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20/03/1972 | CANADA | N°[1974]_R.C.S._845

Canada | Aladdin Industries Inc. c. Canadian Thermos Products Ltd., [1974] R.C.S. 845 (20 mars 1972)


Cour suprême du Canada

Aladdin Industries Inc. c. Canadian Thermos Products Ltd., [1974] R.C.S. 845

Date: 1972-03-20

Aladdin Industries, Incorporated Appelante;

et

Canadian Thermos Products Limited et Le Registraire des Marques de Commerce Intimés.

1972: le 10 mars; 1972: le 20 mars.

Présent: Le Juge Laskin en chambre.

REQUÊTE POUR AUTORISATION DE DEMANDER UNE PROROGATION DU DÉLAI POUR FAIRE ENTENDRE L’APPEL

Cour suprême du Canada

Aladdin Industries Inc. c. Canadian Thermos Products Ltd., [1974] R.C.S. 845

Date: 1972-03-20

Aladdin Industries, Incorporated Appelante;

et

Canadian Thermos Products Limited et Le Registraire des Marques de Commerce Intimés.

1972: le 10 mars; 1972: le 20 mars.

Présent: Le Juge Laskin en chambre.

REQUÊTE POUR AUTORISATION DE DEMANDER UNE PROROGATION DU DÉLAI POUR FAIRE ENTENDRE L’APPEL


Synthèse
Référence neutre : [1974] R.C.S. 845 ?
Date de la décision : 20/03/1972
Sens de l'arrêt : La requête doit être rejetée et une ordonnance de rejet d’appel rendue

Analyses

Appel - Délai pour faire entendre la cause en appel - Changement d’avocat - Transcription du procès ne peut être obtenue - Retard injustifié de la part de l’appelante - Loi sur la Cour suprême, S.R.C. 1970, c. S-19, art. 76 - Règles de la Cour suprême, règles 9 et 59.

À la suite du rejet de son action en radiation de l’enregistrement de certaines marques de commerce de l’intimée, notamment l’emploi du mot «Thermos» en liaison avec diverses marchandises isolantes par le vide, l’appelante a déposé un avis d’appel à cette Cour. Cependant, l’appelante retardait considérablement à inscrire la cause parce qu’elle avait retenu les services d’un nouvel avocat qui devait étudier le volumineux dossier, que la transcription du procès n’avait pas été demandée et qu’elle ne pouvait être obtenue par la suite parce que les notes prises au procès avaient été détruites lorsque la maison chargée de la transcription fut dissoute. L’intimée a demandé au registraire l’émission d’un certificat de rejet conformément à la règle 59 de la Cour suprême et une ordonnance de rejet d’appel pour retard indu en vertu de l’art. 76 de la Loi sur la Cour suprême et des règles 9 et 59. Cette requête a été référée à cette Cour. Par la suite l’appelante a demandé l’autorisation à bref délai de demander la prorogation du délai pour faire entendre l’appel.

Arrêt: La requête doit être rejetée et une ordonnance de rejet d’appel rendue.

Ce qui était en jeu, c’est essentiellement une question de caractère distinctif, vu la conclusion de première instance selon laquelle la marque de commerce était à bon droit enregistrable en 1907 mais le mot «Thermos» était devenu générique et descriptif en 1964 quand les procédures de radiation ont été intentées. La preuve produite était importante et l’absence d’une transcription ne pouvait être corrigée sans que

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cette Cour ne devienne une seconde cour de première instance au lieu d’entendre l’affaire en appel.

L’absence de la transcription et les difficultés auxquelles devait faire face l’avocat de l’appelante dans une affaire qui lui a été confiée un an et demi après la signification et la production de l’avis d’appel n’excusaient pas l’appelante d’avoir dérogé aux règles comme elle l’a fait en l’espèce et ne justifiaient pas le retard excessif pour faire entendre l’appel.

REQUÊTE pour autorisation de demander une prorogation du délai pour faire entendre l’appel rejetée. Requête pour ordonnance de rejet d’appel accueillie.

