La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

11/03/2003 | BéNIN | N°241/CA/ECM

Bénin | Bénin, Cour suprême, Chambre administrative, 11 mars 2003, 241/CA/ECM


Contentieux des résultats - Achat de conscience - Propagande sur les lieux de vote - Défaut de preuve - Impact sur la sincérité du vote (Non) - Rejet.
Est rejeté la demande d'annulation de résultats dès lors que les irrégularités soulevées n'altèrent pas la sincérité du scrutin.
Collectif des candidats UBF de l'arrondissement D'Agblangandan, commune de Semè-Podji, représenté par METODJO S. ANTOINE
C/
Commission Electorale Nationale Autonome (CENA) - PRD (Parti du Renouveau Démocratique) - Groupe des Indépendants d' Agblangandan (GIA)
N° 241 /CA/ECM 11/

03/2003
La Cour,
Vu la requête en date à Agblangandan du 08 janvier 2003 enregis...

Contentieux des résultats - Achat de conscience - Propagande sur les lieux de vote - Défaut de preuve - Impact sur la sincérité du vote (Non) - Rejet.
Est rejeté la demande d'annulation de résultats dès lors que les irrégularités soulevées n'altèrent pas la sincérité du scrutin.
Collectif des candidats UBF de l'arrondissement D'Agblangandan, commune de Semè-Podji, représenté par METODJO S. ANTOINE
C/
Commission Electorale Nationale Autonome (CENA) - PRD (Parti du Renouveau Démocratique) - Groupe des Indépendants d' Agblangandan (GIA)
N° 241 /CA/ECM 11/03/2003
La Cour,
Vu la requête en date à Agblangandan du 08 janvier 2003 enregistrée au greffe de la Cour Suprême le même jour sous le n° 113/GCS/ECM par laquelle le collectif des candidats UBF de l'Arrondissement d'Agblangandan, Commune de Semè-Podji, représenté par Monsieur METODJO S. Antoine a saisi la Cour en contestation des élections communales à Agblangandan au motif que certains actes illégaux ont été commis par le parti du Renouveau Démocratique (PRD) et le Groupe des Indépendants d'Agblangandan (G.I.A) d' Agblangandan pendant la pré campagne, la campagne et le jour du vote;
Vu la communication MT n° 138/GCS/ECM du 21 janvier 2003 par laquelle les candidats de la liste PRD Agblangandan et le Groupe des Indépendants d' Agblangandan (GIA) ont reçu notification de ladite requête pour produire leurs observations à la Cour, lesquelles sont parvenues au greffe les 30 et 31 janvier 2003;
Vu la requête communiquée au Président de la Commission Electorale Nationale Autonome par lettre n° 333/GCS/ECM du 23 janvier 2003 pour ses observations, mais demeurée sans suite;
Vu la loi n°98-006 du 09 mars 2000 portant régime électoral communal et municipal en République du Bénin;
Vu l'ensemble des pièces du dossier;
Ouï le Conseiller Joachim G. AKPAKA en son rapport;
Ouï l'Avocat général Clémence YIMBERE-DANSOU en ses conclusions;
Après en avoir délibéré conformément à la loi;
EN LA FORME
Considérant que le recours a été introduit dans les forme et délai prévus par la loi et ce, conformément à l'article 107 de la loi n°98-006 du 09 mars 2000 portant régime électoral communal et municipal en République du Bénin;
Considérant que Maître Dossou Robert, Conseil du PRD conclut à l'irrecevabilité du présent recours au motif que la Cour ayant déjà rendu un arrêt entre les mêmes parties pour les mêmes objet et cause, il y a autorité de la chose jugée;
Mais considérant que la décision de la Cour dont fait état le requis est relative à un recours sans objet car portant sur des résultats inexistants, la CENA n'ayant encore rien proclamé en ce moment;
Que le présent recours porte sur la contestation des résultats proclamés par la CENA à l'issue du scrutin du 15 Décembre 2002;
Que par conséquent, il y lieu de déclarer mal fondé le moyen du défendeur tiré de l'irrecevabilité pour autorité de la chose jugée et de recevoir le recours des requérants.
AU FOND
Considérant que le collectif des candidats UBF de l'Arrondissement d'Agblangandan représenté par Monsieur METODJO sollicite l'annulation des élections dans cette circonscription électorale au motif que les candidats du PRD et du GIA ont commis des actes illégaux qui ont eu une grande influence sur le vote;
Que les griefs articulés portent notamment sur:
· Les dons et libéralités en nature et en argent avant et pendant la campagne;
