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01/03/1978 | CANADA | N°[1978]_2_R.C.S._830

Canada | Université de la Saskatchewan c. Section locale 1975 du Syndicat canadien de la Fonction publique et autres, [1978] 2 R.C.S. 830 (1 mars 1978)


Cour suprême du Canada

Université de la Saskatchewan c. Section locale 1975 du Syndicat canadien de la Fonction publique et autres, [1978] 2 R.C.S. 830

Date: 1978-03-01

L’Université de la Saskatchewan Requérante;

et

La section locale 1975 du Syndicat canadien de la Fonction publique

et

L’Association du personnel d’administration et de supervision de l’Université de la Saskatchewan

et

Le Conseil des relations du travail de la province de la Saskatchewan Intimées.

1978: 2 février; 1978: 1er mars.

Présent

: Le juge Pigeon.

REQUÊTE EN PROROGATION DE DÉLAI

Cour suprême du Canada

Université de la Saskatchewan c. Section locale 1975 du Syndicat canadien de la Fonction publique et autres, [1978] 2 R.C.S. 830

Date: 1978-03-01

L’Université de la Saskatchewan Requérante;

et

La section locale 1975 du Syndicat canadien de la Fonction publique

et

L’Association du personnel d’administration et de supervision de l’Université de la Saskatchewan

et

Le Conseil des relations du travail de la province de la Saskatchewan Intimées.

1978: 2 février; 1978: 1er mars.

Présent: Le juge Pigeon.

REQUÊTE EN PROROGATION DE DÉLAI



Analyses

Appel - Autorisation d’interjeter appel accordée par la Cour suprême du Canada - Appel non interjeté dans les 30 jours comme l’exige la règle 56(6) - Requête en prorogation de délai en vertu de la règle 98 - Aucune excuse raisonnable ne justifie le retard - Prorogation néanmoins justifiée - Aucun préjudice grave causé à la partie adverse - Pouvoir de proroger le délai prévu après son expiration - Loi sur la Cour suprême, S.R.C. 1970, c. S-19, art. 41(2), (4).

[Arrêts mentionnés: Cité de Pont Viau c. Gauthier Mfg., Ltd., [1978] 2 R.C.S. 516; Massicotte c. Boutin, [1969] R.C.S. 818; Banner v. Johnston (1871), L.R. 5 H.L. 157; La Reine c. K. c. Irving Ltd., [1976] 2 R.C.S. 366.]

REQUÊTE visant la prorogation du délai pendant lequel l’appel doit être interjeté. Prorogation accordée.

D. Woods, pour la requérante.

R. Houston, pour les intimées, la section locale 1975 du Syndicat canadien de la Fonction publique et le Conseil des relations du travail.

Le jugement suivant a été rendu par

LE JUGE PIGEON — Par jugement oral du 5 décembre 1977, cette Cour a autorisé l’appel d’un arrêt de la Cour d’appel de la Saskatchewan du 13 octobre 1977. L’appel n’a pas été interjeté dans les trente jours du jugement comme l’exige la règle 56(6). On demande maintenant, en vertu de la règle 98, la prorogation du délai imparti.

[Page 831]

Dans l’affidavit produit à l’appui de la requête, l’avocat qui a représenté l’appelante pour la demande d’autorisation d’appel, affirme qu’à son «avis», une fois l’autorisation accordée, les correspondants de l’appelante devaient signifier un avis d’appel. Rien ne démontre, toutefois, qu’il ait effectivement informé les correspondants du jugement rendu en sa présence qui autorisait l’appel, ni que ceux-ci aient reçu l’ordre d’introduire l’appel, ni qu’il soit d’usage que les correspondants le fassent sans instruction expresse. Donc, aucune excuse raisonnable ne justifie le retard en l’espèce.

Néanmoins, je considère qu’une prorogation est justifiée dans les circonstances selon le principe qu’il faut accorder un redressement à une partie pour éviter qu’elle subisse un préjudice grave, si on peut le faire sans léser la partie adverse. C’est là, je crois, le principe selon lequel cette Cour a cassé la décision de la Cour d’appel du Québec et accordé une prorogation du délai d’appel dans l’affaire Cité de Pont Viau c. Gauthier Mfg., Ltd. (7 février 1978, encore inédit[1]). En l’espèce, même si le pourvoi avait été introduit dans les délais, il n’aurait pu être inscrit pour la session courante. On peut, par conséquent, éviter tout préjudice appréciable en accordant une prorogation à la condition que la cause soit prête à être inscrite pour la session d’avril.

Une autre difficulté vient de ce qu’il n’est pas clair que la règle 56(6), en vigueur depuis le 1er avril 1976, ne limite pas le pouvoir général de prorogation prévu à la règle 98. Cette règle prescrit:

(6) Lorsque l’autorisation d’appeler est accordée par la Cour, l’appel doit être interjeté dans les trente jours du prononcé du jugement accordant l’autorisation ou dans le délai que la Cour peut, durant cette période, accorder. Si l’appel n’est pas ainsi interjeté la requête est censée retirée.

