La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

04/04/1977 | CANADA | N°[1977]_2_R.C.S._832

Canada | MacDonald c. R., [1977] 2 R.C.S. 832 (4 avril 1977)


Cour suprême du Canada

MacDonald c. R., [1977] 2 R.C.S. 832

Date: 1977-04-04

Robert Wayne MacDonald (Plaignant) Appelant;

et

Sa Majesté La Reine (Défendeur) Intimée.

1977: le 14 février; 1977: le 4 avril.

Présents: Le juge en chef Laskin et les juges Martland, Judson, Ritchie, Spence, Pigeon, Dickson, Beetz et de Grandpré.

EN APPEL DE LA COUR D’APPEL DE L’ONTARIO.

Cour suprême du Canada

MacDonald c. R., [1977] 2 R.C.S. 832

Date: 1977-04-04

Robert Wayne MacDonald (Plaignant) Appelant;

et

Sa Majesté La Reine (Défendeur) Intimée.

1977: le 14 février; 1977: le 4 avril.

Présents: Le juge en chef Laskin et les juges Martland, Judson, Ritchie, Spence, Pigeon, Dickson, Beetz et de Grandpré.

EN APPEL DE LA COUR D’APPEL DE L’ONTARIO.


Sens de l'arrêt : Le pourvoi doit être rejeté

Analyses

Droit criminel - Meurtre - Les coups de feu meurtriers n’ont pas été tirés par l’appelant - Responsabilité à titre de partie aux infractions - Erreur possible dans les directives au jury - Verdict de culpabilité inévitable - Pas de réduction à homicide involontaire coupable - Code criminel, art. 21, 307, 613(1)b)(iii) et 623(1).

L’appelant et un certain Pentiluk ont conjointement été inculpés des meurtres non qualifiés de Derek Hannan et Gregory Plytas. L’appelant avait conduit Pentiluk, sur les instructions de ce dernier, à l’endroit où les meurtres ont été commis, selon la déclaration de l’appelant, afin de donner une correction à Hannan, qu’un peu plus tôt dans la soirée Pentiluk avait poussé par-dessus la balustrade du balcon d’un immeuble. Selon sa déclaration, l’appelant est resté dans la voiture pendant que Pentiluk entrait dans la maison, avec un fusil, afin d’amener Hannan dans la rue pour que l’appelant se batte avec lui. Alors qu’il était dans la maison Pentiluk tua Hannan et Plytas à coups de fusil. Toutefois d’autres témoignages montrent que l’appelant était entré dans la maison avec Pentiluk et que c’était l’appelant qui avait fourni l’arme du crime et les munitions. Les deux accusés ont été déclarés coupables de meurtre non qualifié. Dans ses directives, le juge du procès a lu l’art. 21 du Code criminel et a ensuite exposé la thèse du ministère public selon laquelle l’appelant a aidé et encouragé Pentiluk en fournissant le fusil et les munitions et en conduisant Pentiluk sur les lieux, et qu’il avait formé avec Pentiluk le projet de poursuivre une fin commune illégale. Le juge ensuite a attiré l’attention du jury sur l’art. 307 du Code, traitant de l’infraction qui consiste à entrer dans une maison d’habitation avec l’intention d’y commettre un acte criminel, et il a expliqué que la thèse de la défense consistait partiellement à dire que l’appelant ne savait pas qu’un meurtre pouvait en résulter. La Cour d’appel a confirmé la déclaration de culpabilité de Pentiluk et, après avoir relevé les directives inadéquates données au jury sur la responsabi-

[Page 833]

lité de l’appelant en tant que partie aux infractions, en vertu de Fart. 21, a cependant confirmé la déclaration de culpabilité de l’appelant, au motif qu’un jury raisonnable, ayant reçu des directives appropriées, n’aurait pu, compte tenu de la preuve, faire autrement que de rendre un verdict de culpabilité, invoquant en outre les dispositions correctives du sous-al. 613(1)b)(iii) pour rejeter l’appel. L’appelant interjette ce pourvoi, sur autorisation.

Arrêt (le juge en chef Laskin et le juge Dickson étant dissidents): Le pourvoi doit être rejeté.

Les juges Martland, Judson, Ritchie, Spence, Pigeon, Beetz et de Grandpré: Les directives n’étaient pas aussi complètes ni aussi claires qu’il aurait été souhaitable, mais le jury était pleinement saisi de tous les points litigieux à trancher. En ce qui concerne la question de l’aide et de l’encouragement à commettre une infraction, aux termes des al. 21(1)b) et c), la preuve montrait que l’appelant avait fourni le fusil et les munitions, qu’il avait conduit Pentiluk sur les lieux du crime et qu’il se trouvait dans la maison avec Pentiluk lorsque les infractions ont été commises. Quant au par. 21(2), portant sur la poursuite d’une fin illégale commune, la seule fin illégale commune mentionnée dans les directives au jury était que l’appelant et Pentiluk étaient entrés dans une maison, avec l’intention de commettre une infraction criminelle. Le juge aurait pu faire davantage et souligner que l’appelant et Pentiluk s’étaient rendus dans cette maison, armés d’un fusil, avec pour fin commune de commettre des voies de fait sur Hannan.

