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21/12/1979 | CANADA | N°[1980]_1_R.C.S._54

Canada | Renvoi : Compétence du Parlement relativement à la Chambre haute, [1980] 1 R.C.S. 54 (21 décembre 1979)


Cour suprême du Canada

Renvoi : Compétence du Parlement relativement à la Chambre haute, [1980] 1 R.C.S. 54

Date: 1979-12-21

Dans l’affaire des questions soumises par le gouverneur en conseil sur la compétence législative du Parlement du Canada relativement à la Chambre haute, formulées dans le décret C.P. 1978-3581 en date du 23 novembre 1978.

1979: 20, 21 mars; 1979: 21 décembre.

Présents: Le juge en chef Laskin et les juges Martland, Ritchie, Pigeon, Dickson, Estey, Pratte et McIntyre.

QUESTIONS SOUMISES PAR LE GOUVERNEUR EN CONSEIL

Cour suprême du Canada

Renvoi : Compétence du Parlement relativement à la Chambre haute, [1980] 1 R.C.S. 54

Date: 1979-12-21

Dans l’affaire des questions soumises par le gouverneur en conseil sur la compétence législative du Parlement du Canada relativement à la Chambre haute, formulées dans le décret C.P. 1978-3581 en date du 23 novembre 1978.

1979: 20, 21 mars; 1979: 21 décembre.

Présents: Le juge en chef Laskin et les juges Martland, Ritchie, Pigeon, Dickson, Estey, Pratte et McIntyre.

QUESTIONS SOUMISES PAR LE GOUVERNEUR EN CONSEIL


Synthèse
Référence neutre : [1980] 1 R.C.S. 54 ?
Date de la décision : 21/12/1979

Analyses

Droit constitutionnel - Sénat - Compétence du Parlement d’amender la constitution - Acte de l’Amérique du Nord britannique, art. 21 à 36, 91(1).

Le gouverneur général en conseil a soumis à la Cour en vertu de l’art. 55 de la Loi sur la Cour suprême, les deux questions suivantes:

1. Ressort-il de la compétence législative du Parlement du Canada d’abroger les articles 21 à 36 de l’Acte de l’Amérique du Nord britannique, 1867, tel que modifié et de modifier les autres articles de cette loi dans lesquels il est fait mention de la Chambre haute ou du Sénat, de manière à supprimer toute référence à la Chambre haute ou au Sénat? Dans la négative, à quel égard ou à quels égards et dans quelle mesure?

2. Ressort-il de la compétence législative du Parlement du Canada de promulguer des lois visant à modifier les dispositions relatives à la Chambre haute du Parlement ou à remplacer ladite Chambre? Ainsi, ressort-il de la compétence du Parlement de faire l’un quelconque ou tous les changements suivants:

a) modifier le nom de la Chambre haute;

b) modifier le nombre et le pourcentage des membres qui représentent les provinces ou les territoires dans cette chambre;

c) modifier les qualités requises pour être membre de cette chambre;

d) modifier les termes du mandat des membres de cette chambre;

e) modifier le processus de nomination des membres de cette chambre, en

(i) conférant aux assemblées législatives provinciales le pouvoir de nommer, sur l’avis du lieutenant-gouverneur en conseil, certains membres de la Chambre haute, la Chambre des Communes étant autorisée à nommer lesdits membres, sur

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l’avis du gouverneur général en conseil, lorsqu’une assemblée législative provinciale n’agit pas dans les délais impartis, et

(ii) conférant à la Chambre des Communes le pouvoir de nommer dans chaque province, sur l’avis du gouverneur général en conseil, certains membres de la Chambre haute, l’assemblée législative provinciale étant autorisée à nommer lesdits membres, sur l’avis du lieutenant-gouverneur en conseil, lorsque la Chambre des Communes n’agit pas dans les délais impartis.

(iii) conférant soit aux lieutenants-gouverneurs en conseil ou soit à un ou plusieurs organismes le pouvoir de choisir une partie ou la totalité des membres de la Chambre haute; ou (iv) prévoyant l’élection directe, par la population, d’une partie ou de la totalité des membres de la Chambre haute; ou

(f) prévoir que les projets de la loi approuvés par la Chambre des Communes soient sanctionnés et aient force de loi après l’écoulement d’un certain délai, et ce, même sans leur approbation par la Chambre haute?

Dans la négative, à quel égard ou à quels égards et dans quelle mesure?

Les réponses de la Cour sont:

A la question 1: Non.

A la question 2 par. b), e)(iv) et f): Non.

Pour le reste, en l’absence de précisions sur le contexte, une réponse catégorique est impossible.

La modification de 1949 qui a édicté le par. 91(1) de l’Acte visait manifestement à obvier à la nécessité de la promulgation d’une loi par le Parlement britannique pour apporter à l’Acte des modifications qui, jusqu’alors, avaient été obtenues par une résolution conjointe des deux Chambres du parlement sans le consentement des provinces. Les lois adoptées depuis 1949 en vertu de ce paragraphe ont porté sur des questions qui, selon la pratique antérieure, auraient été soumises au Parlement britannique par voie de résolution conjointe des deux Chambres du parlement sans le consentement des provinces. Elles n’ont aucune répercussion appréciable sur les relations fédérales-provinciales. La loi envisagée dans la première question est d’une toute autre nature. Bien qu’elle n’ait aucun effet direct sur les relations fédérales-provinciales en ce sens qu’elle ne modifie pas les pouvoirs législatifs fédéral et provinciaux, elle vise cependant l’élimination d’une des Chambres du Parlement, et

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modifierait ainsi la structure du Parlement fédéral à qui est confié le pouvoir fédéral de légiférer en vertu de l’art. 91 de l’Acte.

Le Sénat a un rôle vital en tant qu’institution faisant partie du système fédéral: un de ses buts primordiaux était d’assurer la protection des divers intérêts régionaux au Canada quant à d’adoption de la législation fédérale. Le pouvoir d’édicter des lois fédérales à été donné à la Reine, de l’avis et du consentement du Sénat et de la Chambre des communes. Ainsi on a voulu que l’organisme créé pour protéger les intérêts des régions et des provinces participe à ce processus législatif.

Par ailleurs, même si le par. 91(1) a donné à la Reine, de l’avis et du consentement du Sénat et de la Chambre des communes, le pouvoir de modifier la «constitution du Canada» sauf en certaines matières désignées expressément, il ne donne pas le pouvoir de modifier l’A.A.N.B. Le mot «Canada» au par. 91(1) ne se rapporte pas au Canada au sens géographique mais bien à l’entité juridique fédérale. La «constitution du Canada» ne signifie pas l’ensemble de l’Acte de l’Amérique du Nord britannique, mais la constitution du gouvernement fédéral, par opposition aux gouvernements provinciaux. Le pouvoir de modification conféré par le par. 91(1) est donc limité et il se rapporte à la constitution du gouvernement fédéral dans des matières qui concernent uniquement ce gouvernement, les exceptions qui y sont prévues impliquent l’existence continue du Sénat en tant que partie du système législatif fédéral.

