La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

02/05/2016 | BELGIQUE | N°S.15.0115.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 02 mai 2016, S.15.0115.F


Cour de cassation de Belgique

Arret

* NDEG S.15.0115.F

* J.C., domicilie à

* demandeur en cassation,

* represente par Maitre Paul Alain Foriers, avocat à la Cour decassation, dont le cabinet est etabli à Bruxelles, avenue Louise,149, ou il est fait election de domicile,

* * contre

* * OFFICE NATIONAL DE SECURITE SOCIALE, etablissement public dont lesiege est etabli à Saint-Gilles, place Victor Horta, 11,

* defendeur en cassation,

* represente par Maitre Geoffroy de Foestraets, avocat à la Cour decassation, dont le cabinet est

etabli à Bruxelles, rue de la Vallee,67, ou il est fait election de domicile.

I. La procedure devant la C...

Cour de cassation de Belgique

Arret

* NDEG S.15.0115.F

* J.C., domicilie à

* demandeur en cassation,

* represente par Maitre Paul Alain Foriers, avocat à la Cour decassation, dont le cabinet est etabli à Bruxelles, avenue Louise,149, ou il est fait election de domicile,

* * contre

* * OFFICE NATIONAL DE SECURITE SOCIALE, etablissement public dont lesiege est etabli à Saint-Gilles, place Victor Horta, 11,

* defendeur en cassation,

* represente par Maitre Geoffroy de Foestraets, avocat à la Cour decassation, dont le cabinet est etabli à Bruxelles, rue de la Vallee,67, ou il est fait election de domicile.

I. La procedure devant la Cour

Le pourvoi en cassation est dirige contre l'arret rendu le 25 juin2015 par la cour du travail de Mons.

Le 13 avril 2016, l'avocat general Jean Marie Genicot a depose desconclusions au greffe.

Le president de section Christian Storck a fait rapport et l'avocatgeneral Jean Marie Genicot a ete entendu en ses conclusions.

II. Le moyen de cassation

XI. Le demandeur presente un moyen libelle dans les termessuivants :

* Dispositions legales violees

* - article 42, specialement premier et dernier alineas, de laloi du 27 juin 1969 revisant l'arrete-loi du 28 decembre 1944concernant la securite sociale des travailleurs, le premieralinea tel qu'il a ete modifie par la loi du 4 aout 1978 etavant l'entree en vigueur de sa modification par la loi du 3juillet 2005 (article 33), entree en vigueur le 1er janvier 2009(article 50, alinea 1er), et le dernier alinea tel qu'il a etemodifie par la loi du 25 janvier 1999 et la loi-programme du 24decembre 2002 (article 111), qui produit ses effets le 16fevrier 1999 (article 114, troisieme tiret), et avant samodification par la loi-programme du 27 decembre 2005 ;

* - articles 1er à 3 de la loi du 29 juillet 1991 relative à lamotivation formelle des actes administratifs ;

* - article 159 de la Constitution ;

* - principe general du droit interdisant au juge d'appliquer unenorme contraire à une disposition superieure.

* Decisions et motifs critiques

* L'arret dit pour droit que la demande du defendeur introduitepar citation du 19 septembre 2006 n'est pas prescrite.

* L'arret fonde sa decision sur les motifs suivants :

* « 1. Jusqu'au 1er janvier 2009, le delai de prescription pourle recouvrement des cotisations sociales etait de cinq ans àdater de la date d'exigibilite du paiement des cotisations ;

* [...] Aux termes de l'article 42 de la loi du 27 juin 1969revisant l'arrete-loi du 28 decembre 1944 concernant la securitesociale des travailleurs, la prescription des actions enrecouvrement des cotisations sociales est interrompue de lamaniere prevue par les articles 2244 et suivants du Code civilainsi que, notamment, `par une lettre recommandee adressee parl'Office national de securite sociale à l'employeur' ;

* 2. La loi du 27 juin 1969 dispose en son article 1er qu'elle estapplicable aux travailleurs et aux employeurs lies par uncontrat de louage de travail ;

* Il decoule des articles 5, 9, 22 et 40 de cette loi que l'Officenational de securite sociale, etablissement public charge depercevoir les cotisations de securite sociale, a le pouvoir,meme en l'absence de disposition particuliere, de deciderd'office de l'existence ou de l'inexistence du contrat detravail vise à l'article 1er de la loi ;

