La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

26/06/1970 | CANADA | N°[1971]_R.C.S._95

Canada | Lea-Don Canada Limited c. Ministre du Revenu National, [1971] R.C.S. 95 (26 juin 1970)


Cour Suprême du Canada

Lea-Don Canada Limited c. Ministre du Revenu National, [1971] R.C.S. 95

Date: 1970-06-26

Lea-Don Canada Limited Appelante;

et

Le Ministre du Revenu National Intimé.

1970: le 4 juin; 1970: le 26 juin.

Présents: Les Juges Abbott, Hall, Spence, Pigeon et Laskin.

EN APPEL DE LA COUR DE L’ÉCHIQUIER DU CANADA

APPEL d’un jugement du Juge Cattanach de la Cour de l’Échiquier du Canada[1], en matière d’impôt sur le revenu. Appel rejeté.

S.E. Edwards, c.r., et J.M. Bradley, pour l’appelante.


G.W. Ainslie, c.r., et J.J. Gillihand, pour l’intimé.

Le jugement de la Cour a été rendu par

LE JUGE HALL — L’appelante a été...

Cour Suprême du Canada

Lea-Don Canada Limited c. Ministre du Revenu National, [1971] R.C.S. 95

Date: 1970-06-26

Lea-Don Canada Limited Appelante;

et

Le Ministre du Revenu National Intimé.

1970: le 4 juin; 1970: le 26 juin.

Présents: Les Juges Abbott, Hall, Spence, Pigeon et Laskin.

EN APPEL DE LA COUR DE L’ÉCHIQUIER DU CANADA

APPEL d’un jugement du Juge Cattanach de la Cour de l’Échiquier du Canada[1], en matière d’impôt sur le revenu. Appel rejeté.

S.E. Edwards, c.r., et J.M. Bradley, pour l’appelante.

G.W. Ainslie, c.r., et J.J. Gillihand, pour l’intimé.

Le jugement de la Cour a été rendu par

LE JUGE HALL — L’appelante a été constituée sous le nom de «George W. Crothers Limited», le 14 juin 1934, par lettres patentes conformément aux dispositions de la Loi sur les compagnies, S.R.C. 1927, c. 27. Des lettres patentes supplémentaires, datées du 10 novembre 1966,

[Page 97]

ont changé le nom de l’appelante en celui de «Lea-Don Canada Limited». Nassau Leasings Limited (ci-après appelée «Nassau») a été constituée le 25 janvier 1960, par lettres patentes délivrées conformément aux dispositions de The Corporations Act, 1953 Statuts de l’Ontario, c. 19. Durant toute la période qui nous concerne ici, les actions émises de l’appelante et de Nassau appartenaient à Lea-Don Corporation Limited (ci-après appelée la «compagnie mère»), une compagnie constituée en vertu des lois des Îles Bahamas. Nassau a été dissoute. Une ordonnance de la Cour suprême d’Ontario a accordé à l’appelante le droit d’interjeter appel de toute cotisation faite à l’égard de Nassau en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu, après le 16 novembre 1964.

La compagnie mère ne faisait pas affaires au Canada; elle ne résidait pas au Canada non plus, mais aux Bahamas. Nassau et la compagnie appelante étaient toutes deux des compagnies qui ne traitaient pas l’une avec l’autre à distance. Nassau résidait au Canada et s’occupait de louer à l’appelante un avion, au loyer mensuel de $14,000; Nassau s’était portée acquéreur de cet avion en 1960 au coût en capital de $786,232.17. Au cours des années 1961 et 1962, Nassau en a modifié l’intérieur et y a installé un nouveau radio et un nouvel équipement électronique, au coût additionnel d’environ $218,500, ce qui portait à $1,004,732.17 le coût en capital total pour Nassau. Cette entente relative à la location a duré de 1960 à mai 1963. Le 12 juin 1963, Nassau a vendu l’avion à la compagnie mère pour une somme de $615,500. A l’époque de la vente, le coût en capital non déprécié de l’avion était de $676,088.32 pour Nassau.

La compagnie mère s’est portée acquéreur de l’avion à charge du bail conclu avec l’appelante. En s’acquittant du loyer dû à la compagnie mère, l’appelante déduisait et remettait à l’intimé la retenue d’impôt prévue à la Partie III de la Loi de l’impôt sur le revenu.

Le 1er novembre 1963, la compagnie mère a vendu l’avion à Denison Mines Limited au prix de $892,000.

Dans le calcul de son revenu pour l’année fiscale se terminant le 28 juin 1963, Nassau a dé-

[Page 98]

duit la somme de $60,588.32, prétendant que, puisqu’elle avait vendu l’avion à un prix inférieur au coût en capital non déprécié et qu’elle n’avait en mains aucun bien susceptible de dépréciation dans la classe 16, elle avait droit, en vertu du par. (2) de l’art. 1100 des Règlements de l’impôt sur le revenu, de déduire «ce que serait par ailleurs pour elle le coût en capital non déprécié des biens de cette catégorie à la fin de l’année d’imposition».

