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25/03/2016 | BELGIQUE | N°F.14.0194.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 25 mars 2016, F.14.0194.F


Cour de cassation de Belgique

Arret

NDEG F.14.0194.F

FESTIVAL D'ART, association sans but lucratif, dont le siege est etabli àHuy, avenue Delchambre, 7A,

demanderesse en cassation,

ayant pour conseil Maitre Xavier Thiebaut, avocat au barreau de Liege,dont le cabinet est etabli à Liege, rue Simonon, 13, ou il est faitelection de domicile,

contre

Etat belge, represente par le ministre des Finances, dont le cabinet estetabli à Bruxelles, rue de la Loi, 12,

defendeur en cassation,

represente par Maitre Franc,ois T'Kint, avocat à l

a Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Charleroi, rue de l'Athenee, 9, ou il estfait election d...

Cour de cassation de Belgique

Arret

NDEG F.14.0194.F

FESTIVAL D'ART, association sans but lucratif, dont le siege est etabli àHuy, avenue Delchambre, 7A,

demanderesse en cassation,

ayant pour conseil Maitre Xavier Thiebaut, avocat au barreau de Liege,dont le cabinet est etabli à Liege, rue Simonon, 13, ou il est faitelection de domicile,

contre

Etat belge, represente par le ministre des Finances, dont le cabinet estetabli à Bruxelles, rue de la Loi, 12,

defendeur en cassation,

represente par Maitre Franc,ois T'Kint, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Charleroi, rue de l'Athenee, 9, ou il estfait election de domicile.

NDEG F.14.0195.F

Centre culturel de l'arrondissement de Huy, association sans but lucratif,dont le siege est etabli à Huy, avenue Delchambre, 7A,

demanderesse en cassation,

ayant pour conseil Maitre Xavier Thiebaut, avocat au barreau de Liege,dont le cabinet est etabli à Liege, rue Simonon, 13, ou il est faitelection de domicile,

contre

Etat belge, represente par le ministre des Finances, dont le cabinet estetabli à Bruxelles, rue de la Loi, 12,

defendeur en cassation,

represente par Maitre Franc,ois T'Kint, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Charleroi, rue de l'Athenee, 9, ou il estfait election de domicile.

I. La procedure devant la Cour

Les pourvois en cassation sont diriges contre l'arret rendu le 12 fevrier2014 par la cour d'appel de Liege.

Le 2 mars 2016, le premier avocat general Andre Henkes a depose desconclusions au greffe.

Le conseiller Martine Regout a fait rapport et le premier avocat generalAndre Henkes a ete entendu en ses conclusions.

II. Les moyens de cassation

A l'appui du pourvoi inscrit au role general sous le numero F.14.0194.F,la demanderesse presente un moyen libelle dans les termes suivants :

Dispositions legales violees

- articles 13, S: 2, 20, S: 1er, et 44, S: 2, 8DEG, du Code de la taxe surla valeur ajoutee ;

- article 6, S: 4, de la sixieme directive nDEG 77/388/CCE du Conseil du17 mai 1977 en matiere d'harmonisation des legislations des Etats membresrelatives aux taxes sur le chiffre d'affaires - Systeme commun de taxe surla valeur ajoutee : assiette uniforme, avant son abrogation par l'article411, S: 1er, de la directive nDEG 2006/12/CE du Conseil du 28 novembre2006 relative au systeme commun de la taxe sur la valeur ajoutee.

Decisions et motifs critiques

L'arret attaque decide que les prestations litigieuses des agences despectacles fournies à la demanderesse ne peuvent etre exonerees.

L'arret attaque motive comme suit cette decision :

« L'article 44, S: 2, 8DEG, du Code de la taxe sur la valeur ajouteeprevoit notamment que sont exemptees de la taxe `les prestations deservices fournies aux organisateurs de spectacles et de concerts [...] parles acteurs, chefs d'orchestre, musiciens et autres artistes pourl'execution d'oeuvres theatrales, choregraphiques, cinematographiques oumusicales ou celles de spectacles de cirque, de music-hall ou de cabaretartistique'.

Il resulte de cette disposition, et singulierement des termes soulignespar la cour [d'appel], que seules les prestations de services des artistessont exonerees, à l'exclusion de la remuneration de l'intervention del'agence de spectacles .

Les factures litigieuses portent sur un montant global et ne mentionnentdonc pas separement le montant qui revient à l'artiste et celui quirevient à l'agence de spectacles, de sorte que l'exoneration prevue àl'article 44, S: 2, 8DEG, du code precite ne peut s'appliquer en l'absencede preuve de l'existence et, a fortiori, du montant d'une remunerationspecifique de l'artiste pour la prestation litigieuse.

La cour [d'appel] releve en ce sens que les contrats d'agences despectacles qui lui sont soumis ne precisent pas que l'artiste auraitbeneficie d'une remuneration specifique pour la prestation fournie auprofit [de la demanderesse] mais se contentent de mentionner que leproducteur prend en charge `le salaire' de l'artiste, qu'il agit `enqualite d'employeur' de l'artiste ou, d'une maniere encore plus vague,qu'il `s'est assure du concours' ou de la participation du ou desartistes.

