La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

10/08/2006 | BéNIN | N°76ca

Bénin | Bénin, Cour suprême, Chambre administrative, 10 août 2006, 76ca


N° 76/CA du Répertoire REPUBLIQUE DU BENIN

N° 2000-148/CA du Greffe AU NOM DU PEUPLE BENINOIS

Arrêt du 10 Août 2006

COUR SUPREME
...

N° 76/CA du Répertoire REPUBLIQUE DU BENIN

N° 2000-148/CA du Greffe AU NOM DU PEUPLE BENINOIS

Arrêt du 10 Août 2006 COUR SUPREME

Affaire: Société Ouvrière du Bâtiment et CHAMBRE ADMINISTRATIVE
Travaux Publics (SOBA-TP)
C/
- Ministère du Commerce de l'Artisanat et du
Tourisme
- Agence Judiciaire du Trésor


La Cour,

Vu la requête introductive d'instance en date à Cotonou du 08 décembre 2000 enregistrée au greffe de la cour le 13 décembre 2000 sous le n°1293/GCS par laquelle, Maîtres Grâce A. d'Almeida et Angelo A. HOUNKPATIN avocats à la cour, conseils de la Société Ouvrière du Bâtiment et Travaux Publics (SOBA-TP), ont introduit un recours de plein contentieux tendant à voir condamner le Ministère du Commerce, de l'Artisanat et du Tourisme à payer à leur client la somme de 289.875.635 francs CFA à titre de dommages et intérêts toutes causes de préjudices confondues;

Vu la lettre n°1166/GCS en date du 07 mai 2001 par laquelle, les conseils de la requérante ont été invités à produire leur mémoire ampliatif;;

Vu la lettre n° 604/GCS et 605/GCS en date du 02 juillet 2003 par laquelle, la requête introductive d'instance, le mémoire ampliatif et les pièces y annexées de Maîtres Grâce d'Almeida et A. HOUNKPATIN ont été communiqués à l'Agent Judiciaire du Trésor et au Ministre du Commerce, de l'Artisanat et du Tourisme pour leurs observations;

Vu la lettre n° 0726/GCS du 27 février 2004 par laquelle, les observations de l'Agent Judiciaire du Trésor ont été communiquées à Maîtres Grâce d'ALMEIDA et Angelo A. HOUNKPATIN pour leurs répliques éventuelles ;

Vu la consignation légale constatée par reçu n° 1992 du 17 janvier 2001;

Vu l'Ordonnance n° 21/PR du 26 avril 1966 organisant la procédure devant la Cour suprême remise en vigueur par la loi n° 90-012 du 1er juin 1990;

Vu toutes les pièces du dossier;

Ouï le Conseiller-Rapporteur Victor ADOSSOU en son rapport;

Ouï l'Avocat Général René Louis KEKE en ses conclusions;

Après en avoir délibéré conformément à la loi;

EN LA FORME

Sur la recevabilité du recours

Considérant que l'Administration soulève l'irrecevabilité du recours de la requérante motif pris de ce que les dispositions de l'article 14 du contrat, exigent la tentative d'un règlement à l'amiable avant toute saisine de la Chambre administrative de la Cour suprême;

Qu'en ne satisfaisant pas à ces prescriptions, la SOBA-TP se retrouve dans une situation de violation dudit article et que son recours mérite par conséquent, rejet pur et simple.

Mais considérant que lorsque les deux parties contractantes en sont arrivées à une situation de mésintelligence, ne parvenant pas à se mettre d'accord sur le coût de la réalisation des travaux, la requérante a saisi le Ministre du Commerce, de l'Artisanat et du Tourisme, d'un recours gracieux en date du 20 septembre 2000;

Que ce recours gracieux, c'est-à-dire non contentieux, ouvrait la voie à un règlement amiable entre les deux parties;

Que ledit recours gracieux peut s'analyser comme une mise en ouvre des dispositions de l'article 14 du contrat liant les parties et exigeant de celles-ci une tentative de règlement à l'amiable avant toute procédure contentieuse.