Bien que le par. 91(1) permette au Parlement d’apporter certains changements à la constitution actuelle du Sénat, il ne lui permet pas d’apporter des modifications qui porteraient atteinte aux caractéristiques fondamentales ou essentielles attribuées au Sénat pour assurer la représentation régionale et provinciale dans le système législatif fédéral. Sont précisément dans cette catégorie les modifications proposées par le par. b) qui implique un changement dans le mode de représentation régionale, par le par. e) al. (iv) qui ferait du Sénat un organisme entièrement ou partiellement électif et par le par. f) qui permettrait l’adoption de lois sans le consentement du Sénat. Le Parlement n’étant pas autorisé par le par. 91(1) à modifier unilatéralement le caractère fondamental du Sénat, il faut répondre par la négative aux questions formulées dans ces trois paragraphes. Quant aux autres questions, l’absence de précisions sur le contexte ne permet pas de leur donner une réponse catégorique.


Références :

Jurisprudence: Quebec North Shore Paper Co. c. Canadien Pacifique Ltée, [1977] 2 R.C.S. 1054

McNamara Construction (Western) Ltd. c. La Reine, [1977] 2
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R.C.S. 654
In re La réglementation et le contrôle de l’aéronautique au Canada, [1932] A.C. 54
Procureur général de la Nouvelle-Écosse c. Procureur général du Canada et Lord Nelson Hotel Co. Ltd., [1951] R.C.S. 31
In re The Initiative and Referendum Act, [1919] A.C. 35, confirmant (1916), 27 Man. R. 1.
QUESTIONS soumises par le gouverneur général en conseil, en vertu de l’art. 55 de la Loi sur la Cour suprême, sur la compétence législative du Parlement du Canada relativement à la Chambre haute. La Cour a répondu par la négative à la question 1 et aux par. b), e)(iv) et f) de la seconde question. Elle a déclaré, que pour le reste, une réponse catégorique est impossible.
J.J. Robinette, c.r., François Mercier, c.r., et T.B. Smith, c.r., pour le procureur général du Canada.
D.W. Mundell, c.r., et Lorraine E. Weinrib, pour le procureur général de l’Ontario.
Jerrold W. Kavanagh, c.r., et Mollie Gallagher, pour le procureur général de la Nouvelle-Écosse.
Alan D. Reid et Gordon F. Gregory, c.r., pour le procureur général du Nouveau-Brunswick.
Ian W.H. Bailey, pour le procureur général de l’Île-du-Prince-Édouard.
Patrick McDonald, pour le procureur général de la Saskatchewan.
William. Henkel, c.r., pour le procureur général de l’Alberta.
James A. Nesbitt, c.r., pour le procureur général de Terre-Neuve.
LA COUR — Par le décret C.P. 1978-3581, en date du 23 novembre 1978, le gouverneur général en conseil a soumis à cette Cour, pour audition et examen en vertu de l’art. 55 de la Loi sur la Cour suprême, les deux questions suivantes:
1. Ressort-il de la compétence législative du Parlement du Canada d’abroger les articles 21 à 36 de l’Acte de l’Amérique du Nord britannique, 1867, tel que modifié et de modifier les autres articles de cette loi dans lesquels il est fait mention de la Chambre haute ou du Sénat, de manière à supprimer toute référence à la Chambre haute ou au Sénat? Dans la négative, à quel égard ou à quels égards et dans quelle mesure?
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2. Ressort-il de la compétence législative du Parlement du Canada de promulguer des lois visant à modifier les dispositions relatives à la Chambre haute du Parlement ou à remplacer ladite Chambre? Ainsi, ressort-il de la compétence du Parlement de faire l’un quelconque ou tous les changements suivants:
a) modifier le nom de la Chambre haute
b) modifier le nombre et le pourcentage des membres qui représentent les provinces ou les territoires dans cette chambre
c) modifier les qualités requises pour être membre de cette chambre
d) modifier les termes du mandat des membres de cette chambre
e) modifier le processus de nomination des membres de cette chambre, en
(i) conférant aux assemblées législatives provinciales le pouvoir de nommer, sur l’avis du lieutenant-gouverneur en conseil, certains membres de la Chambre haute, la Chambre des Communes étant autorisée à nommer lesdits membres, sur l’avis du gouverneur général en conseil, lorsqu’une assemblée législative provinciale n’agit pas dans les délais impartis, et
(ii) conférant à la Chambre des Communes le pouvoir de nommer dans chaque province, sur l’avis du gouverneur général en conseil, certains membres de la Chambre haute, l’assemblée législative provinciale étant autorisée à nommer lesdits membres, sur l’avis du lieutenant-gouverneur en conseil, lorsque la Chambre des Communes n’agit pas dans les délais impartis,
(iii) conférant soit aux lieutenants-gouverneurs en conseil ou soit à un ou plusieurs organismes le pouvoir de choisir une partie ou la totalité des membres de la Chambre haute
ou
(iv) prévoyant l’élection directe, par la population, d’une partie ou de la totalité des membres de la Chambre haute
ou
f) prévoir que les projets de loi approuvés par la Chambre des Communes soient sanctionnés et aient force de loi après l’écoulement d’un certain délai, et ce, même sans leur approbation par la Chambre haute?
Dans la négative, à quel égard ou à quels égards et dans quelle mesure?
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Le procureur général du Canada et les procureurs généraux de l’Ontario, de la Nouvelle‑Écosse, du Nouveau-Brunswick, de l’Île-du-Prince-Édouard, de la Saskatchewan, de l’Alberta et de Terre-Neuve ont présenté à la Cour des exposés sur ces questions.
1ère question:
Les articles 21 à 36 de l’Acte de l’Amérique du Nord britannique, ci-après désigné «l’Acte», mentionnés dans la première question, figurent dans l’Acte sous le titre «Le Sénat» et portent sur la constitution de cet organisme, y compris le nombre de sénateurs
la représentation au Sénat des quatre divisions, c’est-à-dire, l’Ontario, le Québec, les provinces maritimes et les provinces de l’Ouest
les qualités exigées pour être nommé au Sénat
la nomination, la limite d’âge, la démission et la déchéance des sénateurs. Il est également question du Sénat que l’on désigne par son nom ou comme Chambre du Parlement et des sénateurs aux art. 17, 18, 39, 51A, 55, 56, 57, 59, 73, 74, 91, 128, 133, 146 et 147.
Il est évident que la première question, en substance sinon par ses termes, demande si le Parlement du Canada a la compétence législative pour abolir le Sénat. Le procureur général du Canada prétend qu’il faut répondre par l’affirmative à cette question. Tous les procureurs généraux des provinces représentés à l’audition, prétendent qu’il faut répondre par la négative.
Le procureur général du Canada fonde sa prétention sur les dispositions de la catégorie 1 des sujets énumérés à l’art. 91 de l’Acte. Cet article que l’on trouve dans la Partie VI de l’Acte, sous le titre «Pouvoirs du parlement», définit la compétence législative du Parlement du Canada. En voici le premier alinéa:
91. Il sera loisible à la Reine, de l’avis et du consentement du Sénat et de la Chambre des Communes, de faire des lois pour la paix, l’ordre et le bon gouvernement du Canada, relativement à toutes les matières ne tombant pas dans les catégories de sujets par le présent acte exclusivement assignés aux législatures des provinces
