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20/10/1988 | CANADA | N°[1988]_2_R.C.S._204

Canada | Terre-Neuve (Procureur général) c. N.A.P.E., [1988] 2 R.C.S. 204 (20 octobre 1988)


terre‑neuve (procureur général) c. n.a.p.e., [1988] 2 R.C.S. 204

Newfoundland Association of Public Employees Appelant

c.

Le procureur général de Terre‑Neuve et William Chafe Intimés

répertorié: terre‑neuve (procureur général) c. n.a.p.e.

No du greffe: 19194.

1988: 3 mars; 1988: 20 octobre.

Présents: Le juge en chef Dickson et les juges Estey*, McIntyre, Lamer, Wilson, La Forest et L'Heureux‑Dubé.

en appel de la cour d'appel de terre‑neuve

POURVOI contre un arrêt de la Cour d'appel de Terre‑Neuve (1984), 50

Nfld. & P.E.I.R. 139, 149 A.P.R. 139, 14 D.L.R. (4th) 323, qui a rejeté un appel contre un jugement du juge Noel. Pourvoi...

terre‑neuve (procureur général) c. n.a.p.e., [1988] 2 R.C.S. 204

Newfoundland Association of Public Employees Appelant

c.

Le procureur général de Terre‑Neuve et William Chafe Intimés

répertorié: terre‑neuve (procureur général) c. n.a.p.e.

No du greffe: 19194.

1988: 3 mars; 1988: 20 octobre.

Présents: Le juge en chef Dickson et les juges Estey*, McIntyre, Lamer, Wilson, La Forest et L'Heureux‑Dubé.

en appel de la cour d'appel de terre‑neuve

POURVOI contre un arrêt de la Cour d'appel de Terre‑Neuve (1984), 50 Nfld. & P.E.I.R. 139, 149 A.P.R. 139, 14 D.L.R. (4th) 323, qui a rejeté un appel contre un jugement du juge Noel. Pourvoi rejeté.

1. V. Randell J. Earle, pour l'appelant.

2. Leslie R. Thoms, pour l'intimé le procureur général de Terre‑Neuve.

3. William H. Goodridge, pour l'intimé William Chafe.

Version française du jugement de la Cour rendu par

4. Le Juge en chef—Le présent pourvoi porte sur le droit d'un syndicat de dresser une ligne de piquetage devant un palais de justice et de soumettre à des mesures disciplinaires une personne qui est membre du personnel de la cour et membre du syndicat en grève, parce qu'elle a traversé la ligne de piquetage.

I

Les faits

5. Au cours d'une grève légale des employés des services généraux de la Newfoundland Association of Public Employees, section locale 7104, (ci‑après appelé le "syndicat"), qui a commencé le 18 septembre 1978, il y a eu débrayage de tous les employés du gouvernement de Terre‑Neuve faisant partie de l'unité de négociation, sauf certains membres du personnel d'encadrement et d'autres employés requis pour les services essentiels. Le personnel de la Cour suprême de Terre‑Neuve faisait partie de l'unité de négociation. Les employés de la cour n'avaient pas été désignés comme "essentiels" conformément à The Public Service (Collective Bargaining Act), 1973, S.N. 1973, No. 123. Les membres du syndicat travaillant à la Cour suprême ont débrayé, sauf certains membres du personnel d'encadrement. Le piquetage devant le palais de justice à St. John's faisait partie des activités de grève.

6. William Chafe, membre du syndicat et huissier employé par la cour, a traversé la ligne de piquetage le jour où elle a été dressée, pour aller travailler à la cour. La constitution du syndicat des fonctionnaires prévoit à l'al. 8a)(xiii) de l'article III que tout membre d'une unité de négociation qui refuse de respecter une ligne de piquetage pendant une grève légale est coupable d'une infraction à l'égard de laquelle il peut être reconnu coupable et réprimandé, mis à l'amende, congédié, suspendu ou expulsé. En vertu de cette disposition, M. Chafe a été accusé d'avoir traversé la ligne de piquetage et il a été avisé que son "procès" aurait lieu devant un comité du syndicat le 12 décembre 1978.

