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29/05/1997 | CANADA | N°[1997]_2_R.C.S._294

Canada | Société canadienne des postes c. Syndicat des postiers du Canada, [1997] 2 R.C.S. 294 (29 mai 1997)


Société canadienne des postes c. Syndicat des postiers du Canada, [1997] 2 R.C.S. 294

Syndicat des postiers du Canada Appelant

c.

Société canadienne des postes Intimée

et

Rodrigue Blouin Mis en cause

Répertorié: Société canadienne des postes c. Syndicat des postiers du Canada

No du greffe: 25093.

1997: 12 février; 1997: 29 mai.

Présents: Le juge en chef Lamer et les juges La Forest, L’Heureux‑Dubé, Gonthier et McLachlin.

en appel de la cour d’appel du québec

POURVOI contre un arrêt de la Cour d’a

ppel du Québec, [1995] A.Q. no 885 (QL), J.E. 96‑22, qui a accueilli la requête de l’intimée visant à faire déclarer l’appel non désert...

Société canadienne des postes c. Syndicat des postiers du Canada, [1997] 2 R.C.S. 294

Syndicat des postiers du Canada Appelant

c.

Société canadienne des postes Intimée

et

Rodrigue Blouin Mis en cause

Répertorié: Société canadienne des postes c. Syndicat des postiers du Canada

No du greffe: 25093.

1997: 12 février; 1997: 29 mai.

Présents: Le juge en chef Lamer et les juges La Forest, L’Heureux‑Dubé, Gonthier et McLachlin.

en appel de la cour d’appel du québec

POURVOI contre un arrêt de la Cour d’appel du Québec, [1995] A.Q. no 885 (QL), J.E. 96‑22, qui a accueilli la requête de l’intimée visant à faire déclarer l’appel non déserté et à prolonger le délai de production d’un mémoire. Pourvoi accueilli.

Paul Lesage et Normand Beaulieu, pour l’appelant.

Jacques Reeves, pour l’intimée.

Le jugement de la Cour a été rendu par

1 Le juge Gonthier -- Le présent pourvoi soulève la même question juridique que la décision Construction Gilles Paquette ltée c. Entreprises Végo ltée, [1997] 2 R.C.S. 299, entendue et rendue en même temps que la présente affaire.

I - Les faits

2 L’intimée présente en Cour supérieure une requête en révision judiciaire d’une sentence arbitrale prononcée par le mis en cause. Le 22 février 1995, madame le juge Trahan de la Cour supérieure accorde en partie la requête de l’intimée: D.T.E. 95T-746, [1995] A.Q. no 637 (QL). Celle-ci inscrit cette décision en appel le 21 mars 1995. Quelques jours plus tard, l’appelant forme un appel incident dont la conformité n’est pas en cause dans la présente affaire. L’intimée omet de signifier et produire son mémoire dans le délai prescrit à l’art. 503 du Code de procédure civile, L.R.Q., ch. C-25 («C.p.c.»), si bien que son appel est réputé déserté, conformément à l’art. 503.1 C.p.c. Le 9 août 1995, le greffier de la Cour d’appel constate le défaut et délivre un certificat attestant que l’appel est déserté. Le 15 août 1995, l’avocat de l’intimée prend connaissance du certificat. Il dépose alors une requête afin, d’une part, que la Cour d’appel déclare l’appel non déserté et, d’autre part, qu’elle prolonge le délai de signification et production de son mémoire.

3 Devant la Cour d’appel, l’avocat de l’intimée plaide qu’il connaissait les nouvelles exigences du Code de procédure civile, mais qu’il a confondu les dates. Il avait, durant cette période, deux autres affaires devant la Cour d’appel impliquant les mêmes parties que celles en cause dans la présente affaire, mais dont les dates différaient légèrement. Le 21 novembre 1995, la Cour d’appel accueille la requête de l’intimée: J.E. 96-22, [1995] A.Q. no 885 (QL).

