deux premiers defendeurs] (creanciers en leurqualite d'anciens bailleurs des medies) deposent une requete enrevocation.

Par jugement du 20 septembre 2012, le tribunal du travail de Charleroi :

- Dit la demande de revocation de la procedure recevable et fondee dans lamesure ci-apres determinee ;

- Revoque la decision d'admissibilite du 12 novembre 2009, en applicationde l'article 1675/15, 3DEG, du Code judiciaire (augmentation fautive dupassif) ;

- Invite le mediateur de dettes à faire mentionner la revocation surl'avis de reglement collectif de dettes (article 1675/14, S: 3, du Codejudiciaire) ;

- Reserve à statuer sur le sort du compte de mediation ainsi que sur lataxation definitive des frais et honoraires du mediateur ;

- Invite [le mediateur] à deposer son projet de repartition auxcreanciers et sa requete en taxation definitive de ses frais ethonoraires.

Les [troisieme et quatrieme defendeurs] interjettent appel de cejugement.

Par arret du 16 janvier 2013, la cour du travail de Mons [dans unecomposition autre que celle qui a rendu l'arret attaque]:

`Declare la requete d'appel recevable mais non fondee ;

Confirme le jugement dont appel en ce qu'il :

- a revoque la decision d'admissibilite du 12 novembre 2009 et dit quecette revocation intervenait, en application de l'article 1675/15, S: 1,3DEG, du Code judiciaire (augmentation fautive du passif) ;

- a invite le mediateur de dettes à faire mentionner la revocation surl'avis de reglement collectif de dettes en application de l'article1675/14, S: 3, du Code judiciaire ;

Vidant sa saisine, exclusivement limitee à l'examen de la recevabilite etdu fondement de la requete d'appel en ce qu'il est fait grief au premierjuge d'avoir revoque la decision d'admissibilite du 12 novembre 2009,ordonne le renvoi du dossier au premier juge et ce par derogation àl'effet devolutif de l'appel tel que consacre par l'article 1675/14, S: 2,du Code judiciaire, pour qu'il soit statue par ses soins sur le sort desfonds disponibles sur le compte de mediation, sur la taxation definitivedes frais et honoraires du mediateur ainsi que sur la decharge et lacloture definitive ;

Condamne les [troisieme et quatrieme defendeurs] aux frais et depens del'instance d'appel non liquides par [les deux premiers defendeurs] àdefaut d'etat'.

Par le jugement [du premier juge] du 14 mai 2013, le tribunal du travailde Charleroi :

`Taxe les frais et honoraires definitifs du mediateur de dettes à lasomme de 1.424 euros ;

Autorise le mediateur de dettes à prelever cette somme par privilege surle compte de la mediation ;

Dit que le mediateur versera aux medies un montant de 1.087,63 euros,correspondant à la prime de naissance versee sur le compte de mediationà l'occasion de la naissance de leur second enfant ;

Dit que le mediateur procedera à la repartition du solde des fondssubsistant sur le compte de mediation à la date du prononce du [...]jugement, apres deduction de ses frais et honoraires tels que taxesci-dessus et apres deduction du montant correspondant à la prime denaissance susmentionnee, en respectant les privileges et surete descreanciers declarants, dans le respect de l'ordre suivant (et dans leslimites des fonds disponibles sur le compte de mediation à la date duprononce du jugement) :

1) creance privilegiee du SPF Finances, recette T.V.A. Charleroi 2(montant privilegie de 920,26 euros) ;

2) paiement par concurrence aux creanciers suivants (de meme rang) :

- SPF Finances, recette des contributions de Thuin (montant privilegie de3.018,53 euros) ;

- SPF Finances, recette des contributions de Binche (montant privilegiede 8.367,20 euros) ;

- SPF Finances, recette des contributions de Lessines (montantprivilegie de 2.915,73 euros) ;

- Ville de Lessines (montant privilegie de 75,00 euros) ;

- Ville de Binche (montant privilegie de 199,50 euros) ;

- Ville d'Erquelinnes (montant privilegie de 315,06 euros) ;

Dit la demande [des deux premiers defendeurs] relative aux depens d'appelirrecevable ;

