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15/03/2013 | CAMEROUN | N°057/

Cameroun | Cameroun, Cour d'appel du littoral, 15 mars 2013, 057/


Texte (pseudonymisé)
Les marchandises vendues par l’administration des douanes après exposition n’admettent aucune réclamation ultérieure de l’acheteur fondé soit sur le défaut de qualité soit sur sa consistance ou sa composition. L’acquéreur qui prétend avoir acquis de ladite administration des marchandises avariées ne peut légitimement réclamer le prix d’acquisition et des dommages et intérêts à la Direction Générale des Douanes par la procédure d’injonction de payer en raison de l’incertitude de sa créance.
ARTICLES 1ER, 2 ET 15 AUPSRVE
(COUR D’APPEL DU LITTORAL, ARRET

N°057/C DU 15 MARS 2013, LA DIRECTION GENERALE DES DOUANES C/ MONSIEUR A B Aa Ab)
LA C...

Les marchandises vendues par l’administration des douanes après exposition n’admettent aucune réclamation ultérieure de l’acheteur fondé soit sur le défaut de qualité soit sur sa consistance ou sa composition. L’acquéreur qui prétend avoir acquis de ladite administration des marchandises avariées ne peut légitimement réclamer le prix d’acquisition et des dommages et intérêts à la Direction Générale des Douanes par la procédure d’injonction de payer en raison de l’incertitude de sa créance.
ARTICLES 1ER, 2 ET 15 AUPSRVE
(COUR D’APPEL DU LITTORAL, ARRET N°057/C DU 15 MARS 2013, LA DIRECTION GENERALE DES DOUANES C/ MONSIEUR A B Aa Ab)
LA COUR
Vu la loi n°2006 portant organisation judiciaire de l’Etat ;
Vu le jugement n°715 rendu le 08 octobre 2008 par le Tribunal de Grande Instance du Wouri ;
Vu la requête d’appel du 30 octobre 2008 ;
Vu les pièces du dossier de la procédure ;
Ouï les parties en leurs conclusions respectives ;
Ouï les Ministère public en ses réquisitions ;
Ouï monsieur TSANGA BEDIGA, Vice-président de la Cour d’appel de céans en son rapport ;
Après en avoir délibéré conformément à la loi ;
EN LA FORME
Considérant que toutes les parties ont été régulièrement représentées par leurs conseils qui ont conclu ;
Qu’il y a lieu de statuer contradictoirement à leur égard ;
Considérant que suivant requête du 03 novembre 2008 déposée au Greffe de la Cour d’appel de céans le 04 novembre 2008 et enregistrée sous le n°1990, la Direction Générales
des Douanes, ayant élu domicile à l’étude de Maître ESSONO & Partners BP : 5911 Ac, a relevé appel du jugement n°751 rendu le 08 octobre 2008 par le Tribunal de Grande Instance du Wouri, statuant en matière civile et commerciale, dans la cause qui l’opposait à sieur A B Aa Ab ;
Considérant qu’aux termes de l’article 15 de l’Acte uniforme OHADA portant sur les voies d’exécution, « la décision rendue sur opposition est susceptible d’appel dans les conditions de droit commun d chaque Etat partie. Toutefois, le délai d’appel est de trente jours à compter de la date de cette décision » ;
Considérant que cet appel est dès lors régulier pour avoir été interjeté dans les forme et délai prescrits par la loi ;
Qu’il convient de le recevoir ;
AU FOND
Considérant que l’appelante fait grief au premier juge d’avoir violé l’article 1er de l’Acte uniforme OHADA portant sur les voies d’exécution en la condamnant à payer la somme de 11.240.400 FCFA représentant les causes de l’ordonnance d’injonction d payer n°145/05/06 du 16 mars 2006, alors même que la créance dont se prévaut sieur A B est incertaine dès lors que son existence est contestée ;
Qu’elle sollicite par conséquent que la Cour d’appel de céans infirme cette décision et que, statuant à nouveau, elle déboute celui-ci de sa demande, le recouvrement de sa prétendue créance (si elle n’existe) ne pouvant pas être fait par la voie de l’injonction de payer ;
Considérant qu’elle expose en substance que courant 2004, sieur A a été adjudicataire d’un conteneur n°TRLU499333/5 déclaré contenir de la friperie, au cours d’une vente aux enchères qu’elle a organisée, moyennant le paiement d’une somme de 5.280.000 FCFA, conteneur qu’il a enlevé le 07 juillet 2004 ;
