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21/01/1970 | BéNIN | N°2

Bénin | Bénin, Cour suprême, Chambre administrative, 21 janvier 1970, 2


Recours pour excès de pouvoir - Fonction publique - Personnels militaires - Gestion de carrière - Compétence du Chef de l'Etat Décision du Ministre chargé de la fonction publique - Incompétence - Violation de la loi - Annulation.

Est entaché d'excès de pouvoir et mérite donc annulation la décision portant admission d'office à al retraite d'un officier des Forces armées dahoméennes, ladite décision étant prise par le ministre chargé de la Fonction publique alors que la loi ne lui en donne pas compétence et qu'il n'est pas non plus délégataire des pouvoirs du Président

de la République en matière de gestion de carrière des personnels milita...

Recours pour excès de pouvoir - Fonction publique - Personnels militaires - Gestion de carrière - Compétence du Chef de l'Etat Décision du Ministre chargé de la fonction publique - Incompétence - Violation de la loi - Annulation.

Est entaché d'excès de pouvoir et mérite donc annulation la décision portant admission d'office à al retraite d'un officier des Forces armées dahoméennes, ladite décision étant prise par le ministre chargé de la Fonction publique alors que la loi ne lui en donne pas compétence et qu'il n'est pas non plus délégataire des pouvoirs du Président de la République en matière de gestion de carrière des personnels militaires.

N°2 du 21 janvier 1971

Philippe AHO

Vu la requête enregistre le 27 juillet 1968 au Greffe de la Cour Suprême et émanant du sieur AHO Philippe, colonel des forces armées Dahoméennes, domicile élu en l'Etude de Maître Benjamin d'ALMEIDA, Avocat défenseur, son conseil, ladite requête tendant à l'annulation pour incompétence, excès de pouvoir et violation de la loi de la décision implicite de rejet opposée par le Ministre de la Fonction Publique du Travail et du Tourisme à son recours gracieux contre l'arrêt N°010/MFPTT/MFAEP/DC précité, l'on constate que: le Ministre de la fonction publique a agit dans le cadre des pouvoirs qui lui ont été délégués par le Président de la République conformément au décret N°165/PR/MPTTT du 26 mai 1967;

Qu'aux termes du décret susvisé les pouvoir dévolus au Président de la République, Chef du Gouvernement, en matière d'administration du personnel de l'Etat, tels qu'ils sont définis par la loi N°59-21 du 31 août 1959 portant statut général de la fonction publique et le décret N°59-218 du 15 décembre 1959 portant application du statut général de la fonction publique; que ce texte n'a pas pu donner compétence au Ministre de la fonction Publique en ce qui concerne les décisions intéressant les personnels militaires des Forces Armées Dahoméennes; dispose en son article 2:'' compte tenu du caractère particulier de la fonction militaire des devoirs, missions, obligations et restrictions de droit qu'elle comporte, le statut général de la fonction publique ne lui est pas applicable, sauf dispositions expresses''; que l'ordonnance N°32/PR du 2 septembre 1967, susvisée, postérieure au décret N°163/PR/MFPTT au 26 1967, stipule expressément en ses articles 16 et suivants que le grade d'Officier est conféré par le président de la République sur proposition du Ministre Défense Nationale, de même que toutes les décisions concernant les positions de l'Officier (activité - disponibilité - non activité - réforme - retraite) sont décidées par le Président de la République sur rapport du Ministre de la Fonction Publique n'est pas compétent pour prendre des décisions en ce qui concerne les personnels militaires des forces Armées. Dahoméennes et n'a pas reçu délégation des pouvoirs au Président de la République à cet effet; qu'il en résulte qu'en signant le décision N°010/MFPTT/DC LE Ministre de la Fonction Publique excédé ses pouvoirs et que cette décision doit être annulée parce qu'entachée d'excès de pouvoir; que par ailleurs la décision susvisée doit être également annulée parce que prise en violation de la loi et des textes réglementaires en vigueur; qu'en effet l'ordonnance N°1/PR/MFAEP/DS du 4 janvier 1968 portant loi des Finances pour la gestion 1968 dispose en son article 23 que les ''Magistrats, les membres de la Cour Suprême, les fonctionnaires de l'Etat et les militaires qui réuniront en 1968 le nombre d'années de service requis pour prétendre à une pension et qui n'ont pas atteint la limite d'âge de leur catégorie sont admis à faire valoir leur droit à la retraite '''; Que l'article12 alinéa 1er de l'ordonnance N°63/PD du 28 décembre 1966 portant Code des pensions civiles et militaires dispose par ailleurs que:'' le droit à pension d'ancienneté est acquis par les militaires effectifs. Les militaires ayant accompli 25 ans de service peuvent être mis à la retraite d'office sans condition de limite d'âge dans les 3 cas prévus pour les fonctionnaires à l'article 4'': savoir,

