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22/12/1978 | BéNIN | N°10

Bénin | Bénin, Cour suprême, Chambre judiciaire, 22 décembre 1978, 10


N° 10/CJA du Répertoire

N° 74-13/CJA du Greffe

Arrêt du 22 Décembre 1978

El Hadj Soulé Sadikou Olaofè
c/
DOHOU François


Vu la déclaration du 31 Juillet 1973 au Greffe de la Cour d'Appel de Cotonou, par laquelle Maître FELIHO, avocat à la Cour, a élevé au nom et pour le compte de son client El Hadj Soulé Olaofè contre l'arrêt n° 39/73 du 25 Juillet 1973 rendu par la Chambre de Droit Traditionnel;

Vu la transmission du dossier à la Cour Suprême;

Vu l'arrêt attaqué;

Ensemble les mémoires ampliatifs et en défense des

18 Août 1976 et 26 Février 1977 de Maître conseil du requérant, et de DOHOU François défendeur au présent pourvoi;

Vu l...

N° 10/CJA du Répertoire

N° 74-13/CJA du Greffe

Arrêt du 22 Décembre 1978

El Hadj Soulé Sadikou Olaofè
c/
DOHOU François

Vu la déclaration du 31 Juillet 1973 au Greffe de la Cour d'Appel de Cotonou, par laquelle Maître FELIHO, avocat à la Cour, a élevé au nom et pour le compte de son client El Hadj Soulé Olaofè contre l'arrêt n° 39/73 du 25 Juillet 1973 rendu par la Chambre de Droit Traditionnel;

Vu la transmission du dossier à la Cour Suprême;

Vu l'arrêt attaqué;

Ensemble les mémoires ampliatifs et en défense des 18 Août 1976 et 26 Février 1977 de Maître conseil du requérant, et de DOHOU François défendeur au présent pourvoi;

Vu les autres pièces du dossier;

Vu l'ordonnance n° 21/PR du 26 Avril 1966 portant organisation de la Cour Suprême;

Oui à l'audience publique du Vendredi vingt deux Décembre mil neuf cent soixante dix huit, le conseiller Maurille CODJIA en son rapport;

Oui le Procureur Général Grégoire GBENOU en ses conclusions;

Et après en avoir délibéré conformément à la loi;

Attendu que par déclaration au Greffe de la Cour d'Appel en date du 31 Juillet 1973, Maître FELIHO, Avocat à la Cour, a élevé au nom et pour le compte de son client El Hadj Soulé Olaofè le présent pourvoi contre les dispositions de l'arrêt n° 39/73 rendu le 25 Juillet 1973 par la Chambre de Droit Traditionnel de la Cour d'Appel dans l'affaire l'opposant à DOHOU François;

Attendu que le dossier de la procédure a été transmis au Procureur Général près la Cour Suprême par bordereau n° 2158/PG du 8 Juillet 1974 et enregistré au Greffe de la Cour Suprême le 10 Juillet 1974 s/n°475/G CS;

Attendu que par lettre de mise en demeure n° 857/GCS du 24 Juillet 1974, Maître FELIHO était invité à observer les prescriptions des articles 42 et 45 avec un délai de deux mois pour produire ses moyens de cassation;

Que ce dernier sollicitait par lettre datée du 30 Septembre 1974 une prolongation de délai qui lui fut accordée par lettre n° 1097/GCS du 18 Novembre 1974;

Que la 15 Janvier 1975, il consignait une somme de 5 000 francs à titre de caution;

Attendu que DOHOU a fait parvenir à la Cour son mémoire en défense, enregistré au Greffe le 1er Mars 1977 s/n° 89/GCS et dont communication à Maître FELIHO par lettre n° 185/GCS du 16 Mars 1977;

Attendu qu'en la forme, le pourvoi est recevable, les prescriptions légales ayant été observées dans l'ensemble.

AU FOND

LES FAITS:

Attendu que pour la relation des faits, il convient de se reporter à l'arrêt attaqué. Attendu que le Tribunal de Première Instance de Porto-Novo a par jugement n° 6 du 5 Janvier 1971, déclaré non fondée l'action en revendication introduite par DOHOU François et dit qu'en conséquence les parcelles A et B appartiennent à El Hadj Soulé Olaofè.

