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29/03/1990 | CANADA | N°[1990]_1_R.C.S._695

Canada | Rudolph wolff & co. c. Canada, [1990] 1 R.C.S. 695 (29 mars 1990)


Rudolph Wolff & Co. c. Canada, [1990] 1 R.C.S. 695

Rudolph Wolff & Co. Ltd. et Noranda Inc. Appelantes

c.

Sa Majesté la Reine Intimée

et

Le procureur général de l'Ontario,

le procureur général du Québec et

le procureur général de l'Alberta Intervenants

répertorié: rudolph wolff & co. c. canada

No du greffe: 20842.

1990: 24 janvier; 1990: 29 mars.

Présents: Le juge en chef Dickson et les juges Wilson, L'Heureux‑Dubé, Sopinka, Gonthier, Cory et McLachlin

en appel de la cour d'appel de l

'ontario

POURVOI contre un arrêt de la Cour d'appel de l'Ontario rendu le 7 mars 1988, qui a confirmé la décision du juge Henry, (198...

Rudolph Wolff & Co. c. Canada, [1990] 1 R.C.S. 695

Rudolph Wolff & Co. Ltd. et Noranda Inc. Appelantes

c.

Sa Majesté la Reine Intimée

et

Le procureur général de l'Ontario,

le procureur général du Québec et

le procureur général de l'Alberta Intervenants

répertorié: rudolph wolff & co. c. canada

No du greffe: 20842.

1990: 24 janvier; 1990: 29 mars.

Présents: Le juge en chef Dickson et les juges Wilson, L'Heureux‑Dubé, Sopinka, Gonthier, Cory et McLachlin

en appel de la cour d'appel de l'ontario

POURVOI contre un arrêt de la Cour d'appel de l'Ontario rendu le 7 mars 1988, qui a confirmé la décision du juge Henry, (1987), 26 C.P.C. (2d) 166, accueillant la requête de la Couronne en rejet de l'action des appelantes. Pourvoi rejeté.

R. G. Slaght, c.r., pour les appelantes.

T. B. Smith, c.r., A. R. Pringle et Joseph de Pencier, pour l'intimée.

Robert E. Charney, pour l'intervenant le procureur général de l'Ontario.

Jean Bouchard et Madeleine Aubé, pour l'intervenant le procureur général du Québec.

Richard F. Taylor, pour l'intervenant le procureur général de l'Alberta.

//Le juge Cory//

Version française du jugement de la Cour rendu par

Le juge Cory — La question que soulève ce pourvoi est de savoir si les dispositions législatives qui confèrent à la Cour fédérale du Canada une compétence exclusive sur les réclamations exercées contre le gouvernement fédéral violent le par. 15(1) de la Charte canadienne des droits et libertés. Ironiquement, le problème sera peut‑être résolu pour l'avenir par un projet de loi qui a déjà été adopté en deuxième lecture.

Les faits

L'appelante Rudolf Wolff & Co. Ltd. est une filiale de Noranda Inc. Elle fait affaire comme courtier en produits métallurgiques et en opérations à terme. Le gouvernement fédéral intimé était membre du Conseil international de l'étain (C.I.E.), une association non constituée en personne morale composée de 22 États membres et de la Communauté économique européenne. Le C.I.E. a été créé en 1956 et son mandat a été renouvelé successivement en vertu de dispositions des Accords internationaux sur l'étain, chacun d'une durée de cinq ans. C'est le sixième Accord international sur l'étain (AIE‑6) en date du 1er juillet 1982 qui nous concerne en l'espèce. Selon les dispositions de l'Accord AIE‑6, les membres du C.I.E. ont convenu de financer un stock régulateur de l'étain que devait gérer l'administrateur du stock, comme mandataire des membres du C.I.E., pour maintenir le cours mondial de l'étain.

