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23/11/2006 | BéNIN | N°110

Bénin | Bénin, Cour suprême, Chambre administrative, 23 novembre 2006, 110


N° 110/CA DU REPERTOIRE REPUBLIQUE DU BENIN

N° 03-84/CA DU GREFFE AU NOM DU PEUPLE BENINOIS

Arrêt du 23 Novembre 2006 COUR SUPREME

AFFAIRE: DAMALA Latif CHAMBRE ADMINISTRATIVE
C/
Préfet de l'Atlantique
Et du Litt

oral




La Cour,


Vu la requête en date du 16 juin 2003, enregistrée au Gre...

N° 110/CA DU REPERTOIRE REPUBLIQUE DU BENIN

N° 03-84/CA DU GREFFE AU NOM DU PEUPLE BENINOIS

Arrêt du 23 Novembre 2006 COUR SUPREME

AFFAIRE: DAMALA Latif CHAMBRE ADMINISTRATIVE
C/
Préfet de l'Atlantique
Et du Littoral

La Cour,

Vu la requête en date du 16 juin 2003, enregistrée au Greffe de la Cour le 17 juin 2003 sous le n°288/GCS, par laquelle Monsieur DAMALA I. Latif, représentant commercial, domicilié au carré 179-224 Bokossi Tokpa, par l'organe de son Conseil, Maître Evelyne M. da SILVA, Avocat à la Cour, Lot 118 Sud Zone résidentielle Cotonou, a introduit un recours pour excès de pouvoir contre le Préfet du Département de l'Atlantique aux fins d'annulation de l'arrêté n°2/415/DEP-ATL/SG/SAD du 26 août 1994 et des permis d'habiter n°2/247, et n°2/594 du 15 septembre 1998 et n°s 2/1055 et 2/1056 du 30 décembre 1999.

Vu la lettre n°690/GCS en date du 09 juillet 2003, par laquelle le requérant a été invité à consigner conformément à la loi.

Vu la lettre n°044/GCS du 09 janvier 2004, par laquelle le requérant a été invité à produire son mémoire ampliatif dans un délai de deux mois; puis, à sa demande le délai a été prorogé par lettre n°1990/GCS en date du 25 mai 2004;

Vu les lettres n°819/GCS et n°823/GCS du 24 février 2005, par lesquelles communication de la requête, du mémoire ampliatif et des pièces a été faite respectivement à l'administration et à Monsieur DOUROSSIMY Rigobert Guy pour leurs observations.

Vu la lettre n°823/GCS du 24 février 2005, par laquelle le mémoire ampliatif et les pièces ont été également communiqués à Monsieur CAPO CHICHI Alphonse Gratien pour ses observations.

Vu la lettre en date du 19 avril 2005 enregistrée au Greffe de la Cour sous le n°543/GCS du 26 avril 2005 par laquelle Maître Alexandrine F. SAÏZONOU - BEDIE Conseil du Préfet de l'Atlantique a produit son mémoire en défense.

Vu la lettre n°698/GCS du 30 mai 2005 par laquelle Monsieur DOUROSSIMY Guy, par l'organe de Maître Alfred BOCOVO, Avocat à la Cour, a produit un mémoire responsif;

Vu la lettre en date à Savalou du 16 mars 2005 enregistré au Greffe de la Cour le 25 mars 2005 sous le n°387/GCS, par laquelle Monsieur CAPO CHICHI Alphonse Gratien a fait ses observations.

Vu la lettre n°2495/GCS du 05 juillet 2005 par laquelle les observations de Monsieur CAPO CHICHI Alphonse, de Monsieur DOUROSSIMY Guy et de l'administration ont été communiquées au requérant pour ses répliques.

