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12/12/2016 | BELGIQUE | N°S.13.0022.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 12 décembre 2016, S.13.0022.F


Cour de cassation de Belgique

Arret

NDEG S.13.0022.F

OFFICE NATIONAL DE L'EMPLOI, etablissement public dont le siege est etablià Bruxelles, boulevard de l'Empereur, 7,

demandeur en cassation,

represente par Maitre Paul Alain Foriers, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Bruxelles, avenue Louise, 149, ou il estfait election de domicile,

contre

J. C. M.,

defendeur en cassation,

represente par Maitre Jacqueline Oosterbosch, avocat à la Cour decassation, dont le cabinet est etabli à Liege, rue de Chaudfontai

ne, 11,ou il est fait election de domicile.

I. La procedure devant la Cour

Le pourvoi en cassation est d...

Cour de cassation de Belgique

Arret

NDEG S.13.0022.F

OFFICE NATIONAL DE L'EMPLOI, etablissement public dont le siege est etablià Bruxelles, boulevard de l'Empereur, 7,

demandeur en cassation,

represente par Maitre Paul Alain Foriers, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Bruxelles, avenue Louise, 149, ou il estfait election de domicile,

contre

J. C. M.,

defendeur en cassation,

represente par Maitre Jacqueline Oosterbosch, avocat à la Cour decassation, dont le cabinet est etabli à Liege, rue de Chaudfontaine, 11,ou il est fait election de domicile.

I. La procedure devant la Cour

Le pourvoi en cassation est dirige contre l'arret rendu le 8 novembre 2012par la cour du travail de Liege.

Le 8 novembre 2016, l'avocat general Jean Marie Genicot a depose desconclusions au greffe.

Le conseiller Mireille Delange a fait rapport et l'avocat general JeanMarie Genicot a ete entendu en ses conclusions.

II. Le moyen de cassation

Le demandeur presente un moyen libelle dans les termes suivants :

Dispositions legales violees

- articles 44, 45, alinea 1er, 1DEG, et dernier alinea, 48, S: 1er,specialement 1DEG, 71, 4DEG, 153, 154, alinea 1er, et 169, alinea 1er, del'arrete royal du 25 novembre 1991 portant reglementation du chomage, cesarticles dans leurs versions tant anterieure que posterieure à l'arreteroyal du 29 juin 2000, les articles 45 et 48 etant egalement vises dansleur version posterieure à l'arrete royal du 28 juillet 2006 ;

- article 14, specialement S: 1er, de l'arrete royal du 7 decembre 1992relatif à l'octroi d'allocations de chomage en cas de prepensionconventionnelle ;

- articles 1er et 2, S: 1er, de l'arrete ministeriel du 23 decembre 1992portant activites non remunerees et activites professionnelles autoriseesaux prepensionnes.

Decisions et motifs critiques

Reformant le jugement entrepris, l'arret met à neant les decisions dudemandeur des 11 juin 2010 et 1er decembre 2010, la premiere ayant exclule defendeur du benefice des allocations de chomage du 1er juin 1998 au 31mai 2010, recupere les allocations indument perc,ues et exclu le defendeurdu droit aux allocations à partir du 1er juin 2010 et la seconde refusantde l'admettre au benefice des allocations à partir du 18 juin 2010.

Apres avoir considere que :

« [Le defendeur] est ne le 25 avril 1946.

Depuis le 1er avril 1966, il travaillait au sein des Mutualitesprofessionnelles de Liege. Le 1er novembre 1992, il devient,parallelement à sa fonction de salarie, l'administrateur delegue à titregratuit de la societe cooperative à responsabilite limitee Voyages Lignebleue dont il detient une part sur 32.300. [Le defendeur] decritl'activite de la societe comme une activite commerciale consistant en lagestion d'une agence de voyage dans un but de service et non de lucre. Ils'est affilie à titre accessoire à la securite sociale des travailleursindependants mais il est dispense de cotiser.

Il decrira son activite au sein de la societe cooperative en la signaturede contrats, en la presidence de l'assemblee generale, une fois par an, eten un examen prealable à cette assemblee des comptes examines dejà parun reviseur. Il souligne la presence dans la societe d'une directricefinanciere. Il precise etre parfois appele au service du personnel de lamutuelle qui gere les dossiers pour certaines operations particulieres,telles la signature des contrats, et ceci en journee. Ses activites luiprenaient cinq fois par an un quart d'heure. Il ajoutera par apres qu'ilexaminait regulierement les comptes, signait regulierement tous lesdocuments officiels et presidait le conseil d'administration, le tout àtitre gratuit.