Dans l'exercice de ses fonctions, l'administrateur du stock a fréquemment acheté et vendu de l'étain par l'intermédiaire de l'appelante Wolff. Au cours des premières années qui ont suivi la conclusion de l'Accord AIE‑6, le cours mondial de l'étain était très bas et a eu un effet désastreux sur le C.I.E. qui est devenu insolvable en octobre 1985. Les appelantes prétendent qu'elles ont subi des pertes importantes par suite de la mauvaise gestion du stock régulateur par l'administrateur dont on affirme que le gouvernement fédéral intimé et les autres membres du C.I.E. étaient responsables.

Les appelantes ont intenté une action contre l'intimée en Cour suprême de l'Ontario, réclamant des dommages‑intérêts pour sa conduite préjudiciable et la violation de ses obligations contractuelles et de son devoir de fiduciaire. Les appelantes ont porté leur action devant cette cour pour sauvegarder leur droit de présenter d'autres réclamations dans la même action contre d'autres défendeurs éventuels.

La Couronne a demandé par requête le rejet de l'action, pour défaut de compétence de la Cour suprême de l'Ontario. L'intimée prétend que les réclamations de cette nature relèvent de la compétence exclusive conférée à la Cour fédérale du Canada par les par. 17(1) et (2) de la Loi sur la Cour fédérale, S.R.C. 1970 (2e supp.), ch. 10, et modifications (maintenant L.R.C. (1985), ch. F‑7) et le par. 7(1) de la Loi sur la responsabilité de la Couronne, S.R.C. 1970, ch. C‑38, et modifications (maintenant Loi sur la responsabilité de l'État, L.R.C. (1985), ch. C‑50, par. 15(1)). D'autre part, les appelantes ont prétendu que ces articles de la Loi sur la Cour fédérale et de la Loi sur la responsabilité de la Couronne portent atteinte au par. 15(1) de la Charte.

Les décisions des juridictions inférieures

Le juge Henry, juge des requêtes, a attentivement examiné la requête. Il a ordonné que l'action soit rejetée. À son avis, les dispositions de la Loi sur la Cour fédérale et de la Loi sur la responsabilité de la Couronne conféraient compétence exclusive à la Cour fédérale. Au sujet de l'argument que les dispositions de ces lois portent atteinte à l'art. 15 de la Charte, il a dit qu'il était lié par l'arrêt de la Cour d'appel de l'Ontario R. v. Stoddart (1987), 37 C.C.C. (3d) 351. À son avis, cet arrêt a décidé que le par. 15(1) de la Charte ne s'appliquait pas aux lois qui régissent les rapports entre la Couronne et les particuliers en matière civile et criminelle parce que la Couronne n'est pas une personne que l'on peut comparer à un particulier aux fins de l'art. 15 de la Charte.

La Cour d'appel a confirmé la décision du juge Henry et approuvé ses motifs.

Les articles contestés de la Loi sur la Cour fédérale et de la Loi sur la responsabilité de la Couronne portent‑ils atteinte aux dispositions de l'art. 15 de la Charte?

À mon avis, la réponse qu'il faut apporter à la première question constitutionnelle formulée par le Juge en chef, règle le pourvoi. Voici comment la question a été formulée:

1.Les paragraphes 17(1) et (2) de la Loi sur la Cour fédérale, S.R.C. 1970 (2e supp.), ch. 10 et ses modifications, et le par. 7(1) de la Loi sur la responsabilité de la Couronne, S.R.C. 1970, ch. C‑38 et ses modifications, sont‑ils compatibles avec l'art. 15 de la Charte canadienne des droits et libertés dans la mesure où ils confèrent à la Cour fédérale compétence exclusive relativement à toutes les réclamations exercées contre la Couronne?

