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27/01/1970 | CANADA | N°[1970]_R.C.S._421

Canada | Melcar Inc. et al. c. Ministre de la Voirie de Québec et al., [1970] R.C.S. 421 (27 janvier 1970)


Cour Suprême du Canada

Melcar Inc. et al. c. Ministre de la Voirie de Québec et al., [1970] R.C.S. 421

Date: 1970-01-27

Melcar Inc. et Henri Deslauriers (Demandeurs) Appelants;

et

Le Ministre de la Voirie de Québec et Le Procureur Général de Québec (Défendeurs) Intimés.

1969: les 18 et 19 novembre; 1970: le 27 janvier.

Présents: Les Juges Fauteux, Abbott, Martland, Ritchie et Hall.

EN APPEL DE LA COUR DU BANC DE LA REINE, PROVINCE DE QUÉBEC

APPEL d’un jugement de la Cour du banc de la reine, province de Québec[1], conf

irmant un jugement de la Cour supérieure homologuant une ordonnance de la Régie des Services publics en matière d’...

Cour Suprême du Canada

Melcar Inc. et al. c. Ministre de la Voirie de Québec et al., [1970] R.C.S. 421

Date: 1970-01-27

Melcar Inc. et Henri Deslauriers (Demandeurs) Appelants;

et

Le Ministre de la Voirie de Québec et Le Procureur Général de Québec (Défendeurs) Intimés.

1969: les 18 et 19 novembre; 1970: le 27 janvier.

Présents: Les Juges Fauteux, Abbott, Martland, Ritchie et Hall.

EN APPEL DE LA COUR DU BANC DE LA REINE, PROVINCE DE QUÉBEC

APPEL d’un jugement de la Cour du banc de la reine, province de Québec[1], confirmant un jugement de la Cour supérieure homologuant une ordonnance de la Régie des Services publics en matière d’expropriation. Appel rejeté.

Jules Deschênes, c.r., et Stanislas Germain, c.r., pour les demandeurs, appelants.

Bernardin Blanchet, c.r., et Guy Dorion, c.r., pour les défendeurs, intimés.

Le jugement de la Cour a été rendu par

LE JUGE ABBOTT — Le pourvoi est à l’encontre d’une décision de la Cour du banc de la reine[2] confirmant à l’unanimité une ordonnance de la Régie des services publics que, pour abréger, j’appellerai «La Régie». Cette ordonnance a refusé aux appelants toute indemnité en raison de l’expropriation par le ministre de la Voirie d’une servitude de non-accès.

Les faits pertinents sont relatés complètement dans l’ordonnance de la Régie et dans les motifs de la Cour du banc de la reine. Pour les fins des présents motifs, en voici un bref résumé.

Les terrains assujettis à la servitude ont front sur le boulevard Henri IV, dans «la cité de Ste‑Foy», en banlieue de Québec. La propriété en question a été acquise le 24 octobre 1955 par l’appelant Deslauriers, au coût de $250,000. En décembre 1957, M. Deslauriers la cédait pour le même prix, soit $250,000, avec effet rétroactif au 24 octobre 1955, à l’appelante Melcar Inc., une compagnie dans laquelle il avait des intérêts.

Le 25 mai 1957, le ministre de la Voirie a donné un avis d’expropriation de la servitude de

[Page 423]

non-accès et, en juin 1958, les appelants ont produit en Cour supérieure une requête visant à renvoyer l’affaire à la Régie «pour qu’elle agisse comme arbitre en vue de la fixation de l’indemnité due à la requérante, Melcar Inc.». Cette requête a été accueillie par la Cour.

En août 1958, les appelants ont produit à la Régie une réclamation au montant de $135,020, pour dommages résultant de la création de la servitude. Plus tard, en 1961, la réclamation initiale a été portée à $675,035. Dans l’intervalle, le ministre avait exproprié une partie du terrain assujetti à la servitude de non-accès laquelle a, dès lors, grevé le reste du terrain, mais avec certaines modifications.

Par ordonnance datée du 29 août 1962, la Régie a rejeté la réclamation d’indemnité des appelants. A la suite d’un litige dont l’issue n’a plus de rapport avec l’affaire qui nous est soumise, l’ordonnance de la Régie a été homologuée et c’est, en fait, cette ordonnance qui a fait l’objet de l’appel à la Cour du banc de la reine et du pourvoi en cette Cour.

La Loi de la voirie (maintenant S.R.Q. 1964, c. 133) renferme certaines dispositions relatives à l’acquisition par le gouvernement de servitudes en vue de la construction de chemins. Celles qui nous intéressent ici sont les suivantes:

23. Le ministre peut acquérir toutes les servitudes perpétuelles ou temporaires qui lui paraissent désirables pour tout chemin construit ou projeté, et notamment:

* * *

(c) La servitude de non-accès au chemin public avec interdiction de pratiquer aucune ouverture dans la clôture le long du chemin;

* * *

25. Aucune indemnité n’est due pour l’acquisition des servitudes de non-accès et de ne pas bâtir, lorsqu’elles ne rendent pas l’immeuble assujetti pratiquement inutilisable pour les fins auxquelles il est alors utilisé. Lorsque le ministre considère qu’il n’est dû aucune indemnité, il donne au propriétaire, au lieu de l’avis d’expropriation, un avis par lettre recommandée que toute réclamation doit être présentée à la Régie des services publics dans l’année. Sur requête du propriétaire, la Régie peut déterminer l’indemnité payable, s’il y a lieu.