Que même si le recours gracieux est un préalable nécessaire à la saisine de la Chambre administrative, il n'en demeure pas moins vrai qu'il n'aboutit pas inévitablement à l'enclenchement d'une procédure contentieuse;

Que ce recours gracieux pouvait en effet permettre aux parties de parvenir à un règlement amiable conformément aux stipulations de l'article 14 du contrat lesliant.

Considérant qu'au regard de la réponse faite par le Ministre du Commerce, de l'Artisanat et du tourisme à la lettre de recours gracieux introduite par la requérante, il y a lieu de constater que le règlement amiable entre les parties n'a pu être réalisé.

Que dès lors, la requérante était en droit de saisir le juge administratif.
.
Qu'il échet par conséquent de rejeter le moyen tiré de l'irrecevabilité du recours invoqué par l'Administration et de déclarer ledit recours recevable.

AU FOND

Considérant que la requérante, le Société Ouvrière du Bâtiment et Travaux Publics (SOBA-TP) au soutien de son recours expose:

Que suite à un appel d'offre auquel elle a soumissionné, la Société Ouvrière du Bâtiment et Travaux Publics (SOBA-TP) a été retenue après dépouillement par le Ministère du Commerce, de l'Artisanat et du Tourisme (MCAT) pour la construction dans le lot n°1 de l'embarcadère-débarcadère de Mènontin;

Qu'un contrat de marché fut alors signé entre les parties sous le n° 072/MCAT/DC/DPP. Le coût total du marché d'adjudication du lot n° 1 est de 100.126.850 FCFA;

Qu'elle s'apprêtait à entamer les travaux lorsqu'il lui fut indiqué un site autre que celui pour lequel elle avait soumissionné;

Que ce nouveau site présentant des caractéristiques différentes de l'original, elle fit appel au Centre d'Etudes d'Essais et de Recherches en Construction (CERC SA) qui y effectua des études de faisabilité;

Que des conclusions des études, il résultait pour la construction de l'embarcadère-débarcadère dont il s'agit, un investissement onéreux nécessitant subséquemment une révision à la hausse du prix;

Que les représentants du Ministre du Commerce, de l'Artisanat et du Tourisme en furent informés lors d'une visite de chantier et par la même occasion une révision du prix des prestations fut sollicitée et acceptée par le Maître d'ouvrage qui demanda à la requérante de faire ses propositions;

Que sur cette base, elle a adressé au Ministre du Commerce, de l'Artisanat et du Tourisme, un devis réaménagé d'un montant de 264.875.625 F CFA.

Que tout en réduisant ce devis à la somme de 160.649.525 FCFA, le Ministre du Commerce de l'Artisanat et du Tourisme mit la Société Ouvrière du Bâtiment et Travaux Publics (SOBA-TP) en demeure de reprendre les travaux et de les achever dans un délai de 30 jours;

Qu'elle réagit aussitôt en rétablissant la vérité sur les raisons du blocage du chantier puis rejeta le prix de 160.649.925 FCFA;

Que contre toute attente, le Ministre du Commerce de l'Artisanat et du Tourisme pour toute réponse, lui notifia par lettre n° 488/MCAT/DC/DEP du 28 juillet 2000, la résiliation du marché sur le fondement de l'article 17 du contrat du 28 décembre 1998 pourtant déjà caduc;

Qu'elle fut contrainte de saisir le Ministre du Commerce de l'Artisanat et du Tourisme d'un recours gracieux le 20 septembre 2000 pour paiement de la somme de 264.875.625 FCFA au titre du préjudice matériel et 25.000.000 FCFA au titre du préjudice moral soit au total la somme de 289.875.625 FCFA;

Que sa demande fut rejetée par le Ministre du Commerce de l'Artisanat et du Tourisme par lettre en date du 03 novembre 2000.

Qu'elle saisit dès lors la haute juridiction afin que soit constatée la rupture abusive du marché conclu entre le Ministre du Commerce, de l'Artisanat et du Tourisme et elle et que ce dernier soit condamné à lui verser la somme sus- indiquée.