L'historique des recours contre la Couronne

En common law, les tribunaux n'avaient pas compétence pour entendre un recours en justice contre la Couronne. Le pouvoir d'intenter un tel recours provenait uniquement des lois. Il n'est pas nécessaire de faire une étude très approfondie de l'histoire de ces recours. Il suffit de souligner qu'au Royaume‑Uni, la Petitions of Right Act, 1860 (R.-U.), 23 & 24 Vict., ch. 34, a donné un fondement législatif aux recours exercés contre la Couronne. Au Canada, l'Acte des Pétitions de Droit, Canada, que l'on trouve dans les Statuts du Canada 1875, ch. 12, a donné compétence aux cours supérieures provinciales pour entendre les actions portées contre le gouvernement fédéral sous réserve de l'adoption d'une loi habilitante dans la province. L'Acte des Pétitions de Droit, Canada, 1875, fut abrogé l'année suivante par l'Acte des Pétitions de Droit, 1876, S.C. 1876, ch. 27, qui a conféré à la Cour de l'Échiquier la compétence exclusive pour entendre des pétitions de droit portées contre la Couronne du chef du Canada. Il ne fait pas de doute que, sans l'adoption de ces dispositions, aucune cour n'avait compétence pour entendre une action en dommages‑intérêts exercée contre la Couronne du chef du Canada.

Il est incontestable que seul le Parlement du Canada pouvait édicter des lois autorisant l'exercice de recours en justice contre la Couronne du chef du Canada. Seul le Parlement peut légiférer pour décider de la cour devant laquelle ces demandes peuvent être portées. Les dispositions contestées de la Loi sur la Cour fédérale ont été édictées en 1970. Elles prévoient que ces actions sont portées exclusivement devant la Cour fédérale plutôt que devant les cours supérieures provinciales. Les dispositions contestées ne tentent pas de limiter ou de restreindre les droits de quelque façon que ce soit; elles confèrent plutôt des droits qui n'existaient pas en common law et désignent le tribunal devant lequel ils peuvent être exercés. C'est le contexte historique dans lequel les dispositions contestées des lois doivent être examinées.

L'application de l'art. 15 de la Charte

Le paragraphe 15(1) de la Charte prescrit:

15. (1) La loi ne fait acception de personne et s'applique également à tous, et tous ont droit à la même protection et au même bénéfice de la loi, indépendamment de toute discrimination, notamment des discriminations fondées sur la race, l'origine nationale ou ethnique, la couleur, la religion, le sexe, l'âge ou les déficiences mentales ou physiques.

Le juge McIntyre a établi la manière dont un tribunal doit aborder une allégation de violation du par. 15(1), dans l'arrêt Andrews c. Law Society of British Columbia, [1989] 1 R.C.S. 143. Il a dit clairement que le plaignant qui invoque l'art. 15 doit démontrer "non seulement qu'il ne bénéficie pas d'un traitement égal devant la loi et dans la loi, ou encore que la loi a un effet particulier sur lui en ce qui concerne la protection ou le bénéfice qu'elle offre, mais encore que la loi a un effet discriminatoire sur le plan législatif". Les appelantes n'ont satisfait à aucune de ces exigences.

En ce qui concerne la question de savoir si les appelantes ont subi un traitement inégal, il doit être clair que la Couronne ne peut être comparée à une personne. La Couronne représente l'État. Elle est le moyen par lequel se manifeste la dimension fédérale de notre société canadienne. Elle doit représenter les intérêts de tous les membres de la société canadienne dans les recours en justice exercés contre la Couronne du chef du Canada. Les droits et obligations de la Couronne sont très différents de ceux des particuliers qui intentent des actions contre le gouvernement fédéral.

À mon avis, le juge Henry a correctement appliqué l'arrêt R. v. Stoddart, précité. Je souscris à ce que dit le juge Tarnopolsky au nom de la Cour d'appel dans cet arrêt, aux pp. 362 et 363:

[TRADUCTION] La Couronne n'est pas une "personne physique" avec laquelle une comparaison peut être faite pour déterminer s'il y a violation du par. 15(1).

. . .

. . . le procureur de la Couronne n'agit pas dans un procès criminel à titre de "personne physique". Il agit comme mandataire de la Couronne, laquelle représente à son tour l'État, c.‑à‑d. une société organisée. Il convient de rappeler que l'Oxford English Dictionary définit le terme "individual" comme "a single human being" [un être humain] par opposition à la "société". Par conséquent, l'accusé en tant que "personne physique" ou "individual" ne peut être comparé avec le procureur de la Couronne en tant que mandataire de notre société organisée, aux fins d'un examen fondé sur le par. 15(1).

