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18/12/1997 | CANADA | N°[1997]_3_R.C.S._1183

Canada | R. c. F. (C.C.), [1997] 3 R.C.S. 1183 (18 décembre 1997)


R. c. F. (C.C.), [1997] 3 R.C.S. 1183

Sa Majesté la Reine Appelante

c.

C.C.F. Intimé

Répertorié: R. c. F. (C.C.)

No du greffe: 25198.

Audition et jugement: 16 octobre 1997.

Motifs déposés: 18 décembre 1997.

Présents: Les juges Sopinka*, Cory, McLachlin, Iacobucci et Major.

en appel de la cour d’appel de l’ontario

POURVOI contre un arrêt de la Cour d’appel de l’Ontario (1996), 88 O.A.C. 397, [1996] O.J. No. 379 (QL), qui a infirmé la déclaration de culpabilité prononcée par le juge Lane. Pourvoi accueilli

.

Christine Bartlett‑Hughes, pour l’appelante.

Christopher Hicks, pour l’intimé.

//Le juge Cory//

Version française du jugem...

R. c. F. (C.C.), [1997] 3 R.C.S. 1183

Sa Majesté la Reine Appelante

c.

C.C.F. Intimé

Répertorié: R. c. F. (C.C.)

No du greffe: 25198.

Audition et jugement: 16 octobre 1997.

Motifs déposés: 18 décembre 1997.

Présents: Les juges Sopinka*, Cory, McLachlin, Iacobucci et Major.

en appel de la cour d’appel de l’ontario

POURVOI contre un arrêt de la Cour d’appel de l’Ontario (1996), 88 O.A.C. 397, [1996] O.J. No. 379 (QL), qui a infirmé la déclaration de culpabilité prononcée par le juge Lane. Pourvoi accueilli.

Christine Bartlett‑Hughes, pour l’appelante.

Christopher Hicks, pour l’intimé.

//Le juge Cory//

Version française du jugement de la Cour rendu par

1 Le juge Cory -- L’article 715.1 du Code criminel, L.R.C. (1985), ch. C-46, indique qu’un enregistrement magnétoscopique réalisé dans un délai raisonnable après la perpétration de l'infraction est admissible en preuve si le jeune plaignant confirme dans son témoignage le contenu de l'enregistrement. Les cours d’appel de l’Alberta et de l’Ontario ont donné un sens différent au mot «adopted» («confirme»). La première question qui doit être tranchée dans le présent pourvoi est la question primordiale de savoir ce qui constitue la confirmation d’une déclaration faite dans un enregistrement magnétoscopique. La seconde question concerne l’effet d’une déposition ultérieure contradictoire du plaignant sur l’admissibilité en preuve de l’enregistrement.

Les faits

2 L’intimé a été déclaré coupable d’avoir commis des attouchements sur sa fille à des fins d’ordre sexuel. Au moment de l’infraction, la petite fille n’avait que six ans. À cette époque, la plaignante vivait avec sa mère et son jeune frère. L’intimé vivait séparé de la mère de la plaignante depuis quelques années.

3 Le soir de l’incident, l’intimé s’est rendu chez la mère de la plaignante dans le but de se réconcilier avec elle, mais ses offres ont été rejetées. Plus tard, comme il l’avait fait à d’autres occasions, l’intimé est allé se coucher dans le lit de la plaignante. Le lendemain matin, celle-ci a dit à sa mère que l’intimé l’avait touchée aux «parties» pendant qu’il était au lit avec elle. Le même soir, les policiers ont parlé avec la plaignante et sa mère et ils les ont emmenées au poste de police. Les policiers ont fait une première entrevue avec la plaignante et ont ensuite enregistré sa déclaration sur bande magnétoscopique.

