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26/02/1996 | BURUNDI | N°R.C.C7666

Burundi | Burundi, Cour suprême, 26 février 1996, R.C.C 7666


Texte (pseudonymisé)
Vu la requête de pourvoi formée par B Ad en date du 10/05/1995 et reçue au greffe de la Cour Suprême en date du 17/05/1995 tendant à demander la cassation du jugement RCA 3925 rendu au degré d'appel par le Tribunal de Grande Instance en Mairie de Bujumbura en date du 31 Mars 1995;
Vu en expédition conforme le jugement RCA 3925 du Tribunal de Grande Instance en Mairie de Bujumbura en date du 31/03/1995 et dont le dispositif est ainsi conçu :
« Yakiriye isubiramwo ry'urubanza RCA 3903 ariko isanze ridashemeye;
« Ikomeje urwaciwe na Af Aa y'Igihugu mu ntara ya Bujumbura;
«

Amagarama atangwa na B Ad;
« Uko niko ruciwe kandi rusomwe i Bujumbura...

Vu la requête de pourvoi formée par B Ad en date du 10/05/1995 et reçue au greffe de la Cour Suprême en date du 17/05/1995 tendant à demander la cassation du jugement RCA 3925 rendu au degré d'appel par le Tribunal de Grande Instance en Mairie de Bujumbura en date du 31 Mars 1995;
Vu en expédition conforme le jugement RCA 3925 du Tribunal de Grande Instance en Mairie de Bujumbura en date du 31/03/1995 et dont le dispositif est ainsi conçu :
« Yakiriye isubiramwo ry'urubanza RCA 3903 ariko isanze ridashemeye;
« Ikomeje urwaciwe na Af Aa y'Igihugu mu ntara ya Bujumbura;
« Amagarama atangwa na B Ad;
« Uko niko ruciwe kandi rusomwe i Bujumbura mu ntahe y'icese yo ku wa 31/3/1995 ».
Vu que le jugement avait été signifié à la partie requérante le 21/4/1995; que la requête est partant dans les délais;
Vu l'ordonnance n° 7666 du 11/12/1995 donnant acte au demandeur en cassation du dépôt de sa requête et ordonnant que cette requête et la même ordonnance soient signifiées au défendeur en cassation et qu'assignation lui soit donnée de comparaître devant la Chambre de cassation à son audience publique du 22/12/1995 aux fins d'y présenter ses dires et moyens de défense et entendre statuer sur les mérites du recours exercé;
Vu l'audience publique du 22/12/1995 à laquelle toutes les parties comparaissent, plaident et concluent;
Oui l'avis du Ministère Public en son avis tendant à demander à la Cour de se pencher sur le deuxième moyen du pourvoi;
Après quoi la Cour prit la cause en délibéré pour statuer comme suit :
Attendu que le litige prend sa source dans une lettre que dame Y Ab a adressée au Tribunal de Résidence de ROHERO pour demander les aliments pour elle et pour les enfants que son mari aurait abandonnés;
Attendu que le Tribunal de Résidence statua par défaut le 25/1/1994 par le jugement RCF 487/93 libellé comme suit :
1) Sentare ishinze ko yakiriye imburano nkuko yazishikirijwe na Y Ab kandi ivuze ko zishemeye mu mpande zazo zose.
2) Sentare itegetse NGANYIRIMANA Diomède mwene wabo na B Ad kwimuka akava muri urwo rugo kuva urubanza rucitse.
3) B Ad atange ibitunga umuryango bingana n'amafaranga 30.000 ku kwezi.
4) B Ad arishe factures zose z'ibitaro zimaze kuboneka yongere azoze arariha ibitalo n'imiti igihe bikenewe.
5) B Ad asubize umugore ibi bikurikira (....)
6) Sentare itegetse kandi Ac C avukana na BIGIRIMANA ko yokwimuka nawe nyene kuva uru rubanza rucitse... »
Attendu que BIGIRIMANA interjeta appel contre ce jugement; que le tribunal de Grande Instance, par le jugement avant faire droit décida le 29/3/1994 comme suit :
B Ad ategetswe guha buri kwezi umugore wiwe amafaranga ibihumbi mirongo umunani (80.000 Frs) akayimenyamwo mu kurondera aho aba nico arya we n'umwana bari kumwe.
Ategetse kandi gusubiza mu maguru masha umwana mw'ishule akamurihira n'amahera y'ishule.B Ad asubize umugore n'umwana ivyambarwa vyabo (effets personnels) biri mu nzu.
Amagarama arabangiriwe ».
Attendu qu'en date du 26 mai 1994; B Ad fit opposition contre le jugement; que le Tribunal a ensuite rendu le jugement dont pourvoi;
Attendu que le requérant fonde son pourvoi sur quatre moyens;
a) Premier moyen pris de la violation de l'article 136 du Décret-loi n°1/024 du 28 avril 1993 portant réforme du code des personnes et de la famille.