Ce principe s'applique tout autant aux faits de l'espèce et permet de disposer du pourvoi. Compte tenu des circonstances de l'espèce, la Couronne n'est tout simplement pas une personne physique avec laquelle une comparaison peut être faite pour déterminer s'il y a eu violation du par. 15(1).

Il n'est pas nécessaire pour les fins du présent pourvoi d'examiner les autres conclusions du juge Henry, selon lesquelles la Couronne ne peut jamais être comparée avec des personnes en vertu du par. 15(1) de la Charte dans le contexte des lois régissant les rapports entre la Couronne et les particuliers en matière civile. On pourrait concevoir des cas où les activités de la Couronne ne pourraient être distinguées de celles d'une autre partie se livrant à des activités commerciales. Il se pourrait que, dans ces circonstances, une comparaison en vertu du par. 15(1) soit juste et appropriée, mais il conviendra de s'y arrêter à un autre moment.

Quoi qu'il en soit, je suis convaincu qu'en l'espèce, la Couronne agissait clairement et exclusivement en sa qualité de gouvernement comme membre du Conseil international de l'étain. Elle ne pouvait d'ailleurs être membre du Conseil qu'en tant que gouvernement du Canada. Le but poursuivi par les 22 États et la Communauté européenne en agissant ensemble n'était pas simplement d'acheter et de vendre de l'étain, mais plutôt [TRADUCTION] "de soutenir le cours de l'étain en en achetant sur les marchés organisés en vue de maintenir le cours de l'étain au‑dessus du seuil minimal fixé". En adhérant à cet accord international conclu en vue de maintenir le prix d'un important produit d'exportation canadien, la Couronne ne peut être considérée autrement qu'agissant à titre de gouvernement du Canada. Dans ces circonstances, il ne peut être question d'inégalité de traitement entre la Couronne et les appelantes au sens du par. 15(1) de la Charte.

Les appelantes n'ont pas démontré non plus que l'inégalité, si elle existait, était discriminatoire. Les dispositions législatives contestées qui confèrent à la Cour fédérale compétence exclusive pour entendre des demandes contre la Couronne du chef du Canada n'établissent pas de distinction entre des catégories de personnes pour des motifs énumérés au par. 15(1) ou des motifs analogues. On ne peut certainement pas affirmer que les personnes qui intentent une action contre la Couronne fédérale constituent, selon les propos du juge Wilson dans l'arrêt R. c. Turpin, [1989] 1 R.C.S. 1296, à la p. 1333, une "minorité discrète et isolée" ou "un groupe défavorisé dans la société canadienne au sens de l'art. 15". Au contraire, elles forment un groupe disparate dont le seul point commun est d'exercer une réclamation contre la Couronne devant un tribunal. Voir également le Renvoi relatif à la Workers' Compensation Act, 1983 (T.‑N.), [1989] 1 R.C.S. 922.

À mon avis, les dispositions contestées de la Loi sur la Cour fédérale et de la Loi sur la responsabilité de la Couronne ne portent pas atteinte au par. 15(1) de la Charte.

Compte tenu de cette conclusion, il n'est ni nécessaire ni souhaitable d'examiner la prétention de l'intimée qu'une société n'a pas qualité pour invoquer l'art. 15 de la Charte. Cette question peut fort bien faire l'objet d'un débat ultérieur. La prudence à laquelle nous invite sagement le juge Estey dans l'arrêt Law Society of Upper Canada c. Skapinker, [1984] 1 R.C.S. 357, s'applique bien à l'espèce. Il a écrit, à la page 383:

L'évolution de la Charte dans notre droit constitutionnel doit nécessairement se faire avec prudence. Lorsque les questions soulevées n'exigent pas de commentaires sur ces nouvelles dispositions de la Charte, il vaut mieux ne pas en faire.

