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29/09/2016 | BELGIQUE | N°C.16.0018.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 29 septembre 2016, C.16.0018.F


Cour de cassation de Belgique

Arret

* NDEG C.16.0018.F

* M. L. D.,

* demanderesse en cassation,

* representee par Maitre Johan Verbist, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Anvers, Amerikalei, 187/302, ou il estfait election de domicile,

* contre

BELFIUS BANQUE, societe anonyme dont le siege social est etabli àBruxelles, boulevard Pacheco, 44,

defenderesse en cassation,

* representee par Maitre Bruno Maes, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Bruxelles, rue de la Montagne, 11, ou il

est fait election de domicile,

* * en presence de

1. N. M.,

2. W. M.,

3. C. D.,

parties appelees en d...

Cour de cassation de Belgique

Arret

* NDEG C.16.0018.F

* M. L. D.,

* demanderesse en cassation,

* representee par Maitre Johan Verbist, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Anvers, Amerikalei, 187/302, ou il estfait election de domicile,

* contre

BELFIUS BANQUE, societe anonyme dont le siege social est etabli àBruxelles, boulevard Pacheco, 44,

defenderesse en cassation,

* representee par Maitre Bruno Maes, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Bruxelles, rue de la Montagne, 11, ou ilest fait election de domicile,

* * en presence de

1. N. M.,

2. W. M.,

3. C. D.,

parties appelees en declaration d'arret commun.

I. La procedure devant la Cour

Le pourvoi en cassation est dirige contre l'arret rendu le 14 juillet 2015par la cour d'appel de Bruxelles.

Le president de section Christian Storck a fait rapport.

Le premier avocat general Andre Henkes a conclu.

II. Le moyen de cassation

La demanderesse presente un moyen libelle dans les termes suivants :

Dispositions legales violees

* articles 1944, 2257 et 2262 du Code civil, l'article 2262 tel qu'iletait d'application avant sa modification par la loi du 10 juin 1998modifiant certaines dispositions en matiere de prescription ;

* en tant que de besoin, articles 2262bis, S: 1er, alinea 1er, du Codecivil et 10 de la loi du 10 juin 1998 modifiant certaines dispositionsen matiere de prescription.

Decisions et motifs critiques

Apres avoir decide que l'ancien delai trentenaire de droit commun (telqu'il etait d'application avant la loi du 10 juin 1998) doit etre appliquedans le cas present mais que ce delai a ete contractuellement reduit detrente à dix ans conformement à l'article 36 du reglement general desoperations de la banque, l'arret decide que l'action introduite par lademanderesse est prescrite aux motifs que :

« 11. Par le rec,u du 4 juillet 1984, il est precise que sont rec,ues`les valeurs suivantes', à savoir `un million de francs en bons de caisseun an à 9 p.c. echeance 16 juillet 1985' ;

Le delai de prescription a donc pris cours ce jour, soit le 4 juillet1984 ;

C'est en effet, s'agissant d'un depot - comme l'invoque d'ailleurs [lademanderesse] -, cette date qui constitue le fait generateur,c'est-à-dire le point de depart dudit delai de prescription, et nulautre ;

12. De plus, il est inoperant de se poser la question de l'incidenceeventuelle, sur le rec,u, de la formule pre-dactylographiee selon laquelle`le client est invite à s'assurer que l'ordre susmentionne a ete executedans les trente jours. Priere de demander à l'agent une preuve de cetteexecution', qui n'a pas de sens des lors qu'il s'agissait en realite d'undepot et non d'un quelconque ordre à executer par celui qui a rec,u lesvaleurs, soit le sieur M. ;

13. Il s'en deduit qu'en ayant lance citation le 26 septembre 1994, soitplus de dix ans apres la reception des bons de caisse et le delai prevu àl'article 36 du reglement general des operations, l'action mue par [lademanderesse] est prescrite ;

14. C'est vainement que [la demanderesse] soutient qu'il faut prendre enconsideration la date d'echeance des bons de caisse ;

Tout d'abord, ce faisant, la cour [d'appel] ne peut que constater que [lademanderesse] admet le point de vue de la cour en ce qu'elle considere quece qui fut remis consiste bien en des bons de caisse et non en unequelconque somme ;

Ensuite, ce n'est pas la date d'echeance des bons qui importe mais la datedu fait generateur, celle de la remise, du depot, et non d'une quelconqueecheance ».

Griefs

L'article 2262 du Code civil, tel qu'il etait d'application avant samodification par la loi du 10 juin 1998 modifiant certaines dispositionsen matiere de prescription, dispose que toutes les actions, tant reellesque personnelles, sont prescrites par trente ans, sans que celui quiallegue cette prescription soit oblige d'en rapporter un titre ou qu'onpuisse lui opposer l'exception deduite de la mauvaise foi.

Par la loi du 10 juin 1998, qui est entree en vigueur le 27 juillet 1998,le legislateur a ramene le delai de trente à dix ans pour les actionspersonnelles (article 2262bis, S: 1er, alinea 1er, du Code civil).L'article 10 de cette loi dispose à cet egard que, lorsque l'action apris naissance avant l'entree en vigueur de la loi, les nouveaux delais deprescription qu'elle institue ne commencent à courir qu'à partir de sonentree en vigueur. Toutefois, la duree totale du delai de prescription nepeut depasser trente ans.