Le juge en chef Laskin et le juge Dickson dissidents: Jamais dans ses directives le juge du procès n’a expliqué au jury à quelle conclusion il devait parvenir avant de décider si l’appelant était partie au meurtre en vertu des al. 21(1)b) ou c). Lorsqu’on cherche à inculper une personne pour complicité aux termes des al. 21(1) b) et c), il faut expliquer clairement au jury le fondement d’une telle inculpation. En ce qui concerne le par. 21(2), aucune directive n’indiquait au jury que s’il concluait à l’intention commune de poursuivre une fin illégale et de s’y entraider, et qu’en fait une infraction avait été commise dans la réalisation de cette intention commune, il était en outre nécessaire que la Couronne démontre au-delà de tout doute raisonnable que l’appelant savait ou devait savoir que la réalisation de l’intention commune aurait pour conséquence probable cette infraction. Compte tenu des témoignages discordants, l’absence de directives et les directives erronées rendent impossible l’application en l’espèce du remède prévu au sous-al. 613(1)b)(iii).

S’il y avait un nouveau procès, il est fort probable que MacDonald serait déclaré coupable, mais la preuve est

[Page 834]

telle qu’un jury, ayant reçu les directives appropriées, pourrait déclarer l’appelant coupable d’homicide involontaire coupable plutôt que de meurtre. La Cour devrait donc substituer un verdict d’homicide involontaire coupable. Il n’est pas illogique de déclarer l’appelant coupable d’homicide involontaire coupable même si l’auteur principal de l’infraction a été déclaré coupable de meurtre pour le même crime.

Une cour d’appel peut remplacer une déclaration de culpabilité pour meurtre par une déclaration de culpabilité pour homicide involontaire coupable, infraction comprise dans l’inculpation, lorsqu’elle est convaincue qu’il manque un des éléments essentiels à la première, mais que même sans cet élément, la deuxième reste fondée.

[Arrêts mentionnés: R. v. Dick, [1947] O.R. 105; R. v. Reid (1975), 62 Cr. App. R. 109; R. v. Nantais, [1966] 2 O.R. 246.]

POURVOI contre un arrêt de la Cour d’appel de l’Ontario[1] rejetant un appel des déclarations de culpabilité prononcées par le juge Keith et un jury sur des accusations de meurtre non qualifié. Pourvoi rejeté, le juge en chef Laskin et le juge Dickson étant dissidents.

Alan Gold, pour l’appelant.

David Watt, pour l’intimée.

Le jugement du juge en chef Laskin et du juge Dickson a été rendu par

LE JUGE EN CHEF (dissident) — L’appelant a été déclaré coupable du meurtre de deux personnes abattues par son coaccusé, un nommé Pentiluk. Par la voix du juge Martin, la Cour d’appel de l’Ontario a unanimement confirmé les déclarations de culpabilité prononcées contre ces deux accusés. L’appelant MacDonald a été autorisé à se pourvoir devant cette Cour. Bien qu’il demande un nouveau procès dans le factum déposé en son nom, les plaidoiries de son avocat et du substitut du procureur général ont clairement indiqué que l’on demande en fait à cette Cour de confirmer la déclaration de culpabilité ou d’y substituer un verdict d’homicide involontaire coupable. Le pouvoir de ce faire en vertu de l’art. 613 et du par. 623(1) du Code criminel n’a pas été contesté.

[Page 835]

Il ne fait aucun doute que la poursuite contre MacDonald repose sur des bases solides. Il est tout aussi évident que le juge de première instance, dans ses directives au jury, a commis des erreurs sérieuses et préjudiciables à l’accusé. Cela n’est pas contesté par le substitut du procureur général qui appuie toutefois le point de vue du juge Martin selon lequel il s’agit d’un cas où il y a lieu d’appliquer le remède prévu au sous-al. 613(1)b)(iii) du Code criminel.

L’appelant n’a pas tiré les coups de feu fatals. Toutefois, il a accompagné son coaccusé à l’endroit où la fusillade a eu lieu et il l’y a même conduit dans son automobile; de plus, il savait avant la fusillade que son coaccusé était armé d’un fusil. Le sort de l’appelant dépend donc de l’application de l’art. 21 du Code criminel que voici:

21. (1) Est partie à une infraction quiconque

a) la commet réellement,

b) accomplit ou omet d’accomplir quelque chose en vue d’aider quelqu’un à la commettre,

ou

c) encourage quelqu’un à la commettre.

(2) Quand deux ou plusieurs personnes forment ensemble le projet de poursuivre une fin illégale et de s’y entr’aider et que l’une d’entre elles commet une infraction en réalisant cette fin commune, chacune d’elles qui savait ou devait savoir que la réalisation de l’intention commune aurait pour conséquence probable la perpétration de l’infraction, est partie à cette infraction.

Pentiluk avait été mêlé à une bagarre chez une nommée Helen Platt à Toronto. Pentiluk et trois autres personnes se trouvaient à une fête donnée à cet endroit, sans y avoir été invités. Au cours d’une altercation l’opposant à Derek Hannan, le frère de Mme Platt, il a frappé ce dernier à la tête avec une planche puis l’a poussé par-dessus la balustrade du balcon du 2e étage. Mme Platt a riposté en frappant Pentiluk dans le dos à deux reprises avant que n’entervienne pour les séparer un nommé Plytas, un des compagnons de Pentiluk. Pentiluk a ensuite quitté les lieux en compagnie de ses deux autres compagnons, laissant Plytas derrière lui. Ils se sont rendus chez l’appelant, dont la concubine les a reçus. L’appelant n’était pas chez lui à ce

[Page 836]

moment-là, mais est arrivé peu après. Dans une déclaration volontaire faite après son arrestation, l’appelant a dit que Pentiluk lui avait demandé de donner une correction à Hannan et qu’il avait accepté; il s’est donc rendu chez Mme Platt en compagnie de Pentiluk, qui lui indiquait la route à suivre.

