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27/08/1973 | CANADA | N°[1974]_R.C.S._1159

Canada | Cana Construction Co. c. R., [1974] R.C.S. 1159 (27 août 1973)


Cour suprême du Canada

Cana Construction Co. c. R., [1974] R.C.S. 1159

Date: 1973-08-27

Cana Construction Co. Ltd., ci-devant Burns and Dutton Construction (1962) Ltd. Appelante;

et

Sa Majesté la Reine Intimée.

1973: le 31 mai et le 1er juin; 1973: le 27 août.

Présents: Les Juges Martland, Judson, Ritchie, Spence et Laskin.

EN APPEL DE LA COUR DE L’ÉCHIQUIER DU CANADA

APPEL d’un jugement de la Cour de l’Échiquier du Canada. Appel accueilli.

H. Irving, c.r., et K.F. Bailey, pour l’appelante.

A. Penningto

n et P.T. McInenly, pour l’intimée.

Le jugement de la Cour a été rendu par

LE JUGE SPENCE — Il s’agit d’un appel interjeté à l...

Cour suprême du Canada

Cana Construction Co. c. R., [1974] R.C.S. 1159

Date: 1973-08-27

Cana Construction Co. Ltd., ci-devant Burns and Dutton Construction (1962) Ltd. Appelante;

et

Sa Majesté la Reine Intimée.

1973: le 31 mai et le 1er juin; 1973: le 27 août.

Présents: Les Juges Martland, Judson, Ritchie, Spence et Laskin.

EN APPEL DE LA COUR DE L’ÉCHIQUIER DU CANADA

APPEL d’un jugement de la Cour de l’Échiquier du Canada. Appel accueilli.

H. Irving, c.r., et K.F. Bailey, pour l’appelante.

A. Pennington et P.T. McInenly, pour l’intimée.

Le jugement de la Cour a été rendu par

LE JUGE SPENCE — Il s’agit d’un appel interjeté à l’encontre de l’arrêt de la Cour de l’Échiquier du Canada prononcé le 23 juillet 1970. Dans son jugement, ladite Cour de l’Échiquier du Canada a adjugé à l’appelante la somme de $19,654.79 sans intérêt. L’appelante, à titre de pétitionnaire devant la Cour de l’Échiquier du Canada, avait réclamé $92,854.37, somme qu’elle a par la suite augmentée à $102,812.46.

La pétitionnaire avait signé un accord avec la Couronne le 15 juillet 1964 en vue de la construction du nouveau terminus postal à Edmon-

[Page 1161]

ton dans la province de l’Alberta. La pétitionnaire était alors appelée Burns & Dutton Construction (1962) Ltd., mais il s’agit de la même compagnie que la présente appelante.

Comme exposé préliminaire des faits, je cite le compte rendu suivant tiré des motifs de jugement du savant juge de première instance:

La pétitionnaire, compagnie par actions spécialisée dans la construction, avait obtenu l’adjudication de la construction d’un bâtiment supplémentaire et des améliorations à apporter au terminus postal «A» de la ville d’Edmonton (Alberta), au prix de $4,424,626. Il était convenu que la pétitionnaire ne devrait ni fournir ni installer de matériel de traitement du courrier, mais que l’intimée ferait à cette fin des appels d’offres et les recevrait, que, lorsque l’adjudicataire aurait été choisi, l’équipement et l’installation s’intégreraient au contrat et que la pétitionnaire passerait un sous-contrat avec le soumissionnaire choisi par l’intimée.

Vers la fin des années 1950, il était devenu évident au ministère des Postes que les installations de traitement du courrier à Edmonton avaient besoin d’être agrandies. Le personnel technique des postes a commencé l’étude préliminaire d’un projet pour répondre à ces besoins et établir une évaluation du coût de ce projet afin de faire voter par le Parlement les fonds nécessaires, ce qui a été fait.

Deux firmes d’architectes, la K.C. Stanley and associates et la Aberdeen and Groves, toutes deux d’Edmonton, ont été engagées comme co-architectes responsables du bureau de poste projeté. Bien que la construction elle-même fût destinée à être simplement «l’abri» du matériel de traitement du courrier qu’elle devait loger, le projet dans son ensemble était néanmoins de nature expérimentale car il était pensé en fonction d’un système de traitement du courrier. Pour satisfaire le ministère des Postes, les architectes ont dû travailler de 1953 à 1963 à la conception de la construction destinée à loger le matériel de traitement du courrier à installer. Naturellement, tout au long de cette période, il y a eu de nombreuses consultations et rencontres entraînant des échanges d’idées.

Les architectes ont demandé les services d’une firme d’ingénieurs-conseils, Racey, MacCallum et Bluteau, pour les conseiller sur le système de traitement du courrier. Cette responsabilité incombait à M. Bluteau, membre de cette firme.