4 Dans cette déclaration enregistrée, S.D. (la plaignante) a dit à l’agent de police que, le soir précédent, elle était au lit avec sa mère et dormait quand l’intimé, frappant à grands coups dans la porte, les a réveillées. Elle a affirmé que sa mère a quitté la chambre et que l’intimé s’est couché avec elle dans son lit. S.D. a dit que l’intimé l’avait touchée [traduction] «par là, à l’intérieur», et elle a fait un geste indiquant ses organes génitaux. Elle a aussi dit que, même si aucun d’eux ne disait quoi que ce soit, elle savait que son père était éveillé parce qu’elle l’avait vu éveillé. Elle a affirmé que l’intimé était en sous‑vêtements. Lorsqu’on lui a demandé de quelle façon ils étaient étendus dans le lit, S.D. a dit qu’elle était couchée sur le côté et que son père était sur le dos. Elle a également souscrit à la suggestion du policier que, après l’avoir touchée, l’intimé avait touché ses propres organes génitaux.

5 Au procès, après l’interrogatoire principal de la plaignante, on lui a montré l’enregistrement magnétoscopique de sa déclaration. La plaignante a dit que c’était bien elle qu’on voyait sur la bande, et elle a confirmé qu’elle avait fait les déclarations contenues dans l’enregistrement et que celles-ci étaient vraies. Le juge du procès a statué que la plaignante avait confirmé la déclaration enregistrée et a admis cette déclaration en preuve conformément à l’art. 715.1 du Code. Au cours du contre‑interrogatoire, la plaignante a fait des déclarations contredisant en partie celles enregistrées sur la bande magnétoscopique. Par exemple, elle a témoigné que l’intimé portait un pantalon et une chemise au lit et qu’elle ne pouvait pas dire si celui-ci était éveillé ou endormi lorsqu’il l’a touchée.

6 Le juge Lane, de la Cour de l’Ontario (Division provinciale) a déclaré l’intimé coupable et l’a condamné à 15 mois de prison. La Cour d’appel de l’Ontario (1996), 88 O.A.C. 397, a infirmé cette décision et a ordonné la tenue d’un nouveau procès, à la discrétion du ministère public. Le ministère public a obtenu l’autorisation de se pourvoir devant notre Cour, [1996] 3 R.C.S. xii.

7 Dans le présent pourvoi, au terme de l’argumentation orale, l’arrêt de la Cour d’appel a été infirmé et la décision du juge Lane déclarant l’intimé C.C.F. coupable a été rétablie. La Cour a annoncé que ses motifs suivraient.

La disposition législative pertinente

8 Code criminel, L.R.C. (1985), ch. C‑46, art. 715.1

715.1 Dans des poursuites pour une infraction prévue aux articles 151, 152, 153, 155 ou 159, aux paragraphes 160(2) ou (3) ou aux articles 170, 171, 172, 173, 271, 272 ou 273 et qui aurait été commise à l'encontre d'un plaignant alors âgé de moins de dix‑huit ans, un enregistrement magnétoscopique réalisé dans un délai raisonnable après la perpétration de l'infraction reprochée et montrant le plaignant en train de décrire les faits à l'origine de l'accusation est admissible en preuve si le plaignant confirme dans son témoignage le contenu de l'enregistrement.

Les décisions des juridictions inférieures

Cour de l’Ontario (Division provinciale)

9 Le juge Lane a souligné que les exigences de l’art. 715.1 avaient été respectées et que l’enregistrement magnétoscopique de la déclaration était régulièrement admis en preuve. Ensuite, elle a apprécié le poids qui devait être accordé à cet enregistrement. Elle a soigneusement indiqué qu’il fallait prendre en considération les motifs que pouvait avoir l’enfant de mentir ainsi que la nature des questions posées au cours de l’entrevue enregistrée. Elle a néanmoins accordé un poids considérable à l’enregistrement. Quant aux éléments essentiels de l’infraction qui y est relatée, elle était convaincue que la plaignante avait raconté l’incident d’une manière spontanée en réponse à des questions à réponses libres. La seule question qui paraissait suggestive était celle de savoir si l’intimé avait touché ses propres organes génitaux après avoir touché la plaignante. Le juge Lane a refusé de tirer une conclusion de fait à cet égard. Toutefois, elle a conclu que les faits essentiels de ce qui s’était passé avaient été énoncés dans l’enregistrement magnétoscopique et que, à part certaines incohérences sur des [traduction] «détails secondaires», ces faits concordaient avec le témoignage de la plaignante au procès.

