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23/11/2006 | BéNIN | N°101

Bénin | Bénin, Cour suprême, Chambre administrative, 23 novembre 2006, 101


N°101/CA du REPERTOIRE REPUBLIQUE DU BENIN

N° 2000-092/CA DU GREFFE AU NOM DU PEUPLE BENINOIS

ARRET DU 23 novembre 2006 COUR SUPREME

AFFAIREADANZOUNON Clovis CHAMBRE ADMINISTRATIVE


C/
Ministre de l'Intérieur de la

Sécurité et de l'Administration
Territoriale



La Co...

N°101/CA du REPERTOIRE REPUBLIQUE DU BENIN

N° 2000-092/CA DU GREFFE AU NOM DU PEUPLE BENINOIS

ARRET DU 23 novembre 2006 COUR SUPREME

AFFAIREADANZOUNON Clovis CHAMBRE ADMINISTRATIVE


C/
Ministre de l'Intérieur de la
Sécurité et de l'Administration
Territoriale

La Cour,

Vu la requête en date, à Lokossa, du 11 juillet 2000, enregistrée au greffe de la cour suprême sous le n° 717/GCS du 14 juillet 2000, par laquelle monsieur Clovis ADANZOUNON, commissaire de police de 1ère classe, matricule 1309, 03 BP 3808 Cotonou, a introduit un recours de plein contentieux contre le décret n° 2000-240 du 28 avril 2000 portant nomination des Commissaires de Police aux grades supérieurs au titre de l'année 1999;

Vu la communication faite pour ses observations au Ministre de l'Intérieur, de la Sécurité et de l'Administration Territoriale, de la dite requête, du mémoire ampliatif ainsi que de toutes les pièces y annexées par lettre n°1094/GCS du 30 avril 2001;

Vu la mise en demeure n° 2008/GCS du 02 septembre 2002 adressée au Ministre de l'Intérieur, de la Sécurité et de l'Administration Territoriale;

Vu la consignation constatée par reçu n°1799 du 24 juillet 2000;

Vu l'ordonnance n° 21/PR du 26 avril 1966 organisant la cour suprême, remise en vigueur par la loi n°90-012 du 1er juin 1990;

Vu la loi n° 86-013 du 26 février 1986 portant statut général des Agents Permanents de l'Etat;

Vu la loi n° 93-010 du 20 août 1997 portant Statut Spécial des Personnels de la Police Nationale;

Vu le décret n° 97-622 du 30 décembre 1997 portant Statuts Particuliers des corps de la Police Nationale;

Vu toutes les autres pièces du dossier;

Ouï le Président Grégoire ALAYE en son rapport;

Ouï l'Avocat Général Louis René KEKE en ses conclusions;

Après en avoir délibéré conformément àla loi;

En la forme

Considérant que le recours du sieur ADANZOUNOU Clovis est recevable pour avoir été introduit dans les forme et délai de la loi.

Au fond

Considérant que le sieur Clovis ADANZOUNON, précédemment officier de police de 2ème classe, a été promu au grade d'officier de police de 1ère classe en 1991 après l'obtention du brevet supérieur de police judiciaire, puis à celui de commissaire de police de 1ère classe en 1993;

Qu'en avril 2000, par décret n°2000-240/MISAT, il a été procédé à la promotion au grade de commissaire principal, de certains cadres de la police nationale, dont quelques uns de sa promotion;

Qu'ayant constaté que non seulement ledit décret ne lui accordait pas cet avancement, mais encore constatait la promotion au grade de commissaire principal à d'autres cadres de la police moins anciens que lui dans le corps et le grade, il demande à la cour d'annuler l'acte querellé et de le reclasser conformément aux textes en vigueur;

Considérant qu'à l'appui de sa requête, le requérant invoque les moyens tirés de la violation de la loi, de la violation du principe de l'égalité de tous devant la loi, et du détournement de pouvoir;

Sur le premier moyen du requérant tiré de la violation de la loi en ce que certaines dispositions de la loi n°93-010 du 20 août 1997 portant Statut Spécial des Personnels de la Police Nationale, du décret n°97-622 du 30 décembre 1997 portant Statuts Particuliers des corps de la Police Nationale, et de l'arrêté n°085/ MISAT/ DC/ DGPN/DAP/SPRH/SA du 07 avril 1999 aurait été violées en ce qui concerne son avancement de grade;

Considérant que dans son mémoire ampliatif du 09 janvier 2001 enregistré au greffe de la cour sous le n°037/GCS du 12 janvier 2001, le requérant allègue qu'il venait de réunir huit (08) ans d'ancienneté au grade de commissaire de 1èreclasse sans pouvoir bénéficier, comme ses collègues, de l'avancement au grade de commissaire principal alors que le décret précité n'exigeait qu'une ancienneté minimale de quatre (04) ans;

Qu'en outre, l'administration aurait «promu plusieurs commissaires de police qui sont plus jeunes que lui dans le corps et dans le grade, et un autre qui n'a même pas le diplôme qui donne 75 points (sic) alors que le tableau d'avancement est établi par ordre de mérite», violant ainsi les dispositions statutaires prévues tant par la loi que ses textes d'application ci-dessus cités;

Considérant que les articles 56 et 57 alinéa 2 de la loi n°93-010 du 20 août 1997 portant Statut Spécial des Personnels de la Police Nationale disposent:

Article 56: Les avancements ne peuvent intervenir qu'au profit des fonctionnaires de police inscrits sur un tableau d'avancement dans les conditions fixées pour chaque corps par le statut particulier.