Les Mutualites professionnelles de Liege ont ete reorganisees, avec pourconsequence que [le defendeur] fut licencie en 1998 et que le contrat apris fin au 31 mai de cette annee-là. Sur le formulaire C1 du 1er juin1998, il repond par `non' à la question :`Exercez-vous une activiteindependante, une profession accessoire ou aidez-vous un independant ?'.

Il a alors ete admis au benefice d'une prepension conventionnelle le 1erjuin 1998 [...].

[Le defendeur] declarera qu'il n'avait jamais pense que son mandat àtitre gratuit dans la societe cooperative aurait du etre declare sur leformulaire C1 ».

L'arret fonde sa decision sur ce que :

« Le probleme au centre du present litige provient du fait que [ledefendeur] a exerce une activite gratuite d'administrateur d'une societedont il possede une part alors qu'il etait prepensionne.

Logiquement, l'arrete royal du 7 decembre 1992 relatif à l'octroid'allocations de chomage en cas de prepension conventionnelle, etspecialement son article 14, et l'arrete ministeriel du 23 decembre 1992portant activites non remunerees et activites professionnelles autoriseesaux prepensionnes devraient trouver à s'appliquer au present litige.

Ces dispositions legales n'apparaissent cependant nullement dans ledossier administratif et n'ont apparemment joue aucun role dans laprocedure administrative, ce que [le defendeur] n'a pas manque de souleveren termes de conclusions et ceci à plusieurs niveaux.

[Le demandeur] n'a pas repondu à cette argumentation quant à cesdispositions legales et la problematique y afferente.

L'affaire ayant ete fixee sur la base de l'article 747, S: 2, du Codejudiciaire et [le demandeur] ayant eu l'occasion de repondre auxconclusions [du defendeur] , la cour [du travail] estime inutiled'ordonner une reouverture des debats. [Elle] tranchera le litige sur labase des elements dont elle dispose.

La cour [du travail] suit [le demandeur] en ce qu'il estime que l'activiteexercee par [le defendeur], soit administrateur delegue d'une societecommerciale dont il possede des parts, est une activite pour son proprecompte (Cass., 3 janvier 2005, www.juridat.be).

En ce qui concerne les àctivites pour son propre compte' d'unprepensionne, le Guide social permanent rappelle, sous `le statut duprepensionne' (Partie I, Livre IV, Titre V, Chapitre I - 2740 et 2750),en se basant sur l'arrete royal du 7 decembre 1992 relatif à l'octroid'allocations de chomage en cas de prepension conventionnelle et l'arreteministeriel du 23 decembre 1992 portant activites non remunerees etactivites professionnelles autorisees aux prepensionnes, bien applicablesen l'espece, que : `Toute forme d'activite non remuneree relative auxbiens propres, y compris notamment les travaux d'entretien, dedemenagement et de plus-value apportes à ces biens, est autorisee meme sicette activite peut etre integree dans le circuit des echanges economiquesde biens et de services. Cette activite n'est pas consideree comme untravail pour la reglementation du chomage. Un prepensionne pourrait ainsiconstruire une annexe à son habitation. Toute activite non remunereepour son propre compte, autre que la gestion des biens propres, peutegalement etre exercee par le prepensionne sans qu'aucune forme dedeclaration prealable soit exigee'.

L'activite exercee par [le defendeur] etait bien autorisee ».

Griefs

« Le chomeur qui exerce à titre accessoire une activite au sens del'article 45 [...] peut, moyennant l'application de l'article 130 »,beneficier d'allocations à la condition « notamment qu'il en fasse ladeclaration lors de sa demande d'allocations » (article 48, S: 1er, 1DEG,de l'arrete royal du 25 novembre 1991) et qu'il fasse inscrire cetteactivite sur sa carte de controle (article 71, 4DEG, de l'arrete royal du25 novembre 1991).

Le chomeur qui fait une declaration inexacte ou incomplete ou omet defaire une declaration qui lui incombe (article 153 de l'arrete royal du 25novembre 1991) ou celui qui ne satisfait pas à l'article 71, 4DEG, del'arrete royal du 25 novembre 1991 (article 154, alinea 1er, 1DEG, du memearrete) peut etre exclu du benefice des allocations lorsqu'il a perc,uindument des allocations en raison de ces manquements (articles 153 et 154de l'arrete royal precite).