D.S. Johnson, c.r., pour l’appelante.

Donald J. Wright, c.r., pour l’intimée.

Le jugement a été rendu par

LE JUGE LASKIN (en chambre) — Le 17 août 1964, la requérante Aladdin, une concurrente de l’intimée, a entamé une action en radiation de l’enregistrement de certaines marques de commerce de l’intimée, notamment l’emploi du mot «Thermos» (et, dans un cas, «Super Thermos») en liaison avec diverses marchandises isolantes par le vide que l’intimée fabrique et distribue partout au Canada. L’enregistrement original a été accordé en 1907 (et il se rapportait surtout à des bouteilles isolantes); il y en a eu un autre à Terre-Neuve en 1908, un autre en 1931 et un quatrième en 1960. L’emploi des marques n’a pas été attaqué avant l’action de l’appelante en 1964. La marche des procédures en radiation a été lente, quoique le retard ait été en partie attribuable à l’état de santé des avocats des deux parties et à la préparation extraordinaire qu’a exigée le procès au cours duquel Aladdin a produit près de 100 déclarations sous serment et plus de 40,000 documents, la plupart des lettres. Le procès a duré 18 jours en octobre 1968 et le jugement rejetant l’action a été rendu par le Juge Kerr, le 11 mars 1969.

Un avis d’appel à cette Cour daté du 6 mai 1969 et signifié à l’intimée le même jour, a été déposé le 8 mai 1969. Il ne se passa rien pendant 18 mois, mais l’avocat de l’intimée a conclu que l’appelante se cherchait un avocat pour la

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représenter en appel. Le 24 novembre 1970 ou vers cette date, l’avocat de l’intimée a été informé par téléphone du nom de l’avocat dont l’appelante avait retenu les services. Évidemment, cet avocat devait prendre le temps d’étudier l’affaire et ce n’est qu’en juin 1971 qu’il a parlé de déterminer le contenu du dossier imprimé. Les procureurs de l’intimée l’ont informé qu’il devait faire une proposition concrète. Trois autres mois se sont écoulés et le 28 septembre 1971, l’avocat de l’intimée a écrit à l’avocat de l’appelante que si la cause n’était pas inscrite à la fin d’octobre, il avait reçu instruction de faire rejeter l’appel pour défaut de poursuite.

Cette lettre a obtenu une réponse, le 18 octobre 1971, dans laquelle figuraient certaines propositions et, en conclusion, la mention que l’avocat téléphonerait pour fixer un entretien. L’avocat de l’intimée a répondu par lettre le 21 octobre 1971; il demandait un projet d’entente sur le contenu du dossier imprimé en appel et se disait contrarié par les retards continuels. Dans une lettre datée du 28 octobre 1971, l’avocat de l’appelante a fait parvenir un projet d’entente. L’avocat de l’intimée avait des vues différentes sur ce que devait contenir le dossier imprimé en appel et, dans une lettre du 23 décembre 1971, a déclaré que si on ne pouvait se conformer à ses vues, il faudrait faire une demande pour régler la question.

Les avocats des deux parties ont communiqué entre eux peu de temps après mais aucune entente n’est intervenue. L’avocat de l’intimée a écrit le 19 janvier 1972 et de nouveau le 7 février 1972 demandant qu’on donne suite à l’affaire mais il n’a reçu aucune réponse. Le 3 mars 1972, il a demandé au registraire d’émettre un certificat de rejet conformément à la règle 59 de la Cour suprême, et il a joint à cette requête une demande en vue d’obtenir, en vertu de l’art. 76 de la Loi sur la Cour suprême et en vertu des règles 9 et 59, un ordre ou une ordonnance de rejet d’appel pour retard indû.

Le 9 mars 1972, l’appelante a demandé à un juge de cette Cour l’autorisation à bref délai de demander, en vertu de la règle 108, la proroga-

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tion du délai pour faire entendre l’appel, produire le dossier imprimé en appel et en signifier des copies.