[Page 424]

La Régie et plus tard, en appel, la Cour du banc de la reine avaient à décider deux questions, savoir:

1. La Régie était-elle liée par les dispositions de l’article 25 de la Loi de la voirie en décidant le litige soumis à son adjudication?

2. Si oui, la preuve soumise à la Régie la justifiait-elle de décider que les appelants n’avaient droit à aucune indemnité relativement à l’acquisition par le gouvernement de la servitude de non-accès?

La Régie a répondu affirmativement à ces deux questions et la Cour du banc de la reine a confirmé sa décision. C’est cet arrêt qui fait l’objet du pourvoi devant cette Cour.

Le Juge Brossard a fait, dans l’énoncé savant et complet de ses motifs de jugement, en Cour du banc de la reine, une étude complète des faits et des principes juridiques pertinents. MM. les Juges Pratte, Hyde, Montgomery et Badeaux y ont souscrit.

Dans ses conclusions, le savant Juge a dit ce qui suit:

Je n’ai aucune hésitation à conclure qu’il n’y a pas eu, de la part de la régie, erreur donnant ouverture à une intervention de notre Cour ni quant à l’appréciation qu’elle a donnée des faits mis en preuve devant elle, ni quant aux conclusions qu’elle a tirées de ces faits, ni quant à son interprétation et à son application de l’article 25 de la Loi de la voirie.

Certes, les dispositions de cet article sont rigoureuses et constituent une exception onéreuse à la règle générale posée par l’article 407 du Code civil, une exception qui risque de faire supporter par un individu ou un petit nombre d’individus un fardeau qui est imposé au bénéfice du public en général, ce que certains peuvent considérer comme inique. Nous n’avons pas à juger de la sagesse de ces dispositions. Je rappellerai cependant qu’elles ont été décrétées dans ce que le législateur considérait être l’intérêt général du public. Je soulignerai aussi que tous inconvénients ou dommages que les expropriés ont pu subir du fait de l’imposition initiale de la servitude de non-accès ont pu être considérablement atténués, sinon totalement annulés par l’indemnité représentant près des deux cinquièmes de leur mise de fonds initiale que le ministère de la Voirie a payée aux expropriés pour l’expropriation, toujours dans l’intérêt public, d’à peine un dixième de leur terrain.

Je suis pleinement d’accord avec ces conclusions et je les fais miennes.

[Page 425]

Je suis d’avis de rejeter le pourvoi avec dépens.

Appel rejeté avec dépens.

Procureurs des demandeurs, appelants: Germain, Thibaudeau & Lesage, Québec.

Procureur des défendeurs, intimés: B. Blanchet, Québec.

[1] [1966] B.R. 423.

[2] [1966] B.R. 423.


Synthèse
Référence neutre : [1970] R.C.S. 421 ?
Date de la décision : 27/01/1970
Sens de l'arrêt : L’appel doit être rejeté

Analyses

Expropriation - Servitude de non-accès - Réclamation d’indemnité rejetée par la Régie des Services publics - Loi de la Voirie, S.R.Q. 1941, c. 141, art. 23, 25 [maintenant S.R.Q. 1964, c. 133] - Code Civil, art. 407.

En 1957, le Ministre de la Voirie a exproprié une servitude de non-accès devant grever le terrain des demandeurs. Dans l’intervalle, alors que la fixation de l’indemnité était devant la Régie des Services publics, le Ministre a exproprié une partie du terrain assujetti à la servitude de non-accès laquelle a, dés lors, grevé le reste du terrain, mais avec certaines modifications. Une indemnité a été payée pour l’expropriation de cette partie du terrain. La Régie a rejeté la réclamation d’indemnité des demandeurs pour l’expropriation de la servitude. L’ordonnance de la Régie a été homologuée par la Cour supérieure. La Régie a statué qu’elle était liée par les dispositions de l’art. 25 de la Loi de la Voirie, S.R.Q. 1941, c. 141, et qu’elle était justifiée de décider que les demandeurs n’avaient droit à aucune indemnité. La Cour d’appel a confirmé cette décision. Les demandeurs en ont appelé à cette Cour.

[Page 422]

Arrêt: L’appel doit être rejeté.

La Cour d’appel a conclu avec raison qu’il n’y avait pas eu, de la part de la Régie, erreur donnant ouverture à une intervention de cette Cour ni quant à l’appréciation qu’elle a donnée des faits mis en preuve devant elle, ni quant aux conclusions qu’elle a tirées de ces faits, ni quant à son interprétation et à son application de l’art. 25 de la Loi de la Voirie.


Parties
Demandeurs : Melcar Inc. et al.
Défendeurs : Ministre de la Voirie de Québec et al.
Proposition de citation de la décision: Melcar Inc. et al. c. Ministre de la Voirie de Québec et al., [1970] R.C.S. 421 (27 janvier 1970)


Origine de la décision
Date de l'import : 06/04/2012
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ca;cour.supreme;arret;1970-01-27;.1970..r.c.s..421 ?
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