Que c’est le 24 juillet qu’il est revenu solliciter une compensation en estimant que la marchandise acquise quatorze jours plus tôt n’était poubelles telle que constatée suivant exploit du ministère de Maître OLOBOUEDE, Huissier de justice à Ac ;
Que c’est à la suite de son refus de procéder à ce rachat qu’il a sollicité et obtenu auprès du président du tribunal de grande instance du Wouri l’ordonnance d’injonction de payer sus évoquée, contre laquelle elle s’est opposée avant d’être déboutée par le jugement querellé ;
Qu’elle estime que la vente ayant été parfaite, le prix convenu payé et la chose livrée, les parties se sont mutuellement libérées de leur engagement respectif et que tout paiement supposant une dette, sieur A B ne peut rapporter la preuve que le recouvrement qu’il poursuit repose sur une dette ;
Que le caractère éventuel de la créance dont il se prévaut ne peut donner lieu qu’à la procédure en paiement des dommages intérêts prévue par l’article 1147 du code civil qui dispose que « le débiteur est condamné, s’il y a lieu à des dommages intérêts, soit en raison de l’inexécution de l’obligation, soit en raison du retard dans l’exécution, toutes les fois qu’il
ne justifie pas que l’inexécution provient d’une cause étrangère qui ne peut lui être imputée » ;
Que d’ailleurs, il est de jurisprudence constante que les créances des dommages intérêts fondées sur l’inexécution ou la mauvaise exécution d’un contrat doivent être exclues du domaine d’application de la procédure d’injonction de payer (Cass. Com. 14 juin 1971 Bull. n°169, D. 1971, 629) ;
Que c’est donc à tort que le premier juge l’a déboutée ;
Qu’elle poursuit que la vente querellée était parfaite et régulière dès lors qu’à cette époque, celle-ci se faisant sur conteneur entier sans possibilité de division et l’adjudicataire se référait au connaissement pour connaître le contenu du conteneur et pouvant choisir la marchandise qu’il souhaitait acquérir ;
Que c’est ainsi que A B a choisi le conteneur TRL 449933315 disant contenir de la friperie qu’il a acquis au prix de 5.280.000 FCFA ;
Qu’aux termes de l’article 376 (2) du Code des douanes de la CEMAC « les marchandises vendues après exposition sont acquises dans l’état où elles se trouvent et telle qu’elles se poursuivent et comportent sans garantie aucune de la part de l’administration des douanes et sans qu’aucune réclamation puisse être admise pour quelque cause que ce soit, notamment pour défaut de qualité, de poids, de mesure, de nombre ou d’erreur dans la dénomination de la marchandise, dans sa consistance ou dans sa composition » ;
Que ces dispositions sont opposables aux éventuels acheteurs puisqu’elles sont non seulement affichées mais également lues avant de procéder aux enchères ;
Que le caractère parfait de la vente se concrétise une fois que l’adjudicataire se comporte comme le propriétaire de la marchandise au sens de l’article 544 du code civil ;
Que c’est ainsi A B a pris possession du conteneur acquis, l’a transporté à un lieu choisi par lui-même, l’a dépoté, l’a vidé de son contenu et a entreposé les marchandises dans son magasin ;
Qu’il a omis de l’ouvrir sur place au port ou du moins, en présence des inspecteurs des douanes et il ne l’a informée que quatorze jours après la vente, toute chose qui dénote d’une fraude de sa part ;
Qu’elle ajoute que le contenu du procès-verbal lui-même révèle des contradictions dès lors que l’huissier instrumentaire indique tantôt qu’elle a assisté au déchargement du conteneur et elle a pris connaissance de 60 « balles dont aucune ne contenait de la friperie, tantôt que c’est à son arrivée sur les lieux qu’elle a constaté que les balles sorties du conteneur étaient au nombre de 60 (soixante) ;
Qu’elle poursuit que sous le couvert d’une demande de compensation, sieur A tente d’obtenir malicieusement les dommages-intérêts compensatoires dès lors que la compensation suppose, en matière de vente aux enchères, la remise ou la restitution de la marchandise litigieuse (avaries ou inexactes) ;