Attendu que sous ce premier moyen, il est reproché au juge d'avoir alloué une pension de 80.000 Frs par mois alors que son revenu de fonctionnaire public est de 40.000 Frs par mois alors que celui de la créancière de la pension est de 23.348 Frs; qu'habituellement nos Cour et Tribunaux accordant 30% des revenus dûment prouvés et attestés en faveur du créancier; que le Tribunal a ainsi violé l'article 176 du décret-loi n° 1/024 du 28 avril 1993 par défaut d'application;
Attendu qu'à ce reproche, la partie défenderesse réplique que le Tribunal a tenu compte des ressources du débiteur ainsi que des besoins du créancier d'aliment;
Qu'il a démontré que le demandeur en cassation possède en plus de son salaire de 40.000 Frs et de sa maison familiale construite sans crédit, des véhicules, des troupeaux de vaches, des terres exploitées etc.
Que donc ce moyen est sans fondement;
Attendu qu'il ressort des pièces du dossier que le requérant a protesté contre l'allocation d'un tel montant devant le Tribunal, mais que celui-ci a malgré tout confirmé la décision par défaut; prenant pour motif que l'actuel requérant n'a pas comparu pour expliciter sa position;
Attendu que le Tribunal n'a pas; dans sa décision, donné la base de calcul du montant alloué, qu'il n'a pas justifié la réévaluation de la pension à accorder, que partant il n'a pas motivé sa décision et n'a pas appliqué l'article 136 du nouveau code des personnes et de la famille; qu'en ne le faisant pas le Tribunal a exposé sa décision à la censure de la Chambre de cassation de la Cour Suprême;
b) Deuxième moyen pris de la violation du contrat judiciaire et du fait d'avoir statué ultra petita
Attendu que sous ce moyen, le requérant fait grief au juge d'appel d'avoir revu en hausse la pension accordée alors que la partie défenderesse en cassation qui en a bénéficié n'avait pas fait appel contre le jugement R.C.F.3487 du 25 janvier 1994 qui lui accordait 30.000 Frs de pension alimentaire, qu'en outre le tribunal a autorisé l'épouse à quitter le toit conjugal et à se chercher un logement aux frais de son mari alors que ni dans l'exploit introductif d'instance ni dans le premier jugement il n'était question de résidence séparée; que le juge a donc statué ultra petita et a violé l'effet dévolutif de l'appel;
Attendu que la partie défenderesse réplique que la pension de 30.000 Frs que lui a accordée le jugement RCF 3487/93 était suffisant parce qu'elle était encore sous le toit conjugal, mais qu'après le jugement, elle a été chassée de la maison avec son enfant, qu'en cours d'instance dame Y Ab a demandé au juge d'appel de lui accorder de quoi l'entretenir compte tenu de la situation nouvelle, que c'est ainsi que la pension alimentaire a été révisée pour être rééquilibrée aux nouveaux besoins du créancier;
Attendu qu'il est vrai que l'actuelle partie défenderesse n'était pas partie appelante devant la juridiction qui a rendu le jugement entrepris; qu'elle n'a pas non plus fait un appel incident; que dans le jugement attaqué on ne trouve nulle trace des allégations selon lesquelles elle aurait demandé la révision de la pension alimentaire et des motifs qui l'auraient soutendue;
Attendu qu'aucun fondement légal ne justifie alors la révision en hausse de la pension alimentaire; que le juge d'appel était tenu de statuer dans les limites de la demande, il ne pouvait accorder plus que le premier juge n'avait accordé;
Qu'en plus de cela la résidence séparée ne figurait ni dans l'acte introductif d'instance ni dans les conclusions de la partie actuelles défenderesse; qu'en statuant comme il l'a fait le Tribunal a statué ultra petita et a violé l'effort dévolutif de l'appel; et que sa décision doit pour cela être cassée;
c) Troisième moyen tiré de la violation des droits de la défense
Attendu qu'il est reproché au juge d'appel d'avoir statué sans offrir à la partie requérante la possibilité de se défendre;
Attendu qu'il ressort des pièces de procédure que le requérant s'est toujours abstenu de se présenter devant les juridictions qui ont rendu les décisions successives qui sont intervenues dans la présente cause; qu'il est patent que le requérant n'a pas fait diligence pour assurer sa défense; mais que par contre le juge d'appel a respecté la réglementation en matière de remises des causes où les parties font défaut; qu'il a ainsi offert à la partie défenderesse les occasions pour présenter ses dires et moyens de défense, mais que c'est la partie défenderesse qui a négligé ces occasions comme pour les procédures antérieures, , qu'à la procédure a été régulière et que la censure demandée manque de pertinence; que le moyen doit être pour cela écarté;