Il faut également tenir compte du par. 41(4) de la Loi sur la Cour Suprême qui dispose:

(4) Chaque fois que la Cour suprême a accordé une autorisation d’appel, cette Cour ou un juge peut, nonobstant toute disposition de la présente loi, proroger le délai d’admission de l’appel.

[Page 832]

Le motif pour lequel cette disposition ne dissipe pas tout doute sur le pouvoir de prorogation après l’expiration du délai fixé par les règles, c’est qu’on n’y trouve pas les termes suivants que l’on voit au par. 41(2), savoir: «soit avant, soit après l’expiration des trente jours». Cette phraséologie, que l’on retrouve au par. 65(1), n’est-elle que du verbiage inutile ou faut-il déduire de son omission au par. 41(4) que ce dernier signifie que la Cour n’a pas le pouvoir de proroger un délai après son expiration? Il en résulterait que, passé ce délai, il n’existerait aucun pouvoir de prorogation, comme c’est le cas en vertu du par. 18(2) de la Loi sur le divorce; on a jugé que, dans ce paragraphe, l’expression «avant l’expiration de ces trente jours» exclut tout pouvoir de proroger le délai prévu après son expiration (Massicotte c. Boutin[2]).

Il y a indubitablement une différence majeure entre le par. 18(2) de la Loi sur le divorce et le par. 41(4) de la Loi sur la Cour suprême. Dans le premier texte, certains termes visent clairement à exclure tout pouvoir de prorogation après l’expiration du délai imparti. Dans le second, l’exercice du pouvoir de prorogation n’est pas limité dans le temps. Dans l’arrêt Banner v. Johnston[3], le lord chancelier a jugé (à la p. 170) qu’un pouvoir de prorogation formulé de cette dernière façon dans la Companies Act anglaise, ne devait pas [TRADUCTION] «être interprété comme signifiant que la requête doit être présentée avant l’expiration du délai initial, parce qu’une fois ce délai expiré, il ne reste plus rien à proroger». Selon lui, on pouvait interpréter de cette façon les règles de Chancery auxquelles la Cour pouvait déroger, le cas échéant, mais pas une loi.

Par l’arrêt La Reine c. K. c. Irving Ltd.[4], cette Cour, en accordant l’autorisation d’appeler dans une affaire régie par le Code criminel a, en même temps, accordé une prorogation de délai alors que, comme en l’espèce, la requête de prorogation n’avait pas été présentée dans le délai fixé pour accorder l’autorisation. Dans cette affaire-là également, la disposition relative à la prorogation du

[Page 833]

délai, l’al. 621(1)b), mentionnait simplement «tel délai supplémentaire que la Cour suprême du Canada, ou l’un de ses juges, peut accorder pour des raisons spéciales». Bien qu’à l’article suivant (art. 622) le Code précise «avant ou après l’expiration de ce délai», la Cour a refusé d’en déduire que l’al. 621(1)b) ne permet la prorogation que par une décision rendue dans le délai prescrit. La Cour a jugé que la simple absence des mots «avant ou après l’expiration de ce délai» ne fait pas de cet article une disposition aussi rigoureuse que le par. 18(2) de la Loi sur le divorce.

Pour ces motifs, le délai pour interjeter l’appel est prorogé de quinze jours à partir d’aujourd’hui, à la condition que l’appelante fasse le nécessaire pour inscrire la cause à la session d’avril; l’appelante devra également payer les dépens de cette requête quelle que soit l’issue de la cause.

Jugement en conséquence.

Procureurs de la requérante: McKercher, McKercher, Stack, Korchin & Lang, Saskatoon.

Procureurs de la section locale 1975 du Syndicat canadien de la Fonction publique: Halyk, Priel, Stevenson & Hood, Saskatoon.

Procureurs de l’Association du personnel d’administration et de supervision de l’Université de la Saskatchewan: MacDermid, Wright, Dickson, Molloy & Biss, Saskatoon.

Procureurs du Conseil des relations du travail: Graf & Zarzeczny, Regina.

[1] Depuis publié [1978] 2 R.C.S. 516.

[2] [1969] R.C.S. 818.

[3] (1871), L.R. 5 H.L. 157.

[4] [1976] 2 R.C.S. 366.


Parties
Demandeurs : Université de la Saskatchewan
Défendeurs : Section locale 1975 du Syndicat canadien de la Fonction publique et autres

Références :
Proposition de citation de la décision: Université de la Saskatchewan c. Section locale 1975 du Syndicat canadien de la Fonction publique et autres, [1978] 2 R.C.S. 830 (1 mars 1978)


Origine de la décision
Date de la décision : 01/03/1978
Date de l'import : 06/04/2012

Numérotation
Référence neutre : [1978] 2 R.C.S. 830 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ca;cour.supreme;arret;1978-03-01;.1978..2.r.c.s..830 ?
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