* La decision d'assujettissement est un acte administratif au sensde l'article 1er de la loi du 29 juillet 1991 relative à lamotivation formelle des actes administratifs, soit un actejuridique unilateral de portee individuelle emanant d'uneautorite administrative et qui a pour but de produire des effetsjuridiques à l'egard d'un ou de plusieurs administres ou d'uneautre autorite administrative ;

* Aux termes de l'article 2 de cette loi, tout acte administratifentrant dans le champ d'application de la loi doit faire l'objetd'une motivation formelle, la motivation exigee consistant,selon l'article 3, en l'indication, dans l'acte, desconsiderations de droit et de fait servant de fondement à ladecision ;

* 3. En l'espece, nonobstant le fait que l'Office national desecurite sociale ait qualifie de regularisation en applicationde l'article 22 de la loi du 27 juin 1969 les notifications des13 juillet 2004 et 25 mars 2005, celles-ci constituentnecessairement, en ce qui concerne madame A. C., des decisionsd'assujettissement. C'est en effet parce que celle-ci netravaillait pas pour les besoins du menage [du demandeur] quel'exception au principe d'assujettissement prevue par l'article16 de l'arrete royal du 28 novembre 1969 n'etait pasapplicable ;

* Dans ces conditions, les decisions precitees devaient fairel'objet d'une motivation formelle, condition qui n'amanifestement pas ete respectee ;

* Ce constat n'exclut toutefois pas l'effet interruptif de laprescription des envois recommandes des 13 juillet 2004 et 25mars 2005 en application de l'article 42 de la loi du 27 juin1969 ;

* Les travaux preparatoires de la loi du 25 janvier 1999 portantdes dispositions sociales ayant complete l'article 42 sontlaconiques quant aux conditions de forme et de fond de cettelettre recommandee : `Il est propose, dans un souci desimplification, de creer la possibilite selon laquelle laprescription pour la creance, tant de l'Office national àcharge de l'employeur que de l'employeur à charge de l'Officenational, puisse egalement etre interrompue par lettrerecommandee, sauf dans les circonstances prevues dans le Codecivil' [...] ;

* Il suffit que la lettre recommandee manifeste la volonte ducreancier d'exercer son droit et d'obtenir le paiement de lacreance ;

* La prescription a ete valablement interrompue en ce qui concerneles cotisations des deuxieme, troisieme et quatrieme trimestresde l'annee 1999 et des quatre trimestres de l'annee 2000 et lacitation du 19 septembre 2006 est intervenue avant l'ecoulementdu nouveau delai de prescription de cinq ans ne à la suite dela lettre recommandee du 13 juillet 2004 ».

* Griefs

* 1. En vertu de l'article 42 de la loi du 27 juin 1969 revisantl'arrete-loi du 28 decembre 1944 concernant la securite socialedes travailleurs, tel qu'il est applicable en l'espece,

* « Les creances de l'Office national de securite sociale àcharge des employeurs assujettis à la presente loi et despersonnes visees à l'article 30bis se prescrivent par cinq ans.

* [...] La prescription des actions visees aux alineas 1er et 2est interrompue :

* 1DEG de la maniere prevue par les article 2244 et suivants duCode civil ;

* 2DEG par une lettre recommandee adressee par l'Office nationalde securite sociale à l'employeur ou par une lettre recommandeeadressee par l'employeur à l'office precite ;

* 3DEG par la signification de la contrainte visee à l'article 40».

* La prescription des actions en recouvrement de cotisationssociales est donc interrompue notamment « par une lettrerecommandee adressee par l'Office national de securite socialeà l'employeur ».

* 2. Il resulte de l'article 159 de la Constitution et du principegeneral du droit vise au moyen que les cours et tribunaux ont lepouvoir et le devoir de verifier la legalite interne et externedes actes administratifs invoques devant eux et de refuserd'appliquer les actes de l'administration qui se reveleraientillegaux.

* Il s'ensuit que, des lors que le juge constate qu'un acteadministratif n'est pas conforme à l'exigence de motivationformelle requise par la loi du 29 juillet 1991, il n'est paslegalement autorise à faire application de cet acte et à luireconnaitre un quelconque effet.