mais, pour plus de garantie, sans toutefois restreindre la généralité des termes ci-haut employés dans le présent article, il est par le présent déclaré que (nonob-
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stant toute disposition contraire énoncée dans le présent acte) l’autorité législative exclusive du Parlement du Canada s’étend à toutes les matières tombant dans les catégories de sujets ci-dessous énumérés
La catégorie 1 a été ajoutée par une modification de l’Acte édictée par le Parlement britannique le 16 décembre 1949. Voici le texte de l’art. 1 de la loi modificatrice:
1. L’article quatre-vingt-onze de l’Acte de l’Amérique du Nord britannique, 1867, est modifié par la désignation de là catégorie 1 comme catégorie 1A et par l’insertion, immédiatement avant cette catégorie, de la catégorie 1 suivante:
«1. La modification, de temps à autre, de la constitution du Canada, sauf en ce qui concerne les matières rentrant dans les catégories de sujets que la présente loi attribue exclusivement aux législatures des provinces, ou en ce qui concerne les droits ou privilèges accordés ou garantis, par la présente loi ou par toute autre loi constitutionnelle, à la législature ou au gouvernement d’une province, ou à quelque catégorie de personnes en matière d’écoles, ou en ce qui regarde l’emploi de l’anglais ou du français, ou les prescriptions portant que le parlement du Canada tiendra au moins une session chaque année et que la durée de chaque chambre des communes sera limitée à cinq années, depuis le jour du rapport des brefs ordonnant l’élection de cette chambre
toutefois, le parlement du Canada peut prolonger la durée d’une chambre des communes en temps de guerre, d’invasion ou d’insurrection, réelles ou appréhendées, si cette prolongation n’est pas l’objet d’une opposition exprimée par les votes de plus du tiers des membres de ladite chambre.»
Avant 1949, sous presque tous les rapports, l’Acte ne prévoyait pas sa modification par une autorité législative du Canada. Par conséquent, puisqu’il s’agissait d’une loi édictée par le Parlement britannique, tout changement devait être apporté par une loi modificatrice édictée par ce parlement. Plusieurs modifications ont été apportées de cette façon. On trouve dans le Livre blanc publié en 1965 sous l’autorité de l’honorable Guy Favreau, alors ministre de la Justice du Canada, sous le titre «Modifications de la Constitution du Canada» un bref historique de ces modifications et d’autres lois de nature constitutionnelle:
(1) L’Acte de la Terre de Rupert de 1868 autorisa le Canada à acquérir les droits de la Compagnie de
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la baie d’Hudson sur la Terre de Rupert et le Territoire du Nord-Ouest. Il prévoyait aussi que la Couronne, sur présentation d’adresses de la part des chambres du Parlement du Canada, pourrait déclarer que le territoire ferait partie du Canada, et que le Parlement du Canada pourrait faire des lois pour y assurer la paix, l’ordre et le bon gouvernement.
(2) L’Acte de l’Amérique du Nord britannique de 1871 ratifia l’Acte du Manitoba adopté par le Parlement du Canada en 1870, qui créait la province du Manitoba et lui donnait une constitution semblable à celles des autres provinces. De plus, l’Acte conférait au Parlement du Canada le pouvoir d’ériger de nouvelles provinces dans n’importe quel territoire canadien non compris alors dans une province, de modifier les limites de toute province (avec l’accord de sa Législature) et de pourvoir à l’administration, la paix, l’ordre et le bon gouvernement de tout territoire non compris dans une province.
(3) L’Acte du Parlement du Canada de 1875 modifia l’article 18 de l’Acte de l’Amérique du Nord britannique de 1867, qui énonce les privilèges, immunités et pouvoirs de chacune des chambres du Parlement.
(4) L’Acte de l’Amérique du Nord britannique de 1886 autorisa le Parlement du Canada à pourvoir à la représentation au Sénat et à la Chambre des Communes de tout territoire non compris dans une province.
(5) La Loi de 1893 sur la revision du droit statutaire abrogea certaines dispositions périmées de l’Acte de 1867.
(6) L’Acte concernant l’Orateur canadien (nomination d’un suppléant) de 1895 confirma une loi du Parlement du Canada qui permet la nomination d’un orateur suppléant au Sénat.
(7) L’Acte de l’Amérique du Nord britannique de 1907 établit une nouvelle échelle de subventions financières aux provinces en remplacement de celles qui sont prévues à l’article 118 de l’Acte de l’Amérique du Nord britannique de 1867. Tout en n’abrogeant pas expressément l’article primitif, il en rendit les dispositions inopérantes.
(8) L’Acte de l’Amérique du Nord britannique de 1915 redéfinit les divisions sénatoriales du Canada pour tenir compte de l’existence des provinces du Manitoba, de la Colombie‑Britannique, de la Saskatchewan et de l’Alberta. Bien qu’il n’ait pas modifié expressément le texte de l’article 22 primitif, il en a sûrement changé la portée.
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(9) L’Acte de l’Amérique du Nord britannique de 1916 prolongea la durée du Parlement du Canada alors en fonctions au-delà de la période normale de cinq ans.
(10) La Loi de 1927 sur la revision du droit statutaire une fois encore abrogea des dispositions périmées ou désuètes des statuts du Royaume-Uni, y compris deux dispositions des Actes de l’Amérique du Nord britannique.
(11) L’Acte de l’Amérique du Nord britannique de 1930 confirma les accords relatifs aux ressources naturelles intervenus entre le gouvernement du Canada et ceux du Manitoba, de la Colombie-Britannique, de l’Alberta et de la Saskatchewan et leur donna force de loi, nonobstant toute disposition contraire des Actes de l’Amérique du Nord britannique.
(12) Le Statut de Westminster de 1931, tout en ne modifiant pas directement les Actes de l’Amérique du Nord britannique, changea certaines de leurs dispositions. C’est ainsi, par exemple, que le Parlement du Canada fut autorisé à faire des lois ayant une portée extra-territoriale. En outre, le Parlement et les législatures des provinces furent habilités, dans la limite des pouvoirs respectifs que leur confèrent les Actes de l’Amérique du Nord britannique, à abroger tout statut du Royaume-Uni faisant alors partie des lois du Canada à l’exception expresse, cependant, de l’Acte de l’Amérique du Nord britannique lui-même.
(13) L’Acte de l’Amérique du Nord britannique de 1940 accorda au Parlement du Canada la compétence exclusive de légiférer en matière d’assurance-chômage.
(14) L’Acte de l’Amérique du Nord britannique de 1943 ajourna le rajustement de la représentation à la Chambre des Communes jusqu’à la première session du Parlement qui suivrait la fin des hostilités.
(15) L’Acte de l’Amérique du Nord britannique de 1946 remplaça l’article 51 de l’Acte de l’Amérique du Nord britannique de 1867 et changea les dispositions relatives au rajustement de la représentation à la Chambre des Communes.
(16) L’Acte de l’Amérique du Nord britannique de 1949 sanctionna les Conditions d’union entre le Canada et Terre-Neuve.
(17) L’Acte de l’Amérique du Nord britannique (n° 2) de 1949 habilita le Parlement du Canada à modifier la Constitution du Canada, à l’exception de certaines catégories de sujets.