D’après la preuve, je vois la fonction de M. Bluteau comme celle d’un coordonnateur. Le ministère des Postes avait déjà choisi les principaux composants

[Page 1162]

fondamentaux du système de traitement du courrier de même que les manufacturiers et fournisseurs; il avait aussi fait des études préliminaires et adopté des idées et des conclusions quant à la possibilité de réalisation, de même qu’il avait élaboré des plans préliminaires.

M. Bluteau devait préparer des plans et devis descriptifs détaillés. A la réception des plans préliminaires du ministère, il a apporté plusieurs modifications, plus ou moins importantes, et en a discuté avec ce dernier.

Si j’ai bien compris la preuve, M. Bluteau avait pour tâche, dans la conception du matériel, d’assurer que les composants principaux du système, qui avaient été créés par les manufacturiers, étaient intégrés à l’ensemble du système, avec des chutes, convoyeurs et autres conduites et mécanismes de ce genre pour répondre aux exigences du flot de courrier. Il avait également pour responsabilité de concevoir un système électrique de commandes pour le système dans son ensemble, mais non pour les unités composantes.

En témoignage, M. Bluteau a déclaré qu’il considérait que son travail a pris fin en juin 1964 avec l’envoi au ministère des Postes de tous ses plans et devis corrigés, mis à part le travail supplémentaire qui pourrait lui être demandé et le plan d’un système électrique de commandes.

Le ministère des Postes avait hâte de faire démarrer le projet et le ministère des Travaux publics, pour sa part, de solliciter des soumissions. Il leur semblait évident, vu les délais considérables que l’on subissait quant à l’achèvement des plans et devis du matériel de traitement du courrier et quant à la conception du système électrique de commandes pour ce dernier, que des délais correspondants s’ensuivraient pour la réalisation du projet en son entier. On a donc résolu de faire immédiatement des appels d’offres pour la construction de l’édifice et de solliciter subséquemment des soumissions particulières pour la fourniture et l’installation du matériel de traitement du courrier après l’établissement des plans et devis et le choix du système électrique de commandes. Par conséquent, on a estimé qu’il serait plus expéditif d’incorporer la fourniture et l’installation du matériel de traitement du courrier au contrat général, pour les placer sous la responsabilité de l’entrepreneur général; le ministère des Postes solliciterait des soumissions pour le matériel de traitement du courrier et il serait convenu que l’entrepreneur général choisi devrait passer un sous-contrat avec le soumissionnaire choisi à cette fin par le ministère. Ce fut la procédure adoptée au cours du

[Page 1163]

printemps 1964 et que dicta l’incapacité de l’ingénieur-conseil retenu pour le matériel de traitement du courrier à répondre aux exigences des ministères concernés.

Sur ce principe, on a fait en mai 1964 des appels d’offres. En vue de compléter la documentation à fournir aux soumissionnaires pour leur permettre de formuler leurs offres, l’architecte a, le 12 février 1964, télégraphié à M. Bluteau lui demandant de fournir l’évaluation du coût de la fourniture et de l’installation du matériel de traitement du courrier. M. Bluteau a répondu par télégramme, confirmé ensuite par lettre, en donnant une évaluation de $1,150,000. Cette évaluation a été incorporée à la documentation fournie aux entrepreneurs généraux que le ministère des Travaux publics considérait comme des soumissionnaires éventuels. En outre, on a fourni aux soumissionnaires un ensemble complet de plans montrant toutes les facettes de l’édifice; on ne leur a toutefois fourni aucun plan ou devis descriptif du matériel de traitement du courrier si ce n’est trois plans décrits comme plans d’aménagement d’étage et portant la mention «Pour information seulement».

En tant que plus bas soumissionnaire pour la construction du bâtiment proprement dit, la compagnie remplacée par l’appelante s’est fait adjuger le contrat par le document que j’ai mentionné, et ensuite les devis descriptifs de l’installation du matériel mécanique et électrique ont été achevés et des soumissions ont été sollicitées pour la fourniture dudit matériel. La Canadian Mail Handling Systems Limited de Windsor (Ontario) fut désignée comme la soumissionnaire heureuse; le montant de sa soumission était de $2,078,543.66. Dans une lettre datée du 17 février 1965, le ministère des Travaux publics demanda à la compagnie remplacée par l’appelante de conclure un contrat pour ce montant avec ladite Canadian Mail Handling Systems Limited en conformité des dispositions de la clause A1 — 4d) des conditions générales du contrat. Cette clause sera étudiée en détail plus loin. Le 23 février 1965, un contrat par sous-traitant a été passé entre la compagnie remplacée par l’appelante et ladite Canadian Mail Handling Systems Limited de Windsor (Ontario).