II - La décision de la Cour d’appel, J.E. 96-22

Le juge Bisson

4 Le juge Bisson conclut qu’en vertu de l’art. 523 C.p.c. la Cour d’appel a compétence pour mettre de côté la désertion imposée par l’art. 503.1 C.p.c.: d’une part, parce que l’art. 503.1 C.p.c. n’édicte pas une déchéance du droit d’appel et, d’autre part, en raison des larges pouvoirs accordés à la Cour d’appel à l’art. 523 C.p.c. Il décide qu’il s’agit d’un cas où la Cour d’appel doit exercer sa discrétion. Le procureur de l’intimée n’a commis qu’une erreur technique qui n’a causé aucun préjudice à l’appelant. En outre, une fois l’erreur constatée, il a fait preuve de diligence afin d’y remédier.

Le juge Fish

5 Le juge Fish souscrit à la conclusion du juge Bisson, mais en appliquant au cas présent les principes qu’il avait énoncés dans l’affaire D’Aragon & Associés inc. c. Gravel, [1996] R.D.J. 33. Dans cette affaire, le juge Fish a conclu que la Cour d’appel a compétence pour relever des effets de la désertion imposée par l’art. 503.1 C.p.c. en vertu de son large pouvoir discrétionnaire de rendre toutes ordonnances propres à sauvegarder les droits des parties prévu à l’art. 523 C.p.c.

Le juge Forget (ad hoc)

6 Le juge Forget souscrit à l’opinion du juge Bisson puisqu’il s’estime lié par la décision de la Cour d’appel Construction Gilles Paquette ltée c. Entreprises Végo ltée, [1995] R.J.Q. 2853.

III - Analyse

7 Pour les motifs énoncés par notre Cour dans l’arrêt Construction Gilles Paquette ltée, précité, je conclus qu’il doit être remédié à la désertion d’appel en vertu du pouvoir général de la Cour d’appel prévu à l’al. 2 de l’art. 523 C.p.c. Comme le souligne le juge Bisson dans ses motifs, l’erreur commise par l’avocat de l’intimée n’est que technique et il est possible d’y remédier afin de sauvegarder les droits de l’intimée et ce, sans porter préjudice à l’appelant (à la p. 10 du texte intégral):

J’estime toutefois que l’erreur technique n’est pas fatale et qu’elle n’a causé aucun préjudice au Syndicat-intimé, d’autant plus que ce dernier a interjeté un appel incident qui sera éventuellement entendu et où le syndicat lui-même remet en cause une partie du jugement entrepris.

En outre, on ne prétend pas que l’appel soit futile, abusif ou dilatoire. Enfin, une fois informée de la désertion d’appel, l’intimée a agi avec diligence pour y remédier.

IV - Dispositif

8 Dans le jugement dont appel, le juge Bisson rend l’ordonnance suivante, à la p. 11:

Je donnerais à l’appelante [la Société canadienne des postes] la permission spéciale prévue à l’article 523 C.p.c., confirmerais la validité de la signification et de la production de l’inscription en appel, ferais de même pour les procédures subséquentes et autoriserais l’appelante à produire son mémoire au plus tard quinze jours après le dépôt du jugement sur la présente requête.

Comme je conclus dans l’arrêt Construction Gilles Paquette ltée, précité, qu’il n’est pas nécessaire d’accorder une permission spéciale d’appeler pour remédier à la désertion d’appel imposée à l’art. 503.1 C.p.c., je suis d’avis d’accueillir le présent pourvoi et d’infirmer le jugement de la Cour d’appel à la seule fin de rectifier l’ordonnance, d’ordonner la remise en état de l’appel et d’autoriser l’intimée à signifier à la partie adverse et à produire au greffe de la Cour d’appel du Québec son mémoire dans les 15 jours du présent jugement, le tout avec dépens en faveur de l’intimée.

Pourvoi accueilli avec dépens en faveur de l’intimée.