7. Le jour où l'audience disciplinaire devait commencer, le procureur général de Terre‑Neuve et Chafe ont produit un acte introductif d'instance pour faire déclarer que [TRADUCTION] "le Palais de justice, Duckworth Street, St. John's, ou tout autre endroit où siège un tribunal est un lieu devant lequel aucune ligne de piquetage ne peut être établie, dressée ou maintenue car elle constitue une entrave à l'administration de la justice". Les demandeurs ont également sollicité une injonction pour interdire au syndicat défendeur de poursuivre les procédures contre M. Chafe relativement à l'infraction disciplinaire alléguée. Le juge Noel a accordé l'injonction ex parte et, à la suite d'une audience tenue le 10 janvier 1979, il a rendu l'injonction permanente. Il a jugé qu'il fallait interdire au syndicat de continuer ses procédures disciplinaires contre Chafe. Le syndicat en a appelé à la Cour d'appel de Terre‑Neuve qui a rejeté l'appel à l'unanimité. Une autorisation de pourvoi a par la suite été accordée.

II

Les jugements

Le juge Noel (inédit)

8. Dans de brefs motifs oraux, le juge Noel a conclu qu'inciter un officier de justice à ne pas exécuter ses fonctions constituait un outrage criminel au tribunal et que le tribunal avait amplement les pouvoirs pour veiller à la protection de ses officiers dans l'exécution de leurs fonctions. Le juge Noel a indiqué que ces pouvoirs ne visaient pas à faire respecter la dignité de la cour ou de la personne de l'officier, mais plutôt à empêcher une entrave indue à l'administration de la justice.

La Cour d'appel de Terre‑Neuve (publié à (1984), 14 D.L.R. (4th) 323)

9. Le syndicat en a appelé à la Cour d'appel de Terre‑Neuve, invoquant entres autres moyens que le procureur général ne pouvait pas être partie à l'action, que le juge avait commis une erreur en interdisant au syndicat appelant d'appliquer ses procédures disciplinaires internes et en concluant que l'intimé Chafe était un officier de justice. Chafe a formé un appel incident invoquant comme moyen que le juge de première instance avait commis une erreur en refusant expressément de conclure que l'appelant n'avait pas le droit de prendre des mesures disciplinaires internes contre lui en vertu de la constitution du syndicat pour non‑respect de la ligne de piquetage.

10. Les trois juges de la Cour d'appel ont tous convenu que l'appel devait être rejeté. Selon le juge Morgan, il était implicite dans l'ordonnance du juge Noel que l'établissement d'une ligne de piquetage à l'entrée d'un palais de justice constituait un outrage criminel destiné à inciter les officiers de justice à ne pas s'acquitter de leurs devoirs. Bien que l'appelant ait prétendu que la grève était légale, le juge Morgan a conclu que la vraie question était de savoir si la conduite de l'appelant, qui a dressé une ligne de piquetage devant le palais de justice, constituait un outrage criminel; dans l'affirmative, aucun des arguments de l'appelant ne pouvait réussir. Le juge Morgan mentionne le principe bien établi que les actes qui tendent à gêner ou à entraver l'administration de la justice constituent un outrage criminel; il mentionne également la compétence inhérente des cours supérieures de punir ce genre d'outrage. Le juge Morgan dit à la p. 329:

[TRADUCTION] Il faut également déterminer si l'établissement d'une ligne de piquetage à l'entrée d'un palais de justice gêne ou tend à gêner l'administration publique de la justice comme le prétend le procureur général. Cette question a été examinée dans Re British Columbia Government Employees Union et al. and A.‑G. B.C. et al. (1983), 2 D.L.R. (4th) 705, [1984] 1 W.W.R. 399, 48 B.C.L.R. 5.

Le juge Morgan mentionne de longs extraits des motifs du juge en chef McEachern de la Cour suprême dans l'affaire British Columbia Government Employees' Union et déclare que les principes formulés par ce dernier pouvaient s'appliquer en l'espèce. Il conclut à la p. 330:

[TRADUCTION] Constitue un outrage au tribunal toute conduite qui vise à empêcher ou à gêner l'accès au tribunal de toute partie, tout témoin ou toute autre personne qui y a affaire ou qui désire y entrer aux fins d'entendre ce qui s'y passe. À mon avis, l'établissement d'une ligne de piquetage à l'entrée du palais de justice relève de cette catégorie.

Dans l'arrêt Balogh v. Crown Court at St. Albans, [1974] 3 All E.R. 283 (C.A.), le maître des rôles lord Denning donne des exemples du pouvoir d'un juge de punir de manière sommaire, de son propre chef, l'outrage commis dans certaines circonstances précises, en ces termes, aux pp. 287 et 288:

Ce pouvoir a été dévolu aux juges de la High Court puis aux juges de la Crown Court. Pour en montrer l'étendue, je donnerai quelques exemples:

...