Selon l'article 2257 du Code civil, la prescription ne court point àl'egard d'une creance qui depend d'une condition jusqu'à ce que lacondition arrive, à l'egard d'une action en garantie jusqu'à ce quel'eviction ait lieu, à l'egard d'une creance à jour fixe jusqu'à ce quece jour soit arrive.

Il suit des dispositions mentionnees ci-dessus que le delai deprescription de l'article 2262 ancien du Code civil - aussi bien que, en tant que de besoin, le delai de prescription de l'article 2262bis, S: 1er,alinea 1er, du Code civil - ne peut commencer à courir qu'à partir dujour ou nait le droit à l'action.

Le droit à l'action, sanctionnant une obligation, nait en regle au jourou cette obligation doit etre executee.

Dans le cas d'un contrat de depot, conformement à l'article 1944 du Codecivil, l'obligation de restitution du depositaire ne doit etre executeequ'apres que le contrat de depot a pris fin. Par consequent, laprescription du droit à l'action sanctionnant l'obligation de restitutionne peut commencer à courir qu'au moment ou le contrat de depot a prisfin.

L'arret constate que la defenderesse a rec,u les bons de caisse le 4juillet 1984. Il constate egalement qu'il s'agit d'un (contrat de) depotet que la date de la remise des bons de caisse constitue des lors le faitgenerateur du (contrat de) depot [lire : du delai de prescription].

En considerant que le delai de prescription de l'ancien article 2262 duCode civil (contractuellement abrege à dix ans) a pris cours le 4 juillet1984, à savoir la date de la remise des bons de caisse en depot quiconstitue aussi le fait generateur du contrat de depot, sans examiner àquel moment le contrat de depot a pris fin, alors que l'obligation derestitution du depositaire ne doit etre executee qu'apres que le contratde depot a pris fin et que, par consequent, la prescription d'un tel droità l'action ne peut pas davantage commencer à courir avant ce moment,l'arret viole les articles 1944 et 2257 du Code civil, l'article 2262ancien de ce code et, en tant que de besoin, les articles 2262bis, S:1er, alinea 1er, du meme code et 10 de la loi du 10 juin 1998 modifiantcertaines dispositions en matiere de prescription.

* III. La decision de la Cour

IX. X. Il resulte de l'article 2257 du Code civil que laprescription, qui est une defense opposee à une action tardive,ne peut prendre cours avant que cette action soit nee.

XI. L'action sanctionnant une obligation nait, en regle, au jour oucette obligation doit etre executee et ne se prescrit, des lors,qu'à partir de ce moment.

XII. L'arret considere que l'action de la demanderesse contre ladefenderesse tend, dans la mesure de ses droits successoraux, àla restitution de la contre-valeur de bons de caisse venant àecheance le 16 juillet 1985 que sa mere avait remis en depot le4 juillet 1984 à l'auteur des deux premieres parties appeleesen declaration d'arret commun, agent du Credit communal deBelgique.

XIII. Il enonce que le delai de prescription de cette action, fixe àtrente ans par l'article 2262 du Code civil en vigueur àl'epoque, a ete contractuellement reduit à dix ans.

XIV. En considerant, pour dire prescrite l'action formee par lacitation du 26 septembre 1994, que c'est, « s'agissant d'undepot », le jour de la remise des valeurs litigieuses audepositaire « qui constitue [...] le point de depart du [...]delai de prescription », sans examiner quand est neel'obligation de restitution de celui-ci, l'arret viole l'article2257 du Code civil.

XV. Le moyen est fonde.

XVI. Et la defenderesse a interet à ce que le present arret soitdeclare commun aux parties qu'elle a appelees à la cause devantla Cour à cette fin.

Par ces motifs,

* La Cour

* * Casse l'arret attaque ;

* Declare le present arret commun à N. M., W. M. et C. D. ;

* Ordonne que mention du present arret sera faite en marge del'arret casse ;

* Reserve les depens pour qu'il soit statue sur ceux-ci par le jugedu fond ;

* Renvoie la cause devant la cour d'appel de Mons.

* Ainsi juge par la Cour de cassation, premiere chambre, àBruxelles, ou siegeaient le president de section ChristianStorck, president, le president de section Martine Regout, lesconseillers Didier Batsele, Mireille Delange et Michel Lemal, etprononce en audience publique du vingt-neuf septembre deux milleseize par le president de section Christian Storck, en presencedu premier avocat general Andre Henkes, avec l'assistance dugreffier Patricia De Wadripont.

+-------------------------------------------+
| P. De Wadripont | M. Lemal | M. Delange |
|-----------------+-----------+-------------|
| D. Batsele | M. Regout | Chr. Storck |
+-------------------------------------------+

* * 29 Septembre 2016 C.16.0018.F/2


Synthèse
Numéro d'arrêt : C.16.0018.F
Date de la décision : 29/09/2016

Origine de la décision
Date de l'import : 20/10/2016
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2016-09-29;c.16.0018.f ?
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