10 En ce qui a trait à la déclaration de S.D. en contre‑interrogatoire selon laquelle l’intimé aurait pu être endormi lorsqu’il l’a touchée, le juge Lane a fait observer que S.D. était très fatiguée et bâillait lorsqu’elle a fait cette déclaration, à la fin d’un contre‑interrogatoire très long et très habile. Néanmoins, lorsqu’on lui a demandé s’il était possible que l’intimé ait pu la toucher par accident, la plaignante a répondu catégoriquement que non. Le juge Lane a aussi retenu la déclaration faite par la plaignante, sur la bande magnétoscopique, relativement aux vêtements que portait l’intimé. Le juge du procès a affirmé qu’elle n’était pas inquiète à propos des incohérences, qui portaient sur des détails secondaires, et elle a conclu qu’il fallait accorder un poids considérable à l’enregistrement.

11 Le juge Lane a souligné que le témoignage rendu de vive voix au procès par S.D. renforçait grandement l’essence de l’infraction décrite initialement dans l’enregistrement magnétoscopique et qu’elle était convaincue hors de tout doute raisonnable quant à l’essence de la plainte. Elle a conclu que le témoignage de S.D. était tout à fait cohérent sur les détails essentiels de l’incident, et que cette cohérence n’avait pas été altérée en dépit d’un contre‑interrogatoire très long et très habile.

12 Elle a déclaré l’intimé coupable et l’a condamné à 15 mois de prison.

Cour d’appel de l’Ontario

13 Dans un bref jugement manuscrit, la Cour d’appel a conclu que l’omission du juge du procès de tenir un voir‑dire n’avait eu aucun effet sur le procès ou son issue. La cour a rejeté l’argument que l’art. 715.1 a pour effet d’exiger que les policiers n’interrogent pas le témoin avant d’enregistrer sa déclaration sur bande magnétoscopique. Bien que la nature de l’interrogatoire puisse être examinée à l’occasion d’un voir‑dire, par mesure d’équité envers l’accusé, il serait déraisonnable de considérer que l’art. 715.1 exige que le témoin n’ait jamais été interrogé avant l’enregistrement magnétoscopique de sa déclaration.

14 Pour ce qui est du témoignage enregistré sur la bande magnétoscopique, la cour a conclu que les différences entre ce que la plaignante avait dit lors de l’enregistrement et sa déposition au procès étaient importantes. La cour a statué que le témoignage enregistré sur bande magnétoscopique, qui a ultérieurement été désavoué, ne pouvait pas être considéré comme ayant été confirmé en sens de l’art. 715.1. Bien que le juge du procès eût pu conclure à la culpabilité en se fondant sur le témoignage sous serment, en dépit des incohérences avec l’enregistrement magnétoscopique, elle avait commis une erreur en concluant à la culpabilité de l’intimé sur la foi de l’enregistrement, y compris les parties de cet enregistrement qui avaient été contredites au procès. Le témoignage contredit a cessé d’être admissible au sens de l’art. 715.1 lorsqu’il a été désavoué en contre‑interrogatoire et, par conséquent, il ne pouvait servir de fondement aux motifs aboutissant à la déclaration de culpabilité.

15 La déclaration de culpabilité a été annulée et un nouveau procès a été ordonné, à la discrétion du ministère public.

Les questions en litige

16 (1) Quelles sont les conditions d’admissibilité des déclarations enregistrées sur bande magnétoscopique visées à l’art. 715.1?

(2) Quel est l’effet d’une incohérence entre le témoignage de vive voix d’un enfant et sa déclaration enregistrée sur bande magnétoscopique?

(3) Un voir‑dire aurait‑il dû être tenu quant à l’admissibilité de la déclaration de la plaignante enregistrée sur bande magnétoscopique?

L’analyse

L’admissibilité des déclarations enregistrées sur bande magnétoscopique visées à l’art. 715.1

17 L’article 715.1 est une exception législative à la règle de l’inadmissibilité du ouï‑dire. Il permet, à certaines conditions, qu’une déclaration extrajudiciaire soit admise en preuve pour établir la véracité de son contenu. Plus précisément, le plaignant doit avoir moins de 18 ans; l’infraction doit faire partie de celles qui y sont énumérées (surtout des infractions à caractère sexuel); l’enregistrement magnétoscopique doit avoir été réalisé dans un délai raisonnable après l’infraction reprochée; le plaignant doit y décrire les faits à l’origine de l’accusation; le plaignant doit confirmer dans son témoignage le contenu de l’enregistrement magnétoscopique.