Considérant que la requérante fonde son recours sur les moyens tirés de:

a) La non validité du contrat de marché n° 072/MCAT/ DC/DPP du 28 novembre 1998

Considérant que la requérante soutient que le contrat de marché n°072/MCAT/DC/DPP du 28 décembre 1998 a été signé sur la base de l'adjudication à la SOBA-TP du lot n° 1 contenu dans un dossier d'appel d'offres publié par le Ministre du Commerce, de l'Artisanat et du Tourisme;

Que c'est en connaissance du site de Mènontin retenu pour accueillir l'embarcadère (pour l'avoir visité et y avoir effectué une étude technique), qu'elle a fixé pour sa réalisation, le prix de 100.126.850 FCFA;

Que c'est au moment d'entamer les travaux qu'elle fut informée du changement du site;

Qu'elle fit exécuter par le Centre d'Etudes d'Essais et de Recherches en construction (CERC) une étude du nouveau site, qui conclut à une révision à la hausse du prix;

Qu'en effet, dès lors que changement de site a été opéré, une révision du prix s'impose, et que le premier contrat perd certains éléments substantiels lui conférant sa validité;

Que l'objet du contrat était le site préalablement identifié soumis à l'enrichissement et dont l'adjudication est revenue à la Société Ouvrière du Bâtiment et Travaux Publics (SOBA-TP) qui a, pour sa réalisation, offert un prix de 100.126.850 FCFA pour l'avoir visité et étudié;

Que la modification de cet élément atteint la substance même dudit contrat et sa validité;

Que dès lors aucune des parties contractantes ne saurait plus tirer argument de l'une de ses clauses pour poser un acte juridique;

Qu'en le faisant, le Ministre du Commerce, de l'Artisanat et du Tourisme a commis un abus par la résiliation du nouveau marché relatif au nouveau site identifié et mis la Société Ouvrière du Bâtiment et Travaux Publics (SOBA-TP) par son fait, dans l'impossibilité objective et juridique d'exécuter les travaux sur le nouveau site.

b) La condamnation du Ministre du Commerce de l'Artisanat et du Tourisme au paiement de dommages intérêts pour rupture abusive du contrat

Considérant que la requérante soutient que le Ministre du Commerce, de l'Artisanat et du Tourisme a fait preuve de légèreté et d'abus de pouvoir en décidant la résiliation du contrat avec la Société Ouvrière du Bâtiment et Travaux Publics (SOBA-TP);

Qu'alors même qu'il a modifié l'objet du contrat, le Ministre du Commerce, de l'Artisanat et du Tourisme ne saurait plus reprocher à la requérante, les nouveaux coûts fixés par elle à sa demande expresse, ni un retard dans l'exécution des travaux sur le nouveau site;

Qu'un nouvel ouvrage impose nécessairement un nouveau prix et de nouveaux délais;

Que le comportement du Ministre du Commerce, de l'Artisanat et du Tourisme s'analyse comme la rupture abusive du contrat;

Qu'en réparation du préjudice issu de cette rupture abusive, la Société Ouvrière du Bâtiment et Travaux Publics (SOBA-TP) sollicite la condamnation du Ministre du Commerce, de l'Artisanat et du Tourisme à lui verser la somme de 265.031.600 FCFA, coût de réalisation des travaux;

Que par ailleurs, la Société Ouvrière du Bâtiment et Travaux Publics (SOBA-TP) est désormais perçue dans le milieu des bâtiments et travaux publics comme une société peu fiable;

Que cette réputation lui ferme la porte à d'autres marchés surtout venant de l'Etat, et lui cause ainsi un préjudice qui ne saurait être réparé à moins de 25.000.000 FCFA.

Que si par extraordinaire, la haute juridiction devrait déclarer le marché n° 072/MCAT/DC/DPP du 28/12/98 valide, malgré les modifications intervenues, il faut noter que sa résiliation est tout de même abusive;

Que l'article 14 dudit contrat prévoit en effet qu'en cas de difficulté, les parties doivent régler le litige à l'amiable;

Que tel n'a pas été le cas en l'espèce;

Que le Ministre du Commerce, de l'Artisanat et du Tourisme dans ces conditions, ne peut qu'être condamné au paiement de dommages et intérêts.