avoir été reconnu hors d'état de continuer ses fonctions après avis de la commission réforme prévue à l'article 25 ou présent code;

avoir été licencié pour insuffisance professionnelle à condition de n'avoir commis aucune faute dans l'exercice de ses fonctions;

avoir été licencié pour suppression d'emploi;

Qu'il résulte clairement la combinaison des ordonnances N°1/PR/MFAEP/DB du 14 janvier 1968 et N°63/PR du 28 décembre 1966: que le militaire ayant accompli 25 ans de services effectifs mais n'ayant pas atteint la limite d'âge de sa catégorie est admis à faire valoir des droits à la retraite, mais peut être mis d'office à la retraite après 25 ans de service et sans limitation d'âge dans les 3 cas susvisés;

qu'il n'a pas demandé à faire valoir ses droits à la retraite

qu'il est né le 17 juillet 1914, et ne totalise pas encore 58 ans d'âge, que la limite d'âge pour un colonel en service est fixée à 38 ans conformément à l'article 48 de l'ordonnance N°32/PR du 28 septembre 1967 portant statut général des forces Armées Dahoméennes;

Qu'il n'a pas été reconnu hors d'état de continuer ses fonctions, ni licencié pour insuffisance professionnelle, ni licencié par suppression d'emploi; qu'en conséquence sa mise à la cié par suppression d'emploi; qu'en conséquence sa mise à la retraite d'office est illégal à la décision N°010/MFPTT/MFAEP/DB doit être annulée parce que prise en violation des textes réglementaires;

Vu, enregistré comme ci-dessus, le 19 novembre 1968, le mémoire de l'Etat Dahoméen tendant au rejet de la requête par les moyens que le gouvernement se rapporte à la sagesse de la Cour quant au moyen tiré de l'incompétence; Que les deux conditions exigées par l'article 12 alinéa 2 de l'ordonnance N°63/PR du 29 décembre 1966 portant code des pensions militaires de retraite sont cumulatives et non alternatives: les militaire ayant accompli 25 ans de service peuvent être mis à la retraite d'office dans les trois cas prévus à l'article 4;

Qu'il s'ensuit que pour être mis à la retraite d'office, il faut non seulement avoir 25 ans de service, mais aussi être reconnu inapte à continuer ou être licencié pour insuffisance ou par suppression d'emploi; qu'à ces deux textes, (statut général des FAD et code des pensions) vient s'ajouter la loi de finances de 1960 (-ordonnance N°/PR du 4 janvier 1968); qu'aux termes de l'article 23 de cette ordonnance, ''les militaires qui réunissent en 1968, le nombre d'années de service requis pour prétendre à une pension d'ancienneté (soit 25 ans) et qui n'ont pas atteint la limite d'âge de leur catégorie (fixée à 57 ans pour un colonel) seront admis à la retraite; que ce texte s'applique au cas du colonel AHO puisqu'il totalise plus de 25 ans de service et que par ailleurs il a moins de 57 ans d'âge; que le conflit se situe donc dans l'interprétation de la formule ''seront admis à la retraite''; que le requérant considère la formule comme lui donnant une faculté; que le texte s'entendrait, selon lui, de la manière suivante: ''seront admis à faire valoir leur droit à la retraite''; qu'il s'ensuivrait, toujours selon lui, que les personnes visées ne peuvent être à la retraite que sur leur demande; qu'à ce sujet le requérant écrit qu'il n'a pas demandé à faire valoir ses droits à la retraie; que cette interprétation n'est conforme ni a l'esprit, ni à la lettre du texte; que la formule ''seront admis à la retraite'' doit être entendue comme conférant à l'administration l'initiative de la mise à la retraite, et ce concurremment avec l'intéressé; qu'en effet , il n'est nullement antinomique qu'un égale pouvoir d'initiative soit reconnu à l'intéressé et à l'administration prendra l'initiative s'il estime que la retraite est nécessaire à ses intérêts personnels; que la jurisprudence du Conseil d'Etat a déjà tranché ce genre de litige en plusieurs occasions. Ce conseil d'Etat était, comme dans le cas d'espèce, placé dans l'hypothèse où un agent a été mis à la retraite sans l'avoir demandé alors qu'il n'avait pas encore la limite d'âge, mais remplissait les conditions d'ouverture du droit à pension d'ancienneté;