Attendu qu'en cause d'Appel; la Cour d'Appel a par arrêt n° 39/79 du 25 Juillet 1973 annulé le jugement entrepris pour violation de la loi - rejeté l'exception de communication de pièces comme non fondée - rejeté le reproche fait à AHOUDJI Samuel, vendeur de DOHOU François;

- dit et jugé que la parcelle A est propriété de El Hadj Olaofè
- dit et jugé que la parcelle B est la propriété de DOHOU François.

Attendu que devant la Cour d'Appel DOHOU François, par l'organe de son conseil, Maître ASSOGBA, a abandonné ses prétentions sur la parcelle. A et conclu à l'infirmation à son profit du jugement attaqué en ce qui concerne la parcelle B.

Attendu que la Cour constate que les conventions dont excipent les parties sont des actes sous-seing privé.

Que la convention produite par El Hadj Soulé Olaofè ne pouvait pas valoir comme moyen de preuve parce que non affirmée contrairement à celle présentée par DOHOU et annexée au dossier.

Attendu que la Cour aurait dû tirer toutes les conséquences d'une telle situation pour faire droit aux prétentions de chacun des litigants.

Que cependant il est constant que la Cour a valablement fondé sa décision sur d'autres éléments du dossier.

Attendu que c'est contre l'ensemble de ces éléments que El Hadj Olaofè a articulé ses friefs en quatre moyens de cassation tirés essentiellement de la dénaturation des termes des débats - violation de l'article 17 du décret organique du 3 décembre 1931, manque de base légale - violation de l'article 283 du Code de Procédure Civile comme raison écrite, des articles 10 et 85 du décret 1931.

DISCUSSION DES MOYENS

PREMIER MOYEN. - dénaturation des termes des débats, défaut de réponse aux conclusions des parties et violation de l'article 17 du décret du 3 Décembre 1931.

En ce que la Cour a attribué la parcelle B litigieuse dont le concluant a la possession depuis 1952 à son adversaire au motif que la convention de vente afférente à cette parcelle et produite par le demandeur porte une signature absolument différente de celle du vendeur présumé se trouvant sur l'acte produit par le défendeur.

Alors que d'une part, ladite convention a été rédigée par un agent d'affaires depuis 1952 et indique avec précision les dimensions de la parcelle litigieuse, conformément aux plans établis par les deux experts commis par le Tribunal et la Cour et confirmée par les témoins à l'acte; et que d'autre part, le concluant ayant la possession de cette parcelle depuis 1952, aucune action en revendication ne saurait être accueillie sans violation de l'article 17 du décret organique expressément invoqué par le concluant.

Attendu que pour affirmer ses droits sur la parcelle B Olaofè soutient avoir la possession des lieux depuis 1952 en fondant essentiellement ses prétentions sur la convention intervenue le 3 Décembre 1952 entre lui et GBENOU, son vendeur.

Mais attendu que la convention dont il excipe est un acte de vente sous-seing privé non affirmé.

Attendu qu'il est regrettable que la Cour n'ait pas tiré toutes les conséquences de cette constatation, qu'en effet tout contrat sous-seing privé non affirmé, quand bien il serait rédigé par un agent d'affaires, n'a pas date certaine et partant ne peut valoir comme moyen de preuve.

Attendu qu'en conséquence la date dont se prévaut le concluant est inopposable à DOHOU François et ne saurait lier la Cour.

Qu'il en résulte que l'action en revendication de DOHOU ne peut, en l'espèce, être repoussée en application de l'article 17 du décret organique de 1931;

Qu'ainsi la première branche de ce moyen ne peut être retenue.

Attendu que de plus eu égard aux témoignage de Saïzonou Simon, Pascal et Joseph tous trois, parents de GBENOU, la Cour a lourdement insisté sur la différence ente la signature habituelle de GBENOU et celle apposée sur la prétendue convention conclue en 1952 entre GBENOU et Olaofè contestant, de cette manière la réalité de la convention de 1952.

Attendu qu'il n'y a pas eu contrariété de motifs comme le soutien Olaofè.