[Page 1164]

En plus de la lettre de 17 février 1965 que j’ai déjà mentionnée, il y a aussi une série de documents intéressants se rapportant au marché. Daté du 19 février 1965, un document intitulé «ministère des Travaux publics du Canada, direction de la construction», et estampillé «modification» a été envoyé à l’architecte responsable, M. Hodgson. Ce document indiquait une augmentation de $2,078,543.66 relative à la fourniture et à l’installation du matériel de traitement mécanique et se reportait aux délibérations du conseil du Trésor; en bas de page, il contenait un rapport adressé au chef du Trésor par un certain Wallace au nom de l’architecte en chef et recommandant [TRADUCTION] «ce montant à être ajouté comme supplément au contrat». Ensuite, un autre document intitulé aussi «modification» et signé par K.C. Stanley and Company Aberdeen & Groves, les architectes, a été adressé et délivré à la compagnie remplacée par l’appelante; il était daté du 25 février 1965. Ce document qui, comme je l’ai dit, était adressé par l’architecte en chef résidant à la compagnie remplacée par l’appelante autorisait aussi la modification au montant de $2,078,543.66. L’importance de ces deux documents sera commentée ci-après.

Le 23 février 1965, la compagnie remplacée par l’appelante a envoyé une lettre au ministère des Travaux publics à Ottawa dans laquelle elle se reportait aux instructions concernant la conclusion du contrat par sous-traitant avec la Canadian Mechanical Handling Systems Limited et dans laquelle elle mentionnait la différence entre l’évaluation initiale de ce matériel, tel qu’établie dans ladite clause A 1-4 du contrat, et le contrat définitif, soit une différence de $928,543, et réclamait une somme supplémentaire de $92,854.37, soit 10 pour cent pour frais généraux et bénéfices de l’entrepreneur général. Ladite lettre se terminait comme suit:

[TRADUCTION] NOUS demandons donc que le document de modification concernant le matériel de traitement du courrier soit émis au montant de $2,078,543.66 plus la somme de $92,854.37, soit au montant total de $2,171,398.03.

Le montant supplémentaire fait l’objet du présent litige.

[Page 1165]

Le 5 avril 1965, la compagnie remplacée par l’appelante a présenté à l’architecte résidant une demande semblable en vue de faire changer le document de modification et, le 7 avril, l’architecte a fait un rapport au ministère des Travaux publics au sujet de la demande et ce rapport se terminait comme suit:

[TRADUCTION] En tant que vos consultants quant aux travaux en question, nous recommandons que le ministère accepte le montant demandé, ce geste étant compatible avec l’intention exprimée aux documents de contrat.

Finalement, le 31 mai 1965, l’architecte en chef du ministère des Travaux publics à Ottawa a avisé la compagnie remplacée par l’appelante que le ministère ne pouvait réellement pas appuyer une recommandation de paiement.

Sous l’intitulé «conditions générales» se trouve la clause A 1-4 MATÉRIEL DE TRAITEMENT DU COURRIER qui se lit comme suit:

[TRADUCTION] A1-4 MATÉRIEL DE TRAITEMENT DU COURRIER

a) Les soumissions ne comprennent pas la fourniture et l’installation du matériel de traitement du courrier. Cet équipement apparaît pour information seulement aux dessins MG 695, 696 et 697.

b) La soumission englobe tous les coûts exigibles pour frais généraux, surveillance et bénéfices en ce qui concerne la fourniture et l’installation du matériel de traitement du courrier.

L’évaluation de la fourniture et de l’installation du matériel de traitement du courrier est d’environ $1,150,000.00.

Comme nous le verrons, le présent litige résulte de la différence étonnante entre «l’évaluation» de $1,150,000 dans les conditions générales et le montant de $2,078,543.66 qui est le montant réel du contrat par sous-traitant passé avec l’entrepreneur chargé du matériel de traitement du courrier. Étant donné les circonstances inhabituelles dans lesquelles le contrat a été passé, l’entrepreneur principal n’a pas pu tenir compte de ce contrat par sous-traitant quand il a établi sa soumission. L’entrepreneur principal n’avait à sa disposition que les trois plans intitulés «plan d’aménagement d’étage,

[Page 1166]

pour information seulement» que j’ai mentionnés plus haut.

Il convient de signaler le témoignage suivant de M. Hodgson:

[TRADUCTION] R. Je crois qu’il serait — c’est mon opinion personnelle, mon opinion professionnelle — impossible à un entrepreneur de faire une évaluation appropriée à partir des renseignements contenus dans ces dessins du contrat général.