Condamne les medies aux frais et depens de l'instance en faveur [des deuxpremiers defendeurs], liquides à la somme de 1.320 euros à titred'indemnite de procedure, et reduite à la somme de 82,50 euros par letribunal ;

Decharge le mediateur de sa mission apres repartition du solde du comptede mediation et apres qu'il ait depose au greffe, dans le mois à dater duprononce du [...] jugement, la preuve des operations bancaires precitees,de la mise à zero et de la cloture du compte de mediation ;

Dit le [...] jugement executoire par provision, nonobstant tout recours etsans caution.' »,

la cour du travail, reformant le jugement [du premier juge] « dit pourdroit que le solde disponible sur le compte de la mediation à la date dela revocation, apres prelevement des sommes taxees à titre d'honoraireset frais du mediateur par le jugement [du premier juge] et du montantcorrespondant à le prime de naissance, doit etre reparti au marc l'euroentre les creanciers ayant depose une declaration de creance.

Par consequent, invite :

- (...)

- les creanciers SPF Finances, recette T.V.A. Charleroi 2, SPF Finances,recette des contributions de Thuin, SPF Finances, recette descontributions de Binche, SPF Finances, recette des contributions deLessines, (...) à verser sur [le compte que le mediateur de dettes estinvite à ouvrir] les sommes perc,ues en execution du jugement [du premierjuge] le 14 mai 2013 endeans le mois ;

- le mediateur de dettes à repartir les fonds ainsi perc,us entre lescreanciers ayant declare leur creance au marc l'euro ».

Le moyen critique cette decision et tous ses motifs, tenus ici pourintegralement reproduits, et notamment les motifs suivants :

« L'objet de l'appel est limite à la question de la repartition desfonds figurant sur le compte de la mediation en cas de revocation.

Aucune reponse legislative n'a ete apportee à cette question qui se poseen cas de revocation mais aussi à chaque fois que la procedure prend finen dehors de l'hypothese du terme d'un plan de reglement qu'il soitamiable ou judiciaire.

Comme le releve la cour du travail de Liege, dans son arret du 2 avril2012, il existe, dans ce cas, trois modalites possibles d'affectation dusolde du compte de la mediation :

- la restitution des fonds au debiteur ;

- une repartition au marc l'euro entre les creanciers ayant regulierementdeclare leur creance ;

- une repartition entre les creanciers selon le droit commun, enrespectant les causes legitimes de preference (...).

La cour [du travail] s'en refere à la position qu'elle avait developpeedans l'hypothese d'un desistement, à savoir que le solde disponible surle compte de la mediation au jour du jugement decretant le desistement,apres prelevement des sommes taxees à titre d'honoraires et frais dumediateur, doit etre reparti au marc le franc entre les creanciers ayantdepose une declaration de creance (...).

Dans ledit arret, la cour [du travail de Mons] justifie tout d'abord sadecision de ne pas retroceder le solde figurant sur le compte de lamediation au debiteur, comme l'avait ordonne le premier juge, notammentcomme suit :

- `Les sommes placees au credit du compte de la mediation constituent unactif affecte au retablissement de la situation financiere' et il est`coherent d'affecter ces sommes detenues par le mediateur au benefice descreanciers, sous la reserve de l'article 1675/19 du Code judiciaire pourle paiement des honoraires et des frais dus au mediateur de dettes'(...) ;

- Sous peine d'etre victime d'un abus de droit dans le chef du medie, lescreanciers declarants peuvent beneficier de la distribution du solde ducompte de mediation (...) ;

- En raison de la situation de concours existant depuis la decisiond'admissibilite jusqu'au terme de la procedure et de l'indisponibilite dupatrimoine du medie (...), ce dernier ne peut plus retrouver la pleinedisposition de ce patrimoine (...).

Reste la question de savoir si la repartition entre les creanciers ayantvalablement produit une declaration de creance doit tenir compte descauses legitimes de preference.

Si cette question ne pose pas de difficultes lorsqu'il y a realisation del'actif dans le cadre d'un plan de reglement judiciaire (...), tel n'estpas le cas lorsqu'il est mis fin à la procedure de reglement collectif dedettes en dehors d'un plan.