d) Quatrième moyen tiré de la violation des articles 128, a et 172 et suivants du code des personnes et de la famille
Attendu que selon le requérant les juges de fond n'avaient jamais été saisis ni d'une demande d'assignation d'une résidence séparée de la part de son épouse, ni de la garde des enfants, que normalement la suspension du devoir de cohabitation, l'assignation d'une résidence séparée, la garde des enfants, l'allocation de provision alimentaire en faveur de l'un des époux sont des décisions que le juge prend à titre de mesures provisoires pendant l'instance de divorce;, mais que malgré les dispositions légales en vigueur le juge a condamné à payer un logement séparé, à lui laisser la garde de l'enfant Darcy et à verser une pension supérieure au montant de son salaire mensuel;
Attendu la partie défenderesse rétorque même s'il n'y avait pas une action en divorce ni assignation de résidence séparée, le juge a constaté que la cohabitation était devenue impossible, qu'il y avait déjà une séparation de fait dont elle n'était pas responsable; et qu'au cours des audiences publiques le requérant avait déclaré qu'il ne veut plus la voir;
Attendu que ce moyen réjoint le premier sur de nouvelles bases; que par conséquent la réponse de la Cour ne peut différer de celle qu'elle a donné sous le premier moyen, qu'il est en effet permis au juge de prendre des mesures provisoires dans l'intérêt d'une des parties qui le demande mais que le juge accorde ces mesures dans les limites de la demande et en proportion des besoins et des ressources des parties;
Attendu que les moyens présentés par le requérant sont partiellement fondés et que le jugement entrepris doit être pour cela censuré;
Par tous ces motifs :
Vu la Constitution de la République;
Vu la loi n°1/004 du 14 janvier 1987 portant réforme du code de l'organisation et de la compétence judiciaires;
Vu le Décret-loi n°1/51 du 23 juillet 1980 relatif au pourvoi et à la procédure suivie devant la Chambre de Cassation de la Cour Suprême;
Oui le Ministère Public en son avis;
Statuant contradictoirement et publiquement;
Après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Déclare le pourvoi recevable et partiellement fondé;
Casse en conséquence le jugement RCA 3925 rendu par le Tribunal de Grande Instance de la Mairie de Bujumbura;
Renvoie la cause et les parties devant le Tribunal de Grande Instance de la Mairie de Bujumbura autrement composé pour statuer à nouveau;
Ordonne l'inscription de la présente décision en marge du jugement RCA 3925;
Met les frais à charge des deux parties : ¼ pour le demandeur et ¾ pour la défenderesse;
Ainsi arrêté et prononcé en audience publique du 26 Février 1996 où siégeaient Adrien NYANKIYE, Président, Timothée BISUMBAGUTIRA et Gérard SINDAYIGANZA, Conseillers, Assistés de NKENGURUTSE Sébastien, Officier du Ministère Public et de HABIYAMBERE Ignace, Greffier.
Le président : Adrien NYANKIYE (sé)
Les Conseillers : Timothée BISUMBAGUTIRA (sé); Gérard SINDAYIGANZA (sé)
Le Greffier : Ae A (sé)
COMMENTAIRE DE L'ARRET RCC 7666
L'arrêt sous analyse a été rendu en date 26 février 1996 par la Chambre de cassation de la Cour suprême entre B Ad (demandeur en cassation) et Y Ab Xdéfendeur en cassation).
Le commentaire qui suit requiert d'abord une présentation succincte des faits et de la procédure. Il sera ensuite exposé les arguments et thèses développés. Il sera également discuté les questions juridiques en cause avant de revenir à la réponse de la Cour. Le commentaire sera clos par une conclusion d'ensemble contenant la valeur et la portée de l'arrêt.
Résumé des Faits
Madame Y Ab meut une action en justice contre son mari B Ad, qui aurait abandonné sa famille, pour obtenir de lui versement d'aliments à elle et aux enfants communs.
Le Tribunal de résidence de Rohero condamne, sous le jugement RCF 3487/93 du 25 janvier 1994, le défendeur au paiement de 30.000 FBU par mois. B Ad interjettera appel contre ce jugement devant le Tribunal de Grande Instance en Mairie de Bujumbura sous le RCA 3904.