Je dis ceci parce que, bien que son entreprise puisse avoir à son service des gens compétents dans ce domaine, il s’agissait en fait d’un matériel tout nouveau et très complexe comme par exemple une très grosse trieuse à colis, une trieuse de sacs Aero‑Jet, un certain nombre de convoyeurs verticaux qui n’avaient pas encore été utilisés dans notre pays, à l’exception, je crois, de deux plus petits dans le système de convoyeurs verticaux de l’est du Canada. Le montant total de ces éléments fixes suffirait à fausser n’importe laquelle évaluation parce qu’ils étaient décrits — ce qui est aussi, bien entendu, contraire à la pratique du ministère des Travaux publics — par unités et fabricants et par conséquent à moins que l’entrepreneur n’ait communiqué avec ces fabricants, il ne pourrait aucunement savoir que le gros du prix, une bonne partie de ce coût du traitement du courrier, était déjà compris dans ces éléments fixes.

Q. Les noms et l’identité de ces éléments manufacturés étaient-ils indiqués dans les documents qui ont été envoyés aux entrepreneurs généraux aux mois de mai et juin 64?

R. Non.

Q. Ils n’étaient pas disponibles à ce moment?

R. Ni sur les dessins ni sur les devis descriptifs.

Q. Je vois. Alors, pouvez-vous répéter pourquoi le chiffre de $1,150,000 a été mentionné à l’article A-1-4 du matériel de traitement du courrier, pièce 1?

R. Afin que l’entrepreneur puisse évaluer ses coûts au chapitre des frais généraux, de la surveillance de ce secteur particulier des travaux qui devait être incorporé dans son contrat général.

R. Bien, pour lequel il a reçu —

[Page 1167]

LA COUR:

Q. Mais vous dites, M. Hodgson, qu’il ne pouvait faire l’évaluation, parce qu’il ne sait rien au sujet de ces éléments. Comment va-t-il faire son évaluation?

R. Eh bien, au moyen de ce montant déterminé, que nous avons mentionné dans les devis, de ce montant de $1,150,000.

Q. Oui.

R. Oui, il évalue ses frais généraux, son coût, son profit en se basant sur ce chiffre.

Q. Sur ce montant?

R. Oui, Monsieur.

Il était donc capital pour le soumissionnaire, sachant qu’il devrait inclure dans sa soumission un montant pour les frais généraux, surveillance et profit applicables au contrat du matériel de traitement du courrier, de connaître le montant exact auquel le contrat par sous-traitant relatif à ce matériel de traitement du courrier serait consenti. C’est la raison pour laquelle le ministère des Travaux publics a inclus dans ses conditions générales la disposition suivante [TRADUCTION] «l’évaluation de la fourniture et de l’installation du matériel de traitement du courrier est d’environ $1,150,000.» Le 12 février 1964, M. Hodgson, l’architecte, a envoyé le télégramme suivant à Racey, McCallum & Bluteau, Limited:

[TRADUCTION] Indiquer par télégramme le coût de l’installation complète du matériel de traitement de courrier du terminus postal d’Edmonton au plus tard vendredi le 14 février

M. Bluteau a témoigné qu’autant qu’il se souvienne, il a répondu à ce télégramme le même jour et qu’il avait au préalable fait une vérification très rapide. Je cite un extrait de l’interrogatoire que lui a fait subir l’avocat de la pétitionnaire:

[TRADUCTION] Q. Je pourrais peut-être vous poser la question suivante, Monsieur: si vous aviez su le 12 février 1964 qu’on vous demandait le calcul des coûts, l’évaluation des coûts du matériel de traitement du courrier dans le but de les insérer dans les documents du contrat aux fins de faire des appels d’offre, comme vous le savez maintenant, auriez-vous tenté d’atteindre un certain degré d’exactitude dans le chiffre que vous avez avancé?

[Page 1168]

R. Oui, si — je me serais certainement cru en mesure de me maintenir à dix ou quinze pour cent près pour le coût des convoyeurs, du monte-charge, du matériel divers, des glissières, des couloirs, et de tout l’équipement accessoire, mais je ne crois pas que, en aucun temps, j’aurais fait — j’aurais pu faire mieux que de supposer que les chiffres que j’avais reçus sur les éléments principaux étaient exacts. Ce que j’aurais peut-être pu faire, bien sûr, évidemment, aurait été de vérifier auprès du ministère, ce que je n’ai pas fait. Je crois, pour répondre à votre question, que si j’avais su qu’il s’agissait d’une évaluation technique, j’aurais pu certainement vérifier auprès du ministère et obtenir une réponse positive ou négative quant à l’exactitude de ces chiffres.

Au sujet de la réponse qu’il a reçue de M. Bluteau, l’optique de M. Hodgson était tout à fait différente. On lui a posé la question suivante:

[TRADUCTION] Et bien, vous attendiez-vous à un certain degré d’exactitude?