A leur arrivée (selon la déclaration de l’appelant), Pentiluk a tiré du coffre de l’automobile un fusil qu’il voulait utiliser, a-t-il dit, pour forcer Hannan à sortir pour se battre avec l’appelant. Pentiluk est entré dans la maison et l’appelant dit avoir entendu deux coups de feu, coup sur coup, suivis d’un troisième; l’appelant s’est alors précipité dans la maison, a grimpé l’escalier et dit à Pentiluk [TRADUCTION] «Sortons d’ici». Ils sont sortis en courant et ont pris la fuite dans l’automobile de l’appelant. D’autres preuves ont révélé que Hannan a été abattu alors qu’il parlait au téléphone, que Plytas a été touché dans la salle de séjour, et est mort peu après des suites de ses blessures, et que Mme Platt a été grièvement blessée par le troisième coup de feu tiré par Pentiluk.

La preuve a permis au jury de conclure que le fusil employé par Pentiluk provenait de l’appartement de l’appelant et que l’appelant lui-même l’avait fourni à Pentiluk et que ce dernier était accompagné par l’appelant lorsqu’il s’est introduit dans la maison de Mme Platt avec le fusil et qu’il s’est mis à tirer. Toutefois, puisque la participation de l’appelant aux meurtres dépend de savoir si les al. 21(1)b) ou c) ou le par. 21(2) s’appliquent de façon à entraîner sa culpabilité, j’estime qu’une cour d’appel doit appliquer avec beaucoup de circonspection le remède prévu au sous-al. 613(1)b)(iii), lorsqu’une directive erronée a été donnée à l’égard de ces dispositions et si cette directive (comme c’est, à mon avis, le cas en l’espèce) a trait directement à l’évaluation de la situation qui aurait pu apparaître sous un jour différent si le jury avait reçu des directives régulières.

En donnant aux jurés ses directives concernant l’appelant MacDonald, le juge de première instance leur a lu l’art. 21 en entier, mais il ne leur a pas expliqué à quelle conclusion ils devaient parvenir avant de décider si l’appelant était partie aux

[Page 837]

meurtres en vertu des al. 21(1)b) ou c). J’estime que lorsque l’on cherche à inculper une personne pour complicité aux termes des al. 21(1)b) et c), il faut expliquer clairement au jury le fondement d’une telle inculpation: voir R. v. Dick[2]. La façon dont le juge de première instance a soumis aux jurés la question de l’aide et de l’encouragement à commettre une infraction pouvait les conduire à croire que l’appelant était partie à l’infraction de meurtre du seul fait qu’il avait conduit Pentiluk chez Mme Platt, lieu du crime. Le substitut du procureur général a reconnu l’insuffisance des directives à cet égard.

Le juge de première instance a commis une autre erreur, cette fois dans ses directives portant sur le par. 21(2). Selon moi, cette erreur à elle seule entache de nullité la déclaration de culpabilité, d’autant plus que le juge de première instance a initialement omis d’informer le jury que l’homicide involontaire coupable était un verdict possible dans le cas de MacDonald, alors qu’il l’avait fait dans le cas de Pentiluk. Dans de nouvelles directives, il a informé le jury de la possibilité de rendre un verdict d’homicide involontaire coupable, mais il l’a fait en des termes qui ne répondent pas aux exigences de la preuve permettant de déclarer l’appelant coupable d’homicide involontaire coupable aux termes du par. 21(2).

En effet, à l’exception d’une paraphrase du par. 21(2) au début, le juge de première instance a négligé, dans son exposé aux jurés, de leur indiquer qu’ils devaient non seulement conclure que Pentiluk et MacDonald avaient formé ensemble le projet de poursuivre une fin illégale (en l’espèce, de commettre des voies de fait) et de s’y entraider, mais également que l’appelant savait ou devait savoir que la réalisation de l’intention commune aurait pour conséquence probable un homicide, en l’occurrence un meurtre ou un homicide involontaire coupable (termes à définir dans les directives).

Dans l’exposé au jury, deux passages seulement traitent du droit applicable à l’égard du par. 21(2); ils sont, dans les deux cas, suivis d’un exposé détaillé de la preuve concernant surtout Pentiluk. Voici le premier passage:

[Page 838]

[TRADUCTION]… la preuve indique, et je la porte de nouveau à votre attention, que ces deux hommes armés d’un fusil ont dû entrer ensemble dans cette maison, sans en avoir le droit, en violation des dispositions de l’art. 307 du Code criminel. Cette maison n’était pas la leur.

(1) Est coupable d’un acte criminel et passible d’un emprisonnement de dix ans, quiconque, sans excuse légitime, dont la preuve lui incombe, s’introduit ou se trouve en une maison d’habitation avec l’intention d’y commettre un acte criminel…

Vous voyez maintenant pourquoi je vous dis que l’art. 307 fait du par. (2) de l’art. 21 une disposition que vous devez prendre en considération.