Avant de terminer, je dois signaler que j'éprouve de la sympathie pour l'appelante qui s'est trouvée dans une situation difficile sans aucune faute de sa part. Il ne fait pas de doute que les dispositions contestées de la Loi sur la Cour fédérale et de la Loi sur la responsabilité de la Couronne peuvent entraîner pour les parties des difficultés et des délais inutiles ainsi que des dépenses supplémentaires inutiles. En fait, le Parlement l'a reconnu lorsqu'il a adopté en deuxième lecture, le 1er novembre 1989, le projet de loi C‑38. Ce projet de loi reconnaîtrait la compétence concurrente de la Cour fédérale et des cours supérieures provinciales dans les actions exercées contre la Couronne fédérale.

Dispositif

En définitive, je suis d'avis de rejeter le pourvoi, mais sans adjudication de dépens, et de répondre aux questions constitutionnelles de la façon suivante:

1.Les paragraphes 17(1) et (2) de la Loi sur la Cour fédérale, S.R.C. 1970 (2e supp.), ch. 10 et ses modifications, et le par. 7(1) de la Loi sur la responsabilité de la Couronne, S.R.C. 1970, ch. C‑38 et ses modifications, sont‑ils compatibles avec l'art. 15 de la Charte canadienne des droits et libertés dans la mesure où ils confèrent à la Cour fédérale compétence exclusive relativement à toutes les réclamations exercées contre la Couronne?

Réponse: Oui.

2.Si les par. 17(1) et (2) de la Loi sur la Cour fédérale, S.R.C. 1970 (2e supp.), ch. 10 et ses modifications, et le par. 7(1) de la Loi sur la responsabilité de la Couronne, S.R.C. 1970, ch. C‑38 et ses modifications, ou l'un ou l'autre de ceux‑ci, sont incompatibles avec l'art. 15 de la Charte canadienne des droits et libertés, constituent‑ils une limite raisonnable au sens de l'article premier de la Charte?

Réponse: Il n'est pas nécessaire de répondre à cette question.

Pourvoi rejeté.

Procureurs des appelantes: McCarthy & McCarthy, Toronto.

Procureur de l'intimée: Le ministère de la Justice, Ottawa.

Procureur de l'intervenant le procureur général de l'Ontario: Robert E. Charney, Toronto.

Procureur de l'intervenant le procureur général du Québec: Le ministère de la Justice, Québec.

Procureur de l'intervenant le procureur général de l'Alberta: Richard F. Taylor, Edmonton.


Synthèse
Référence neutre : [1990] 1 R.C.S. 695 ?
Date de la décision : 29/03/1990
Sens de l'arrêt : Le pourvoi est rejeté

Analyses

Droit constitutionnel - Charte des droits - Égalité devant la loi - Poursuite contre la Couronne - Loi fédérale conférant compétence exclusive à la Cour fédérale relativement à toutes les réclamations contre la Couronne du chef du Canada - La Loi fédérale porte‑t‑elle atteinte à l'art. 15(1) de la Charte canadienne des droits et libertés? - Le terme "personne" à l'art. 15(1) comprend‑il la Couronne? - Loi sur la Cour fédérale, S.R.C. 1970 (2e supp.), ch. 10, art. 17(1), (2) - Loi sur la responsabilité de la Couronne, S.R.C. 1970, ch. C‑38, art. 7(1).

Tribunaux - Cour fédérale - Compétence - Poursuite contre la Couronne - Loi fédérale conférant compétence exclusive à la Cour fédérale relativement à toutes les réclamations portées contre la Couronne du chef du Canada - La loi fédérale porte‑t‑elle atteinte au droit à l'égalité devant la loi prévu par la Charte? - Charte canadienne des droits et libertés, art. 15(1) - Loi sur la Cour fédérale, S.R.C. 1970 (2e supp.), ch. 10, art. 17(1), (2) - Loi sur la responsabilité de la Couronne, S.R.C. 1970, ch. C‑38, art. 7(1).