R. Je m’attendais à ce que l’évaluation soit exacte.

Bien entendu, étant donné la fin à laquelle l’évaluation était destinée, une évaluation qui était de plus de $900,000 inférieure au montant réel du contrat par sous-traitant était pire qu’inutile. A mon avis, il est significatif que cette évaluation n’a pas été obtenue par la soumissionnaire, la présente appelante, des ingénieurs mais a été obtenue de l’architecte en chef dans la région, à qui les soumissions devaient être soumises, et elle était donc à mon avis une déclaration par la Couronne que la juste évaluation du coût de l’installation du matériel pour le contrat par sous-traitant était de $1,150,000. Comme je l’ai dit, cette «évaluation» était la seule base sur laquelle un soumissionnaire pouvait fonder sa soumission, qui devait inclure ses frais généraux, la surveillance et les profits sur l’ensemble du contrat y compris le contrat par sous-traitant relatif au matériel de traitement du courrier. Le savant juge de première instance l’a qualifiée ainsi:

L’évaluation du coût énoncée à l’article A1-4 était simplement une déclaration, une suggestion ou un aperçu et ne peut pas s’interpréter comme une garantie que l’évaluation du coût était exacte.

[Page 1169]

Avec respect, je ne puis partager cet avis. M. Hodgson, qui a indiqué le montant aux soumissionnaires, était loin d’être d’avis qu’il s’agissait d’une simple évaluation ou d’un aperçu. D’autre part, il s’attendait à ce que le montant soit exact et il s’est rendu compte que quand la Couronne a inséré cette évaluation dans les conditions générales, elle donnait aux soumissionnaires la base sur laquelle ils pouvaient présenter leurs soumissions. Les soumissionnaires avaient le droit de se baser sur cette «évaluation» en la considérant comme exacte dans les limites que je mentionnerai ci-après, et dans le témoignage que j’ai cité plus haut, M. Bluteau a admis que l’évaluation aurait pu être faite avec exactitude. Les témoins étaient généralement d’accord que pareilles évaluations de coûts de services techniques peuvent comporter un élément de variation, mais que cet élément de variation se limite à dix pour cent en plus ou en moins du montant de l’évaluation. En l’espèce, l’évaluation, ainsi qu’on l’appelle, ne représentait qu’environ 55 pour cent du véritable contrat par sous-traitant. De plus, comme je l’ai dit, M. Hodgson n’a même pas été disposé à admettre qu’il puisse y avoir une variation courante de dix pour cent dans le présent cas. D’autre part, il pensait qu’elle était exacte et qu’elle aurait dû certainement l’être.

Dans les circonstances, il est difficile de comprendre la raison pour laquelle la Couronne peut en toute justice s’opposer à la réclamation que fait l’appelante pour le 10 pour cent du montant qui excède, dans le contrat par sous-traitant, le montant de l’évaluation en question. A cette fin, la Couronne s’appuie sur les termes explicites du contrat et cet appui a été accepté par le savant juge de la Cour de l’Échiquier qui a déclaré:

L’article A1-4 déclarait expressément que l’évaluation de la fourniture et de l’installation du matériel de traitement du courrier n’était qu’une évaluation. Elle s’est avérée grossièrement inexacte. Après recherches, je n’ai pu trouver dans le contrat de disposition portant que l’intimée serait responsable si l’évaluation s’avérait inexacte et on ne m’en a d’ailleurs signalé aucune.

Comme je l’ai dit, ce qui était dit constituait plus, à mon avis, qu’une simple évaluation ordi-

[Page 1170]

naire et la personne qui en a fait l’énoncé au nom de la Couronne, M. Hodgson, entendait qu’il soit une déclaration et l’énoncé a été considéré tel par une personne qui a dû se baser sur lui et uniquement sur lui pour faire ses calculs.

Je suis d’avis que la manière dont l’appelante a été appelée à conclure un contrat avec la compagnie responsable du matériel de traitement du courrier et à ajouter ce montant à son contrat revêt une importance considérable. Comme je l’ai signalé, il y a d’abord eu modification délivrée par le ministère à l’architecte en chef de la région et ensuite une modification a été délivrée par cet architecte en chef à l’appelante. Le contrat passé entre la Couronne et l’appelante prévoit des frais supplémentaires et la disposition importante qui se trouve à la clause 38 se lit comme suit:

[TRADUCTION] 38. (1) L’ingénieur peut, par écrit et à tout moment avant de délivrer son certificat définitif d’achèvement,

a) commander des travaux ou des matériaux en plus de ceux prévus aux plans et devis descriptifs; et

b) supprimer ou changer les dimensions, la nature, la quantité, la qualité, la description, l’emplacement ou la position de la totalité ou d’une partie de l’ouvrage ou des matériaux prévus aux plans et devis descriptifs ou prescrits en vertu de l’alinéa a);

et l’entrepreneur exécutera les travaux suivant ces commandes, suppressions et changements comme s’ils avaient fait partie des plans et devis descriptifs.