En cotisant Nassau, l’intimé s’est basé sur le fait que Nassau avait vendu l’avion à une personne avec laquelle elle ne traitait pas à distance et qu’en vertu du par. (2) de l’art. 17 de la Loi de l’impôt sur le revenu, le produit de la disposition était la juste valeur marchande de l’avion, que le Ministre a évalué à $915,500. Le litige entre l’appelante et l’intimé est le suivant: le produit de la disposition se chiffre-t-il à $615,500 ou à $915,500 et le tout est subordonné à l’application ou non du par. (2) de l’art. 17 de la Loi de l’impôt sur le revenu à la transaction entre Nassau et la compagnie mère. Le paragraphe (7) de l’art. 17 de la Loi de l’impôt sur le revenu édicte que «lorsqu’il a été disposé de biens susceptibles de dépréciation… dans des circonstances telles que le paragraphe 4 de l’article 20 s’applique», le par. (2) de l’art. 17 ne s’applique pas. Par conséquent, la question suivante a été soumise à la Cour de l’Échiquier:

[TRADUCTION] 15. En rapport avec la vente de l’avion que Nassau a consentie à la compagnie mère et en rapport avec les dispositions du paragraphe 7 de l’article 17 de la Loi de l’impôt sur le revenu, a-t-il été «disposé» de biens susceptibles de dépréciation d’un contribuable, selon la définition qui en est donnée pour les fins de l’article 20, «dans des circonstances telles que le paragraphe 4 de l’article 20 s’applique en vue de déterminer, aux fins de l’alinéa a) du paragraphe (1) de l’article 11, ce que les biens coûtent en capital» à la compagnie mère?

Le Juge Cattanach a répondu négativement à cette question et, en raison d’une entente survenue entre les parties sur la juste valeur marchande de l’avion à l’époque de la vente consentie par Nassau à la compagnie mère, la question de la juste valeur marchande a été ajournée pour que la Cour en dispose à une date ultérieure.

[Page 99]

Le savant juge de première instance s’est basé sur la conclusion préalable que la compagnie mère ne résidant pas au Canada, il n’est ni nécessaire ni pertinent de calculer son revenu canadien et que, de plus, à son avis l’avion ne constitue pas «un bien susceptible de dépréciation» parce que, en vertu du Règlement, ceux qui ne résident pas au Canada ne peuvent réclamer une allocation du coût en capital que s’ils y exercent des affaires ou gagnent un revenu provenant de biens visés par l’article 110 de la Loi.

A l’instar du Juge Cattanach, j’accepte cette conclusion ainsi que sa réponse négative à la question posée à la Cour. L’appelante a prétendu que la compagnie mère est un contribuable aux termes de la Loi de l’impôt sur le revenu, se fondant sur:

(1) La prétention que, en vertu de la définition de l’alinéa (av) du par. (1) de l’art. 139, «‘contribuable’ comprend toute personne, qu’elle soit tenue ou non de payer l’impôt» et la déduction à l’égard des biens susceptibles de dépréciation étant faite à partir du revenu et non du revenu imposable, s’applique même aux personnes dont le revenu n’est pas imposable;

(2) L’argument de portée plus restreinte que l’impôt retenu sur le loyer de l’avion dû à la compagnie mère et remis à l’intimé en vertu de la Partie III de la Loi de l’impôt sur le revenu, donne à l’appelante la qualité de contribuable.

On ne peut aucunement admettre la prétention que les dispositions de la Loi de l’impôt sur le revenu, qui autorisent une déduction à l’égard du coût en capital des biens susceptibles de dépréciation, s’appliquent à ceux qui, ne résidant pas au Canada, ne sont pas assujettis à la cotisation pour fins d’impôt en vertu de la Partie I de la Loi sous prétexte que cette déduction se calcule à partir du revenu. Il est clair que le par. (4) de l’art. 20 vise les contribuables qui ont droit à une déduction et non les personnes qui ne sont pas assujetties à la cotisation en vertu de la Partie I. Celui qui ne réside pas au Canada et qui n’y fait pas affaires n’est pas une personne qui a droit à une telle déduction; donc, on ne saurait à proprement parler, dire que le par. (4) de l’art. 20 s’applique à lui.

[Page 100]

On ne peut davantage admettre l’argument subsidiaire à l’effet que la compagnie mère doit être considérée comme un contribuable aux termes de la Loi de l’impôt sur le revenu parce que Nassau déduisait et remettait à l’intimé l’impôt retenu susmentionné. La retenue d’impôt prévue à l’art. 106 de la Loi de l’impôt sur le revenu est un impôt sur les recettes brutes perçues au Canada par une personne qui y réside pour le compte d’une personne qui n’y réside pas et elle ne fait pas de cette dernière, ici la compagnie mère, un contribuable au sens du par. (4) de l’art. 20.