(ii) Dans la salle d'audience mais hors de la vue du juge — À Old Bailey, un homme distribuait dans la galerie du public des tracts qui incitaient les gens à piqueter les lieux. Un membre du public l'a signalé à un agent de police qui l'a signalé au juge. Le contrevenant a nié. Le juge Melford Stevenson a immédiatement entendu la preuve des deux côtés. Il a reconnu le contrevenant coupable et l'a condamné à sept jours de prison. L'homme en a appelé à cette cour. Son appel a été rejeté (Lecointe v. Courts' Administrator of the Central Criminal Court)" (le 8 février 1973; Bar Library Transcript No. 57A of 1973).

Le juge Morgan a conclu que le procureur général de Terre‑Neuve était une partie qui avait qualité pour intenter la procédure, que Chafe était un officier de justice et, en conséquence, il a rejeté l'appel.

11. Le juge Mahoney exprime son accord, se fondant largement sur les motifs du juge en chef McEachern dans l'affaire British Columbia Government Employees' Union. Le juge Mahoney conclut qu'on ne pouvait pas dire qu'il s'agissait d'une affaire purement interne entre le syndicat et son membre, car aucun syndicat ne peut convenir par contrat avec ses membres d'accomplir un acte qui entrave l'administration de la justice. Il dit à la p. 337:

[TRADUCTION] Empêcher William Chafe d'avoir accès au palais de justice entravait la signification des brefs et l'exécution des ordonnances de la cour et entravait l'administration de la justice de façon générale. L'établissement d'une ligne de piquetage devant le palais de justice constituait en l'espèce un outrage criminel au tribunal.

Le juge Mahoney conclut que l'appel incident de Chafe était inutile vu que le juge de première instance lui avait en effet accordé le redressement recherché.

12. Le juge en chef Mifflin a été du même avis que le juge Morgan. De l'avis du Juge en chef, l'établissement d'une ligne de piquetage à l'entrée d'un palais de justice est une entrave à l'administration publique de la justice et, ainsi, constitue en soi un outrage au tribunal. Le Juge en chef ajoute à la p. 325:

[TRADUCTION] On ne peut pas dire qu'en franchissant la ligne de piquetage William Chafe, fût‑il officier de justice ou simple membre du syndicat appelant, pourrait s'exposer à des mesures disciplinaires de la part du syndicat. Je ne peux imaginer de situation où une personne pourrait faire l'objet de mesures disciplinaires pour avoir refusé d'approuver un acte illégal. À fortiori, un officier de justice ne peut faire l'objet de mesures disciplinaires pour avoir refusé de respecter une ligne de piquetage illégale, peu importe les procédures disciplinaires prévues dans les statuts du syndicat.

Le Juge en chef termine en disant que le procureur général pouvait indubitablement être partie aux procédures étant donné que l'administration de la justice lui incombe.

III

La question en litige

13. La question en litige en l'espèce n'est pas de savoir s'il y avait un droit de grève ni si M. Chafe avait l'obligation légale de ne pas tenir compte de la grève et de la ligne de piquetage et de se rendre à son travail. Il n'est pas nécessaire d'examiner l'un ou l'autre point. Le pourvoi soulève deux questions. La première est de savoir si faire du piquetage devant un palais de justice pendant une grève légale constitue un outrage criminel au tribunal. La seconde est de savoir si le syndicat a le droit de donner suite à ses accusations et à ses audiences disciplinaires prévues contre M. Chafe.

14. L'accusation contre Chafe porte qu'il a [TRADUCTION] "enfreint les statuts de la Newfoundland Association of Public Employees en refusant de respecter une ligne de piquetage de la section locale 7104 de la Newfoundland Association of Public Employees pendant une grève légale du syndicat au Palais de justice, Duckworth Street, St. John's, Terre‑Neuve". Les intimés soutiennent que le syndicat n'a pas le pouvoir de donner suite à ces accusations parce que le piquetage lui‑même était illégal.

15. La première question en l'espèce est la même que celle de l'affaire B.C.G.E.U. c. Colombie‑Britannique (Procureur général), [1988] 2 R.C.S. 214, savoir si le piquetage qui gêne l'accès aux cours de justice constitue un outrage criminel au tribunal. Il n'y a aucun doute en l'espèce que la grève était légale. Cependant, pour les motifs donnés dans l'arrêt B.C.G.E.U., la légalité de la grève ne rend pas légal un piquetage qui entrave l'administration de la justice. Les faits de la présente espèce montrent clairement que le syndicat voulait que la ligne de piquetage fasse obstacle devant le palais de justice. Monsieur Chafe faisait face à des mesures disciplinaires graves pour avoir forcé son passage à travers la ligne et être entré dans le palais de justice. La conclusion de l'arrêt B.C.G.E.U. règle donc clairement la présente espèce et il s'ensuit que le piquetage constitue un outrage criminel au tribunal.