Il n'est donc meme pas etabli qu'une partie du prix forfaitaire paye par[la demanderesse] pour les spectacles litigieux correspondraitspecifiquement à la remuneration du ou des artistes et que ceux-ci neseraient pas remuneres par un montant mensuel fixe, une participation auxbenefices du producteur ou tout autre mode de remuneration qui ne seraitpas directement lie aux representations effectuees.

Le refus de l'administration de la taxe sur la valeur ajoutee d'appliquer,fut-ce partiellement, la disposition de l'article 44, S: 2, 8DEG, du Codede la taxe sur la valeur ajoutee aux prestations de services litigieusesn'est donc pas arbitraire, comme le soutient [la demanderesse], maisresulte de l'absence de toute preuve de l'existence meme d'uneremuneration specifique de l'artiste pour lesdites prestations ».

Griefs

L'article 20, S: 1er, du Code de la taxe sur la valeur ajoutee dispose que« lorsqu'un commissionnaire ou un intermediaire quelconque, agissant dansles conditions prevues à l'article 13, S: 2, s'entremet dans desprestations de services, il est repute avoir rec,u personnellement cesservices et les avoir fournis personnellement ».

L'article 13, S: 2, du meme code, auquel il est renvoye, s'exprime quantà lui comme suit : « est considere comme commissionnaire, non seulementcelui qui agit en son nom propre ou sous un nom social pour le compte d'uncommettant, mais egalement l'intermediaire à l'achat qui rec,oit duvendeur, ou l'intermediaire à la vente qui delivre à l'acheteur, àtitre quelconque, une facture, une note de debit ou tout autre ecritequivalent libelles en son nom propre ».

Ces dispositions constituent la transposition en droit belge de l'article6, S: 4, de la sixieme directive nDEG 77/388/CCE du Conseil du 17 mai 1977en matiere d'harmonisation des legislations des Etats membres relativesaux taxes sur le chiffre d'affaires - Systeme commun de taxe sur la valeurajoutee : assiette uniforme, avant son abrogation par l'article 411, S:1er, de la directive nDEG 2006/12/CE du Conseil du 28 novembre 2006relative au systeme commun de la taxe sur la valeur ajoutee.

La Cour de justice de l'Union europeenne a dit pour droit que cettederniere disposition « cree la fiction juridique de deux prestations deservices identiques fournies consecutivement. En vertu de cette fiction,l'operateur, qui s'entremet dans la prestation de services et quiconstitue le commissionnaire, est repute avoir, dans un premier temps,rec,u les services en question de l'operateur pour le compte duquel ilagit, qui constitue le commettant, avant de fournir, dans un second temps,personnellement ces services au client. [...] Etant donne que l'article 6,paragraphe 4, de la sixieme directive releve du titre V de cettedirective, intitule `Operations imposables', et qu'il est libelle en destermes generaux, sans contenir de restrictions quant à son champd'application ou à sa portee, la fiction creee par cette dispositionconcerne egalement l'application des exonerations de la taxe sur la valeurajoutee prevues par la sixieme directive » (CJ.U.E., 14 juillet 2011,C-464/10, en cause Etat belge / Pierre Henfling, points 35 et 36).

L'arret attaque releve que les agences de spectacles etaient lesemettrices des factures litigieuses, de sorte que les conditions del'article 13, S: 2, du Code de la taxe sur la valeur ajoutee(« intermediaire à la vente qui delivre à l'acheteur, à titrequelconque, une facture ») etaient reunies.

Il s'ensuit que la fiction juridique prevue aux articles 13, S: 2, et 20,S: 1er, du Code de la taxe sur la valeur ajoutee conduisait à considererque les agences de spectacles avaient personnellement fourni les services.

L'article 44, S: 2, 8DEG, du Code de la taxe sur la valeur ajoutee prevoitune exoneration des « prestations de services fournies aux organisateursde spectacles et de concerts [...] par les acteurs, chefs d'orchestre,musiciens et autres artistes pour l'execution d'oeuvres theatrales,choregraphiques, cinematographiques ou musicales ou celles de spectaclesde cirque, de music-halls ou de cabaret artistique ».

Lorsqu'un intermediaire s'entremet dans les conditions de l'article 13,S: 2, du Code de la taxe sur la valeur ajoutee dans une prestation deservices, fut-elle exemptee, ceci conduit à « la fiction juridique dedeux prestations de services identiques fournies consecutivement »(C.J.U.E., 14 juillet 2011, dejà cite, pt 35).

Aussi l'agence de spectacles est-elle, par l'effet d'une fictionjuridique, censee personnellement fournir la prestation de servicesd'acteur, de chef d'orchestre, de musicien ou d'autres artistes.