Dans son arret du 12 avril 2012, la cour du travail de Liege a considereque la cessation de la procedure de reglement collectif de dettes n'inclutpas les operations de cloture selon la regle du concours de sorte que lasuspension des privileges stipulee à l'article 1675/7 du Code judiciairene s'applique plus des le prononce de la decision de revocation et que lescreanciers doivent etre payes en tenant compte des causes legitimes depreference.

La cour [du travail de Mons] ne partage pas cette analyse considerant que:

`... aucun creancier ne peut etre avantage des lors que, durant laprocedure, l'effet des suretes reelles et des privileges est suspendu saufen cas de realisation du patrimoine. De meme, le versement preferentielgaranti aux creanciers hypothecaires et aux creanciers privilegiesspeciaux ne vaut qu'en cas de realisation du patrimoine' (...).

Par ailleurs, la cour[du travail] rejoint la these defendue par C. Andresuivant laquelle les effets de la decision d'admissibilite s'etendent nonpas jusqu'à la decision de revocation mais bien jusqu'à la cloture de laprocedure (...).

Contrairement à ce que pretend le mediateur de dettes, cette these n'estpas minoritaire ; elle est egalement defendue par C. Bedoret sur la basenotamment des considerations suivantes :

- l'article 1675/7, S: 4, du Code judiciaire (`Les effets de la decisiond'admissibilite se prolongent jusqu'au rejet, jusqu'au terme ou jusqu'àla revocation du reglement collectif de dettes') porte non pas sur le plande reglement collectif de dettes mais sur le reglement collectif qui estune notion plus large englobant la cloture de la procedure ;

- lorsque la question des privileges et des suretes a ete evoquee lors desmodifications apportees par la loi du 13 decembre 2005, la volonte dulegislateur s'est clairement exprimee sur ce point en precisant que `...la suspension des effets des suretes reelles et des privileges n'est paslimitee à la seule duree du plan judiciaire...' (...) ;

- l'article 1675/15, S: 3, du Code judiciaire tel qu'il etait applicableà l'espece (`En cas de revocation, les creanciers recouvrent le droitd'exercer individuellement leur action sur les biens du debiteur pour larecuperation de la partie non acquittee de leurs creances'), tenduniquement à restaurer, en cas de revocation, les droits des creanciersayant consenti ou subi une remise de dettes dans le cadre d'un plan dereglement (...) ;

- le prolongement des effets de la decision d'admissibilite jusqu'à lacloture de la procedure s'inscrit dans la logique des dispositions du Codejudiciaire qui reglent la procedure de reglement collectif de dettes ;dispositions qui integrent notamment le controle des operations de cloture(...).

S'agissant des cessions de creance dont les effets sont suspendus durantla procedure au meme titre que les suretes reelles et les privileges, lacour [du travail de Mons] a , par ailleurs, considere que leurreactivation ne pouvait s'envisager en cours de procedure notamment auregard du statut du mediateur de dettes : `En tout etat de cause, si lafin de la procedure par le desistement fait retrouver au creancier tousses moyens d'action et lui permet le cas echeant d'activer ou de reactiverune cession de remuneration, il doit veiller à adresser les notificationsdestinees au debiteur cedant au requerant lui-meme et à son debiteur etnon au mediateur. En effet, dans le cadre du reglement collectif, celui-cine detient une partie des revenus du requerant que pour compte de cerequerant et ce, en execution d'une mission legale. Il ne devient donc pasle debiteur du requerant. Toute notification adressee au mediateur estdonc inoperante' (...).

A l'instar d'un important [courant] doctrinal (...), la cour [du travail] considere, en consequence, que les fonds figurant sur le compte de lamediation apres revocation doivent etre repartis entre les creanciersayant introduit une declaration de creance au marc l'euro.

La decision de la cour [du travail de Mons] du 22 decembre 2010 (...),vantee par le mediateur de dettes, n'enerve en rien ce constat des lorsqu'elle concerne le sort des creances nouvelles post-admissibilite.

Par ailleurs, l'argument du mediateur de dettes suivant lequel, seconformant aux termes du jugement [du premier juge] executoire parprovision, il a reparti les fonds le 23 mai 2013 ne saurait mettre enechec la position de la cour[du travail].