Vu la consignation constatée par reçu n° 2566 du 16 juillet 2003 ;

Vu toutes les pièces du dossier;

Vu l'Ordonnance n°21/PR du 26 avril 1966 organisant la procédure devant la Cour Suprême, remise en vigueur par la loi n°90-012 du 1er juin 1990;

Ouï le Conseiller Jérôme O. ASSOGBA en son rapport ;

Ouï l'Avocat Général Clémence YIMBERE-DANSOU en ses conclusions;

Après en avoir délibéré conformément à la loi;

En la Forme

Considérant que Maître Alexandrine F. SAÏZONOU Bedié conseil de l'Administration soutient que le requérant n'a pas produit copie de son recours gracieux et n'a pas rapporté la preuve de son dépôt;

Qu'il conclut donc à l'irrecevabilité du recours;

Mais considérant qu'il est établi au dossier, notamment à l'examen des pièces produites par le requérant, que celui-ci a adressé au préfet de l'Atlantique et du Littoral un recours gracieux daté du 14 février 2003 réceptionné au SAC de la préfecture de Cotonou le 17 février 2003;

Qu'à la suite de ce recours gracieux le requérant, face au silence de l'administration, a introduit un recours en annulation enregistré au greffe de la Cour le 17 juin 2003;

Considérant que le recours en annulation enregistré à la Cour le 17 juin 2003 suite à un recours gracieux reçu par l'administration défenderesse le 17 février 2003 est intervenu dans le délai prévu par l'article 68 de l'ordonnance n°21/PR du 26 avril 1966 fixant les règles de procédure devant la Cour Suprême;

Qu'il y a donc lieu de déclarer le recours pour excès de pouvoir en date du 16 juin 2003 de Monsieur DAMALA Latif recevable pour être intervenu dans les forme et délai prévus par la loi;

Au Fond

Considérant que le requérant expose qu'il a acquis le 18 août 1980 auprès de Monsieur CAPO CHICHI Alphonse Gratien deux parcelles contiguës G et H au quartier Djidjè à Cotonou;

Que Monsieur CAPO CHICHI qui avait acquis lesdites parcelles le 14 janvier 1971 avait obtenu les permis d'habiter n°294 et 295 du 21 septembre 1972 y afférents;

Qu'à la suite de la cession intervenue entre lui et le sieur CAPO CHICHI, la mutation des titres est intervenue et il lui a été délivré les permis d'habiter n°2/494 et 2/495 en date du 22 septembre 1980;

Que s'étant aperçu qu'une construction était en train d'être érigée sur ces parcelles, il a engagé devant le tribunal de première instance de Cotonou une action en cessation des travaux au cours de laquelle l'arrêté et les permis d'habiter objets du présent recours lui ont été communiqués;

Que contre ces actes administratifs pris en violation de ses droits, il a saisi le préfet des départements de l'Atlantique et du Littoral le 14 février 2003 d'un recours gracieux demeuré sans suite;

Que face au silence de l'autorité administrative, il a introduit devant la Cour un recours contentieux en annulation desdits actes pour détournement de pouvoir et violation du principe du contradictoire par l'Administration;

Sur le moyen tiré du détournement de pouvoir

Considérant que le requérant soutient qu'il y a eu détournement de pouvoir en ce que l'objectif du préfet en prenant les différents actes attaqués est de favoriser le sieur DOUROSSIMY Guy à acquérir les parcelles G et H du lot 1034 de Djidjè et ce, à son détriment;

Considérant que le détournement de pouvoir réside dans l'accomplissement par l'autorité administrative d'un acte de sa compétence mais dans un but autre que celui pour lequel l'acte pouvait légalement être accompli;

Considérant que l'administration invitée à faire ses observations, n'a présenté aucune explication relativement à ce grief, s'étant limité au moyen tendant à l'irrecevabilité du recours;

Que monsieur DUROSSIMY Guy, bénéficiaire des actes attaqués, quant à lui justifie la décision de l'Administration par le non respect de la part du requérant et du sieur CAPO CHICHI Gratien Alphonse des dispositions de l'article 5 du décret n° 64-276/PC/MFAEP/EDT du 2 décembre 1964 fixant le régime des permis d'habiter au Bénin;

Considérant que de l'examen du dossier il est établi que le motif énoncé dans l'acte et qui sous tend l'arrêté n°2/415/DEP-ATL/SG/SAD du 26 août 1994 portant retrait des parcelles en cause aux nommés CAPO CHICHI Alphonse et Barystème et leur attribution à la collectivité Houngbo-Avocègamou est la fraude dont seraient entachées leurs attributions initialesà ceux-ci ;

Mais considérant qu'aucun élément justifiant la fraude dont l'administration fait état, n'apparaît au dossier;