Qu'en écartant cette convention, la Cour a néanmoins fondé sa décision sur d'autres éléments du dossier.

Attendu qu'elle constate en effet que:
- en 1949, personne ne pouvait acquérir valablement cette parcelle en dehors de AHOUDJI Samuel, vendeur de DOHOU.
Le vendeur et les témoins ont attesté la réalité de l'achat de la parcelle B par DOHOU.
DOHOU a construit sur cette parcelle depuis 1967 sans aucune protestation de Olaofè.
DOHOU était le premier à saisir le Tribunal de Porto-Novo en 1969, alors que Olaofè n'exigeait que le respect d'une distance raisonnable entre la construction de DOHOU et sa propriété.
Aucune issue pratiquée par Olaofè ne donne accès sur la parcelle B - le portail de celui-ci étant situé au sud de cette parcelle.

Qu'en conséquence la Cour a suffisamment répondu aux conclusions selon lesquelles elle aurait attribué indûment la parcelle B à DOHOU en refusant d'admettre l'occupation des lieux par Olaofè.

Attendu qu'il s'ensuit que la prétendue violation de l'article 17 étant sans fondement, le moyen doit être écarté.

2ème MOYEN pris de la violation des règles de preuve, excès de pouvoir, contrariété de motifs, insuffisance de motifs, manque de base légale, dénaturation des termes du débat.

En ce que la Cour a commencé par affirmer que DOHOU François a acquis auprès de AHOUDJI Samuel à la fois partie du terrain de ce dernier, figuré sur le plan MEAR et la parcelle B litigieuse et s'est livré ensuite à une démonstration personnelle pour parvenir à ce résultat qu'elle a énoncé au départ.

Alors que il est interdit au juge de se déterminer d'une part sur les investigations personnelles poursuivies en dehors de l'audience et, d'autre part, sur des pièces non communiquées à l'autre partie.

Attendu que pour Olaofè, la Cour aurait affirmé que DOHOU a érigé une construction sur une partie de la parcelle B en 1967, sans indiquer d'où elle tenait ce renseignement.

Que selon lui DOHOU avait profité de son absence pour entreprendre de construire en 1969 un bâtiment qui a empiété sur sa parcelle.

Attendu qu'il est constant que la Cour s'est beaucoup moins attachée à une date précise qu'au fait pour DOHOU d'avoir édifié une construction sur la parcelle sans protestation de la part de Olaofè.

Qu'il importe donc peu que le bâtiment de DOHOU ait été construit plutôt en 1969 qu'en 1967.

Attendu qu'il en résulte que les investigations personnelles reprochées à la Cour paraissent superfétatoires pour motiver vraiment l'annulation de l'arrêt.

Attendu que le concluant aurait pu préciser à l'attention de Cour Suprême en quoi consistait la fausse interprétation à laquelle il faisait allusion.

Que faute d'avoir fait, la Cour ne saurait apprécier valablement cette allégation.

Attendu qu'il s'agit essentiellement dans cette 2ème branche de mensurations qui, relèvent du domaine de simples constations, échappent au contrôle de la Cour Suprême.

Qu'il y a lieu de rejeter tout le moyen.

3ème MOYEN - Violation de l'article 283 du Code de Procédure Civile comme raison écrite.

En ce que la Cour d'Appel a déclaré non admissible le reproche fait par le concluant à AHOUDJI au motif que si celui-ci se trouve en procès avec celui-là, ce n'est pas au sujet de la parcelle litigieuse B.

Alors que aux termes de l'article 283 du Code de Procédure Civile prise comme raison écrite, tout témoin peut-être reproché s'il est soumis à une obligation de garantie envers une des parties au procès ou s'il existe une certaine animosité ou antipathie entre lui et une des parties au procès.

Attendu que les dispositions invoquées par le concluant en tant que raison écrite ont été abrogées par décret n° 58-1289 du 22 Décembre 1958.

Attendu que leur inapplication au cas de l'espèce confirmerait d'autant la position adoptée par la Cour d'Appel quant au reproche fait par Olaofè à AHOUDJI.

Que même si elles demeuraient encore en vigueur, elles aboutiraient simplement au rejet du témoignage de AHOUDJI partisan et hostile à Olaofè.