Article 57 alinéa 2: Les fonctionnaires de police sont inscrits au tableau par ordre de mérite.

Considérant par ailleurs que le décret n°97-622 du 30 décembre 1997 portant Statuts Particuliers des corps de la Police Nationale dispose en son article 61 :

«En application des dispositions de l'article 56 de la loi n°93-010 du 20 août 1997, peuvent être inscrits au tableau d'avancement dans le corps des commissaires de police:

1-Pour le grade de commissaire de police de 1ère classe:

Les commissaires de police de 2e classe comptant au moins trois (03) ans dans le grade ou deux (02) ans si les intéressés sont recrutés sur la base d'un titre universitaire de spécialité de niveau supérieur à la maîtrise;

2-Pour le grade de commissaire principal de police:

Les commissaires de police de 1ère classe comptant au moins quatre (04) ans dans le grade;

3-Pour le grade de commissaire divisionnaire de police:

Les commissaires principaux de police comptant au moins trois (03) ans dans le grade et titulaires du diplôme d'études supérieures appliquées ( DESAP ).

4-Pour le grade de contrôleur général de police:

Les commissaires divisionnaires de police comptant au moins trois (03) ans dans le grade.»

Considérant qu'il résulte de la lecture combinée des dispositions ci-dessus citées que le passage d'un grade inférieur à un grade supérieur est soumis à des conditions bien déterminées prévues aussi bien par le statut spécial des personnels de la police nationale que par le décret portant statut particulier des corps des personnels de la dite police;

Que, de manière spécifique, pour mériter le passage du grade de commissaire de police de 1ère classe à celui de commissaire principal de police, comme le souhaite le requérant, il faut, entre autres, pouvoir justifier d'une ancienneté de quatre (04) ans au moins au grade inférieur;

Considérant qu'à la date de parution du décret querellé, c'est-à-dire le 28 avril 2000, le requérant qui était déjà commissaire de police de 2ème classe depuis le 10 août 1988 (cf décret n°98-387 du 11 septembre 1998 ) et commissaire de police de 1ère classe en 1993 (cf décret n°98-375 du 11 septembre 1998 ), justifiait d'une ancienneté de sept (07) ans au grade de commissaire de police de 1ère classe, dépassant largement l'ancienneté minimale de quatre (04) ans exigée par la loi;

Considérant qu'en ne l'inscrivant pas au tableau d'avancement, et en ne procédant pas à son avancement, l'administration de la police qui, par ailleurs, ne lui reproche aucun manquement au règlement qui aurait pu justifier son blocage au grade de commissaire de police de 1ère classe, ne lui permet pas de jouir, comme ses collègues du même grade, de son droit à l'avancement prévu par le statut spécial et les statuts particuliers des corps de personnels de la police nationale;

Que, par cette omission, l'administration a effectivement violé, entre autres les dispositions de l'article 61 du décret n°97-622 du 30 décembre 1997 portant statut particulier des corps des personnels de la police nationale;

Qu'il y a donc lieu d'accueillir le moyen du requérant tiré de la violation de la loi;

Sur le moyen du requérant tiré de la violation du principe de l'égalité de tous devant la loi, sans qu'il soit besoin d'examiner le dernier moyen:

Considérant que le sieur Clovis ADANZOUNON invoque, par ailleurs, dans son mémoire ampliatif, le moyen tiré de la violation du principe de l'égalité de tous devant la loi en ce que « l'avancement est fait non sur le principe de l'égalité de tous les citoyens devant la loi mais plutôt sur la base de la race, de la région et de la couleur politique»;

Que, pour illustrer cette affirmation, il fournit des exemples de collègues de même grade ou même de grade inférieur qui auraient bénéficié de l'avancement de grade pendant que son nom ne figurait pas sur l'acte constatant leur promotion;

Considérant que de l'instruction du dossier de la cause, et de l'examen comparatif des décrets n°98-387 du 11 septembre 1998 portant reconstitution de carrière des fonctionnaires de police et n°2000-240 du 28 avril 2000 portant nomination des commissaires de police au grade supérieurs au titre de l'année 1999, il ressort que:

1-Comme le requérant, le commissaire de police de 2ème classe TALON Roger, matricule 1310 a vu sa carrière reconstituée par le décret de 1998 ainsi qu'il suit:

- Officier de police de 2ème classe à compter du 10 août 1982.
- Officier de police de 1ère classe à compter du 10 août 1984.
- Commissaire stagiaire à compter du 10 août 1987.
- Commissaire de 2ème classe à compter du 10 août 1988.
( cf décret n°98-387 du 11 septembre 1998, p.4 et 5).