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(18) La Loi de 1950 sur la revision du droit statutaire abrogea un article désuet de l’Acte de l’Amérique du Nord britannique de 1867.
(19) L’Acte de l’Amérique du Nord britannique de 1951 autorisa le Parlement du Canada à légiférer concurremment avec les provinces sur les pensions de vieillesses.
(20) L’Acte de l’Amérique du Nord britannique de 1960 modifia l’article 99 et changea la durée des fonctions des juges des cours supérieures.
(21) L’Acte de l’Amérique du Nord britannique de 1964 modifia les pouvoirs conférés au Parlement du Canada par l’Acte de l’Amérique du Nord britannique de 1951 au sujet des pensions de vieillesse et des prestations additionnelles.
(22) Modifications par arrêté en conseil
L’article 146 de l’Acte de l’Amérique du Nord britannique prévoyait l’adjonction au Canada d’autres territoires de l’Amérique du Nord britannique par arrêté en conseil et stipulait que les dispositions de tels arrêtés auraient le même effet que si elles avaient été édictées par le Parlement du Royaume-Uni. En vertu de cet article, la Terre de Rupert et le Territoire du Nord-Ouest furent admis par arrêté en conseil du 23 juin 1870
la Colombie-Britannique par arrêté en conseil du 16 mai 1871
et l’Île-du-Prince-Édouard par arrêté en conseil du 26 juin 1873. Comme tous ces arrêtés renferment des dispositions d’un caractère constitutionnel, ayant pour objet d’adapter les clauses de l’Acte de l’Amérique du Nord britannique aux nouvelles provinces, — avec les variations nécessaires dans chaque cas, — ils doivent être considérés comme des modifications d’ordre constitutionnel.
Depuis 1875, la pratique a été de demander la modification par une adresse conjointe présentée par les deux Chambres du Parlement. Dans certains cas, il y a eu consultation d’une ou plusieurs provinces. La modification de 1907 a été fondée sur des résolutions adoptées au cours de conférences provinciales malgré l’opposition de la Colombie‑Britannique. La modification de 1930 relative au transfert de ressources aux quatre provinces de l’Ouest découlait de conventions avec ces provinces. La modification de 1949 en vertu de laquelle Terre-Neuve est devenue une province a été apportée par suite d’un accord avec cette province. Les modifications de 1940, 1951, 1960 et 1964, concernant l’assurance-chômage, les pensions de vieillesse, la retraite obligatoire des juges et des presta-
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tions supplémentaires aux pensions de vieillesse, ont toutes été faites du consentement unanime des provinces.
Après avoir passé en revue la procédure suivie pour les modifications de l’Acte, le Livre blanc a énoncé les quatre principes généraux suivants:
Premièrement, bien qu’une loi du Royaume-Uni soit nécessaire pour modifier l’Acte de l’Amérique du Nord britannique, une telle loi n’est promulguée que sur la demande officielle du Canada. Le Parlement du Royaume-Uni n’adopte aucune loi touchant le Canada à moins qu’elle ne soit demandée et acceptée par le Canada
inversement, toute modification que le Canada a demandée dans le passé a été adoptée.
Deuxièmement, le Parlement du Canada doit autoriser toute demande au Parlement britannique de modifier l’Acte de l’Amérique du Nord britannique. Ce principe a été établi dès le début et l’on ne s’en est pas écarté depuis 1895. Une demande de modification prend invariablement la forme d’une adresse conjointe de la Chambre des Communes et du Sénat du Canada à Sa Majesté.
Troisièmement, le Parlement britannique ne peut procéder à une modification de la Constitution du Canada à la seule demande d’une province canadienne. Certaines tentatives ont été faites par des provinces dans ce sens, mais sans succès. La première, qui remonte à 1868, émanait d’une province qui n’était pas satisfaite à l’époque des conditions de la Confédération. D’autres ont suivi en 1869, 1874 et 1887. Le gouvernement britannique a chaque fois refusé de donner suite aux instances des gouvernements provinciaux, soutenant qu’il ne devait pas intervenir dans les affaires du Canada, sauf s’il en était requis par le gouvernement fédéral agissant au nom de tout le Canada.
Quatrièmement, le Parlement du Canada ne procède pas à une modification de la Constitution intéressant directement les rapports fédératifs sans avoir au préalable consulté les provinces et obtenu leur assentiment. Ce principe ne s’est pas concrétisé aussi tôt que les autres, mais, à partir de 1907 et en particulier depuis 1930, il a été de plus en plus affirmé et accepté. Il n’a pas été facile, cependant, de préciser la nature et l’étendue de la participation provinciale à la procédure de modification.
La modification de 1949 qui a édicté le par. 91(1) de l’Acte visait manifestement à obvier à la nécessité de la promulgation d’une loi par le Parlement britannique pour apporter à l’Acte des modi-
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fications qui, jusqu’alors, avaient été obtenues par une résolution conjointe des deux Chambres du Parlement sans le consentement des provinces. Les lois adoptées depuis 1949 en vertu du par. 91(1), n’ont pas, pour citer le Livre blanc, «porté atteinte aux relations fédérales-provinciales». Les lois suivantes ont été adoptées par le Parlement du Canada:
(1) L’Acte de l’Amérique du Nord britannique, 1952, a effectué un rajustement de la représentation à la Chambre des Communes. Cette loi n’a pas modifié le principe de la représentation d’après la population.
(2) L’Acte de l’Amérique du Nord britannique, 1965, a institué, pour l’avenir, la retraite obligatoire des sénateurs à l’âge de soixante-quinze ans.
(3) L’Acte de l’Amérique du Nord britannique (n° 2), 974, a abrogé les dispositions de l’Acte de 1952 et y a substitué un nouveau rajustement de la représentation à la Chambre des Communes. Le principe de la représentation d’après la population a été maintenu.
(4) L’Acte de l’Amérique du Nord britannique, 1975, a porté de un à deux le nombre de députés des territoires du Nord-Ouest à la Chambre des Communes.
(5) L’Acte de l’Amérique du Nord britannique (n° 2), 1975, a porté de 102 à 104 le nombre total de sénateurs et prévu la représentation du territoire du Yukon et des territoires du Nord-Ouest au Sénat.
Toutes ces mesures portaient sur ce que l’on pourrait appeler des questions fédérales «internes» qui, selon la pratique antérieure à 1949, auraient été soumises au Parlement britannique par voie de résolution conjointe des deux Chambres du Parlement sans le consentement des provinces. Les deux dernières ressortissaient du pouvoir législatif du Parlement du Canada en vertu de l’art. 1 de l’Acte de l’Amérique du Nord britannique, 1886. Comme les autres elles n’ont aucune répercussion appréciable sur les relations fédérales-provinciales.
La loi envisagée dans la première question est d’une toute autre nature. Bien qu’elle n’ait aucun effet direct sur les relations fédérales-provinciales en ce sens qu’elle ne modifie pas les pouvoirs législatifs fédéral et provinciaux, elle vise cepen-