Après quelques mots sur la thèse alléguée en défense par Pentiluk, le juge a tenu les propos suivants:

[TRADUCTION] Quant à MacDonald, selon sa défense, non seulement n’a-t-il pas fourni le fusil à Pentiluk, mais il ne savait même pas que ce dernier était armé avant qu’ils n’arrivent au 14, avenue Seymour et la seule raison de sa présence à cette adresse, au moment de la fusillade, est celle mentionnée dans sa déclaration, c’est-à-dire se battre avec Derek Hannan; il prétend n’avoir rien fait, selon les termes de l’art. 21 du Code criminel, pour aider ou encourager Pentiluk à commettre les meurtres et n’avoir pas formé avec lui le projet de poursuivre une intention illégale, en sachant qu’un meurtre pourrait en résulter.

[Les italiques sont de moi.]

Après avoir passé la preuve en revue, le juge de première instance n’a fait aucune autre mention du droit applicable et s’en est tenu aux verdicts possibles; dans le cas de Pentiluk, coupable de meurtre ou non coupable de meurtre mais coupable d’homicide involontaire coupable, tandis que dans celui de l’appelant, coupable de l’infraction dont il est inculpé ou non coupable.

A la fin de l’exposé du juge au jury, le substitut du procureur général a relevé l’absence de directives concernant la possibilité d’un verdict d’homicide involontaire coupable à l’endroit de l’appelant. Mais cela n’était certes pas la seule lacune même si, à ce stade du procès, l’avocat de l’appelant, qui n’est pas celui qui le représente devant cette Cour, n’a soulevé aucune objection. Le juge de première instance a rappelé le jury pour réparer son oubli. J’ai déjà fait allusion aux nouvelles directives et je

[Page 839]

cite maintenant le passage où il est question d’homicide involontaire coupable comme verdict possible:

[TRADUCTION] On a attiré mon attention sur les circonstances qui rendraient possible votre conclusion qu’aucun d’eux n’avait l’intention, en se rendant à cet endroit, de tirer sur quelqu’un et que cependant il y a eu des coups de feu pendant qu’ils poursuivaient une fin illégale, MacDonald ayant fourni le fusil à Pentiluk. Je suppose que si telle est votre conclusion, il vous est alors possible de rendre un verdict d’homicide involontaire coupable plutôt que non coupable de meurtre non qualifié et vous devez examiner cette possibilité.

L’irrégularité de cette directive est flagrante.

Le jury lui-même était mal à l’aise devant les renvois succincts du juge de première instance au droit applicable et surtout à l’art. 21. Les jurés lui ont d’ailleurs fait parvenir la note suivante:

[TRADUCTION] Nous aimerions quelques éclaircissements sur l’art. 21 ainsi que sur l’art. 307.

Le juge a dit au jury que [TRADUCTION] «ceci vise uniquement l’accusé MacDonald… et, dans le contexte de votre question, c’est sur le par. 2 que vous demandez des éclaircissements et non sur la question de l’aide ou de l’encouragement». Il a ensuite lu au jury les par. 21(2) et 307(1), puis il a enchaîné:

[TRADUCTION] Maintenant, je veux rattacher ces articles à la preuve qui est devant vous et à la lumière de laquelle vous devez décider si l’art. 21 est applicable de façon à faire de l’accusé MacDonald une partie aux infractions qui ont été, selon vous, commises dans cette maison.

Après cela, le juge de première instance a passé en revue une partie de la preuve, dont un extrait de la déclaration de l’appelant, et il a terminé en disant:

[TRADUCTION] Maintenant, je ne sais pas quelle impression cela va vous laisser. A mon avis, la seule déduction possible, si vous croyez Davis — et son témoignage est étayé par celui de Millie Dubien et de Helen Platt, selon lequel il n’y a eu aucun bruit de pas après le troisième coup de feu, et par la déclaration de Derek Hannan «Ils ont un fusil» — il faut en déduire que lorsque Pentiluk s’est introduit dans cette maison — selon le témoignage de Davis, un témoin indépendant — MacDonald était à ses côtés et savait que son compagnon tenait un fusil entre ses mains lorsqu’il s’est introduit, sans en avoir le droit, dans la maison en question.

[Page 840]

Les propos du juge de première instance ne répondaient en rien aux éclaircissements demandés par le jury sur l’art. 21 ni, selon le point de vue du juge de première instance, sur son par. (2). A mon avis, on a demandé au jury de décider de la culpabilité de MacDonald à la lumière de directives sur le droit tellement ténues qu’elles équivalent à une absence de directives ou à des directives totalement erronées sur des points qu’il fallait expliquer avec beaucoup de soin.