Par contre, seul le nom du commissaire de police TALON Roger de la même promotion que le requérant figurait parmi les noms des cinq commissaires de police promus au grade de commissaire principal « à compter du 1er juillet 1999» (cf page 3 point III-5 de l'article 1er du décret n°2000-240 du 28 avril 2000 ) alors qu'aucune disposition dudit décret ne stipulait qu'il avait été promu à titre exceptionnel, échappant ainsi à la condition habituelle relative à l'ancienneté dans le corps des commissaires de police de 1ère classe.

2- A la différence du requérant ADANZOUNON Clovis, devenu commissaire de police de 2ème classe le 10 août 1988, les commissaires dont les noms suivent, n'ont atteint ce grade que deux ans plus tard c'est-à-dire le 1er juin 1990 pour les trois premiers et quatre mois plus tard pour le dernier: (cf p.4, 5 et 7 du décret n° 98-387 du 11 septembre 1998):
- GANGBO Kouassi Léon, Matricule 1383
- OKE-VE Noël, Matricule 1401
- SYLLA Mohamed, Matricule 1386
- DADJO Marius, Matricule 532, devenu commissaire de 2e classe à compter du 05 janvier 1989.

Malgré ce décalage quant à la date d'accession au grade de commissaire de 2e classe, les quatre fonctionnaires de police précités ont été promus au grade de commissaire principal de police par le décret querellé qui n'a nullement constaté ladite promotion au profit du requérant (cf p.3 du décret n° 2000-240 du 28 avril 2000).

Considérant que le requérant ayant atteint le grade de commissaire de 2e classe avant les autres fonctionnaires ci-dessus cités ne pouvait se voir refuser l'accès aux grades supérieurs en dehors de tout motif sérieux de blocage de sa carrière ou de promotion exceptionnelle pour les autres sans être victime d'une situation d'inégalité préjudiciable pour tout le reste de sa carrière; que cette inégalité constitue une flagrante violation de son droit à une évolution normale et régulière de sa carrière; que ledit droit étant prévu par l'article 59 de la loi n° 93-010 du 20 août 1997 portant Statut Spécial des Personnels de la Police Nationale dispose:
«Pour l'établissement du tableau d'avancement, il est tenu compte essentiellement de l'ancienneté dans le grade, l'ancienneté dans le corps, des notes annuelles précédant l'année de proposition, des diplômes professionnels obtenus, des récompenses et des punitions».

Qu'il échet donc d'accueillir également, comme fondé, le moyen du requérant tiré de la violation du principe de l'égalité de tous devant la loi;

Mais considérant que ce qui est en cause dans le cas d'espèce, c'est moins l'annulation du décret n° 2000-240 que l'absence de prise en compte du requérant par ledit décret;

Que ce qui est en cause, ce n'est pas le décret n° 2000-240 pris au profit de ses collègues en tant que tel, mais le fait que le requérant n'ait pas jouit des mêmes droits que ses promotionnaires;

Considérant que la reconstitution de carrière du requérant ne passe pas nécessairement par l'annulation du décret n° 2000-240 portant nomination des commissaires de police aux grades supérieurs au titre de l'année 1999, comme il le sollicite ;

Qu'elle en est même indépendante;

Que par conséquent, la demande d'annulation dudit décret doit être rejetée;

Considérant en revanche, qu'il y a lieu de faire droit à la demande de reconstitution de sa carrière formulée par le requérant.

PAR CES MOTIFS,

DECIDE:

Article 1er: Le recours de plein contentieux du requérant dirigé contre le décret n° 2000-240 du 28 avril 2000 est recevable.

Article 2: Le Ministre de l'Intérieur de la Sécurité Publique et des Collectivités Locales est condamné à procéder à la reconstitution de carrière du requérant conformément aux textes sus rappelés.

Article 3: Le surplus de la demande est rejeté.

Article 4: Notification du présent arrêt sera faite aux parties et au Procureur Général près la Cour Suprême;

Article 5: .Les dépens sont mis à la charge du Trésor Public ;

Ainsi fait et délibéré par la cour suprême, (chambre administrative), composée de:

ALAYE Grégoire, Président de la chambre administrative,

PRESIDENT
LAWIN Joséphine }
Et ( CONSEILLERS;
ADOSSOU Victor }

Et prononcé à l'audience publique du jeudi vingt trois novembre deux mille six la Chambre étant composée comme il est dit ci-dessus, en présence de:

Louis René KEKE ,
MINISTERE PUBLIC;

Et de Maître Irène AITCHEDJI,
GREFFIER.;

Et ont signé

Le Président-Rapporteur Le Greffier

G. ALAYE.- I. AITCHEDJI.-


Synthèse
Formation : Chambre administrative
Numéro d'arrêt : 101
Date de la décision : 23/11/2006

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;bj;cour.supreme;arret;2006-11-23;101 ?
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