Les prestations de services litigieuses d'agences de spectacles ne peuventainsi etre exclues de l'exemption prevue à l'article 44, S: 2, 8DEG, duCode de la taxe sur la valeur ajoutee. Par ailleurs, cette memedisposition, lue à la lumiere des articles 13, S: 2, et 20, S: 1er, duCode de la taxe sur la valeur ajoutee, ne conditionne pas davantagel'exemption à la mention separee, sur la facture des prestataires (iciles agences de spectacles), du montant qui revient à l'artiste et decelui qui revient à l'agence de spectacles.

L'arret, qui decide que les prestations litigieuses des agences despectacles fournies à la demanderesse ne peuvent etre exonerees, violel'ensemble des dispositions legales visees au moyen.

A l'appui du pourvoi inscrit au role general sous le numero F.14.0195.F,la demanderesse presente un moyen identique.

III. La decision de la Cour

Les deux pourvois etant diriges contre le meme arret, il y a lieu de lesjoindre.

Quant au pourvoi inscrit au role general sous le numero F.14.0194.F :

Sur le moyen :

En vertu de l'article 44, S: 2, 8DEG, du Code de la taxe sur la valeurajoutee, sont exemptees de la taxe les prestations de services fourniesaux organisateurs de spectacles et de concerts par les acteurs, chefsd'orchestre, musiciens et autres artistes pour l'execution d'oeuvrestheatrales, choregraphiques, cinematographiques ou musicales ou celles despectacles de cirque, de music-hall ou de cabaret artistique.

L'arret attaque considere, sans etre critique, que « seules lesprestations de service des artistes sont exonerees, à l'exclusion de laremuneration de l'intervention de l'agence de spectacles ».

Les articles 13, S: 2, et 20, S: 1er, du Code de la taxe sur la valeurajoutee visent l'intermediaire qui s'entremet dans des prestations deservices. Le seul fait qu'une agence de spectacles emet des factures àl'intention d'un organisateur de spectacles ne fait pas presumer que cesfactures portent sur la remuneration des artistes qui participent auspectacle, remuneration pour le paiement de laquelle l'agence aurait agicomme intermediaire.

L'arret attaque releve que « les contrats d'agences de spectacles qui luisont soumis ne precisent pas que l'artiste aurait beneficie d'uneremuneration specifique pour la prestation fournie au profit de [lademanderesse, organisateur de spectacles], mais se contentent dementionner que le producteur prend en charge `le salaire' de l'artiste,qu'il agit `en qualite d'employeur' de l'artiste ou, d'une maniere encoreplus vague, qu'il `s'est assure du concours' ou de la participation du oudes artistes » ; « qu'il n'est donc meme pas etabli qu'une partie duprix forfaitaire paye par [la demanderesse] pour les spectacles litigieuxcorrespondrait specifiquement à la remuneration du ou des artistes et queceux-ci ne seraient pas remuneres par un montant mensuel fixe, uneparticipation aux benefices du producteur ou tout autre mode deremuneration qui ne serait pas directement lie aux representationseffectuees » et « que le refus de l'administration de la taxe sur lavaleur ajoutee d'appliquer, fut-ce partiellement, la disposition del'article 44, S: 2, 8DEG, du Code de la taxe sur la valeur ajoutee auxprestations litigieuses [...] resulte de l'absence de toute preuve del'existence meme d'une remuneration specifique de l'artiste pour lesditesprestations ».

L'arret attaque a pu deduire de ces considerations qu'il n'y a pas lieud'exonerer de la taxe sur la valeur ajoutee les prestations facturees parl'agence de spectacles à la demanderesse.

Le moyen ne peut etre accueilli.

Quant au pourvoi inscrit au role general sous le numero F.14.0195.F :

Sur le moyen :

Pour les motifs enonces en reponse au moyen invoque à l'appui du pourvoiinscrit sous le numero F.14.0194.F, le moyen ne peut etre accueilli.

Par ces motifs,

La Cour

Joint les pourvois inscrits au role general sous les numerosF.14.0194.F et F.14.0195.F ;

Rejette les pourvois ;

Condamne chacune des demanderesses aux depens de son pourvoi.

Les depens taxes, dans la cause F.14.0194.F, à la somme de centsoixante-six euros cinquante-trois centimes envers la partie demanderesseet, dans la cause F.14.0195.F, à la somme de cent soixante-six euroscinquante-trois centimes envers la partie demanderesse.

Ainsi juge par la Cour de cassation, premiere chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le president de section Christian Storck, les conseillersDidier Batsele, Martine Regout, Marie-Claire Ernotte et Sabine Geubel, etprononce en audience publique du vingt-cinq mars deux mille seize par lepresident de section Christian Storck, en presence du premier avocatgeneral Andre Henkes, avec l'assistance du greffier Patricia De Wadripont.

+-----------------------------------------------+
| P. De Wadripont | S. Geubel | M.-Cl. Ernotte |
|-----------------+------------+----------------|
| M. Regout | D. Batsele | Chr. Storck |
+-----------------------------------------------+

25 MARS 2016 F.14.0194.F/1

F.14.0195.F


Synthèse
Numéro d'arrêt : F.14.0194.F
Date de la décision : 25/03/2016

Origine de la décision
Date de l'import : 26/04/2016
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2016-03-25;f.14.0194.f ?
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