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dant l’élimination d’une des Chambres du Parlement, et modifierait ainsi la structure du Parlement fédéral à qui est confié le pouvoir fédéral de légiférer en vertu de l’art. 91 de l’Acte.
Le Sénat a un rôle vital en tant qu’institution faisant partie du système fédéral créé par l’Acte. Les considérants de l’Acte ont une certaine importance:
Considérant que les provinces du Canada, de la Nouvelle-Ecosse et du Nouveau‑Brunswick ont exprimé le désir de contracter une Union Fédérale pour ne former qu’une seule et même Puissance (Dominion) sous la couronne du Royaume-Uni de la Grande-Bretagne et d’Irlande, avec une constitution reposant sur les mêmes principes que celle du Royaume-Uni:
Considérant de plus qu’une telle union aurait l’effet de développer la prospérité des provinces et de favoriser les intérêts de l’Empire Britannique:
Considérant de plus qu’il est opportun, concurremment avec l’établissement de l’union par autorité du parlement, non seulement de décréter la constitution du pouvoir législatif de la Puissance, mais aussi de définir la nature de son gouvernement exécutif:
En vertu de la constitution du Royaume-Uni, dont il est fait mention dans le premier considérant, le pouvoir législatif était, et il l’est encore, exercé par la Reine, de l’avis et du consentement de la Chambre des lords et de la Chambre des Communes. La Chambre haute n’était pas, alors comme aujourd’hui, un organisme électif, la Chambre basse l’était et le demeure.
Il convient, croyons-nous, d’examiner la situation historique qui a suscité les dispositions de l’Acte pour l’institution du Sénat comme partie du système législatif fédéral. Pendant les débats de la Conférence de Québec en 1864, beaucoup de temps a été consacré à la discussion des dispositions relatives au Sénat. Son but important est énoncé dans les passages suivants de discours prononcés au cours des débats sur la Confédération dans le parlement de la province du Canada:
Sir John A. Macdonald:
Afin de protéger les intérêts locaux de chaque province, nous avons jugé nécessaire de donner aux trois grandes divisions de l’Amérique Britannique du Nord une représentation égale dans la chambre haute, car chacune de
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ces divisions aura des intérêts différents.… A la chambre haute sera confié le soin de protéger les intérêts de section
il en résulte que les trois grandes divisions seront également représentées pour défendre leurs propres intérêts contre toutes combinaisons de majorités dans l’Assemblée.
Débats parlementaires sur la question de la Confédération des provinces de l’Amérique Britannique du Nord, Québec, 1865, aux pp. 35 et 38.
L’honorable George Brown:
Or, l’essence de notre convention est que l’union sera fédérale et nullement législative. Nos amis du Bas-Canada ne nous ont concédé la représentation d’après la population qu’à la condition expresse qu’ils auraient l’égalité dans le conseil législatif. Ce sont là les seuls termes possibles d’arrangement et, pour ma part, je les ai acceptés de bonne volonté. Du moment que l’on conserve les limites actuelles des provinces et que l’on donne à des corps locaux d’administration des affaires locales, on reconnaît jusqu’à un certain point une diversité d’intérêts et la raison pour les provinces moins populeuses de demander la protection de leurs intérêts par l’égalité de représentation dans la chambre haute.
Débats parlementaires sur la question de la Confédération des provinces de l’Amérique Britannique du Nord, Québec, 1865, à la p. 87.
Un but primordial de l’institution du Sénat, en tant que partie du système législatif fédéral, était donc d’assurer la protection des divers intérêts régionaux au Canada quant à l’adoption de la législation fédérale. Dans sa forme initiale, l’Acte prévoyait à l’art. 22 qu’en ce qui concerne la composition du Sénat, le Canada serait censé comprendre trois divisions également représentées, c.-à-d. l’Ontario, le Québec et les provinces maritimes (la Nouvelle‑Éosse et le Nouveau-Brunswick). Cette disposition a été modifiée par la suite et l’art. 22 prévoit maintenant quatre divisions, la quatrième division comprenant les provinces de l’Ouest: le Manitoba, la Colombie-Britannique, la Saskatchewan et l’Alberta. L’Acte prévoit maintenant la représentation de l’Île-du-Prince-Édouard (comme l’une des provinces maritimes), de Terre-Neuve, du territoire du Yukon et des territoires du Nord-Ouest. Le paragraphe 5 de l’art. 23 exige qu’un sénateur réside dans la province pour laquelle il est nommé.
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La place du Sénat dans l’exercice du pouvoir législatif fédéral est déterminée par les art. 17 et 91 de l’Acte. Voici le texte du premier:
17. Il y aura, pour le Canada, un parlement qui sera composé de la Reine, d’une chambre haute appelée le Sénat, et de la Chambre des Communes.
Le premier alinéa de l’art. 91, l’article d’importance primordiale qui définit le pouvoir législatif fédéral, à déjà été cité. Le pouvoir de «faire des lois pour la paix, l’ordre et le bon gouvernement du Canada, relativement à toutes les matières ne tombant pas dans les catégories de sujets par le présent Acte exclusivement assignés aux législatures des provinces» a été conféré par le Parlement britannique à «la Reine, de l’avis et du consentement du Sénat et de la Chambre des Communes».
La création d’un système fédéral au Canada entraînait la nécessité d’effectuer un partage des pouvoirs législatifs. Ce partage est fait par les dispositions des art. 91 et 92 de l’Acte. Ce dernier article confère généralement à chaque législature provinciale le pouvoir de faire des lois exécutoires à l’intérieur de la province, dans des matières de nature locale ou privée. Quinze catégories de sujets y sont énumérées. L’article 91 prévoit en termes généraux le pouvoir de faire des lois pour la paix, l’ordre et le bon gouvernement du Canada. Vingt-neuf catégories de sujets y sont énumérées. Les lois qui traitent de ces matières peuvent avoir un effet sur les matières d’une nature locale ou privée à l’intérieur d’une province.
Le pouvoir d’édicter des lois fédérales a été donné à la Reine, de l’avis et du consentement du Sénat et de la Chambre des Communes. Ainsi, on a voulu que l’organisme créé pour protéger les intérêts des régions et des provinces participe à ce processus législatif.
La modification apportée à l’Acte en 1949 a ajouté à l’art. 91 une catégorie de sujets à celles qui étaient déjà énumérées et dont le nombre avait été porté à trente. La modification a été apportée à la suite d’une résolution conjointe des deux Chambres du Parlement, mais sans le consentement des provinces. Elle a donné à la Reine, de l’avis et du consentement du Sénat et de la Chambre des Communes, le pouvoir de modifier «la constitution
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du Canada». Ce pouvoir est assujetti aux exceptions expresses suivantes:
…sauf en ce qui concerne les matières rentrant dans les catégories de sujets que la présente loi attribue exclusivement aux législatures des provinces, ou en ce qui concerne les droits ou privilèges accordés ou garantis, par la présente loi ou par toute autre loi constitutionnelle, à la législature ou au gouvernement d’une province, ou à quelque catégorie de personnes en matière d’écoles, ou en ce qui regarde l’emploi de l’anglais ou du français, ou les prescriptions portant que le parlement du Canada tiendra au moins un session chaque année et que la durée de chaque chambre des communes sera limitée à cinq années, depuis le jour du rapport des brefs ordonnant l’élection de cette chambre