Ayant cité ou mentionné tout ce que le juge de première instance a dit sur le droit applicable à l’égard de l’appelant, je ne souscris pas à l’évaluation mitigée que le juge Martin fait des directives lorsqu’il dit qu’à l’égard de l’art. 21, [TRADUCTION] «[elles] n’étaient pas aussi complètes ni aussi claires qu’il aurait été souhaitable». Le juge de première instance n’a jamais mentionné le fait que l’intention est un élément essentiel de l’infraction qui consiste à aider ou à encourager à commettre un crime, et il n’a pas non plus parlé de la nature de pareille intention; il n’a donné aucune directive pour bien faire comprendre aux jurés que même s’ils concluaient que les accusés avaient formé ensemble le projet de poursuivre une fin illégale et de s’y entraider (et je passe sous silence, puisque cela me paraît sans importance dans l’ensemble, le fait qu’il n’a mentionné à cet égard que l’art. 307) et qu’une infraction avait été commise en réalisant cette fin commune, il fallait en outre que le ministère public prouvât, au-delà de tout doute raisonnable, que l’appelant savait ou devait savoir que la réalisation de cette intention commune aurait pour conséquence probable la perpétration d’une infraction. Le jury a tout simplement été abandonné à lui-même à l’égard d’aspects déterminants de l’affaire. Compte tenu des témoignages discordants, l’absence de directives et les directives erronées rendent à mon avis impossible l’application en l’espèce du remède prévu au sous-al. 613(1)b)(iii).

De toute évidence, la déclaration de culpabilité pour meurtre ne peut être maintenue, et s’il y avait un nouveau procès, il est fort probable que MacDonald suivrait l’exemple de Pentiluk et plaiderait

[Page 841]

coupable d’homicide involontaire coupable, infraction comprise dans l’inculpation. Ce plaidoyer a été rejeté dans le cas de Pentiluk, mais l’argumentation du substitut du procureur général en l’espèce ainsi que la forme de redressement subsidiaire proposée par l’avocat de l’accusé me convainquent que cette Cour ne doit pas ordonner un nouveau procès, que ce soit pour meurtre ou pour homicide involontaire coupable. Puisqu’il est certain que la preuve est suffisante pour permettre à un jury, ayant reçu des directives appropriées, de déclarer l’appelant coupable d’homicide involontaire coupable plutôt que de meurtre (il ne fait aucun doute que l’appelant ne pourrait être totalement acquitté), il est donc préférable que cette Cour substitue au verdict du jury celui d’homicide involontaire coupable.

Il n’est pas illogique de déclarer l’appelant coupable d’homicide involontaire coupable même si l’auteur principal de l’infraction a été déclaré coupable de meurtre pour le même crime: voir R. v. Reid[3]. En outre, une cour d’appel peut remplacer une déclaration de culpabilité pour meurtre par une déclaration de culpabilité pour homicide involontaire coupable, infraction comprise dans l’inculpation, lorsqu’elle est convaincue qu’il manque un des éléments essentiels à la première, mais que même sans cet élément, la deuxième reste fondée: voir R. v. Nantais[4]. En l’espèce, on peut raisonnablement dire que l’intention commune était de forcer Hannan, sous la menace d’un fusil, à sortir de chez Mme Platt pour se battre avec l’appelant, et que, même si cela pouvait entraîner un meurtre, puisque Pentiluk était armé d’un fusil, l’appelant ne savait pas et n’avait pas moyen de savoir que la réalisation de l’intention commune aurait pour conséquence probable la perpétration d’un meurtre.

Je substituerais donc au verdict du jury celui d’homicide involontaire coupable et je renverrais l’affaire devant la Cour d’appel de l’Ontario pour qu’elle impose une sentence.

[Page 842]

Le jugement des juges Martland, Judson, Ritchie, Spence, Pigeon, Beetz et de Grandpré a été rendu par

LE JUGE MARTLAND — L’appelant et un nommé Pentiluk ont conjointement été inculpés des meurtres non qualifiés de Derek Hannan et Gregory Plytas, et ils ont subi conjointement leur procès à cet égard. Ils ont été déclarés coupables et les appels qu’ils ont interjetés devant la Cour d’appel de l’Ontario ont échoué. Sur autorisation, seul l’appelant se pourvoit devant cette Cour.

Voici les faits relatés dans les motifs du juge Martin qui a rendu l’arrêt de la Cour d’appel:

[TRADUCTION] Les deux meurtres ont été commis au cours d’un même échange et il n’y a eu qu’un seul procès pour les deux chefs d’accusation. Le jury a constaté à bon droit que la preuve établit les faits suivants: feu Derek Hannan demeurait au 14, avenue Seymour, à Toronto, au premier étage d’une maison de trois étages. Au cours de la soirée du 1er septembre 1972, sa sœur Mme Helen Platt, qui occupait les 2e et 3e étages de la maison, avait organisé une fête à laquelle assistaient plusieurs personnes, y compris feu son frère Derek Hannan et Mildred Dubien, une jeune femme habitant au 3e étage. Vers 2h du matin le 2 septembre, l’appelant Pentiluk est arrivé à la fête, en compagnie de Gus Williams, de feu Gregory Plytas et de John Pearson. Environ trois quarts d’heure plus tard, une bagarre a éclaté entre l’appelant Pentiluk et feu Hannan sur le balcon de l’appartement du 2e étage, apparemment au sujet de Mildred Dubien. Au cours de la bagarre, l’appelant Pentiluk a frappé Hannan sur le côté de la tête avec une planche arrachée à la balustrade du balcon. Il a ensuite poussé Hannan par-dessus la balustrade. Avant de descendre prêter secours à son frère qui était tombé à terre, Mme Platt a frappé l’appelant Pentiluk dans le dos alors qu’il se dirigeait vers la cuisine. Gregory Plytas est intervenu; l’appelant Pentiluk a alors dit à Mme Platt: «Toi aussi tu vas l’avoir». Pentiluk, Williams et Pearson ont ensuite quitté la maison tandis que Plytas y est resté. Tous les trois se sont alors rendus au 10, avenue Boultbee où demeuraient l’appelant MacDonald et son amie Janice Taylor. MacDonald n’y était pas mais est arrivé peu de temps après. Les appelants ont parlé de la bagarre avec Hannan. Ils sont partis quelque temps après, emportant avec eux un étui à fusil vert que Janice Taylor était allée chercher à la demande de l’appelant MacDonald.