Le conseil d'Etat a , dans ces cas, reconnu la validité de principe de la mise à la retraite d'office; que le conseil d'Etat n'annule la décision que si la mise à la retraite a pris un caractère disciplinaire; il exige alors une communication préalable de son dossier à l'intéressé; qu'il n'y a pas d'annulation lorsque la décision est prise, comme dans le cas du Colonel AHO, dans l'intérêt du service.

En conséquence, et pour le cas où la Cour admettrait la compétence du Ministre qui a prononcé la décision, le gouvernement conclut à ce que soit rejeté le moyen tiré de la violation de l'ordonnance N°1/PR du 4 janvier 1968.

Vu, enregistré comme ci-dessus, le 18 janvier 1969 le mémoire en réplique de Maître Angelo, Avocat défenseur, substituant Maître d'ALMEIDA pour le compte du requérant tendant aux mêmes fins par les mêmes motifs et ensuite par les moyens que l'interprétation de l'Etat Dahoméen quant au terme:''seront admis à la retraite», est insoutenable car pour être admis au bénéfice d'un droit il faut d'abord avoir postulé ce droit, qu'on ne peut admettre un fonctionnaire à l'exercice d'un droit contre son gré; qu'au surplus le Colonel AHO a été mis d'office à la retraite comme il est précisé à l'arrêté N°010/MFPTT cité plus haut et non pas admis à faire valoir ses droits à la retraite; que la jurisprudence rapportée par l'Etat Dahoméen en la cause est inopérante;

Vu, enregistré comme ci-dessus, le 18 février 1969 le mémoire en réplique que l'Etat Dahoméen, tendant aux mêmes fins, par les mêmes moyen;

..................................................................................................................

Vu les autres pièces produites et jointes au dossier;

Vu l'ordonnance N°21/PR du 26 avril 1966 portant composition, organisation, fonctionnement et attributions de la Cour Suprême;

Ouï à l'audience publique du mercredi vingt et un janvier mil neuf cent soixante dix, Monsieur le conseil BOUSSARI en son rapport,

Monsieur le Procureur Général AINADOU en ses conclusions se rapportant à justice,

Et après en avoir délibéré conformément à la loi;

Sur l'unique moyen tiré de l'incompétence du Ministre de la Fonction Publique à décider de la retraite du requérant;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi

D E C I D E:

ARTICLE 1er.- L'arrêt N°010/MAEPT/D-3 en date du 31 janvier 1968 du Ministre de la Fonction Publique, du Travail et du Tourisme est annulée en ce qui concerne le sieur AHO Philippe, Colonel des Forces Armées Dahoméennes.

ARTICLE 2.- Les dépens sont mis à la charge du Trésor public;

ARTICLE 3.- Notre modification du présent arrêt sera faite aux parties.

Ainsi fait et délibéré par la Cour Suprême (Chambre Administrative) composée de Messieurs:

Louis IGNACIO-PINTO - Président de la Cour Suprême - PRESIDENT

Corneille Taofiqui BOUSSARI et Grégoire GBENOU, CONSEILLERS

Et ont prononcé à l'audience publique du mercredi vingt et un janvier mil neuf cent soixante dix. La chambre étant composée comme il est dit ci-dessus en présence de:

Monsieur Cyprien AINANDOU PROCUREUR GENERAL

ET MAÏTRE Honoré GERO AMOUSSOUGA GREFFIER

Et ont signé:

LE PRESIDENT LE RAPPORTEUR LE GREFFIER

Louis IGNACIO-PINTO Corneille. BOUSSARI H. GERO AMOUSSOUGA


Synthèse
Formation : Chambre administrative
Numéro d'arrêt : 2
Date de la décision : 21/01/1970

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;bj;cour.supreme;arret;1970-01-21;2 ?
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