Vu la nature de la requête de l’appelante et du redressement demandé par l’intimée en vertu de l’art. 76 de la Loi sur la Cour suprême, le registraire m’a déféré la requête de l’intimée. J’ai entendu les deux requêtes le 10 mars 1972. Les documents ont révélé que ni la Cour ni les parties n’avaient demandé une transcription du procès, que la maison chargée de la transcription s’était dissoute en avril 1969 et avait détruit, à la fermeture de ses bureaux, les notes prises dans l’affaire. Si l’appel devait être entendu, il devait l’être sans la transcription à laquelle l’intimée tenait beaucoup car, bien qu’elle ait eu gain de cause, elle avait l’intention de contester certaines conclusions du juge de première instance et de soulever certains points quant à l’admissibilité de preuves. L’avocat de l’appelante allègue qu’à l’exception de certains témoignages obtenus à l’examen préalable, qu’il était disposé à omettre dans le dossier imprimé, les autres preuves produites étaient de nature documentaire et étaient disponibles. Ce n’est que récemment que l’avocat a appris que la transcription ne pouvait être obtenue, mais rien n’explique pourquoi l’appelante n’a pas demandé une transcription plus tôt ni soulevé la question plus tôt.

Ce qui est en jeu, dans cette affaire de marque de commerce, c’est essentiellement une question de caractère distinctif, le juge de première instance ayant conclu que la marque de commerce était à bon droit enregistrable en 1907 mais que le mot «Thermos» était devenu générique et descriptif en 1964 quand les procédures en radiation ont été intentées. La preuve produite est importante et je ne vois pas comment l’absence d’une transcription peut être corrigée (surtout lorsque, en plus, les parties ne peuvent se mettre d’accord sur le contenu du dossier imprimé en appel) sans que cette Cour ne devienne une seconde cour de première instance au lieu d’entendre l’affaire en appel.

Aussi regrettable que cette conclusion puisse être, je suis d’avis que le retard pour faire

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entendre l’appel est excessif. Aucune raison valable ne le justifie, bien que je me rende compte des difficultés auxquelles doit faire face l’avocat de l’appelante dans une affaire qui lui a été confiée un an et demi après la signification et la production de l’avis d’appel. Cependant, cela n’excuse pas l’appelante d’avoir dérogé aux règles comme elle l’a fait en l’espèce. Eu égard, en outre, à l’absence de transcription et à la nature de la question principale soulevée en appel, je ne crois pas qu’il s’agisse d’une affaire où je devrais être indulgent en matière de délai. Je note que dans ses motifs de jugement, rapportés dans [1969] 2 R.C.É. 80, le Juge Kerr a fait allusion à une marge de liberté possible pour l’appelante en disant ce qui suit (à la p. 120):

[TRADUCTION] Je n’exclus pas la possibilité que la requérante puisse employer ce terme dans son sens générique avec certaines restrictions ou réserves, d’une manière qui n’induirait pas le public en erreur, qui ne violerait pas les marques de commerce de l’intimée ou qui ne diminuerait pas la valeur de la clientèle intéressée. On a trouvé une solution aux États-Unis. Je n’exprime aucun avis sur la question de savoir s’il est possible de trouver une solution au Canada.

La requête de l’appelante est rejetée avec dépens, et, relativement à celle de l’intimée, une ordonnance de rejet d’appel sera rendue avec dépens.

Requête rejetée avec dépens. Ordonnance de rejet d’appel avec dépens.

Procureurs de l’appelante: MacBeth and Johnson, Toronto.

Procureurs de l’intimée: Ridout et Maybee, Toronto.


Parties
Demandeurs : Aladdin Industries Inc.
Défendeurs : Canadian Thermos Products Ltd.
Proposition de citation de la décision: Aladdin Industries Inc. c. Canadian Thermos Products Ltd., [1974] R.C.S. 845 (20 mars 1972)


Origine de la décision
Date de l'import : 06/04/2012
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ca;cour.supreme;arret;1972-03-20;.1974..r.c.s..845 ?
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