[Page 843]

Environ une heure après que l’appelant Pentiluk eut quitté le 14, rue Seymour, à la suite de la bagarre avec Derek Hannan, Mme Platt a vu Pentiluk et un autre homme qu’elle n’a pas reconnu arriver en automobile et s’arrêter devant la maison. L’appelant Pentiluk est sorti du côté du conducteur et les deux hommes se sont dirigés vers le coffre de l’automobile et l’ont ouvert. Mme Platt s’est alors rendue dans la cuisine. Elle a entendu la porte s’ouvrir et son frère Derek Hannan crier: «Il a un fusil».

Derek Hannan a été abattu devant la porte de la cuisine alors qu’il parlait à son frère au téléphone. Mme Platt a ensuite entendu un autre coup de feu en provenance de la salle de séjour. Armé d’un fusil qu’il tenait à deux mains, l’appelant Pentiluk s’est dirigé vers la cuisine, a fixé Mme Platt pendant 10 à 15 secondes et lui a tiré une balle dans la cuisse, d’une distance d’environ 6 pieds. Mme Platt s’est finalement remise de cette blessure. Hannan et Plytas sont décédés des suites de blessures à l’abdomen infligées par les plombs d’un fusil.

L’appelant MacDonald a fait une déclaration à la police, que le juge de première instance a jugée faite volontairement. Dans sa déclaration, il affirme avoir quitté son appartement en compagnie de l’appelant Pentiluk pour se rendre à l’endroit où ce dernier aurait été attaqué. Au volant de son automobile, MacDonald a suivi l’itinéraire que lui indiquait Pentiluk, jusqu’à une maison de la rue Seymour. L’appelant Pentiluk a retiré un fusil du coffre et selon l’appelant MacDonald, a pénétré dans la maison pour forcer son agresseur à venir se battre avec MacDonald dans la rue. Après avoir entendu les deux premiers coups de feu puis un troisième, MacDonald est entré dans la maison en courant et a crié: «Sortons d’ici». La fin de la déclaration de MacDonald est incompatible avec le témoignage de Ernest Davis qui demeure au 18, rue Seymour, et qui a été réveillé à 3 h 20 le 2 septembre 1972 par deux coups de feu. Après avoir arrêté son climatiseur, il a entendu un autre coup de feu; il a alors vu, de sa fenêtre, deux hommes qui couraient en direction d’une automobile garée devant le 14, rue Seymour. Un des hommes est monté dans la voiture du côté du conducteur tandis que l’autre, qui semblait tenir un bâton dans ses mains, a pris place du côté du passager.

L’appelant Pentiluk a allégué comme seul moyen de défense que par suite de sa consommation d’alcool et de drogues, il était dans un état d’ivresse tel qu’il n’a pas pu former l’intention nécessaire au crime de meurtre. Pour sa part, l’appelant MacDonald allègue qu’il n’est partie à aucune des infractions, aux termes des dispositions de l’art. 21 du Code.

[Page 844]

Traitant de l’appel interjeté par le présent appelant, le juge Martin s’est exprimé en ces ternies:

[TRADUCTION] Le moyen d’appel le plus solide invoqué au nom de MacDonald est que le juge de première instance n’a pas donné au jury des directives adéquates concernant l’application de l’art. 21 aux faits que le jury pourrait en l’espèce tirer de la preuve. Il faut dire que les directives à cet égard n’étaient pas aussi complètes ni aussi claires qu’il aurait été souhaitable. A l’appui de l’application de l’art. 21 aux agissements de l’appelant MacDonald, relativement aux homicides, le juge du procès n’a mentionné que la poursuite commune d’une seule fin illégale: s’introduire illégalement dans une maison d’habitation avec l’intention d’y commettre un acte criminel, contrairement à l’art. 307 du Code.

Il ressort nettement de la déclaration faite par l’appelant à la police et déposée en preuve, que les deux appelants avaient formé ensemble le projet de poursuivre une fin illégale — de se livrer à des voies de fait contre un ou plusieurs des occupants de la maison, et dans ce but, Pentiluk avait emporté avec lui, au su de l’appelant MacDonald, un fusil chargé. Bien que l’appelant n’ait pas avoué qu’il savait que le fusil était chargé, le jury pouvait, à bon droit, tirer cette déduction des faits. En effet, si l’on accepte le témoignage de Pearson, c’est MacDonald lui-même qui a fourni le fusil.

Malgré les insuffisances des directives, nous sommes d’avis que les points litigieux essentiels ont été soumis au jury et que des directives adéquates lui ont été données à l’égard du moyen de défense allégué par MacDonald, savoir qu’il avait uniquement convenu de se battre avec l’agresseur de Pentiluk et qu’il n’avait jamais pensé que quelqu’un pourrait être tué. Nous croyons même que l’omission par le juge de première instance de donner au jury des directives plus complètes quant à l’application de l’art. 21 aux faits que le jury pouvait tirer de la preuve, a pu jouer en faveur de l’accusé plutôt qu’à son désavantage. Nous sommes unanimement d’avis qu’un jury raisonnable, ayant reçu des directives appropriées, n’aurait pu, compte tenu de la preuve, faire autrement que de rendre un verdict de culpabilité.