Considérant qu'en réplique aux observations de la requérante, l'Agent Judiciaire du Trésor, soutient:

Que la Société Ouvrière du Bâtiment et Travaux Publics (SOBA-TP) a été déclarée adjudicataire du marché de construction d'embarcadère et un délai de 04 mois lui a été imparti pour le réalisation des travaux mais qu'au bout de 12 mois, lesdits travaux n'avaient toujours pas évolué;

Qu'en effet, il convient de préciser qu'au moment du dépouillement des offres, des doutes sérieux avaient été émis quant à la capacité de la Société Ouvrière du Bâtiment et Travaux Publics (SOBA-TP) à exécuter les travaux au coût unitaire à réaliser le mur de soutènement longeant la lagune pour lequel elle a demandé 22.500F;

Que la Société Ouvrière du Bâtiment et Travaux Publics (SOBA-TP) a répondu en son temps qu'elle est seule responsable de sa politique de prix et a produit un engagement légalisé à maintenir ses prix fermes et non révisables jusqu'à l'achèvement des travaux;

Que c'est sur cette base qu'elle a été déclarée adjudicataire pour avoir été la mieux disante.

Que le changement de site n'est pas un acte délibéré du maître d'ouvrage;

Que ce sont des raisons de difficultés d'accès qui ont conduit dès le démarrage des travaux, au changement du site initial;

Que le nouveau site est situé à moins de cents mètres du premier;

Que la doctrine et la jurisprudence ont admis que les pouvoirs de modification unilatérale sont de prérogatives régulières propres à la puissance publique dans le cadre du contrat administratif;

Que ce changement de site ne devrait avoir aucune influence sur l'évolution du chantier car le réajustement des travaux était déjà prévu dans le dossier d'appel d'offres;

Que les modifications apportées ne sont pas constitutives en elles-mêmes de faute contractuelle susceptible d'engager la responsabilité de l'administration;

Que quel que soit le site retenu, des réajustements au niveau des quantités étaient probables;

Qu'au demeurant, l'article 5 intitulé: «Modification du projet» contient les règles de calcul applicables en cas de changement de site;

Que c'est conformément à cela que les calculs ont été refaits par l'administration pour aboutir à un devis réaménagé de 160.649.525 FCFA;

Que la difficulté est que dans son devis réaménagé la Société Ouvrière du Bâtiment et Travaux Publics (SOBA-TP) a cru devoir revenir sur les prix unitaires alors que dans le cas d'avenant à un contrat, les prix sont intouchables, le changement de site impliquant des modifications à la hausse ou à la baisse des quantités uniquement;

Qu'en l'espèce la requérante a voulu toucher les prix qu'elle a elle-même confirmés par acte notarié en faisant passer le prix unitaire du mur de soutènement de 22.500 l'unité à 130.000 FCFA soit 6 fois environ le prix initial.

Que le constat qui se dégage du comportement de la Société Ouvrière du Bâtiment et Travaux Publics (SOBA-TP) est qu'elle a sciemment minimiser son offre pour éliminer son proche concurrent dont l'offre financière était de l'ordre de 160.000.000 FCFA TTC.

Que par ailleurs, l'introduction d'un avenant dans le cas du marché, n'est pas suspensive de l'exécution des travaux et
la Société Ouvrière du Bâtiment et Travaux Publics (SOBA-TP) ne peut se prévaloir de cet état de chose pour cesser les travaux; qu'il y a seulement une incapacité de sa part à honorer ses engagements.

Qu'au terme des dispositions de l'article 11 du marché, l'entrepreneur dispose d'un délai de quatre (4) mois pour exécuter les travaux.

Que l'état du chantier douze (12) mois après le démarrage des travaux a conduit le Ministre du Commerce de l'Artisanat et du Tourisme à résilier le contrat le liant à la Société Ouvrière du Bâtiment et Travaux Publics (SOBA-TP) conformément à l'article 17 du marché;

Que les dispositions dudit article laissent envisager une possibilité de résiliation après sommation, rappel à l'ordre et multiples relances et mise en demeure.

Que la Société Ouvrière du Bâtiment et Travaux Publics (SOBA-TP) ne peut pas être admise à se prévaloir de sa propre turpitude;

Qu'il échet de la débouter;

Considérant que dans son mémoire en réplique, le requérant a plaidé la violation des dispositions de l'article 14 du marché échu le 28 décembre 1998.