toutefois, le parlement du Canada peut prolonger la durée d’une chambre des communes en temps de guerre, d’invasion ou d’insurrection, réelles ou appréhendées, si cette prolongation n’est pas l’objet d’une opposition exprimée par les votes de plus du tiers des membres de ladite chambre.
L’expression «constitution du Canada» ne se trouve pas ailleurs dans l’Acte. On y trouve le mot «constitution» à divers endroits et dans différents contextes. Le préambule fait mention d’une «constitution reposant sur les mêmes principes que celle du Royaume-Uni». L’article 22 traite de «la composition du Sénat» (en anglais «Constitution of the Senate» qui est censé comprendre quatre divisions. La Partie V de l’Acte porte le titre: «Constitutions provinciales» et les art. 58 à 90 de cette Partie traitent de l’exercice du pouvoir exécutif et du pouvoir législatif dans les provinces. Le paragraphe 92(1) prévoit la modification de «la constitution de la province». L’article 147 se rapporte aux «trois divisions en lesquelles le Canada est, relativement à la composition du Sénat, partagé par le présent acte».
Le procureur général du Canada prétend que le pouvoir conféré au Parlement par le par. 91(1) est limité uniquement par les exceptions expresses y contenues. Il soutient que la spécificité même de ces exceptions indique l’ampleur du pouvoir ainsi conféré. Si cette façon de voir était adoptée, cela signifierait que le Parlement fédéral, agissant unilatéralement, pourrait modifier n’importe quelle partie de l’Acte, sous réserve seulement des exceptions énoncées au par. 91(1). Mais, le par. 91(1) ne donne pas le pouvoir de modifier l’Acte. Il emploie plutôt l’expression «constitution du
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Canada». A notre avis, le mot «Canada» au par. 91(1) ne se rapporte pas au Canada au sens géographique mais bien à l’entité juridique fédérale. La «constitution du Canada» ne signifie pas l’ensemble de l’Acte de l’Amérique du Nord britannique, mais la constitution du gouvernement fédéral, par opposition aux gouvernements provinciaux. Le pouvoir de modification conféré par le par. 91(1) est limité à ce qui concerne uniquement le gouvernement fédéral.
Le mot «Canada» est employé pour désigner l’entité juridique fédérale dans plusieurs articles de l’Acte, dont les suivants:
L’article 111 prévoit que «le Canada sera responsable des dettes et obligations de chaque province existantes lors de l’union».
L’article 125 prévoit que «nulle terre ou propriété appartenant au Canada ou à aucune province en particulier ne sera sujette à la taxation».
L’article 101 mentionne les «lois du Canada», expression que cette Cour a récemment interprétée. En voici le texte:
101. Le parlement du Canada pourra, nonobstant toute disposition contraire énoncée dans le présent acte, lorsque l’occasion le requerra, adopter des mesures à l’effet de créer, maintenir et organiser une cour générale d’appel pour le Canada, et établir des tribunaux additionnels pour la meilleure administration des lois du Canada.
Dans Quebec North Shore Paper Company c. Canadien Pacifique Limitée[1], le litige portait sur l’étendue de la compétence de la Cour fédérale, qui a été établie par loi fédérale en vertu de l’art. 101 «pour la meilleure administration des lois du Canada». On y a statué que l’expression «lois du Canada» signifie seulement les lois fédérales existantes et ne comprend pas les matières au sujet desquelles le Parlement fédéral aurait pu édicter des lois.
Dans McNamara Construction (Western) Limited c. La Reine[2], cette Cour a statué que la Cour
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fédérale n’a pas le droit de juger une réclamation du gouvernement fédéral pour violation de contrat, une matière qui relève du droit provincial.
A notre avis, le pouvoir de modification conféré par le par. 91(1) se rapporte à la constitution du gouvernement fédéral dans les matières qui concernent uniquement ce gouvernement. Les lois édictées par le Parlement fédéral depuis 1949, que j’ai déjà mentionnées, illustrent l’exercice de ce pouvoir.
La question suivante est de savoir si, pris dans ce sens restreint, le par. 91(1) permet au Parlement fédéral d’abolir le Sénat.
Si l’on garde à l’esprit la situation historique dans laquelle l’institution du Sénat a été conçue comme partie du système législatif fédéral, l’opinion de lord Sankey L.C. dans In re La réglementation et le contrôle de l’aéronautique au Canada[3], à la p. 70, bien que rédigée en regard de l’Acte dans sa forme initiale, est toujours pertinente:
[TRADUCTION] Dans la mesure où l’Acte renferme un compromis en vertu duquel les provinces primitives consentaient à se fédérer, il est important de ne pas perdre de vue que le maintien des droits des minorités était une des conditions auxquelles ces minorités consentaient à entrer dans la fédération et qu’il constituait la base sur laquelle toute la structure allait par la suite être érigée. La façon dont on l’interprète d’année en année ne doit pas faire perdre de vue ou modifier les dispositions du contrat initial qui prévoyait l’établissement de la fédération
il n’est pas juste non plus qu’une interprétation judiciaire des dispositions des art. 91 et 92 impose aux membres de la fédération un contrat nouveau et différent.
A notre avis, le pouvoir que le par. 91(1) a donné au Parlement fédéral ne visait pas à lui permettre de modifier de quelque façon les dispositions des art. 91 et 92 régissant l’exercice de l’autorité législative par le Parlement du Canada et les législatures provinciales. Le paragraphe 91(1) est une particularisation du pouvoir législatif général du Parlement du Canada. Ce pouvoir général ne peut être exercé que par la Reine du consentement et de l’avis du Sénat et de la Chambre des Communes. On ne peut interpréter le par.
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91(1) de façon à permettre de supplanter tout le reste de l’article. On ne peut l’interpréter de façon à permettre le transfert des pouvoirs législatifs énumérés dans l’art. 91 à un ou plusieurs organismes autres que ceux qui y sont expressément désignés.
Dans Procureur général de la Nouvelle-Écosse c. Procureur général du Canada et Lord Nelson Hotel Company Limited[4], cette Cour a décidé que ni le Parlement du Canada ni une législature provinciale ne peuvent déléguer à l’autre les pouvoirs législatifs dont ils sont investis ni recevoir de l’autre les pouvoirs dont l’autre est investi. L’élimination du Sénat irait beaucoup plus loin car elle impliquerait le transfert par le Parlement de tous ses pouvoirs législatifs à un nouvel organisme législatif dont le Sénat ne ferait pas partie.