En effet, si la methode utilisee par certaines juridictions d'instance(jugement executoire par provision imposant au mediateur de dettes deproceder à la repartition des fonds figurant sur le compte de lamediation et à la cloture dudit compte dans le mois du prononce dujugement) a pour effet de placer tant la cour [du travail] que lemediateur dans une situation inconfortable en cas de reformation, cettemethode ne suffit pas pour s'opposer au fondement de l'appel, sous peinede vider la procedure d'appel de toute substance.

Dans de telles circonstances, il convient d'inviter :

- le mediateur de dettes à poursuivre sa mission et à ouvrir un comptede mediation dont il renseignera les coordonnees aux creanciers mentionnesci-apres dans les quinze jours de la notification du present arret ;

- les creanciers SPF Finances, recette T.V.A. Charleroi 2, SPF Finances,recette des contributions de Thuin, SPF Finances, recette descontributions de Binche, SPF Finances, recette des contributions deLessines, ville de Lessines, ville de Binche et ville d'Erquelinnesà verser sur ledit compte les sommes perc,ues en execution du jugement[du premier juge] du 14 mai 2013 endeans le mois ;

- le mediateur de dettes à repartir les fonds ainsi perc,us entre lescreanciers ayant declare leur creance au marc l'euro.

Afin de s'assurer de la correcte execution du present arret et avantd'envisager, le cas echeant, des mesures plus coercitives à l'egard descreanciers qui ne s'executeraient pas volontairement, la cour [du travail]fixe une audience de reouverture des debats ».

Griefs

En vertu de l'article 1675/7, S: 4, du Code judiciaire, « les effets dela decision d'admissibilite se prolongent jusqu'au rejet, jusqu'au termeou jusqu'à la revocation du reglement collectif de dettes, sous reservedes stipulations du plan de reglement ».

L'article 1390quinquies, alinea 1er, du Code judiciaire (modifie par laloi du [14 janvier 2013, entree en vigueur le] 1er septembre 2013)enonce : « Aucune remise ou distribution des deniers saisis, comptants ousaisis-arretes, ou provenant de la vente de biens meubles ou immeublessaisis, ne peut avoir lieu que conformement aux dispositions des articles1627 à 1654 ».

S'imposaient donc en l'espece les articles 1627 et suivants du Codejudiciaire, ainsi que l'article 1675/15, S: 3, du Code judiciaire en vertuduquel : « En cas de revocation, les creanciers recouvrent le droitd'exercer individuellement leur action sur les biens du debiteur pour larecuperation de la partie non acquittee de leurs creances ».

Par ailleurs, les articles 7 et 8 de la loi hypothecaire imposent que« quiconque est oblige personnellement est tenu de remplir sesengagements sur tous ses biens mobiliers ou immobiliers, presents et àvenir » et que « les biens du debiteur sont le gage commun de sescreanciers, et le prix s'en distribue entre eux par contribution, à moinsqu'il n'y ait entre les creanciers des causes legitimes de preference ».

La revocation a eu pour effet de replacer les debiteurs dans la situationqui etait la leur avant la decision d'admissibilite.

Ils retrouvent donc la relation juridique qui existait avec les creanciersavant la decision d'admissibilite, tant au niveau du calcul des interetsqu'en ce qui concerne les effets des suretes et des privileges, ainsi quedes cessions et des saisies.

Lorsqu'il est constate que le passif du debiteur est plus important queles fonds à repartir, il y a donc lieu de proceder à une repartition parcontribution et de respecter les causes legitimes de preference.

En decidant au contraire, par les motifs critiques, qu'il y a lieu derepartir les fonds qu'il detenait « au marc l'euro » (et en invitant enconsequence le demandeur qui avait rec,u paiement preferentiel sur basedes privileges attaches à ses creances à restituer à cette fin lessommes rec,ues au mediateur), la cour du travail ne justifie donc paslegalement sa decision.

III. La decision de la Cour

En vertu de l'article 1675/7, S: 1er, alinea 3, du Code judiciaire, ladecision d'admissibilite entraine la suspension de l'effet des suretesreelles et des privileges jusqu'à la revocation du plan.