(2) L’ingénieur détermine si ce qui a été exécuté ou n’a pas été exécuté par l’entrepreneur suivant une commande, une suppression ou un changement fait par l’ingénieur en vertu du par. (1), a augmenté ou diminué le coût de l’ouvrage pour l’entrepreneur.

(3) Si l’ingénieur détermine, en vertu du paragraphe (2), que le coût a été augmenté, Sa Majesté paiera à l’entrepreneur le coût de la main-d’œuvre supplémentaire, des matériaux et de l’outillage qui en résultent nécessairement, calculé en conformité des articles 44 à 47 des Conditions générales.

L’avocat de l’intimée a prétendu que la modification délivrée par le ministère des Travaux publics constituaient simplement un moyen d’obtenir du conseil du Trésor une autorisation de dépense des deniers et que la [TRADUCTION]

[Page 1171]

«modification délivrée par l’architecte responsable des travaux à la pétitionnaire n’a pas eu pour effet de mettre en jeu l’article 38 parce qu’il ne s’agissait pas d’une commande de l’ingénieur. Il n’y a pas eu de frais additionnels à la charge de la pétitionnaire et la modification ne visait pas des changements mais simplement le coût d’éléments complémentaires qui ressortaient nécessairement des plans d’aménagement d’étage».

Je suis d’avis que si la Couronne a décidé de demander à l’entrepreneur d’ajouter le contrat par sous-traitant comme supplément, il s’ensuit que la Couronne appliquait les dispositions de la clause 38 et que ses droits sont régis par cette clause. Le terme «ingénieur» est défini à l’al. a) du par. (1) de l’art. 1 des Conditions générales comme suit:

[TRADUCTION] a) «ingénieur» désigne l’architecte en chef du ministère des Travaux publics du gouvernement du Canada, ainsi qu’une personne spécialement autorisée par lui pour remplir en son nom toute fonction prévue au contrat.

L’architecte-conseil responsable des travaux, c’est-à-dire les compagnies représentées par M. Hodgson, était une personne expressément autorisée par l’architecte en chef au sens de la définition ci-dessus. Il y a eu des coûts supplémentaires à la charge de l’appelante. L’appelante a passé un contrat avec la compagnie responsable du matériel de traitement mécanique et elle était tenue de payer cette compagnie malgré le fait qu’elle pouvait réclamer du ministère les paiements qu’elle effectuait. Dans une lettre adressée par le ministère des Travaux publics à la compagnie qu’a remplacée l’appelante, on dit ceci:

[TRADUCTION] En ce qui concerne la Couronne, votre firme sera responsable de l’exécution des travaux qui rentrent dans le cadre du contrat par sous-traitant et de toutes les questions s’y rapportant. Les paiements selon l’avancement des travaux relativement aux travaux exécutés par le sous-traitant seront effectués par votre firme en la manière normale.

Je suis donc d’avis que le contrat par sous-traitant doit être régulièrement traité comme un supplément en vertu des dispositions de la clause 38 du contrat et, en conformité de la

[Page 1172]

directive stipulée dans cette clause, le paiement du supplément doit être régi par les clauses 44 à 47 inclusivement.

La clause 45 stipule que si une question n’est pas visée au tableau des prix unitaires, le montant déterminé de temps à autre par l’entrepreneur et l’ingénieur constituera, aux fins de certains articles des Conditions générales, y compris la clause 38, le coût de la main‑d’œuvre, de l’outillage et des matériaux et l’appelante a prétendu que l’ingénieur avait accepté le paiement de ce montant de $92,000. Je suis toutefois d’avis que la réponse de l’intimée à cette prétention est absolument convaincante. La lettre datée du 7 avril 1965 est adressée par M. Hodgson au ministère des Travaux publics, lettre dont j’ai cité une partie plus haut, n’était pas une convention de paiement mais une simple recommandation au ministère des Travaux publics que le montant devrait être payé et, dans sa lettre du 31 mai à la compagnie qu’a remplacée l’appelante, l’architecte en chef du ministère des Travaux publics a catégoriquement refusé d’accepter cette recommandation. Par conséquent, il faut se reporter à la clause 46 des Conditions générales. Cette clause prévoit que si la méthode de calcul des articles 44 et 45 ne peut résoudre une question, la rétribution sera alors égale au total de a) toutes les sommes justes et raisonnables réellement dépensées et b) 10 pour cent des dépenses totales de l’entrepreneur répondant au critère de l’alinéa a). Appliquant la clause 46 b), on s’aperçoit que, sur cette base, que je fais mienne, l’appelante a droit à 10 pour cent des coûts du montant de $2,078,543.66. Elle a déjà obtenu 10 pour cent de $1,150,000 sur cette somme en devenant la soumissionnaire heureuse et elle aura droit à 10 pour cent du solde, c’est-à-dire, aux 92,000 et quelques dollars qu’elle réclame dans sa pétition.