16. Si la ligne de piquetage elle‑même constitue un outrage criminel, le syndicat appelant ne peut être fondé en droit à prendre des mesures disciplinaires contre un de ses membres parce qu'il n'a pas tenu compte de sa demande illégale. Comme on l'a souligné dans l'affaire B.C.G.E.U., le syndicat et ses statuts sont soumis à la loi du pays. Le syndicat peut avoir tout à fait le droit de faire respecter la solidarité et ses lignes de piquetage légales, mais il ne peut exercer ce pouvoir disciplinaire pour faire respecter une ligne de piquetage qui est elle‑même illégale.

17. Il faut souligner que le présent jugement n'ordonne en aucune façon à une personne ou à un groupe de retourner au travail, qu'il ne conclut pas que la grève elle‑même était illégale ni que M. Chafe avait l'obligation de ne pas tenir compte de la ligne de piquetage et de se présenter au travail malgré la grève. Monsieur Chafe a pris sa propre décision de ne pas tenir compte de la grève et de se rendre au travail. Le seul point que cette Cour est appelée à trancher est de savoir s'il peut faire l'objet de procédures disciplinaires en raison de son geste, compte tenu du fait que la ligne de piquetage elle‑même constituait un outrage criminel au tribunal. À mon avis, la réponse à cette question doit être négative. S'il n'y avait pas eu d'illégalité, le syndicat appelant aurait eu le droit de prendre des mesures disciplinaires contre M. Chafe conformément à ses statuts. S'il n'y avait pas eu d'illégalité, l'argument de l'appelant aurait été inattaquable. Dans les circonstances de l'espèce cependant, le piquetage du palais de justice était illégal, un outrage criminel au tribunal, et, à mon avis, on peut à bon droit interdire à l'appelant de prendre des mesures disciplinaires contre un membre parce que ce dernier avait décidé de traverser une ligne de piquetage illégale.

18. L'avocat de l'appelant fait valoir que, dans leur demande ex parte d'injonction et à l'audience subséquente devant la cour, le procureur général de Terre‑Neuve et William Chafe n'ont présenté aucune preuve établissant que le piquetage du palais de justice avait entravé la circulation au palais de justice ou que le piquetage avait interrompu ou gêné des procédures judiciaires. Il ajoute qu'il y n'avait aucune preuve d'intimidation, de contrainte ou de violence établissant une entrave réelle ou probable de l'administration de la justice. Dans l'affaire B.C.G.E.U., le piquetage était paisible; il n'y a eu aucune violence ou menace de violence. L'argument présenté ici l'a également été dans cette affaire‑là et a été rejeté aux pp. 16 et 17:

L'objet même d'une ligne de piquetage dans un conflit de travail est de décourager et de dissuader les gens d'entrer dans les locaux visés par le piquetage . . .

Une ligne de piquetage gêne ipso facto l'accès du public à la justice. Elle entrave cet accès et c'est à dessein. Une ligne de piquetage a de grands pouvoirs d'influence comme forme de coercition. Comme l'a dit le juge Stewart dans l'affaire Heather Hill Appliances Ltd. v. McCormack, [1966] 1 O.R. 12 (H.C. Ont.), à la p. 13:

[TRADUCTION] La ligne de piquetage est devenue le signe et le symbole de la solidarité syndicale, acquérant graduellement le caractère d'une barrière — intangible mais non moins réelle. Le respect de la ligne de piquetage est devenu une question de foi et de moral, une obligation de conscience, un commandement auquel obéissent non seulement les collègues des piqueteurs, mais aussi tous les vrais membres convaincus d'autres syndicats qui n'ont rien à reprocher à l'employeur visé par le piquetage.

19. L'avocat de l'appelant affirme que la jurisprudence traitant du pouvoir des tribunaux en matière d'outrage criminel le décrit comme un pouvoir inhérent d'une cour supérieure de maintenir son autorité et d'empêcher que ses procédures fassent l'objet d'obstruction et d'abus. C'est là une formulation correcte de la jurisprudence qui ressort des décisions qu'il cite. Il ajoute ensuite: [TRADUCTION] "Les cours ne doivent pas, en vertu de ce pouvoir, avoir une existence parfaite dégagée des vicissitudes de tous les jours". Cette affirmation fait peu de cas du point souvent répété dans la jurisprudence que le pouvoir de punir pour l'outrage criminel n'est pas destiné à protéger les cours contre les vicissitudes de la vie; il n'est pas destiné à placer les cours à l'Elysée, dans un lieu béni à l'abri des traits qui atteignent tous les autres; il n'est pas destiné à faire respecter la dignité des cours ou des juges. Le fait est que les cours d'archives ont eu depuis des temps immémoriaux le pouvoir de punir pour outrage ceux dont la conduite entrave ou gêne le cours normal de la justice; elles ont ce pouvoir afin de défendre et de protéger efficacement les droits et libertés de tous les citoyens dans les seuls prétoires où l'on peut statuer à leur égard, les cours civiles et criminelles. Tout ce qui empêche, entrave ou gêne l'accès aux tribunaux va à l'encontre de la primauté du droit et constitue un outrage criminel. La primauté du droit, enchâssée dans notre Constitution, ne peut être maintenue que si les gens ont un accès totalement libre aux tribunaux de ce pays.