Mais attendu que le témoignage de AHOUDJI n'a vraiment pas été déterminant et son rejet n'a rien modifié quant à , l'attribution de la parcelle B à DOHOU.

Attendu qu'il ne peut donc être tenu rigueur à la Cour de n'avoir pas envisagé les conséquences de sa décision qui pourraient être préjudiciable aux intérêts du concluant dans l'instance l'opposant à AHOUDJI.

Que compte tenu de ces considérations le moyen ne peut vraiment pas être retenu.

4ème MOYEN / Violation de l'article 254 et suivant du Code de Procédure Civile et 142 et 175 du même Code - Violation des règles d'enquête - Violation de l'article 10 alinéa 2 et 85 du Décret organique du 3 Décembre.

En ce que la Cour a procédé à la barre à une enquête et contre-enquête sans avoir porté dans l'arrêt les mentions exigées par la loi.

Alors que aux termes de l'article 85 du décret organique, en toute matière, les juridictions doivent indiquer entre autres le nom et la qualité de l'interprète. Le nom, le sexe, l'âge, la profession, le domicile et la coutume de chacune des parties et de chacun des témoins avec ses déclarations et la mention du serment qu'il a prêté et enfin la déposition du témoin, l'énoncé complet de la coutume.

Attendu que conformément à la jurisprudence de la Cour Suprême définitivement établie sur ce point, l'inobservation des dispositions citées par le concluant dans ce moyen ne constituent plus désormais des causes péremptoires et, automatiques de cassation.

Attendu qu'elle estime en effet que de ces dispositions ont une importance relative du fiat que les témoignages s'apprécient globalement et que nos juridictions sont essentiellement composées de magistrats autochtones professionnels.

Attendu que l'énoncé de la coutume, ne saurait se justifier aussi, dès lors que des règles de droit plus objectives et plus précises se substituent à la coutume et s'imposent comme loi applicable.

Attendu en effet que dans le cas de l'espèce, il se trouve annexé au dossier de la procédure une convention conclue entre AHOUDJI et DOHOU relative à la parcelle B.

Attendu que cette convention datée du 13 Octobre 1960 a été affirmée le 10 Janvier 1965 par le Sous-Préfet de Porto-Novo.

Attendu que par cette formalité DOHOU a fait la preuve de ses prétentions sur la parcelle contestée tout au noms depuis 1965.

Attendu qu'il n'est pas contraire à l'ordre public que dans le domaine du droit traditionnel, les droits respectifs de chaque litigant soient appréciés en fonction d'éléments plus objectifs sans qu'il soit nécessaire de recourir à une règle coutumière quelconque.

Attendu qu'à défaut d'une coutume applicable le grief articule en l'occurrence contre l'arrêt apparaît comme sans fondement, d'où le rejet de ce moyen.

PAR CES MOTIFS

La Cour après avoir délibéré conformément à la loi:
accueille le pourvoi en la forme;
le rejette, au fond comme non fondé dans son ensemble;
met les dépens à la charge de El Hadj Soulé Sadikou Olaofè;
ordonne la notification du présent arrêt au Procureur Général près la Cour d'Appel de Cotonou ainsi qu'aux parties;
ordonne la transmission en retour du dossier au Parquet Général près la Cour d'Appel.

Ainsi fait et délibéré par la Cour Suprême (Chambre Judiciaire) composée de:
Cyprien AÏNANDOU, Président de la Cour Suprême PRESIDENT
Maurille CODJIA et François Xavier GRIMAUD CONSEILLERS

Et prononcé à l'audience publique du Vendredi vingt deux Décembre mil neuf cent soixante dix huit, la Chambre étant composée comme il est dit ci-dessus en présence de:

Grégoire GBENOU PROCUREUR GENERAL
et de Maître Germain MIASSI GREFFIER EN CHEF

Et ont signé:

Le Président Le Rapporteur Le Greffier en Chef

C. AÏNANDOU M. CODJIA G. MIASSSI


Synthèse
Formation : Chambre judiciaire
Numéro d'arrêt : 10
Date de la décision : 22/12/1978
Civile traditionnelle

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;bj;cour.supreme;arret;1978-12-22;10 ?
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