· La propagande sur les lieux de vote le jour du scrutin;
· Les actes d'achat de conscience la veille et le jour du vote;
Sur le grief fondé sur les dons et libéralités avant et pendant la campagne
Considérant que les requérants allèguent que des dons de six (06) tonnes de ciment et six (06) paquets de feuilles de tôles galvanisées et une somme de 100 000 F à chacun des villages d'Agbalilamè et de Lokokoukoumè pour la construction de leurs places publiques et deux tonnes de ciment et deux paquets de feuilles de tôles à l'Eglise « Apostolic Church» de kadjacomè ont été faits par le PRD avant et pendant la campagne électorale;
Qu'à l'appui de leur requête, ils produisent, suite aux mesures d'instructions de la Cour les invitant à rapporter les preuves de leurs allégations, un mémoire en date du 31 janvier 2003 ainsi que divers témoignages et constatations matérielles établis par exploit d'Huissier de Maître Monique K. FAIHUN le 27 janvier 2003;
Qu'ils soutiennent que ces témoignages, confortés par les photos prises par l'Huissier et certifiées par lui, constituent des commencements de preuve, donc des moyens de preuve qui sont admis devant le juge électoral;
Qu'en conséquence, ils sollicitent de la cour, l'annulation des élections des nommés HONFO Charlemagne, DJENGUE KOUKOUI Bérénice, DOSSA David, tous élus du PRD et de ADANTOFODJI Jean-Baptiste élu du GIA d'une part; la réformation du procès-verbal des résultats aux fins de déclarer élus les candidats UBF à savoir METODJO S. Antoine; ADOUHOUEKONOU Mathieu et AYABA Napoléon d'autre part;
Considérant qu'en réplique, Maître Robert DOSSOU, Conseil du défendeur, le parti du Renouveau Démocratique, réfute lesdites allégations au motif que les faits ne sont pas avérés et ne sont pas imputables aux candidats PRD;
Qu'à l'appui de ce moyen, il produit une copie du procès-verbal d'audition en date du 28 janvier 2003 établi par Maître Hortense BANKOLE de SOUZA, Huissier de Justice près le Tribunal de Première Instance et la Cour d'Appel de Cotonou, procès-verbal dans lequel les prétendus bénéficiaires de ces dons à savoir Messieurs AVLESSI Antonin, AYABA André, SOSSOU Benoît et GUEDE Jean, tous membres des bureaux à divers niveaux de l'Association de Développement des villages de Lokokoukoumè et d'Agbalilamè ( ADK TONIGNON), suite à leur audition, affirment tous n'avoir rien reçu ni des candidats PRD élus, ni des membres du PRD, ni avant ni au cours desdites élections pour la réfection de leur place publique;
Que s'agissant du don fait à l'Eglise «Apostolic Church» de Kadjacomè, Monsieur KODJO Pierre, Pasteur de ladite Eglise déclare n'avoir compté que sur l'effort de ses fidèles, donc n'avoir reçu à aucun moment des dons extérieurs pour sa reconstruction.
Mais considérant qu'il résulte de l'examen des pièces versées au dossier que les bénéficiaires affirment n'avoir rien reçu ni des candidats du PRD élus dans l'arrondissement concerné, ni d'un autre membre du PRD; qu'ils reconnaissent néanmoins avoir reçu dons de deux (02) tonnes de ciment et six (06) paquets de feuilles de tôles pour Agbalilamè de la part d'une Association de bienfaisance, une ONG dénommée «Cercle de Réflexion et d'Etude sur la Recherche en Démocratie, le Développement social et Economique» comprenant un volet social dénommé Gbénonkpo; qu'ils ont pu bénéficier de ce don grâce à l'action d'un natif en la personne du sieur Timothée AHOUANDJINOU;
Qu'il convient de faire également observer, s'agissant des pièces justificatives versées au dossier par le conseil du défendeur, que douze (12) paquets de feuilles de tôles et dix (10) tonnes de ciment ont été livrés par «Gbénonkpo» auxdites localités alors que les déclarations des bénéficiaires ne font état que de 12 paquets de tôles et de 08 tonnes de ciment au total au lieu de 10 tonnes qui leur auraient été offerts par ladite ONG;
Considérant en outre que des déclarations contradictoires ont été relevées dans les témoignages en faveur des requérants notamment en ce qui concerne la quantité des matériaux et sommes d'argent offerts à Lokokoukoumè, les requérants alléguant que chaque village a reçu six tonnes de ciment et six paquets de tôles et une somme de 100 000 F, alors que Monsieur BESSE François dans sa déclaration fait état d'un don de deux tonnes de ciment et de deux paquets de tôles et d'une somme de 100 000 F;