Dans l’arrêt In re The Initiative and Referendum Act[5], la Cour d’appel du Manitoba a jugé que The Initiative and Referendum Act, 6 Geo. V, chap. 59, était ultra vires du pouvoir législatif de la législature du Manitoba. Cette loi prévoyait une procédure au moyen de laquelle les lois de la province pouvaient être édictées ou abrogées par vote direct des électeurs plutôt que par la seule législature. Le paragraphe 92(1) de l’Acte de l’Amérique du Nord britannique prévoit:
92. Dans chaque province la législature pourra exclusivement faire des lois relatives aux matières tombant dans les catégories de sujets ci-dessous énumérés, savoir:
1. L’amendement de temps à autre, nonobstant toute disposition contraire, énoncée dans le présent acte, de la constitution de la province, sauf les dispositions relatives à la charge de lieutenant-gouverneur.
La Cour a jugé que l’art. 92 de l’Acte confère à la législature le pouvoir exclusif d’édicter ou d’abroger des lois et qu’il ne vise pas l’institution d’un nouvel organisme législatif à qui la législature pourrait déléguer ses pouvoirs législatifs ou avec lequel elle pourrait les partager. La Cour a jugé qu’on ne pouvait pas justifier cette loi en invoquant qu’elle constituait une modification de la constitu-
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tion en vertu du par. 92(1). Le juge en chef Howell a traité ainsi de la question à la p. 7:
[TRADUCTION] La Législature ne peut d’aucune façon modifier les dispositions de l’art. 92. En vertu du par. 1 elle peut modifier la constitution de la province
mais, quels que soient les changements apportés à la constitution, seule la législature provinciale peut légiférer sur les sujets énumérés dans les autres paragraphes. C’est là, je crois, une interprétation juste de l’article si on le lit à la lumière de l’ensemble de l’Acte.
La Cour a également jugé que cette loi portait atteinte à «la charge du lieutenant-gouverneur» en lui enlevant tout pouvoir de refuser un texte de loi adopté de la façon prévue.
L’arrêt du Conseil privé[6], a rejeté sur ce dernier moyen l’appel de ce jugement, mais le vicomte Haldane a ajouté à la p. 945:
[TRADUCTION] Ceci dit, suivant leur pratique habituelle de ne décider que le strict nécessaire, leurs Seigneuries ne trancheront pas d’une manière définitive une autre difficulté à laquelle ceux qui prônent la validité de la loi doivent faire face. Mais ils croient juste d’en parler, la question ayant été discutée à la Cour d’appel du Manitoba. L’article 92 de l’Acte de 1867 confie l’autorité législative au sein de la province à sa législature, et à elle seulement. Nul doute qu’un organisme jouissant, sur les sujets qui sont de sa compétence, d’un pouvoir de légiférer aussi étendu que celui qui appartient à une législature provinciale au Canada pourrait, tout en préservant ses propres pouvoirs dans leur intégrité, se faire aider par des organismes subordonnés. Ceci était le cas lorsque, dans l’affaire Hodge c. La Reine (9 App. Cas. 117), il a été décidé que la législature de l’Ontario avait le droit de confier à un bureau de commissaires le pouvoir d’édicter des règlements relatifs aux tavernes
il ne s’ensuit pas toutefois que la Législature provinciale puisse créer un nouvel organe législatif qui n’est pas mentionné dans l’Acte auquel il doit son existence. Leurs Seigneuries ne font ici rien d’autre que souligner la gravité des questions constitutionnelles qui se posent à cet égard.
Les exceptions prévues au par. 91(1) impliquent l’existence continue du Sénat en tant que partie du système législatif fédéral. Une exception au pouvoir conféré par le par. 91(1) de modifier la constitution du Canada est «en ce qui regarde… les
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prescriptions portant que le parlement du Canada tiendra au moins une session chaque année». Aux termes de l’art. 17, le «parlement» sera composé de la Reine, du Sénat et de la Chambre des Communes. Cette exception implique que le Sénat et la Chambre des Communes devront continuer de siéger au moins une fois chaque année.
L’exception suivante porte que «la durée de chaque chambre des communes sera limitée à cinq années, depuis le jour du rapport des brefs ordonnant l’élection de cette chambre» sauf en temps de guerre, d’invasion ou d’insurrection, réelles ou appréhendées.
Ces deux exceptions indiquent clairement que le pouvoir de modifier «la constitution du Canada» donné par le par. 91(1) ne comprend pas celui d’éliminer le Sénat ou la Chambre des Communes.
Le procureur général du Canada prétend que le pouvoir de modification conféré par le par. 91(1) est l’équivalent, dans le domaine fédéral, du par. 92(1) dans le domaine provincial.
Il fait remarquer qu’en vertu de ce pouvoir les provinces du Manitoba, du Nouveau-Brunswick, de l’Île-du-Prince-Édouard, de la Nouvelle-Écosse et du Québec ont aboli leur conseil législatif respectif.
Cependant, les deux articles ne sont pas analogues. Contrairement à l’art. 91, l’art. 92 ne nomme pas les organes du pouvoir législatif. L’article 91 confère le pouvoir de légiférer, dans les matières qu’il vise, à la Reine, de l’avis et du consentement du Sénat et de la Chambre des Communes. L’article 92 confère à «la législature» le pouvoir de légiférer dans les matières qu’il énumère.
Ce qui est plus important, c’est que le par. 92(1) donne à la législature le pouvoir de modifier la constitution de la province, sauf les dispositions relatives à la charge de lieutenant-gouverneur, «nonobstant toute disposition contraire énoncée dans le présent acte». Mais le par. 91(1) confère un pouvoir de modification sous réserve d’exceptions précises lesquelles, comme nous l’avons déjà mentionné, impliquent l’existence continue du Sénat et de la Chambre des Communes.
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Pour les motifs qui précèdent, nous sommes d’avis de répondre à la première question par la négative.
2e question:
Le procureur général du Canada prétend, qu’à tous égards, il faut répondre à cette question par l’affirmative. Les procureurs généraux des provinces ont exprimé des vues différentes.
Tous les procureurs généraux des provinces, à l’exception du procureur général de l’Île‑du‑Prince-Édouard, ont soutenu qu’il faut répondre par la négative à la question 2(f). Ce paragraphe pose la question du pouvoir du Parlement, en vertu du par. 91(1), de prévoir que tous les projets de loi soient sanctionnés et aient force de loi après l’écoulement d’un certain délai, et ce, même sans leur approbation par la Chambre haute. La seule disposition actuelle, qui limite le pouvoir du Sénat, par rapport à celui de la Chambre des Communes, est l’art. 53 qui prévoit que tout projet de loi ayant pour but l’approbation d’une portion quelconque du revenu public, ou la création de taxes ou d’impôts, devra originer dans la Chambre des Communes.
Une disposition de la nature de celle que l’on envisage affaiblirait beaucoup la position du Sénat dans le système législatif parce qu’elle permettrait que des lois soient édictées en vertu de l’art. 91 sans le consentement du Sénat. Pour les motifs déjà donnés, quant à la première question, nous croyons que le Parlement ne peut, en vertu du par. 91(1), affaiblir le rôle du Sénat dans ce système. Nous sommes d’avis de répondre à cette question par la négative.