Qu'elle fait observer que le contrat de marché n° 072/MCAT/DC/DPP du 28 décembre 1998 ne peut plus constituer la loi des parties dès lors que son objet et son prix ont changé;

Que ce contrat est devenu caduc;

Que l'abandon ou le changement de l'emplacement originel de l'embarcadère pour un autre ne peut s'assimiler aux modifications prévues à l'article 5 du contrat qui ne concernent que les changements survenant au cours de l'exécution du contrat sur son objet ou des travaux supplémentaires à y opérer.

Qu'en tout état de cause, le Ministre du Commerce de l'Artisanat et du Tourisme ne peut reprocher à la Société Ouvrière du Bâtiment et Travaux Publics (SOBA-TP) d'avoir violé le préalable de règlement amiable alors même que c'est lui qui a résilié le contrat en faisant litière de ce préalable, violant ainsi outre son propre engagement, les dispositions du code des marchés publics en ses articles 95 et consorts relatifs au règlement des différends;

Que faute d'avoir suivi cette démarche, la résiliation prononcée par lui, est abusive et c'est plutôt lui qui a violé les règles concernant la résiliation des contrats;

b- Sur le bien fondé de la mesure de résiliation du marché n°072/MCAT/DC/DPP du 28 décembre 1998 allégué par le MCAT.

Considérant que le requérant soutient que le Ministre du Commerce, de l'Artisanat et du Tourisme, ne doit plus être admis à évoquer la violation de l'article 5 du marché conclu puisque, non seulement, il y a eu abandon du premier site mais l'objet a également changé, ce qui rend ce contrat caduc;

Que désormais, les parties sont en présence d'un nouveau contrat tant en raison du nouvel objet, du nouveau prix que du nouveau délai d'exécution;

Qu'en outre le retard de l'exécution du marché ne peut pas être mis à la charge de la Société Ouvrière du Bâtiment et Travaux Publics (SOBA-TP);

Que le silence gardé par le Ministre du Commerce, de l'Artisanat et du Tourisme pendant plus de six mois pour opérer sur le nouveau devis déposé par la Société Ouvrière du Bâtiment et Travaux Publics (SOBA-TP), en est la véritable cause;

Qu'au surplus, nulle part un nouveau délai de réalisation des travaux sur le nouveau site, n'a été fixé;

Qu'à tous égards, la résiliation paraît abusive et ouvre droit aux réparations pécuniaires réclamées;

a°) Sur le moyen de la non validité du contrat de marché n° 072/MCAT/DC/DPP du 28 novembre 1998 invoqué par la requérante

Considérant que la requérante soutient que le contrat dont il s'agit, a été conclu sur la base et la connaissance du premier site et après l'avoir visité et effectué une étude technique;

Que le prix proposé par la Société Ouvrière du Bâtiment et Travaux Publics (SOBA-TP), l'a été en fonction de tous ces éléments;

Qu'une fois le premier site changé, un nouveau retenu, entraînant en même temps que le changement de l'objet, le changement de prix, la substance même du premier contrat et partant, le problème de sa validité, se pose et que l'on ne peut plus tirer aucun argument de l'une de ses clauses;

Considérant que de l'examen du dossier il ressort que le Ministre du Commerce, de l'Artisanat et du Tourisme, a lancé un appel d'offres pour la construction d'un embarcadère débarcadère à Mènontin lot n° 1;

Considérant qu'un premier site a été retenu;

Mais considérant que le changement de site s'est imposé au Maître d'ouvrage en raison de l'inaccessibilité du site initial;

Que du reste, le nouveau site se situe à une centaine de mètres du premier.