Que s'agissant de la période considérée, il convient de relever que pour les défendeurs les matériaux ont été offerts par l'ONG au mois d'Août 2002 alors que les requérants et les témoignages s'en tiennent à la fin du mois d'octobre 2002 pour les localités de Lokokoukoumè et Agbalilamè, au 02 octobre 2002 plus précisément pour la paroisse de Kadjacomè;
Mais considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que si le procès-verbal d'audition et de constat produit par les requérants fait état des témoignages et des constatations matérielles, il n'en demeure pas moins vrai qu'il n'a pas été établi au moment des faits et qu'il n'a pas été dressé de façon contradictoire relativement aux personnes impliquées dans les actes incriminés;
Considérant que ces faits, s'ils étaient avérés sont passibles de sanctions pénales prévues par l'article 124 de la loi N° 98-006 du 9 mars 2000 dont le prononcééchappe au juge électoral;
Que cependant la preuve que les infractions relevées ont effectivement altéré la sincérité du scrutin, doit être faite;
Qu'à défaut de rapporter une telle preuve, le juge électoral qu'est la Cour suprême, juge de la sincérité du scrutin, ne saurait tirer effet des irrégularités constatées pour annuler l'élection contestée;
Mais considérant qu'il résulte de l'examen des documents électoraux transmis à la Cour, que dans les 20 bureaux de vote des localités concernés, à savoir Lokokoukoumè, Agbalilamè, Davatin, Adjacomè et Akpokpota, l'écart de voix notamment entre les candidats de la liste PRD (2314 voix) et ceux de la liste UBF (941 voix) est si grand que ces faits ne sauraient entachés la sincérité du scrutin;
Qu'en conséquence il y a lieu de rejeter ce moyen des requérants;
Sur les griefs fondés sur la propagande sur les lieux de vote et les actes d'achat de conscience
Considérant que le requérant expose:
Que le jour même du vote, le GIA a distribué de la bière à ses mandataires;
Qu'il a positionné ses éléments devant l'école primaire publique de Lokokoukoumè et à Akpokpota, lesquels donnaient des consignes de vote sous la direction de Monsieur ADOUWEKONOU Pascal et consorts;
Qu'au bureau de vote installé à l'école maternelle du village d'Agblangandan, le superviseur HOUMBIE Dominique a laissé le logo du PRD affiché sur le plateau devant l'établissement;
Que monsieur DOSSOU Bertin a distribué le logo PRD à la population à Akpokpota en vue d'orienter leur suffrage;
Qu'il dénonce en outre que le PRD a distribué des billets de 500 F aux votants à Davatin;
Que à Akpokpota, ce parti a également positionné ses militants sur les voies menant au lieu de vote pour corrompre la population avec 500 F ou 1 000 F afin de voter pour le PRD;
Considérant que pour rapporter la preuve de ses allégations, suite aux instructions du Conseiller-rapporteur, le requérant a produit la copie d'un procès-verbal d'audition et de constat établi le 27 janvier 2003 pas Maître Monique K. FAIHUN, Huissier de Justice près le Tribunal de Première Instance de Cotonou sur sa demande;
Que ledit procès-verbal fait état des témoignages de personnes qui tous dénoncent les faits;
Qu'en effet Monsieur BESSE François y déclare: «le jour du vote du premier tour, des représentants du PRD se sont placés à mi-chemin des bureaux de vote et ont fait à tous les passants le signe du PRD;
Que Monsieur AHOUANDJINOU Alfred pour sa part soutient que «ce jour-là, le sieur ADOUWEKONOU Pascal s'est pointé à la porte de ladite école et a donné des consignes de vote aux électeurs. Il a même distribué des logos du Groupe des Indépendants d'Agblangandan (GIA). Il a demandé à tous les passants de voter le logo «la main dans la main» qui est du GIA. Le sieur AYABA André a été témoin des faits»;
Quant à Monsieur GUEDE André, il affirme qu'«un bulletin a été retrouvé sur un membre du PRD, Monsieur AGOSSOU Mathias qui faisait la propagande dans les bureaux de vote en donnant des consignes de vote pour le «PRD»;