(i) L’objet de l’art. 715.1

18 L’interprétation d’une loi est toujours facilitée par la prise en considération de son objet. Dans l’arrêt R. c. L. (D.O.), [1993] 4 R.C.S. 419, notre Cour a examiné la validité constitutionnelle de l’art. 715.1 et a statué à l’unanimité que cet article est valide. S’exprimant au nom de six juges de la Cour, le juge en chef Lamer a fait le commentaire suivant quant à l’objet de cet article, à la p. 429:

En permettant l’enregistrement magnétoscopique de témoignages dans certaines conditions précises, non seulement l’art. 715.1 rend la participation au système de justice pénale moins pénible et moins traumatisante pour les enfants et les adolescents, mais encore il favorise la conservation de la preuve et la découverte de la vérité.

19 Il est évident aux yeux de tout parent observateur et de toute personne qui travaille auprès des jeunes que les enfants, encore plus que les adultes, ont un meilleur souvenir d’un événement peu de temps après qu’il se soit produit que ce n’est le cas lorsqu’il s’est écoulé des semaines, des mois voire des années. D’ailleurs, plus l’enfant est jeune, plus cette différence sera marquée. De fait, cette observation ne fait qu’exprimer ce que la plupart des Canadiens sont à même de constater. Il est notoire que les gens, et plus particulièrement les enfants, ont un meilleur souvenir d’un événement peu de temps après celui-ci qu’à mesure que le temps passe. (Voir, par exemple, Rhona Flin et J. R. Spencer, «Do Children Forget Faster?», [1991] Crim. L.R. 189, à la p. 190.) Il s’ensuit qu’un enregistrement magnétoscopique décrivant l’acte, réalisé dans un délai raisonnable après l’infraction reprochée et décrivant les faits à l’origine de l’accusation, reflétera presque inévitablement un souvenir plus précis des événements que ne le fera le témoignage ultérieur au procès. Par conséquent, cet article accroît la capacité du tribunal de découvrir la vérité en préservant un souvenir très frais de l’événement en question.

20 Il y a un autre aspect de cet article qui ne saurait être passé sous silence. Toute forme de voies de fait commise contre un enfant est susceptible de le traumatiser. Les voies de fait d’ordre sexuel risquent encore plus d’avoir des effets nocifs. Le traumatisme sera encore plus grand lorsque l’auteur de l’infraction est le père, la mère, un tuteur ou une autre personne en situation d’autorité. Le souvenir des événements sera extrêmement pénible pour tout enfant et, plus la jeune personne est sensible, plus grandes seront les difficultés qu’elle éprouvera. Il s’ensuit qu’il faut encourager toute mesure qui peut être prise pour atténuer l’effet traumatisant pour l’enfant. Par conséquent, le fait de recueillir une description des événements dans un environnement plus informel et moins sévère qu’une salle d’audience permettra de réduire le risque de préjudice supplémentaire pour l’enfant témoin.

21 On peut donc constater que le but premier de l’article est de permettre de recueillir un compte rendu qui est probablement le meilleur souvenir de l’événement et qui sera d’une aide inestimable dans la recherche de la vérité. De fait, il est possible que ce compte rendu vidéo soit le seul moyen de présenter le témoignage de l’enfant. Par exemple, un enfant qui aurait été agressé à l’âge de trois ou quatre ans peut très bien n’avoir conservé que très peu de souvenirs concrets des événements un an ou deux plus tard, lorsqu’il tente de témoigner au procès. Dans les motifs minoritaires qu’elle a exposés dans L. (D.O.), précité, le juge L’Heureux‑Dubé, a souligné l’importance fondamentale que l’enregistrement magnétoscopique soit déposé devant la cour. À la page 450, elle a déclaré ceci:

L’article 715.1 fait en sorte que le récit de l’enfant soit porté à la connaissance de la cour, indépendamment de la capacité de la jeune victime à accomplir cette pénible tâche.