Considérant que le changement du site ne modifie pas l'objet du contrat initial qui reste la construction d'un embarcadère débarcadère à Mènontin;

Que ce qui pourrait changer, c'est bien le coût de réalisation du fait des caractéristiques du nouveau site;

Que sur ce point, l'Etat béninois est tout à fait en accord avec la requérante;

Qu'en revanche, les nouvelles propositions financières de la du requérante sont telles que l'on peut se demander si elles ne sont pas caractéristiques de sa mauvaise foi ;

Qu'en tout état de cause, la nature, l'objet et les parties au contrat étant demeurés les mêmes, l'on ne saurait dire que le contrat initial est atteint dans sa validité;

Qu'il convient de retenir que ce moyen de la requérante ne saurait prospérer.

b)- Sur la condamnation du Ministre du Commerce de l'Artisanat et du Tourisme au paiement de dommages intérêts pour rupture abusive de contrat

Considérant que la requérante a adressé au Ministre du Commerce, de l'Artisanat et du Tourisme, ses nouvelles propositions financières qui se sont élevées à 264.875.625 FCFA;

Que l'administration a aussitôt réagi en notifiant à la requérante qu'elle consentait à la réévaluation du marché à la hausse et fixé le nouveau coût à 160.649.525 FCFA;

Que la requérante se devait, s'il estimait que le nouveau prix fixé était dérisoire par rapport aux réalités du nouveau site, d'entrer en discussion avec l'administration aux fins d'une réévaluation à la hausse, le cas échéant, du coût du marché;

Qu'en cas de désaccord, la requérante pouvait, soit décliner l'offre, soit ouvrir par là même, la voie à un contentieux avec toutes les conséquences de droit.

Considérant qu'il n'existe au dossier aucune trace de la réaction de la Société Ouvrière du Bâtiment et Travaux Publics (SOBA-TP) suite à la révision à la baisse par le Ministre du Commerce, de l'Artisanat et du Tourisme;

Que cette situation a conduit le Ministre du Commerce, de l'Artisanat et du Tourisme, à adresser en vain des mises en demeure à la requérante;

Considérant que la Société Ouvrière du Bâtiment et Travaux Publics (SOBA-TP) est curieusement restée indifférente à la mise en demeure écrite à elle adressée.

Que son attitude, à la limite de la désinvolture, a conduit à la résiliation du contrat;

Qu'il est de principe, que nul ne doit se prévaloir de sa propre turpitude;

Que c'est en vain que la requérante soutient le principe de la caducité du contrat initial;

Qu'il est du reste curieux de constater que la requérante évoque le caractère abusif de la rupture du contrat supposé par elle caduc;

Que l'on ne peut résilier un contrat qui n'existe plus du fait de sa caducité;

Que manifestement, la requérante se confond elle-même dans les moyens qu'elle développe;

Qu'il échet de le débouter de toutes ses prétentions tendant à condamner l'Etat à des dommages intérêts à son profit;

Qu'en conséquence il convient de rejeter au fond le recours du Directeur de la Société Ouvrière du Bâtiment et Travaux Publics (SOBA-TP) parce que non fondé.


PAR CES MOTIFS,

D E C I D E:

Article 1er: Le recours en date à Cotonou du 8 décembre 2000 de la Société Ouvrière du Bâtiment et Travaux Publics (SOBA-TP) contre l'Etat béninois tendant à voir celui-ci condamné à lui payer des dommages et intérêts, est recevable.

Article 2 : Ledit recours est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié aux parties et au Procureur Général près la Cour suprême;

Article 4: Les dépens sont mis à la charge de la requérante.

Ainsi fait et délibéré par la Cour suprême (chambre administrative) composée de:

Grégoire ALAYE, Président de la Chambre Administrative,
PRESIDENT;

Joséphine OKRY-LAWIN }
et } CONSEILLERS.
Victor D. ADOSSOU }

Et prononcé à l'audience publique du jeudi dix août deux mille six, la Chambre étant composée comme il est dit ci-dessus en présence de:

René Louis KEKE
MINISTERE PUBLIC;

Et de Maître Irène O. AÏTCHEDJI,
GREFFIER.

Et ont signé

Le Président, Le Rapporteur, Le Greffier,

G. ALAYE.- V. D. ADOSSOU.- I. O. AÏTCHEDJI.-


Synthèse
Formation : Chambre administrative
Numéro d'arrêt : 76ca
Date de la décision : 10/08/2006

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;bj;cour.supreme;arret;2006-08-10;76ca ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award