IV

Conclusion

20. Je suis d'avis de rejeter le pourvoi avec dépens.

Pourvoi rejeté.

Procureurs de l'appelant: Wells, O'Dea, Halley, St. John's.

Procureur de l'intimé le procureur général de Terre‑Neuve: Le ministère de la Justice, St. John's.

* Le juge Estey n'a pas pris part au jugement.


Synthèse
Référence neutre : [1988] 2 R.C.S. 204 ?
Date de la décision : 20/10/1988
Sens de l'arrêt : Le pourvoi est rejeté

Analyses

Tribunaux - Outrage criminel - Piquetage devant un palais de justice au cours d'une grève légale - Un membre du syndicat en grève a traversé la ligne de piquetage pour se rendre à son travail au palais de justice - Mesures disciplinaires internes entreprises par le syndicat - Le piquetage devant un palais de justice au cours d'une grève légale constitue‑t‑il un outrage criminel? - Le syndicat avait‑il le droit de prendre des mesures disciplinaires internes?.

L'intimé Chafe, membre du syndicat appelant, a traversé une ligne de piquetage dressée par le syndicat en se rendant à son travail au palais de justice. La ligne de piquetage avait été établie devant le palais de justice au cours d'une grève légale en 1978. Au moment où le syndicat devait commencer à prendre des mesures disciplinaires, les intimés ont demandé (i) une ordonnance déclarant que tout endroit où siège un tribunal est un lieu devant lequel aucune ligne de piquetage ne peut être dressée ou maintenue et (ii) une injonction interdisant au syndicat de donner suite à ses mesures disciplinaires. L'injonction a été accordée ex parte et, à la suite d'une audience, l'injonction a été rendue permanente. La Cour d'appel de Terre‑Neuve a rejeté l'appel du syndicat à l'unanimité. Ce pourvoi soulève deux questions. La première est de savoir si faire du piquetage devant un palais de justice au cours d'une grève légale constitue un outrage tribunal criminel. La seconde est de savoir si le syndicat a le droit de donner suite à ses accusations et à ses audiences disciplinaires prévues contre M. Chafe.

Arrêt: Le pourvoi est rejeté.

En l'espèce le piquetage constituait un outrage criminel au tribunal. Bien que la grève fût légale, il découle du fait que le syndicat voulait que la ligne de piquetage fasse obstacle devant le palais de justice que la présente espèce est clairement réglée par l'arrêt B.C.G.E.U. c. Colombie‑Britannique (Procureur général).

Puisque la ligne de piquetage elle‑même constituait un outrage criminel, le syndicat appelant n'était pas fondé en droit à prendre des mesures disciplinaires contre un de ses membres parce qu'il n'a pas tenu compte de la demande illégale de ne pas traverser la ligne de piquetage. Le syndicat peut avoir tout à fait le droit de faire respecter la solidarité et ses lignes de piquetage légales, mais il ne peut exercer ce pouvoir disciplinaire pour faire respecter une ligne de piquetage qui est elle‑même illégale.


Parties
Demandeurs : Terre-Neuve (Procureur général)
Défendeurs : N.A.P.E.

Références :

Jurisprudence
Arrêt appliqué: B.C.G.E.U. c. Colombie‑Britannique (Procureur général), [1988] 2 R.C.S. 214.
Lois et règlements cités
Public Service (Collective Bargaining Act), 1973, S.N. 1973, No. 123.
Doctrine citée
Newfoundland Association of Public Employees. Constitution of the Newfoundland Association of Public Employees. Article III, s. 8(a)(xiii).

Proposition de citation de la décision: Terre-Neuve (Procureur général) c. N.A.P.E., [1988] 2 R.C.S. 204 (20 octobre 1988)


Origine de la décision
Date de l'import : 06/04/2012
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ca;cour.supreme;arret;1988-10-20;.1988..2.r.c.s..204 ?
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