Toute somme indument perc,ue par un chomeur peut par ailleurs etrerecuperee par l'Office national de l'emploi (article 169 de l'arrete royaldu 25 novembre 1991).

Premiere branche

Aux termes de l'article 44 de l'arrete royal du 25 novembre 1991 portantreglementation du chomage, pour pouvoir beneficier des allocations, lechomeur doit etre prive de travail et de remuneration par suite decirconstances independantes de sa volonte.

En vertu de l'article 45, alinea 1er, 1DEG, de cet arrete, est considerecomme travail, pour l'application de l'article 44, l'activite effectueepour son propre compte qui peut etre integree dans le courant des echangeseconomiques de biens et de services et qui n'est pas limitee à la gestionnormale des biens propres.

L'article 45, dernier alinea, du meme arrete dispose que, pourl'application de l'alinea 1er, 1DEG, une activite n'est consideree commelimitee à la gestion normale de biens propres que s'il est satisfaitsimultanement à trois conditions dont la premiere est de n'etre pasreellement integree dans le courant des echanges economiques de biens etde services et de n'etre pas exercee dans un but lucratif (article 45,dernier alinea, 1DEG).

L'exercice du mandat d'administrateur d'une societe commerciale exploitantune agence de voyage constitue une activite effectuee pour son proprecompte au sens de l'article 45, alinea 1er, 1DEG, de l'arrete royal du 25novembre 1991.

Pareille activite, qui est integree dans le courant des echangeseconomiques de biens et de services, est exercee dans un but lucratif memesi elle ne procure pas de revenus ; elle n'est des lors pas une activitelimitee à la gestion normale des biens propres au sens de l'article 45,premier et dernier alineas, de cet arrete.

L'arret, qui constate que le defendeur, qui beneficiait d'une prepensionconventionnelle, exerc,ait neanmoins un mandat d'administrateur delegue àtitre gratuit d'une societe commerciale (societe Voyages Ligne bleue) dontil possedait une part et n'avait pas declare ce mandat sur le formulaireC1 du 1er juin 1998, ne justifie legalement ni sa decision que cetteactivite etait autorisee (violation des articles 44 et 45, specialementalinea 1er, 1DEG, et dernier alinea, 1DEG, de l'arrete royal du 25novembre 1991 vise au moyen) ni, des lors, sa decision d'annuler desdecisions administratives critiquees et de retablir le defendeur dans lesdroits dont celles-ci l'avaient prive (violation de toutes lesdispositions de l'arrete royal du 25 novembre 1991 visees au moyen).

Seconde branche

L'arret souligne que le demandeur n'a pas repondu à l'argumentationdeduite de l'article 14 de l'arrete royal du 7 decembre 1992 et del'arrete ministeriel du 23 decembre 1992 vises au moyen et se fonde surces dispositions pour decider que l'activite du defendeur etait autorisee.

Or, ces dispositions etaient inapplicables en l'espece et le demandeurn'avait des lors pas à s'en expliquer.

Les articles 1er et 2 de l'arrete ministeriel du 23 decembre 1992 ont eneffet trait à l'application de l'article 14 de l'arrete royal du 7decembre 1992, lequel etait inapplicable puisqu'il vise l'exercice par leprepensionne d'une activite pour son propre compte et sans but lucratif etque l'activite exercee par le defendeur, et dont l'arret admet qu'ellel'etait pour son propre compte, etait exercee dans un but lucratif, ainsique le demontre la premiere branche du moyen.

Il suit de là qu'en decidant que l'activite du defendeur etait bienautorisee en vertu des dispositions visees au moyen de l'arrete royal du 7decembre 1992 et de l'arrete ministeriel du 23 decembre 1992, alors queces dispositions etaient inapplicables, l'arret :

1DEG viole lesdites dispositions de l'arrete royal du 7 decembre 1992 etde l'arrete ministeriel du 23 decembre 1992 ;

2DEG viole les dispositions de l'arrete royal du 25 novembre 1991 viseesen tete du moyen (et plus specialement les articles 44 et 45 de cetarrete) d'ou il resulte, ainsi que le demontre la premiere branche dumoyen, que l'activite du defendeur n'etait pas autorisee et ne pouvaitetre cumulee avec les allocations de chomage.

III. La decision de la Cour

Quant à la premiere branche :

Aux termes de l'article 44 de l'arrete royal du 25 novembre 1991 portantreglementation du chomage, pour pouvoir beneficier d'allocations, lechomeur doit etre prive de travail et de remuneration par suite decirconstances independantes de sa volonte.