Procureurs de l’appelant: Trudel, Nadeau, Lesage, Larivière & Associés, Montréal.

Procureurs de l’intimée: Beauvais, Truchon & Associés, Québec.


Sens de l'arrêt : Le pourvoi est accueilli. le jugement de la cour d’appel est infirmé à la seule fin de modifier son ordonnance

Analyses

Procédure civile - Appel -- Désertion d’appel - La Cour d’appel a‑t‑elle compétence pour remédier à la désertion d’appel? - Code de procédure civile, L.R.Q., ch. C‑25, art. 503.1, 523.

Après avoir inscrit en appel un jugement de la Cour supérieure, l’intimée a omis de signifier et de produire son mémoire dans le délai prescrit à l’art. 503 C.p.c., si bien que, conformément à l’art. 503.1 C.p.c., son appel a été réputé déserté. Le greffier de la Cour d’appel a constaté le défaut et délivré un certificat attestant que l’appel est déserté. Quelques jours plus tard, l’avocat de l’intimée a pris connaissance du certificat et déposé une requête afin que la Cour d’appel déclare l’appel non déserté et qu’elle proroge le délai de signification et production de son mémoire. Devant la Cour d’appel, l’avocat de l’intimée a plaidé qu’il connaissait les exigences du Code de procédure civile, mais qu’il a confondu les dates puisqu’il avait à l’époque deux autres affaires devant la Cour d’appel impliquant les mêmes parties. La Cour d’appel a accueilli la requête et accordé à l’intimée la permission spéciale d’appeler prévue à l’art. 523 C.p.c.

Arrêt: Le pourvoi est accueilli. Le jugement de la Cour d’appel est infirmé à la seule fin de modifier son ordonnance.

Pour les motifs énoncés dans l’arrêt Construction Gilles Paquette ltée c. Entreprises Végo ltée, [1997] 2 R.C.S. 299, il doit être remédié à la désertion d’appel en vertu du pouvoir général de la Cour d’appel prévu à l’al. 2 de l’art. 523 C.p.c. L’erreur commise par l’avocat de l’intimée n’est que technique et il est possible d’y remédier afin de sauvegarder les droits de l’intimée, et ce, sans porter préjudice à l’appelant. En outre, on ne prétend pas que l’appel est futile, abusif ou dilatoire. Enfin, une fois informée de la désertion d’appel, l’intimée a agi avec diligence pour y remédier. Il n’est toutefois pas nécessaire d’accorder la permission spéciale d’appeler prévue à l’art. 523 pour remédier à la désertion d’appel. Il suffit d’ordonner la remise en état de l’appel.


Parties
Demandeurs : Société canadienne des postes
Défendeurs : Syndicat des postiers du Canada

Références :

Jurisprudence
Arrêt suivi: Construction Gilles Paquette ltée c. Entreprises Végo ltée, [1997] 2 R.C.S. 299, inf. [1995] R.J.Q. 2853
arrêt mentionné: D’Aragon & Associés inc. c. Gravel, [1996] R.D.J. 33.
Lois et règlements cités
Code de procédure civile, L.R.Q., ch. C‑25, art. 503 [rempl. 1982, ch. 32, art. 39
mod. 1993, ch. 30, art. 12] , 503.1 [aj. 1993, ch. 30, art. 13
rempl. 1995, ch. 2, art. 5], 523 [mod. 1985, ch. 29, art. 11
mod. 1992, ch. 57, art. 422].

Proposition de citation de la décision: Société canadienne des postes c. Syndicat des postiers du Canada, [1997] 2 R.C.S. 294 (29 mai 1997)


Origine de la décision
Date de la décision : 29/05/1997
Date de l'import : 06/04/2012

Numérotation
Référence neutre : [1997] 2 R.C.S. 294 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ca;cour.supreme;arret;1997-05-29;.1997..2.r.c.s..294 ?
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