Les appelantes ont intenté une action en Cour suprême de l'Ontario contre la Couronne du chef du Canada. La Couronne a demandé par requête le rejet de l'action pour défaut de compétence de la Cour suprême de l'Ontario. Le juge des requêtes a conclu que les par. 17(1) et (2) de la Loi sur la Cour fédérale et le par. 7(1) de la Loi sur la responsabilité de la Couronne conféraient compétence exclusive à la Cour fédérale; il a rejeté l'argument des appelantes que ces dispositions portaient atteinte à l'art. 15 de la Charte canadienne des droits et libertés et a rejeté l'action. La Cour d'appel de l'Ontario a confirmé cette décision. Le pourvoi a pour but de déterminer si les par. 17(1) et (2) de la Loi sur la Cour fédérale et le par. 7(1) de la Loi sur la responsabilité de la Couronne portent atteinte à l'art. 15 de la Charte.

Arrêt: Le pourvoi est rejeté.

Les dispositions contestées de la Loi sur la Cour fédérale et de la Loi sur la responsabilité de la Couronne ne portent pas atteinte au par. 15(1) de la Charte. Les appelantes n'ont pas établi qu'elles ont subi un traitement inégal. La Couronne ne peut être comparée à une personne. La Couronne représente l'État et la dimension fédérale de notre société canadienne. Elle doit représenter l'intérêt de tous les membres de la société canadienne dans les recours exercés contre la Couronne du chef du Canada. Les droits et obligations de la Couronne sont très différents de ceux des particuliers qui intentent des actions contre le gouvernement fédéral. Compte tenu des circonstances de l'espèce, la Couronne n'est tout simplement pas une personne physique avec laquelle une comparaison peut être faite pour déterminer s'il y a eu violation du par. 15(1). En outre, les appelantes n'ont pas démontré que l'inégalité, si elle existait, était discriminatoire. Les dispositions législatives contestées, qui confèrent à la Cour fédérale compétence exclusive pour entendre des demandes contre la Couronne du chef du Canada, n'établissent pas de distinctions entre des catégories de personnes pour des motifs énumérés au par. 15(1). Les personnes qui intentent une action contre la Couronne fédérale ne sont pas un groupe défavorisé dans la société canadienne au sens de l'art. 15. Au contraire, elles forment un groupe disparate dont le seul intérêt commun est d'exercer une réclamation contre la Couronne devant un tribunal.


Parties
Demandeurs : Rudolph wolff & co.
Défendeurs : Canada

Références :

Jurisprudence
Arrêt appliqué: R. v. Stoddart (1987), 37 C.C.C. (3d) 351
arrêts mentionnés: Andrews c. Law Society of British Columbia, [1989] 1 R.C.S. 143
R. c. Turpin, [1989] 1 R.C.S. 1296
Renvoi relatif à la Workers' Compensation Act, 1983 (T.‑N.), [1989] 1 R.C.S. 922
Law Society of Upper Canada c. Skapinker, [1984] 1 R.C.S. 357.
Lois et règlements cités
Acte des Pétitions de Droit, 1876, S.C. 1876, ch. 27.
Acte des Pétitions de Droit, Canada, 1875, S.C. 1875, ch. 12.
Charte canadienne des droits et libertés, art. 1, 15(1).
Loi sur la Cour fédérale, S.R.C. 1970 (2e supp.), ch. 10, art. 17(1), (2).
Loi sur la responsabilité de la Couronne, S.R.C. 1970, ch. C‑38, art. 7(1).
Petitions of Right Act, 1860 (R.‑U.), 23 & 24 Vict., ch. 34.

Proposition de citation de la décision: Rudolph wolff & co. c. Canada, [1990] 1 R.C.S. 695 (29 mars 1990)


Origine de la décision
Date de l'import : 06/04/2012
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ca;cour.supreme;arret;1990-03-29;.1990..1.r.c.s..695 ?
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