Le juge d'appel va maintenir le principe de la pension alimentaire mais cette fois-ci, le montant de la pension alimentaire sera porté à 80.000 FBU. Le mari va former opposition contre le jugement intervenu sous le RCA 3925 et le juge va rendre la décision attaquée en cassation, qui confirme le contenu du jugement RCA 3904.
Les arguments et thèses développés
Les arguments développés tournent autour de la question de base de calcul du montant de la pension alimentaire de l'article 136 du Code des Personnes et de la Famille, à la marge de manoeuvre offerte au juge dans l'évaluation de ce montant et les limites dans lesquelles le juge tranche les litiges qui lui sont soumis.
Le demandeur en cassation s'explique mal pourquoi il est condamné au paiement de la pension alimentaire d'un montant aussi élevé alors que « nos cours et tribunaux accordent 30 % des revenus dûment prouvés et attestés en faveur du créancier», étant donné que son revenu de fonctionnaire n'est que de 40.000 FBU par mois.
Le défendeur en cassation de son côté démontre que le juge d'appel a effectivement « tenu compte des ressources du débiteur» mais aussi « des besoins du créancier d'aliments». Il montre à cet effet que la partie adverse possède en plus de son salaire, une maison familiale construite sans crédit, des véhicules, des troupeaux de vaches, des terres exploitées, etc.
Le demandeur en cassation reproche au juge d'appel d'avoir revu à la hausse le montant des aliments octroyés par le premier juge alors que le créancier n'avait pas interjeté un appel incident et d'avoir statué sur la résidence séparée alors qu'aucune demande n'avait été formulée dans ce sens.
Le défendeur en cassation rétorquera que le juge d'appel a accru la pension alimentaire en partant du constat que dans l'entretemps, la créancière a été chassée du toit conjugal avec son enfant et que les besoins s'étaient corrélativement accrus.
Les questions juridiques en cause
Il est posé au juge de cassation deux questions à savoir l'évaluation de la pension alimentaire prévue par l'article 136 du Code des Personnes et de la Famille et le principe de l'interdiction de statuer infra ou ultra petita.
L'évaluation de la pension alimentaire
La question de l'évaluation de la pension alimentaire est organisée par l'article 136 CPF aux termes duquel « les aliments ne sont accordés que dans la proportion des besoins de celui qui les réclame et des ressources de celui qui les doit ».
Mais il y a lieu de remarquer que la solution n'est pas aussi aisée à trouver comme on peut être tenté de le croire. L'estimation des besoins du créancier et des ressources du débiteur reste relative.
Ainsi, tant que les différents revenus ne sont pas individualisés et évalués à leur juste valeur, toute fixation du montant de la pension par le juge demeure contestable. L'application de l'article 136 CPF laisse certes une marge d'appréciation au juge mais il doit faire preuve de clarté et fonder surtout sa décision sur des éléments probants, objectifs, vérifiés et vérifiables. Dans le cas qui nous occupe, le juge d'appel est critiqué pour avoir manqué à ce devoir.
Interdiction de statuer infra ou ultra petita
Le juge, lorsqu'une affaire lui est soumise, a le devoir de la trancher sous peine de déni de justice. Mais il doit agir à l'intérieur des limites tracées par les parties. C'est-à-dire qu'il doit tabler sur des demandes exprimées par les parties, sans plus ni moins. C'est l'interdiction qui est faite au juge de statuer infra ou ultra petita.
Le principe de l'interdiction de statuer infra ou ultra petita veut que le juge ne se prononce que sur tout ce qui lui est demandé et uniquement ce qui lui est demandé. Il ne doit pas faire preuve d'excès de zèle en se prononçant sur des éléments que les parties n'auront pas exprimé comme querelle
Le juge statue infra petita lorsqu'il omet de se prononcer sur un chef de demande. Par contre, il statue ultra petita lorsqu'il accorde ce qui n'a pas été demandé ou plus qu'il n'a été demandé . C'est dire qu'il y a omission de statuer lorsque le juge ne tranche pas dans sa décision une ou plusieurs demandes qui lui ont été soumises par les parties et l'ultra petita apparaît lorsque le juge se prononce sur une question dont il n'a pas été saisi .