Le seul moyen d’appel solide soulevé devant nous est celui dont traite le juge Martin dans le passage que je viens de citer.

Pour déterminer si les lacunes que présentent les directives au jury sont telles que la Cour d’appel n’aurait pas dû invoquer les dispositions du sous-al. 613(1)b)(iii) du Code criminel, il est nécessaire

[Page 845]

d’examiner l’ensemble des faits visés par lesdites directives.

L’appelant n’a pas témoigné au procès, mais il avait fait une déclaration à la police qui a été déposée en preuve. Dans cette déclaration, il mentionne une conversation qu’il a eue chez lui avec Pentiluk, après l’incident qui avait opposé ce dernier à Hannan. Il a déclaré que Pentiluk lui avait dit que: [TRADUCTION] «… un des types à la fête l’avait poussé par-dessus la balustrade du balcon. Il voulait sa revanche. Il m’a demandé si j’étais d’accord pour aller avec lui rosser le type. Je lui ai répondu que j’irais et que je lui réglerais son compte». Il affirme avoir conduit Pentiluk à la maison que ce dernier lui a indiquée et avoir garé l’automobile. Pentiluk est alors descendu de voiture et a tiré du coffre un fusil ou une carabine. Lorsque l’appelant lui a demandé pourquoi il avait besoin d’une arme, Pentiluk lui a répondu [TRADUCTION] «… qu’il forcerait le type à sortir de la maison pour que je lui règle son compte dans la rue». Selon la déclaration, Pentiluk est alors entré dans la maison.

L’appelant a donc admis avoir conduit Pentiluk à la maison dans le but de se livrer à des voies de faits sur Hannan, et que Pentiluk était armé d’un fusil ou d’une carabine. Le jury pouvait à bon droit en déduire que l’appelant savait que le fusil était chargé. Le ministère public a produit d’autres éléments de preuve pour démontrer que l’appelant avait fourni l’arme en question.

Bien que l’appelant ait affirmé dans sa déclaration n’être entré dans la maison qu’après les trois coups de feu, un témoin indépendant, Davis, regardait dans la rue de la fenêtre de sa chambre à coucher lorsque le troisième coup de feu a été tiré. Il a ensuite vu deux hommes qui sortaient en courant de la maison d’où provenaient les coups de feu et il les a vus prendre place à bord d’une automobile en stationnement. Il a remarqué que celui qui a pris place du côté du passager transportait un objet ressemblant à un bâton, qu’il a d’ailleurs placé entre ses jambes en s’asseyant dans l’automobile. Ce témoignage contredit la dernière partie de la déclaration de l’appelant puisqu’il indique que l’appelant était dans la maison lorsque le troisième coup de feu a été tiré.

[Page 846]

Dans le passage suivant de son exposé au jury, le juge de première instance parle du droit applicable aux accusations portées contre l’appelant:

[TRADUCTION] Quant à MacDonald, le ministère public concède qu’il n’a pas tiré de coup de feu, mais allègue qu’il est néanmoins coupable des infractions en vertu de l’art. 21 du Code criminel dont les dispositions pertinentes se lisent comme suit:

(1) Est partie à une infraction quiconque

a) la commet réellement.

c’est-à-dire, en l’espèce, Pentiluk, selon la thèse du ministère public.

b) accomplit ou omet d’accomplir quelque chose en vue d’aider quelqu’un à la commettre.

c’est-à-dire, toute autre personne,

ou c) encourage quelqu’un à la commettre. Cette personne serait MacDonald.

Le second paragraphe est libellé comme suit:

(2) Quand deux ou plusieurs personnes forment ensemble le projet de poursuivre une fin illégale et de s’y entraider et que l’une d’entre elles commet une infraction en réalisant cette fin commune, chacune d’elles qui savait ou devait savoir que la réalisation de l’intention commune aurait pour conséquence probable la perpétration de l’infraction, est partie à cette infraction.

En vous fondant sur la preuve dont nous allons parler, il vous est loisible de conclure que MacDonald était partie aux infractions en vertu des dispositions de ces deux paragraphes.

Selon la thèse du ministère public, MacDonald est devenu partie à l’infraction en aidant et encourageant Pentiluk qui a avoué dans sa défense avoir commis les meurtres, en fournissant à ce dernier le fusil et des munitions, en conduisant Pentiluk au 14, avenue Seymour. En plus, ils ont formé, selon les termes du par. (2), le projet de poursuivre une afin commune», de s’y entraider et de réaliser cette fin commune, une fin illégale, par la perpétration d’une infraction alors que chacun d’eux savait ou devait savoir que la réalisation de l’intention commune aurait pour conséquence probable la perpétration de l’infraction.

…la preuve indique, et je la porte de nouveau à votre attention, que ces deux hommes armés d’un fusil ont dû entrer ensemble dans cette maison, sans en avoir le droit, en violation des dispositions de l’art. 307 du Code criminel. Cette maison n’était pas la leur.