Que dans ces conditions l'objectif visé par l'administration en prenant cet arrêté est autre que celui prétendu de corriger une injustice qu'aurait subie la collectivité Houngbo-Avocègamou lors des attributions de parcelles;

Considérant que le nommé DOUROSSIMY Guy n'a pas contesté les allégations du requérant selon lesquelles, lesdites parcelles vierges sont situées dans le prolongement de la ruelle de son domicile et ont attiré sa convoitise;

Que la contradiction relevée entre le motif énoncé par Monsieur DOUROSSIMY (violation des prescriptions de l'article 5 du décret n°64-276 du 02 décembre 1964) et celui retenu dans l'arrêté préfectoral n°2/415 du 26 août 1994 (nature frauduleuse de l'opération d'attribution des parcelles) est la preuve de la manigance entreprise par le sieur DOUROSSIMY pour amener le préfet de l'Atlantique et du Littoral à prendre l'arrêté querellé et les permis d'habiter subséquents et confirme donc ces allégations de monsieur Damala Latif;

Qu'ainsi, la prise des actes querellés par l'administration qui vise plutôt à favoriser un citoyen au détriment d'un autre, qu'à corriger une prétendue fraude, constitue un détournement de pouvoir emportant annulation de l'arrêté n°2/415/DEP-ATL/SG/SAG du 26 août 1994 et les actes subséquents notamment les permis d'habiter n°s 2/247 et 2/594 du 15 septembre 1998 et numéros 2/1055 et 2/1056 du 30 décembre 1999;

Sur le moyen tiré de la violation du principe du contradictoire

Considérant que le requérant fait observer que la décision du préfet ayant conduit à l'établissement des permis d'habiter au profit de Monsieur DOUROSSIMY Guy est intervenue sans que l'autorité administrative ait cru devoir recueillir préalablement ses observations;

Que le préfet a établi les permis d'habiter attaqués sans avoir préalablement annulé les siens;

Considérant que l'autorité administrative, est tenue de respecter le principe du contradictoire toutes les fois que sa décision est de nature à nuire aux intérêts individuels;

Considérant que dans le cas d'espèce, il n'est pas établie la preuve de ce que le requérant, encore moins les nommés CAPO CHICHI Alphonse Gratien et CAPO CHICHI M. Eurysthène, titulaires de droit sur les parcelles G et H du lot 1034 de Djidjè, ont été entendus par le préfet avant la prise de la décision de retrait desdites parcelles pour fraude;

Qu'en agissant tel qu'elle l'a fait, l'administration préfectorale de l'Atlantique a violé le principe du contradictoire;

Que par conséquent tous les actes pris par elle à travers cette décision doivent être annulés;

Par ces motifs,

Décide:

Article 1er: Le recours de monsieur Damala I. Latif contre l'arrêté n° 2/415/DEP-ATL/SG/SAD du 26 août 1994 et les permis d'habiter n° 2/247, 2/594 du 15 septembre 1998 et n°s 2/1055, 2/1056 du 30 décembre 1999 pris par le préfet du département de l'Atlantique est recevable.

Article 2: Ledit arrêté et tous les actes subséquents notamment les permis d'habiter n°s 2/247, 2/594 du 15 septembre 1998 et n°s 2/1055, 2/1056 du 30 décembre 1999 sont annulés.

Article 3: Les dépens sont à la charge du Trésor Public.

Article 4: Notification du présent arrêt sera faite aux parties ainsi qu'au Procureur Général près la Cour Suprême;

Ainsi fait et délibéré par la Cour Suprême (Chambre Administrative) composée de:

Jérôme O. ASSOGBA, Conseiller à la Chambre Administrative;

Président;

Eliane R. G. PADONOU

Etienne FIFATIN

Et prononcé à l'audience publique du jeudi vingt trois novembre deux mille six, la Chambre étant composée comme il est dit ci-dessus en présence de:

Clémence YIMBERE-DANSOU

MINISTERE PUBLIC;

Et de Me Geneviève GBEDO,
GREFFIER.;

Et ont signé

Le Président-Rapporteur Le Greffier

J. O. ASSOGBA.- G. GBEDO.-


Conseillers


Synthèse
Formation : Chambre administrative
Numéro d'arrêt : 110
Date de la décision : 23/11/2006

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;bj;cour.supreme;arret;2006-11-23;110 ?
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