En vertu de l’art. 106, aucune déduction n’est permise à l’égard de l’impôt retenu. Voir le par. (1) de l’art. 108 qui s’énonce ainsi:

108. (1) L’impôt exigible sous le régime de l’article 106 est payable à l’égard des montants qui y sont visés, sans qu’il y soit fait une déduction quelconque.

Par conséquent, je suis d’avis de rejeter le pourvoi avec dépens.

Appel rejeté avec dépens.

Procureurs de l’appelante: Fraser & Beatty, Toronto.

Procureur de l’intimé: D.S. Maxwell, Ottawa.

[1] [1969] 1 R.C. de l’É. 594, [1969] C.T.C. 85, 69 D.T.C. 5142.


Synthèse
Référence neutre : [1971] R.C.S. 95 ?
Date de la décision : 26/06/1970
Sens de l'arrêt : L’appel doit être rejeté

Analyses

Revenu - Impôt sur le revenu - Allocation du coût en capital - Considération insuffisante - Bien susceptible de dépréciation - Vente d’un avion à une compagnie mère ne résidant pas au Canada - Transaction dans laquelle on ne traitait pas à distance - Avion n’est pas un bien susceptible de dépréciation entre les mains de la compagnie mère - Loi de l’impôt sur le revenu, S.R.C. 1952, c. 148, art. 17(2), (7), 20(4), 106, 108, 110, 139(1)(av) - Règlements de l’impôt sur le revenu, art. 1100(2).

Nassau Leasings Ltd. était propriétaire d’un avion qu’elle louait à l’appelante, une compagnie avec laquelle elle ne traitait pas à distance. Ces deux compagnies résidaient au Canada et étaient des filiales d’une compagnie mère résidant aux Bahamas et qui ne faisait pas affaires au Canada. En 1963, Nassau a vendu l’avion à la compagnie mère pour une somme de $615,500. A cette époque, le coût en capital non déprécié de l’avion était de $676,088.32 pour Nassau. Dans le calcul de son revenu pour l’année 1963, Nassau a déduit cette différence en vertu du par. (2) de l’art. 1100 des Règlements de l’impôt sur le revenu. L’appelante a loué l’avion de la compagnie mère et, en s’acquittant du loyer, elle a déduit et remis à l’intimé la retenue d’impôt prévue à la Partie III de la Loi de l’impôt sur le revenu. En novembre 1963, la compagnie mère a vendu l’avion à une compagnie avec laquelle elle traitait à distance au prix de $892,000.

En cotisant Nassau, l’intimé s’est basé sur le fait que Nassau avait vendu l’avion à une personne avec laquelle elle ne traitait pas à distance et qu’en vertu du par. (2) de l’art. 17 de la Loi de l’impôt sur le revenu, le produit de la disposition était la juste valeur marchande de l’avion, que le Ministre a évalué à $915,500. La question soumise à la Cour de l’Échiquier était de savoir si le par. (4) de l’art. 20 de la Loi s’applique en vue de déterminer ce que les biens coûtent en capital à la compagnie mère. La Cour de l’Échiquier a répondu négative-

[Page 96]

ment à cette question. La Cour a conclu que la compagnie mère ne résidant pas au Canada, il n’était ni nécessaire ni pertinent de calculer son revenu canadien et que, de plus, l’avion ne constituait pas «un bien susceptible de dépréciation» parce que, en vertu du Règlement, ceux qui ne résident pas au Canada ne peuvent réclamer une allocation du coût en capital que s’ils y exercent des affaires ou gagnent un revenu provenant de biens visés par l’art. 110 de la Loi. Nassau a été dissoute et une ordonnance a accordé à l’appelante le droit d’interjeter appel.

Arrêt: L’appel doit être rejeté.

Le paragraphe (4) de l’art. 20 vise les contribuables qui ont droit à une déduction et non les personnes qui ne sont pas assujetties à la cotisation en vertu de la Partie I. Celui qui ne réside pas au Canada et qui n’y fait pas affaires n’est pas une personne qui a droit à une telle déduction; donc, on ne saurait à proprement parler, dire que le par. (4) de l’art. 20 s’applique à lui.

On ne peut davantage admettre l’argument subsidiaire à l’effet que la compagnie mère doit être considérée comme un contribuable parce que l’impôt retenu était déduit et remis à l’intimé. La retenue d’impôt prévue à l’art. 106 de la Loi est un impôt sur les recettes brutes perçues au Canada par une personne qui y réside pour le compte d’une personne qui n’y réside pas et elle ne fait pas de cette dernière un contribuable au sens du par. (4) de l’art. 20.


Parties
Demandeurs : Lea-Don Canada Limited
Défendeurs : Ministre du Revenu National
Proposition de citation de la décision: Lea-Don Canada Limited c. Ministre du Revenu National, [1971] R.C.S. 95 (26 juin 1970)


Origine de la décision
Date de l'import : 06/04/2012
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ca;cour.supreme;arret;1970-06-26;.1971..r.c.s..95 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award