Une décision de la Court of Appeal dans une affaire très semblable à la présente est d’un intérêt considérable. Dans l’arrêt Parkinson & Co. Ltd. v. Commissioners of Works and Public Buildings[1], la Cour eut encore à se prononcer

[Page 1173]

sur un contrat conclu par les Travaux publics et un constructeur en vue de la construction d’une usine, et dans lequel était prévue la possibilité d’une augmentation substantielle des services à rendre en cours d’exécution. Le contrat était pour le prix coûtant plus un pourcentage et il stipulait que le montant à être payé à l’entrepreneur devait être calculé en conformité des dispositions du contrat mais ne devait pas être inférieur au coût des travaux plus un profit net ou une rémunération de 150,000 livres, ni supérieur au coût des travaux plus 300,000 livres. Ces montants avaient été calculés comme représentant un certain pourcentage des travaux, tels que ceux-ci avaient été prévus à l’origine dans le contrat ou tels qu’ils pouvaient être augmentés, mais les augmentations ont conduit à un coût total de 6,683,000 livres et non simplement 5,000,000. Il a été décidé que, selon la juste interprétation de l’acte de modification de contrat, les parties n’avaient pas envisagé, lors de la signature de cet acte, qu’il y aurait des augmentations si considérables dans la somme de travail à exécuter; et, qu’à ce moment-là, les deux parties avaient envisagé des travaux qui, avec l’introduction de méthodes exceptionnelles, devaient coûter approximativement cinq millions de livres, et que c’était sur cette base que les parties s’étaient entendues sur un profit maximum de 300,000 livres. Les travaux supplémentaires ayant été exécutés par l’entrepreneur à la demande des commissaires, il avait le droit de recevoir un profit ou une rémunération raisonnable à l’égard de ces travaux. Le Juge Asquith a dit à la p. 226:

[TRADUCTION] En premier lieu, si le contrat original et l’acte ne contiennent aucune restriction implicite quant à leur sens littéral, il en résulte, comme nous l’avons vu plus haut, qu’après que l’entrepreneur a gagné un profit de 300,000 livres il peut être contraint de travailler comme les Danaïdes sans limite ni rétribution sur tout autre «supplément» que les commissaires peuvent décider de lui demander, «jusqu’à la dernière syllabe du souvenir». Le facteur restrictif que constitue, sur le plan pratique, la nécessité de payer pour de tels «suppléments», et de payer avec les deniers des contribuables, ne joue plus alors, à cause de la réserve de la clause 4 de l’acte imposant un profit maximum. Seules les dispositions les plus

[Page 1174]

impératives pourraient induire une cour à interpréter l’effet combiné des deux documents comme mettant une partie complètement à la merci de l’autre. Lorsque les dispositions d’un contrat peuvent s’accommoder d’un sens large et littéral de même que d’un sens plus restreint et moins littéral, on peut tenir compte de toutes les circonstances pertinentes pour décider s’il faut leur prêter un sens littéral ou un sens plus restreint.

Et à la p. 227, le Juge Asquith a dit:

[TRADUCTION] S’il en est ainsi, il paraît juste de conclure qu’il était entendu entre les parties à l’acte de modification que le profit maximum et minimum était directement relié et limité à une quantité totale de travail correspondant à environ 5 millions de livres, et que les commissaires ne devaient pas avoir le droit, en vertu du contrat, d’exiger du travail qui dépassât substantiellement cette quantité. Il s’ensuit qu’il est impossible, en vertu du contrat, de faire droit à une demande exigeant une quantité supplémentaire de travail correspondant à environ 2 millions de livres et, vu que ce travail supplémentaire a été effectivement demandé et exécuté, l’entrepreneur a le droit de réclamer à cet égard, non en vertu du contrat, mais en dehors du contrat, une rémunération raisonnable.

En appliquant la même méthode d’interprétation à la présente affaire, je conclus que quand les parties ont passé le contrat original, il était entendu que l’appelante serait requise de conclure un contrat par sous-traitant en vue de l’installation du matériel de traitement mécanique à un coût d’environ $1,150,000 et que, par conséquent, sa soumission devait comprendre les frais généraux, la surveillance et le profit sur ce montant-là. Ce qui est arrivé, c’est que l’appelante a dû conclure un contrat par sous-traitant d’un montant supérieur à $2,000,000, et par conséquent les frais généraux, la surveillance et le profit sur ce montant plus élevé n’avaient été envisagés par aucune des parties. Aucun des précédents cités par l’intimée au cours de sa plaidoirie ne m’ont convaincu que je ne devrais pas aborder l’interprétation de ce contrat d’affaires d’une manière que je considère comme pratique aboutissant à la décision que j’ai adoptée.