22 L’article a aussi un objectif subsidiaire important, soit celui de prévenir ou de réduire considérablement le risque de préjudice supplémentaire à l’enfant par suite de sa participation aux procédures judiciaires. Cet objectif sera atteint en réduisant le nombre d’interrogatoires auxquels l’enfant doit se soumettre et, par conséquent, en diminuant le stress qui lui est infligé par des interrogatoires successifs sur un incident douloureux. Qui plus est, l’enregistrement magnétoscopique se fera dans un environnement moins intimidant pour l’enfant qu’une salle d’audience.

23 De nombreux universitaires canadiens ont souligné l’importance des objectifs visés par l’art. 715.1. Par exemple, dans Nicholas Bala et Hilary McCormack, «Accommodating the Criminal Process to Child Witnesses: L. (D.O.) and Levogiannis» (1994), 25 C.R. (4th) 341, à la p. 343, le professeur Bala a affirmé ceci:

[traduction] L’un des objectifs principaux de cette disposition est de faire en sorte que les tribunaux disposent de la description la plus fidèle possible des événements, étant donné qu’un enfant est davantage susceptible d’avoir un souvenir plus précis et plus complet des événements au moment où l’enregistrement magnétoscopique est réalisé, qu’au procès plusieurs mois plus tard. Il y a davantage de chances que les enfants se rappellent complètement et relatent en entier des souvenirs souvent douloureux dans le cadre d’un interrogatoire mené dans une atmosphère relativement détendue plutôt que dans le contexte inhabituel, stressant et sévère du tribunal.

24 Il s’agit là aussi de l’approche qui avait été retenue avant l’entrée en vigueur de l’art. 715.1. Durant la deuxième lecture du projet de loi C‑15, Loi modifiant le Code criminel et la Loi sur la preuve au Canada, l’honorable Bob Kaplan a indiqué que l’art. 715.1 avait notamment pour objectif de permettre de recueillir le récit de l’enfant à un moment où les événements sont encore frais à son esprit. Il a déclaré ce qui suit, à la p. 1040:

[traduction] . . . l’enregistrement magnétoscopique du témoignage du plaignant peu après l’incident rendra compte plus fidèlement du vocabulaire et de la maturité d’un enfant. Il ne faut pas oublier que ce témoignage sera fort différent dans quatre ou cinq ans parce que cet enfant aura vieilli et qu’il comprendra mieux, et le comportement sexuel adulte et sa propre sexualité. Cet argument a suffisamment de poids, en soi, pour justifier l’admissibilité des bandes magnétoscopiques . . .

(Débats de la Chambre des communes, 2e sess., 33e lég., vol. I, 1986, 4 novembre 1986.)

25 Dans la poursuite des mêmes objectifs que ceux visés par les législateurs canadiens, de nombreux États américains ont édicté des lois rendant admissibles dans les procédures pénales l’enregistrement magnétoscopique d’entrevues réalisées avec des enfants. Habituellement, l’admissibilité de l’enregistrement est subordonnée à la condition que l’enfant soit disponible pour être contre‑interrogé au procès. Cette disponibilité est souvent assurée par liaison vidéo. Certains régimes législatifs permettent le recours à la «déposition vidéo» lorsque l’enfant n’est pas disponible pour témoigner au procès. Dans le cadre de ces régimes, l’enregistrement magnétoscopique est réalisé à l’extérieur de la salle d’audience, en présence des avocats et du défendeur. Ce dernier a alors la possibilité de contre‑interroger l’enfant. L’enregistrement est ensuite admis en preuve au procès à la place du témoignage de l’enfant. Cependant, plusieurs États permettent que l’enfant soit assigné comme témoin au procès malgré l’admission en preuve de l’enregistrement magnétoscopique.

26 La première mesure législative de ce type a été édictée au Montana en 1977, dans le but déclaré d’atténuer les traumatismes auxquels sont soumis les jeunes victimes d’exploitation sexuelle au cours de leur passage dans le système de justice pénale (Mike McGrath et Carolyn Clemens, «The Child Victim as a Witness in Sexual Abuse Cases» (1985), 46 Mont. L. Rev. 229, à la p. 230). En 1994, 37 États autorisaient le témoignage d’enfants par enregistrement magnétoscopique dans les cas d’exploitation sexuelle d’enfants, et 30 États permettaient aux enfants dont on alléguait qu’ils avaient été victimes d’exploitation de témoigner par l’entremise d’un système de télévision en circuit fermé unidirectionnelle ou bidirectionnelle. Voir Diana B. Lathi, «Sex Abuse, Accusations of Lies, and Videotaped Testimony: A Proposal for a Federal Hearsay Exception in Child Sexual Abuse Cases» (1997), 68 U. Colo. L. Rev. 507, à la p. 531 (note 126).