En ce qui a trait aux autres parties de la seconde question, le procureur général de l’Ontario et le procureur général de la Nouvelle-Écosse prétendent que l’on ne peut y répondre catégoriquement dans la forme où elles sont posées. Pour reprendre les paroles du procureur général de la Nouvelle-Ecosse, on ne peut répondre à ces questions [TRADUCTION] «en l’absence de précisions sur le contexte ou d’un projet de loi rédigé». Cette prétention nous paraît bien fondée. Nous examinerons successivement chaque paragraphe.
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Au paragraphe (a) on demande si le Parlement peut modifier le nom de la Chambre haute. Nous présumons qu’un changement de nom ne serait proposé que dans le cadre d’un projet de modification du Sénat lui-même. Si ce projet était jugé ultra vires du Parlement, alors le changement de nom le serait probablement aussi. Nous ne croyons pas que l’on puisse répondre convenablement à cette question en l’absence d’un tel contexte.
Le paragraphe (b) implique un changement dans le nombre et la proportion des membres du Sénat qui y représentent les provinces et les territoires. Aucune des provinces n’a appuyé la prétention fédérale sur ce point.
Comme on l’a vu, le mode de représentation régionale au Sénat était l’un des caractères essentiels de cet organisme lors de sa création. Sans lui, le caractère fondamental du Sénat en tant que partie du système fédéral canadien disparaît. En l’absence de précisions sur le contexte, il n’est pas possible de dire si un changement visé par cette question respecterait ce caractère fondamental.
Le paragraphe (c) porte sur un changement dans les qualités exigées des sénateurs. La difficulté ici, est que nous ignorons quels changements sont envisagés. Certaines des qualités exigées des sénateurs à l’art. 23, comme celles qui ont trait à leurs biens, peuvent ne pas avoir aujourd’hui l’importance qu’elles avaient lorsque l’Acte a été édicté. Par ailleurs, l’exigence qu’un sénateur réside dans la province pour laquelle il est nommé est importante par rapport aux caractéristiques des divisions qui composent le Sénat. A notre avis, on ne peut répondre catégoriquement à cette question.
Le paragraphe (d) concerne la durée des fonctions des sénateurs. Actuellement, lorsqu’ils sont nommés, les sénateurs occupent leur charge jusqu’à l’âge de soixante-quinze ans. A un certain point, la réduction de la durée des fonctions pourrait nuire au bon fonctionnement du Sénat qui assure, pour reprendre les paroles de Sir John A. Macdonald, [TRADUCTION] «un deuxième coup d’œil attentif à la loi». L’Acte prévoit une constitution semblable, en principe, à celle du Royaume-
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Uni, où les membres de la Chambre des lords siègent à vie. L’imposition de la retraite obligatoire à l’âge de soixante-quinze ans n’a pas modifié le caractère essentiel du Sénat. Cependant, pour répondre à cette question, il nous faudrait savoir quels changements on se propose d’apporter à la durée des fonctions.
Le paragraphe (e), aux alinéas (i), (ii) et (iii), envisage le changement du mode de nomination des sénateurs, pouvoir qu’exerce actuellement le gouverneur général. On ferait choisir «certains» membres du Sénat par les législatures provinciales, «certains» membres par la Chambre des Communes, «certains» membres par les lieutenants-gouverneurs en conseil ou par «un ou plusieurs organismes». Le choix de sénateurs par une législature provinciale ou par le lieutenant-gouverneur d’une province impliquerait une participation indirecte des provinces à l’adoption des lois fédérales et cela est contraire au raisonnement de cette Cour dans l’arrêt Lord Nelson Hotel cité précédemment.
De nouveau, nous ne croyons pas avoir sur le contexte des précisions qui nous permettraient de formuler une réponse satisfaisante.
Le paragraphe (e) à l’alinéa (iv) vise la sélection possible d’une partie ou de la totalité des membres du Sénat par voie d’élection directe par le peuple. La substitution d’un système d’élection à un système de nomination implique un changement radical dans la nature d’un des organes du Parlement. Comme on l’a vu, le préambule de l’Acte parle d’«une constitution reposant sur les mêmes principes que celle du Royaume-Uni», où la Chambre haute n’est pas élective. En créant le Sénat de la manière prévue à l’Acte, il est évident qu’on voulait en faire un organisme tout à fait indépendant qui pourrait revoir avec impartialité les mesures adoptées par la Chambre des Communes. On y est arrivé en disposant que les membres du Sénat seraient nommés à vie. Si l’on faisait du Sénat un organisme entièrement ou partiellement électif, on en modifierait un trait fondamental. Nous sommes d’avis de répondre par la négative sur ce point.
Examinant de façon générale la seconde question, nous sommes d’avis que, bien que le par.
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91(1) permette au Parlement d’apporter certains changements à la constitution actuelle du Sénat, il ne lui permet pas d’apporter des modifications qui porteraient atteinte aux caractéristiques fondamentales ou essentielles attribuées au Sénat pour assurer la représentation régionale et provinciale dans le système législatif fédéral. Le Parlement britannique a déterminé le caractère du Sénat d’après les propositions soumises par les trois provinces pour rencontrer les exigences du système fédéral proposé. C’est à ce Sénat, créé par l’Acte, que l’art. 91 a donné un rôle législatif. Nous sommes d’avis que le Parlement du Canada ne peut en modifier unilatéralement le caractère fondamental et le par. 91(1) ne l’y autorise pas.
Nous répondons par la négative à la première question ainsi qu’aux paragraphes 2(b), 2(e) alinéa (iv) et 2(f) de la seconde question. A notre avis, en l’absence de précisions sur le contexte, il n’est pas possible de donner une réponse catégorique au reste de la seconde question.
Les questions soumises ont reçu les réponses suivantes:
Question 1:
Non
Question 2:
a) Pas de réponse
b) Non
c) Pas de réponse
d) Pas de réponse
e) (i) Pas de réponse
(ii) Pas de réponse
(iii) Pas de réponse
(iv) Non
f) Non
Procureur du procureur général du Canada: Roger Tassé, Ottawa.
Procureur du procureur général de l’Ontario: Allan Leal, Toronto.
Procureur du procureur général de la Nouvelle-Écosse: Gordon F. Coles, Halifax.
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Procureur du procureur général du Nouveau-Brunswick: Gordon F. Gregory, Fredericton.
Procureur du procureur général de l’Île-du-Prince-Édouard: Graham W. Stewart, Charlotte-town.
Procureur du procureur général de la Saskatchewan: Richard Gosse, Regina.
Procureurs du procureur général de l’Alberta: Ross Paisley et William Henkel, Edmonton.
Procureur du procureur général de Terre-Neuve: James A. Nesbitt, St-Jean.
[1] [1977] 2 R.C.S. 1054.
[2] [1977] 2 R.C.S. 654.
[3] [1932] A.C. 54.
[4] [1951] R.C.S. 31.
[5] (1916), 27 Man. R. 1.
[6] [1919] A.C. 935.

Proposition de citation de la décision: Renvoi : Compétence du Parlement relativement à la Chambre haute, [1980] 1 R.C.S. 54 (21 décembre 1979)


Origine de la décision
Date de l'import : 06/04/2012
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ca;cour.supreme;arret;1979-12-21;.1980..1.r.c.s..54 ?
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