* 3. L'arret admet l'effet interruptif de la prescription desenvois recommandes des 13 juillet 2004 et 25 mars 2005 enapplication de l'article 42 de la loi du 27 juin 1969, tout enconstatant que les actes administratifs que constituent lesditsenvois recommandes sont depourvus de la motivation formelle etadequate requise par les articles 1er à 3 de la loi du 29juillet 1991 relative à la motivation formelle des actesadministratifs.

* 3. Il s'ensuit qu'en reconnaissant un effet interruptif de laprescription aux envois recommandes des 13 juillet 2004 et 25mars 2005 dont il constate cependant l'illegalite, l'arret

* 1DEG viole l'article 159 de la Constitution et le principegeneral du droit vise au moyen, et, en tant que de besoin, lesarticles 1er à 3 de la loi du 29 juillet 1991 relative à lamotivation formelle des actes administratifs, en faisantapplication d'actes administratifs illegaux auxquels il nepouvait reconnaitre aucun effet ;

* 2DEG viole, partant, l'article 42, specialement premier etdernier alineas, de la loi du 27 juin 1969 revisant l'arrete-loidu 28 decembre 1944 concernant la securite sociale destravailleurs, en refusant de constater la prescription del'action du defendeur alors que cette prescription n'avait pasete interrompue par un acte qui pouvait avoir effet et etait deslors acquise ;

3DEG ne justifie pas legalement sa decision (violation de toutes lesdispositions legales et du principe general du droit vise au moyen).

III. La decision de la Cour

XLVI. Aux termes de l'article 159 de la Constitution, les cours ettribunaux n'appliqueront les arretes et reglements generaux,provinciaux et locaux qu'autant qu'ils seront conformes auxlois.

XLVII. Les juridictions contentieuses ont, en vertu de cettedisposition, le pouvoir et le devoir de verifier la legaliteinterne et la legalite externe de tout acte administratifsur lequel est fondee une demande, une defense ou uneexception.

XLVIII. L'arret considere que les actes administratifs que ledefendeur a notifies au demandeur les 13 juillet 2004 et 25mars 2005 constituent « des decisionsd'assujettissement » devant, conformement à l'article 2de la loi du 29 juillet 1991 relative à la motivationformelle des actes administratifs, « faire l'objet d'unemotivation formelle » mais que cette « condition [...]n'a manifestement pas ete respectee ».

IL. En decidant que cette circonstance « n'exclut [...] pasl'effet interruptif de la prescription [de ces notifications][...] en application de l'article 42 de la loi du 27 juin 1969[revisant l'arrete-loi du 28 decembre 1944 concernant lasecurite sociale des travailleurs] » des lors que cettedisposition exige seulement que « la lettre recommandeemanifeste la volonte du creancier d'exercer son droit etd'obtenir le paiement de sa creance », l'arret, qui donneeffet, en ayant egard à leur teneur, à des actesadministratifs dont il constate l'illegalite, viole l'article159 de la Constitution.

L. Le moyen est fonde.

* Par ces motifs,

* * La Cour

* Casse l'arret attaque, sauf en tant qu'il rec,oit l'appel et ledit partiellement fonde ;

Ordonne que mention du present arret sera faite en marge de l'arretpartiellement casse ;

Reserve les depens pour qu'il soit statue sur ceux-ci par le juge dufond ;

Renvoie la cause, ainsi limitee, devant la cour du travail deBruxelles.

* Ainsi juge par la Cour de cassation, troisieme chambre, àBruxelles, ou siegeaient le president de section ChristianStorck, les conseillers Didier Batsele, Mireille Delange,Michel Lemal et Sabine Geubel, et prononce en audience publiquedu deux mai deux mille seize par le president de sectionChristian Storck, en presence de l'avocat general Jean MarieGenicot, avec l'assistance du greffier Fabienne Gobert.

+---------------------------------------+
| F. Gobert | S. Geubel | M. Lemal |
|------------+------------+-------------|
| M. Delange | D. Batsele | Chr. Storck |
+---------------------------------------+

* * 2 MAI 2016 S.15.0115.F/1



Références :

Origine de la décision
Date de la décision : 02/05/2016
Date de l'import : 17/05/2016

Numérotation
Numéro d'arrêt : S.15.0115.F
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2016-05-02;s.15.0115.f ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award