La constatation de l'infra ou de l'ultra petita résulte de la comparaison entre le dispositif de la décision (et non les motifs : cass.soc. 29 janvier 1959, Bull.Civ, n°117) et les prétentions des parties telles qu'elles résultent du dernier état des conclusions . Toutefois, la comparaison ne peut porter que sur des conclusions dont le juge a été régulièrement saisi, et qui présentaient, dans leur dispositif ou dans leurs motifs, de véritables demandes .
Il convient de préciser ici qu'on considère que le juge a statué infra petita lorsque l'omission est involontaire ; le caractère volontaire de l'omission transforme celle-ci en un déni de justice .
Ainsi, au premier degré, le juge doit identifier les points querellés et les demandes y relatives et y répondre. Si le défendeur n'aura pas fait une demande reconventionnelle, le juge saisi ne pourra pas se proposer de lui accorder quoi que ce soit, même si l'équité recommanderait une telle démarche. Il est en effet tenu par le contenu de l'acte introductif d'instance et les conclusions des parties, qui constituent ensemble le contrat judiciaire qui s'impose au juge.
En instance d'appel, le juge devra statuer sur l'appel, en misant sur les moyens d'appel relevés par l'appelant, mais il ne pourra pas rejuger les points tranchés par le premier juge qui ne font pas objet de contestation. Ainsi, il se gardera de faire droit à l'intimé qui n'aura pas formé appel incident.
Réponse de la Cour
La Cour a rendu un arrêt de cassation. La chambre de cassation remet en cause la décision attaquée après avoir constaté que le juge d'appel « n'a pas donné la base de calcul du montant alloué, qu'il n'a pas justifié la réévaluation de la pension à accorder,...». Le juge de cassation a estimé à juste titre que ce manquement constitue un défaut de motifs lors que la motivation d'une décision judiciaire est un principe sacro-saint dans un Etat qui se veut de droit.
Le juge de cassation a également censuré le juge d'appel après le constat que ce dernier est allé plus loin en statuant au-delà de ce qui lui était demandé. En effet, le défendeur en cassation n'était pas appelant et n'avait pas non plus fait un appel incident. De plus, il n'apparait nulle part dans le jugement attaqué aucune trace des allégations selon lesquelles elle aurait demandé la révision de la pension alimentaire.
La même observation vaut en ce qui concerne la décision du juge d'appel quant à la résidence séparée des époux. A cet égard, le juge de cassation rappelle qu'il est « permis au juge de prendre des mesures provisoires dans l'intérêt d'une des parties qui le demande mais que le juge accorde ces mesures dans les limites de la demande et en proportion des besoins et des ressources des parties». Le juge de cassation rappelle ainsi au juge d'appel qu'il « était ténu de statuer dans les limites de la demande » et qu' « il ne pouvait accorder plus que le premier juge n'avait accordé».
Conclusion
L'arrêt RCC 7666 est un arrêt de principe qui précise et renforce le principe de l'interdiction de statuer infra ou ultra petita. L'arrêt devrait inspirer et servir de référence à nos cours et tribunaux qui, souvent laissent transparaître un sentimentalisme dans leurs décisions, en violant le contrat judiciaire ou l'effet dévolutif de l'appel. L'arrêt pourrait aussi servir de leçon aux juges du fond qui ignorent leur rôle d'arbitre pendant le procès, en se faisant passer à la fois pour juge et partie.


Synthèse
Numéro d'arrêt : R.C.C7666
Date de la décision : 26/02/1996

Analyses

Abandon de famille - droit à la pension alimentaire - enfants communs - créancier d'un montant - principe d'évaluation et base de calcul - statuer «infra ou ultra petita » - conséquences - demande reconventionnelle - mesures provisoires - Art.136 du Code des Personnes et de la Famille


Parties
Demandeurs : BIGIRIMANA Nestor : C/o Ministère des Finances
Défendeurs : HAKIZIMANA Potamie, résidant à NGAGARA Q.3 N°4

Origine de la décision
Date de l'import : 22/11/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;bi;cour.supreme;arret;1996-02-26;r.c.c.7666 ?
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