En vertu de l'article 45, alinea 1er, 1DEG, de cet arrete, est considereecomme travail, pour l'application de l'article 44, l'activite effectueepour son propre compte qui peut etre integree dans le courant des echangeseconomiques de biens et de services et qui n'est pas limitee à la gestionnormale des biens propres.

L'article 45, dernier alinea, du meme arrete dispose que, pourl'application de l'alinea 1er, 1DEG, une activite n'est consideree commelimitee à la gestion normale des biens propres que s'il est satisfaitsimultanement à trois conditions dont la premiere est de n'etre pasreellement integree dans le courant des echanges economiques de biens etde services et de n'etre pas exercee dans un but lucratif.

L'exercice du mandat d'administrateur d'une societe commerciale constitueune activite effectuee pour son propre compte au sens de l'article 45,alinea 1er, 1DEG, de l'arrete royal du 25 novembre 1991.

La circonstance qu'elle ne procure pas de revenus ne suffit pas à exclureque pareille activite soit exercee dans un but lucratif.

L'arret constate que le demandeur, qui « travaillait au sein desMutualites professionnelles de Liege », n'a, lorsqu'il « a ete admis aubenefice d'une prepension conventionnelle le 1er juin 1998 », pas declaredans sa demande d'allocations qu'il exerc,ait, « parallelement à safonction de salarie », le mandat d'« administrateur delegue à titregratuit de la societe cooperative à responsabilite limitee Voyages Lignebleue, dont il detient une part sur 32.300 ».

L'arret, qui admet que ce mandat est une activite exercee pour son proprecompte au sens de l'article 45, alinea 1er, 1DEG, de l'arrete royal du 25novembre 1991, n'a pu, sans violer les dispositions reglementairesprecitees, decider, au seul motif que cette activite n'etait pasremuneree, qu'elle constituait une activite limitee à la gestion normaledes biens propres.

Quant à la seconde branche :

En vertu de l'article 14, S: 1er, alinea 1er, de l'arrete royal du 7decembre 1992 relatif à l'octroi d'allocations de chomage en cas deprepension conventionnelle, une activite relative aux biens propres quipeut etre integree dans le courant des echanges economiques de biens et deservices n'est, lorsqu'elle est effectuee pour son propre compte et sansbut lucratif par un travailleur auquel s'applique cet arrete, pasconsideree comme une activite professionnelle au sens de l'article 45,alinea 1er, 1DEG, de l'arrete royal du 25 novembre 1991.

L'arret, qui ne decide pas legalement que l'activite du defendeur etaitexercee sans but lucratif, ne justifie des lors pas legalement sa decisionde faire droit à son recours par application dudit arrete royal du 7decembre 1992 et de l'arrete ministeriel du 23 decembre 1992 portantactivites non remunerees et activites professionnelles autorisees auxprepensionnes.

Le moyen, en chacune de ses branches, est fonde.

Par ces motifs,

La Cour

Casse l'arret attaque, sauf en tant qu'il joint les causes et rec,oit lesappels ;

Ordonne que mention du present arret sera faite en marge de l'arretpartiellement casse ;

Vu l'article 1017, alinea 2, du Code judiciaire, condamne le demandeur auxdepens ;

Renvoie la cause, ainsi limitee, devant la cour du travail de Mons.

Les depens taxes à la somme de trois cent soixante-neuf euroscinquante-neuf centimes envers la partie demanderesse et à la somme decent vingt-trois euros soixante-trois centimes envers la partiedefenderesse.

Ainsi juge par la Cour de cassation, troisieme chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le president de section Christian Storck, les conseillers KoenMestdagh, Mireille Delange, Antoine Lievens et Eric de Formanoir, etprononce en audience publique du douze decembre deux mille seize par lepresident de section Christian Storck, en presence de l'avocat generalJean Marie Genicot, avec l'assistance du greffier Lutgarde Body.

+--------------------------------------------+
| L. Body | E. de Formanoir | A. Lievens |
|------------+-----------------+-------------|
| M. Delange | K. Mestdagh | Chr. Storck |
+--------------------------------------------+

12 DECEMBRE 2016 S.13.0022.F/11



Références :

Origine de la décision
Date de la décision : 12/12/2016
Date de l'import : 18/01/2017

Numérotation
Numéro d'arrêt : S.13.0022.F
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2016-12-12;s.13.0022.f ?
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