Qu’aux termes de l’article 1646 du code civil « Dans les cas des articles 1641 et 1643, l’acheteur a le choix de vendre la chose ou de se faire restituer le prix ou de garder la chose et de se faire rendre une partie du prix telle qu’elle sera débitée par experts » ;
Que A B ne s’est pas lié à l’exigence de restitution de la marchandise prétendument avariée afin de se faire rembourser le prix ;
Que l’appelante estime que l’intimé a fixé les dommages-intérêts à un taux déraisonné qui traduite son souci de s’enrichir sans cause ; et elle maintient que les conditions prévues par les articles 1 et 2 de l’Acte uniforme OHADA portant sur les voies d’exécution pour enclencher la procédure d’injonction de payer ne sont pas réunies en l’espèce ;
Considérant qu’en réplique à ces arguments A B relève que c’est huit mois après sa réclamation que la direction général des douanes lui a vicieusement demandé de rapporter la marchandise litigieuse alors même que sa demande de compensation s’accompagnait d’un procès-verbal du 16 février 2005 constatant la destruction desdites colis à la décharge publique ;
Que l’article 1646 du code civil susvisé dispose plutôt que « si le vendeur ignorait les vices de la chose, il ne sera tenu qu’à la restitution du prix et à rembourser à l’acquéreur les frais occasionnés par la vente » ;
Que l’article 1645 du même code énonce quant à lui que « si le vendeur connaissait les vices de la chose, il est tenu outre la restitution du prix, qu’il a reçu, de tous les dommages-intérêts envers l’acheteur » ;
Que c’est sur la base de ces articles que les dommages-intérêts lui ont été octroyés ;
Considérant que le Ministère public a requis la confirmation du jugement entrepris ;
Considérant que le fond du litige porte sur la garantie des vices cachés dont la responsabilité incombe en principe au vendeur, conformément aux articles 1641 et suivants du code civil, laquelle responsabilité peut être soit limitée soit exclue, lorsque les conditions sont réunies (art. 376 (2) du code des douanes de la CEMAC) ;
Que l’étendue d la réparation qui dépend de la connaissance que l’acquéreur a pu avoir du vice caché doit être appréciée par le juge et rend partant la créance incertaine, donc non recouvrable par la procédure d’injonction de payer ;
Que c’est à tort que le premier juge a condamné la Direction générale des douanes à payer le prix d’achat des marchandises avariées et les dommages-intérêts à A B par la procédure d’injonction de payer alors qu’il n’avait pas les possibilités de procéder à des telles investigations ;
Qu’il y a par conséquent lieu d’infirmer le jugement entrepris et, statuant à nouveau, de dire que la créance revendiquée par A B Aa Ab ne peut pas être recouvrée par les procédures d’injonction de payer ;
Considérant que la partie qui succombe doit être condamnée aux dépens ;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement à l’égard de toutes les parties, en chambre civile et commerciale, en appel, en dernier ressort, en formation collégiale et à l’unanimité des voix ;
EN LA FORME
Reçoit l’appel ;
AU FOND
Infirme le jugement entrepris ;
Statuant à nouveau
Reçoit la Direction générale des douanes en son opposition ;
L’y dit fondée ;
Dit la créance revendiquée par A B Aa Ab ne peut être recouvrée par la procédure d’injonction de payer ;
Condamne celui-ci aux dépens ; (…)


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel du littoral
Numéro d'arrêt : 057/
Date de la décision : 15/03/2013

Analyses

RECOUVREMENT DES CRÉANCES - INJONCTION DE PAYER - CRÉANCES DE DOMMAGES ET INTÉRÊTS - CRÉANCES RÉSULTANT DE LA MAUVAISE EXÉCUTION D'UN CONTRAT DE VENTE - VICES CACHES - INCERTITUDE DE LA CRÉANCE (OUI) - APPLICATION DU DROIT DOUANIER (OUI) - CONDITIONS DE LA PROCÉDURE D'INJONCTION DE PAYER NON RÉUNIES.


Références :

Ohada.com/Unida


Origine de la décision
Date de l'import : 22/11/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;cm;cour.appel.du.littoral;arret;2013-03-15;057 ?
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