Que messieurs KOUYONI Boniface et DJOTCHOU Esaïe confirment pour leur part que des billets de banque neufs ont été distribués par les représentants du PRD et du GIA aux électeurs le jour de vote à Davatin;
Considérant qu'à l'appui de sa requête, M. METODJO soutient dans son mémoire qu'en faisant des propagandes le jour du vote par la distribution d'argent, en orientant le vote des électeurs par des personnes placées à divers coins de la rue ou même à l'entrée de divers postes de vote, les candidats du PRD et du GIA se sont donnés plus d'opportunité de s'attirer plus d'électeurs que l'UBF;
Qu'il conclut que ces faits violent la loi et qu'en agissant comme ils l'ont fait, ils ont rompu l'égalité entre les candidats et par conséquent la sincérité du vote;
Considérant qu'en revanche les candidats du PRD et du GIA dans leurs observations transmises à la Cour réfutent lesdites allégations au motif qu'elles ne sont pas fondées;
Mais considérant que le requérant verse aux débats les témoignages recueillis pas exploit d'Huissier le 27 janvier 2003;
Qu'il soutient que ces témoignages sont probants;
Qu'à tout le moins ils constituent des commencements de preuve;
Considérant cependant qu'il est de jurisprudence constante en cette matière qu'on ne saurait considérer comme un commencement de preuve des énonciations n'émanant pas directement des électeurs ayant été l'objet par exemple de pression, de tentative de pression ou de corruption;
Qu'au surplus, aucun constat n'a été diligenté le jour même du vote et aucune mention aux procès-verbaux de déroulement du scrutin, relativement aux faits et aux actes dénoncés n'a fait l'objet de protestation ou d'observations ni de la part des requérants ni de leurs mandataires pourtant présents dans les bureaux de vote concernés;
Considérant que du reste, l'écart de voix entre les listes PRD, 2314 voix et UBF, 941 voix d'une part, entre les listes GIA, 1033 voix et l'UBF, 941 voix d'autre part, dans les 20 bureaux de vote des localités concernées, même si les faits étaient avérés, n'aurait aucune influence sur les résultats de l'élection contestée;
Que dès lors, le procès-verbal en date du 27 janvier 2003 ne prouve pas à suffire les allégations du requérant;
Qu'en conséquence, ces griefs ne sauraient être retenus et doivent être rejetés.
PAR CES MOTIFS
DECIDE:
Article 1er: le recours du collectif des candidats UBF de l'Arrondissement d'AGLANGANDAN, Commune de Sèmè-Podji, représenté par Monsieur METODJO S. Antoine, en date du 08 janvier 2003 tendant à invalider l'élection des candidats de la liste PRD et du GIA est recevable.
Article 2: Ledit recours est rejeté.
Article 3: Notification du présent arrêt sera faite aux parties et au Procureur Général près la Cour Suprême.
Ainsi fait et délibéré par la Cour Suprême (Chambre Administrative) composée de:
Jérôme O. ASSOGBA, Conseiller de la Chambre Administrative,
PRESIDENT;
Joachim G. AKPAKA }
et }CONSEILLERS.
Edwige AFANWOUBO HOUNSA }
Et prononcé à l'audience publique du Mardi onze Mars deux mille trois, la Chambre étant composée
comme il est dit ci-dessus en présence de:
Clémence. YIMBERE DANSOU, MINISTERE PUBLIC;
Et de Maître Félicienne GNONLONFOUN ZONON, GREFFIER.

Et ont signé
Le Président, Le Rapporteur, Le Greffier.


Synthèse
Formation : Chambre administrative
Numéro d'arrêt : 241/CA/ECM
Date de la décision : 11/03/2003
1re section contentieuse

Analyses

Contentieux des résultats - Achat de conscience - Propagande sur les lieux de vote - Défaut de preuve - Impact sur la sincérité du vote (Non) - Rejet.

Est rejeté la demande d'annulation de résultats dès lors que les irrégularités soulevées n'altèrent pas la sincérité du scrutin.


Parties
Demandeurs : Collectif des candidats UBF de l'arrondissement D'Agblangandan, commune de Semè-Podji, représenté par METODJO S. ANTOINE
Défendeurs : Commission Electorale Nationale Autonome (CENA) - PRD (Parti du Renouveau Démocratique) - Groupe des Indépendants d' Agblangandan (GIA)

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;bj;cour.supreme;arret;2003-03-11;241.ca.ecm ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award