Suivant le paragraphe 4 dudit article 1675/7, les effets de la decisiond'admissibilite se prolongent jusqu'à la revocation du reglementcollectif de dettes.

Aux termes de l'article 1675/15, S: 3, de ce code, dans sa versionapplicable aux faits, en cas de revocation, les creanciers recouvrent ledroit d'exercer individuellement leur action sur les biens du debiteurpour la recuperation de la partie non acquittee de leurs creances.

L'article 8 de la loi hypothecaire dispose que les biens du debiteur sontle gage commun de ses creanciers, et le prix s'en distribue entre eux parcontribution, à moins qu'il n'y ait entre les creanciers des causeslegitimes de preference.

Il suit de ces dispositions qu'en cas de revocation de la decisiond'admissibilite, la suspension de l'effet des suretes reelles et desprivileges prend fin et que le partage des sommes disponibles sur lecompte de la mediation entre les creanciers doit etre effectue en tenantcompte des causes legales ou conventionnelles de preference.

L'arret constate que, par jugement du 20 septembre 2012, le tribunal dutravail de Charleroi a revoque la decision d'admissibilite et invite lemediateur à deposer son projet de repartition aux creanciers, que pararret du 16 janvier 2013, la cour du travail a confirme la decision derevocation de la decision d'admissibilite et renvoye la cause au tribunaldu travail « pour qu'il soit statue par ses soins sur le sort des fondsdisponibles sur le compte de mediation » et que le jugement du premierjuge decide, sans etre critique, qu'apres prelevement de ses frais ethonoraires par le mediateur et versement aux debiteurs d'une sommecorrespondant à une prime de naissance, le solde disponible sur le comptede mediation doit etre reparti entre les creanciers ayant depose unedeclaration de creance.

L'arret, qui considere que ce solde doit etre reparti au marc l'euro sanstenir compte des causes legitimes de preference, viole les articles1675/7, S: 4, et 1675/15, S: 3, du Code judiciaire et 8 de la loihypothecaire.

Le moyen est fonde.

Sur l'etendue de la cassation :

La cassation de la decision que le solde du compte de la mediation doitetre reparti au marc l'euro s'etend à celle que le demandeur en sesdifferentes qualites, les villes de Binche et de Lessines et la communed'Erquelinnes doivent reverser les sommes perc,ues en vertu du jugement dupremier juge, qui en est la suite.

Par ces motifs,

La Cour

Casse l'arret attaque en tant qu'il dit que le solde du compte demediation, apres prelevement des frais et honoraires du mediateur etversement aux debiteurs d'une somme correspondant à une prime denaissance, doit etre reparti au marc l'euro entre les creanciers ayantdepose une declaration de creance, invite le demandeur en ses differentesqualites, les villes de Binche et de Lessines et la commune d'Erquelinnesà verser sur le compte ouvert par le mediateur les sommes perc,ues enexecution du jugement du premier juge du 14 mai 2013 et invite lemediateur à repartir les fonds perc,us au marc l'euro ;

Ordonne que mention du present arret sera faite en marge de l'arretpartiellement casse ;

Reserve les depens pour qu'il soit statue sur ceux-ci par le juge dufond ;

Renvoie la cause, ainsi limitee, devant la cour du travail de Bruxelles.

Ainsi juge par la Cour de cassation, troisieme chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le president de section Albert Fettweis, les conseillersMartine Regout, Mireille Delange, Michel Lemal et Marie-Claire Ernotte, etprononce en audience publique du cinq janvier deux mille quinze par lepresident de section Albert Fettweis, en presence de l'avocat general JeanMarie Genicot, avec l'assistance du greffier Lutgarde Body.

+-------------------------------------------+
| L. Body | M.-Cl. Ernotte | M. Lemal |
|------------+----------------+-------------|
| M. Delange | M. Regout | A. Fettweis |
+-------------------------------------------+

5 JANVIER 2015 S.14.0038.F/16



Références :

Origine de la décision
Date de la décision : 05/01/2015
Date de l'import : 24/01/2015

Numérotation
Numéro d'arrêt : S.14.0038.F
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2015-01-05;s.14.0038.f ?
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