(1) Est coupable d’un acte criminel et passible d’un emprisonnement de dix ans, quiconque, sans excuse

[Page 847]

légitime, dont la preuve lui incombe, s’introduit ou se trouve en une maison d’habitation avec l’intention d’y commettre un acte criminel…

Vous voyez maintenant pourquoi je vous dis que l’art. 307 fait du par. (2) de l’art. 21 une disposition que vous devez prendre en considération.

Après avoir traité de la thèse du ministère public dans le passage que je viens de citer, le juge de première instance a parlé de la thèse de la défense:

[TRADUCTION] Quant à MacDonald, selon sa défense, non seulement n’a-t-il pas fourni le fusil à Pentiluk, mais il ne savait même pas que ce dernier était armé avant qu’ils n’arrivent au 14, avenue Seymour et la seule raison de sa présence à cette adresse, au moment de la fusillade, est celle mentionnée dans sa déclaration, c’est-à-dire se battre avec Derek Hannan; il prétend n’avoir rien fait, selon les termes de l’art. 21 du Code criminel, pour aider ou encourager Pentiluk à commettre les meurtres et n’avoir pas formé avec lui le projet de poursuivre une fin illégale, en sachant qu’un meurtre pourrait en résulter.

L’avocat de l’appelant insiste sur le fait que dans ce passage, le juge de première instance emploie la phrase «sachant qu’un meurtre pourrait en résulter» alors que le par. 21(2) du Code criminel dit «que la réalisation de l’intention commune aurait pour conséquence probable…». Toutefois, le jury avait déjà reçu des directives modelées sur le libellé de ce paragraphe et dans ce passage, le juge du procès ne fait que résumer la thèse de la défense, c.-à-d. que l’appelant ne savait pas qu’un meurtre pourrait résulter de la réalisation de la fin illégale poursuivie en commun. S’il ne savait pas que tel pouvait être le résultat, il est évident qu’il ne savait pas que la réalisation de cette fin commune aurait pour conséquence probable la perpétration d’un meurtre.

Par la suite, le juge de première instance a soigneusement passé en revue les dépositions des divers témoins.

Bien qu’à l’instar du juge Martin, j’estime que les directives n’étaient pas aussi complètes ni aussi claires qu’il aurait été souhaitable, je suis d’avis qu’au regard des faits de l’espèce, le jury a été pleinement saisi de tous les points litigieux à trancher.

[Page 848]

Quant aux al. 21(1)b) et c), portant sur l’aide et l’encouragement à commettre une infraction, le juge de première instance a souligné que, selon la preuve produite par le ministère public, l’appelant a fourni le fusil et des munitions à Pentiluk et a conduit ce dernier sur les lieux du crime. Le juge a aussi passé en revue la preuve démontrant que l’appelant était dans la maison avec Pentiluk lorsque les infractions ont été commises.

Quant au par. 21(2), portant sur la poursuite d’une fin illégale commune, le juge a traité des dispositions du par. 307(1) du Code criminel. Il aurait pu faire davantage et souligner que l’appelant et Pentiluk se sont rendus à la maison, armés d’un fusil, avec pour fin commune de commettre des voies de fait sur Hannan. Il aurait pu ajouter que l’appelant devait être considéré comme partie aux infractions s’il devait savoir que la réalisation de l’intention commune aurait pour conséquence probable la perpétration d’un meurtre. Mais le juge de première instance ne l’a pas fait et comme l’a souligné le juge Martin, en ne donnant pas au jury des directives plus complètes sur l’application de l’art. 21 aux faits, il a pu favoriser l’appelant.

Les directives, telles qu’elles ont été données, laissaient au jury le choix d’accepter la preuve produite par le ministère public ou d’accepter plutôt la déclaration de l’appelant selon laquelle il avait simplement convenu de se battre avec Hannan et n’avait pas pensé qu’un meurtre pouvait être commis. En acceptant la preuve produite par le ministère public, un jury raisonnable devait rendre un verdict de culpabilité. En acceptant les explications de l’appelant, il se devait de l’acquitter. Le jury a prononcé un verdict de culpabilité.

Je partage l’avis du juge Martin selon lequel un jury raisonnable, ayant reçu les directives appropriées, aurait, compte tenu de la preuve en l’espèce, inévitablement rendu un verdict de culpabilité. Je suis d’avis de rejeter le pourvoi.

Pourvoi rejeté, le juge en chef LASKIN et le juge DICKSON étant dissidents.

Procureurs de l’appelant: Pomerant, Pomerant & Greenspan, Toronto.

Procureur de l’intimée: Le procureur général de l’Ontario, Toronto.

[1] (1974), 21 C.C.C. (2d) 87, sub nom. R. v. Pentiluk and MacDonald.

[2] [1947] O.R. 105.

[3] (1975), 62 Cr. App. R. 109.

[4] [1966] 2 O.R. 246.


Parties
Demandeurs : MacDonald
Défendeurs : Sa Majesté la Reine

Références :
Proposition de citation de la décision: MacDonald c. R., [1977] 2 R.C.S. 832 (4 avril 1977)


Origine de la décision
Date de la décision : 04/04/1977
Date de l'import : 06/04/2012

Numérotation
Référence neutre : [1977] 2 R.C.S. 832 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ca;cour.supreme;arret;1977-04-04;.1977..2.r.c.s..832 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award