Le savant juge de la Cour de l’Échiquier a fait droit à la pétition pour seulement $19,654.79. De cette somme, un montant de $9,958.09 avait

[Page 1175]

fait l’objet de la modification dont j’ai parlé, apportée à la pétition, et l’intimée avait reconnu sa responsabilité pour ce montant. Je suis donc d’avis de modifier le jugement rendu sur la pétition de façon à inclure cette somme de $9,958.09 en même temps que la réclamation originale de $92,854.37, ce qui fait un total de $102,812.46. L’appelante a droit à ses dépens dans toutes les cours.

Appel accueilli avec dépens.

Procureurs de l’appelante: Parlee, Cavanagh, Irving, Henning, Mustard & Rodney, Edmonton.

Procureur de l’intimée: André M. Garneau, Ottawa.

[1] [1950] 1 All E.R. 208.


Synthèse
Référence neutre : [1974] R.C.S. 1159 ?
Date de la décision : 27/08/1973
Sens de l'arrêt : L’appel doit être accueilli

Analyses

Contrats - Contrats de construction de bâtiment - Contrat avec la Couronne - Évaluation du coût - Soumission fondée sur l’évaluation - Responsabilité du propriétaire pour les suppléments.

L’appelante a signé un accord avec la Couronne en 1964 en vue de la construction d’un nouveau terminus postal à Edmonton. Des appels d’offre ont été faits au mois de mai de la même année pour la construction immédiate de la bâtisse, avec l’entente qu’on solliciterait des soumissions particulières pour la fourniture et l’installation du matériel de traitement du courrier après l’établissement de plans et devis et le choix du système électrique et du système de commandes. La fourniture et l’installation de ce matériel demeuraient cependant sous la responsabilité de l’entrepreneur général, qui devait passer un contrat par sous-traitant avec l’heureux soumissionnaire que lui désignerait le ministère des Travaux publics. Une évaluation du coût de la fourniture et de l’installation du matériel de traitement du courrier au montant de $1,150,000 a été incorporée à la documentation rendue disponible aux soumissionnaires éventuels par le ministère des Travaux publics. En outre, on a fourni aux soumissionnaires un ensemble complet de plans de l’édifice sans toutefois fournir aucun plan ou devis descriptif du matériel de traitement du courrier si ce n’est trois plans décrits comme plans d’aménagement d’étage et portant la mention «Pour information seulement». Le montant effectivement inscrit au contrat passé avec le sous-traitant pour la fourniture et l’installation du matériel de traitement du courrier a été de $2,078,543.66. La demande d’un supplément, faite par l’appelante, pour les frais généraux, la surveillance et le profit, est née de la différence considérable entre l’évaluation et le montant du contrat par sous-traitant. Le juge de première instance a fait droit à la pétition de l’appelante pour seulement $19,654.79 alors que celle-ci avait fait une réclama-

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tion de $92,854.37, augmentée par amendement à $102,812.46.

Arrêt: L’appel doit être accueilli.

Étant donné les circonstances inhabituelles dans lesquelles le contrat a été passé, l’entrepreneur principal n’a pu, quand il a établi sa soumission, tenir compte de ce contrat par sous-traitant autrement qu’en se référant aux plans d’aménagement d’étage intitulés «pour information seulement». On comptait que l’évaluation de $1,150,000 était exacte et donnée aux soumissionnaires à titre de base sur laquelle ils pouvaient présenter leurs soumissions, et ces soumissionnaires avaient le droit de se baser sur l’exactitude de ces chiffres dans certaines limites normales (l’élément de variation généralement accepté étant de 10 pour cent en plus ou en moins du montant de l’évaluation). La Couronne a demandé à l’appelante de considérer le contrat par sous-traitant comme un supplément: lorsque les parties ont passé le contrat original, le montant plus élevé n’était pas envisagé par elles. Le contrat par sous‑traitant aurait dû être traité comme un supplément et une tranche de 10 pour cent du montant par lequel le contrat par sous-traitant dépassait la somme de $1,150,000 aurait dû être accordée pour les frais généraux, la surveillance et le profit. Arrêt suivi: Parkinson & Co. Ltd. v. Commissioners of Works and Public Buildings [1950] 1 All E.R. 208.


Parties
Demandeurs : Cana Construction Co.
Défendeurs : Sa Majesté la Reine
Proposition de citation de la décision: Cana Construction Co. c. R., [1974] R.C.S. 1159 (27 août 1973)


Origine de la décision
Date de l'import : 06/04/2012
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ca;cour.supreme;arret;1973-08-27;.1974..r.c.s..1159 ?
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