27 La validité d’un grand nombre de ces lois a été contestée par des défendeurs pour le motif qu’elles violaient le droit constitutionnel que leur garantit le Sixième amendement, soit celui de confronter leurs accusateurs. Toutefois, dans la plupart des cas, les tribunaux ont confirmé la validité de ces mesures nouvelles en raison de la détresse émotionnelle considérable que ces confrontations directes peuvent causer aux enfants, détresse qui à son tour affecte leur capacité de témoigner et, par conséquent, entrave le processus de recherche de la vérité. Voir Lathi, loc. cit., à la p. 531.

28 Les motifs avancés devant les tribunaux des États‑Unis pour étayer l’utilisation de déclarations enregistrées sur bande magnétoscopique se reflètent dans ceux avancés au Canada par les tribunaux et les auteurs universitaires. Premièrement, l’enregistrement magnétoscopique des déclarations peut réduire le nombre d’interrogatoires préalables auxquels l’enfant pourrait avoir à se soumettre avant le procès. Deuxièmement, l’enregistrement des déclarations atténue le risque de préjudice supplémentaire à l’enfant, à tout le moins en diminuant le stress au procès. Troisièmement, l’enregistrement magnétoscopique des déclarations peut accroître la fidélité du témoignage, étant donné que l’enfant est susceptible de se sentir plus à l’aise et d’être plus ouvert dans le cadre dans lequel l’enregistrement est réalisé. Quatrièmement, l’admission en preuve de l’enregistrement peut avoir pour effet d’inciter le défendeur à plaider coupable et ainsi éliminer complètement le besoin de faire témoigner l’enfant en cour. Finalement, l’enregistrement magnétoscopique de la déclaration permet de conserver un récit des événements allégués, qui est recueilli tôt après les faits et qui montre également les gestes et les expressions du visage de l’enfant pendant qu’il fait cette déclaration initiale (Nancy Walker Perry et Bradley D. McAuliff, «The Use of Videotaped Child Testimony: Public Policy Implications» (1993), 7 Notre Dame J.L. Ethics & Pub. Pol’y 387). Comme l’affirment ces auteurs, à la p. 420:

[traduction] L’environnement habituel des salles d’audience est particulièrement susceptible de causer un traumatisme aux enfants témoins; cet environnement est également susceptible de diminuer leur capacité de communiquer. Dans de telles circonstances, le fait de ne pas autoriser l’utilisation de dépositions enregistrées sur bande magnétoscopique dans les affaires où des enfants sont des témoins pourrait nuire aux tribunaux dans la recherche de la vérité.

29 Aux États‑Unis, l’expérience souligne et confirme les deux objectifs principaux de l’art. 715.1. Premièrement, cette disposition aide les tribunaux dans leur rôle fondamental de recherche de la vérité. Deuxièmement, elle réduit le risque que les enfants subissent un préjudice supplémentaire par suite de leur participation au processus pénal. En gardant ces objectifs à l’esprit, il faut se demander quel est le critère approprié pour décider si un enfant a confirmé la déclaration enregistrée.

(ii) Le critère de confirmation

30 Aux termes de l’art. 715.1, l’enregistrement magnétoscopique d’une déclaration est admissible en preuve si le plaignant «confirme [. . .] le contenu de l'enregistrement» dans son témoignage. Quel sens faut‑il donner à cette expression?

31 Il s’est établi, en droit de la preuve, des lignes directrices générales permettant de décider si un témoin a confirmé une déclaration antérieure incompatible. À l’origine, les déclarations antérieures incompatibles n’étaient admises en preuve que pour attaquer la crédibilité du témoin, même dans les cas où ce témoin en confirmait la véracité. Cependant, avec le temps, la règle a été élargie. Si le témoin admettait la véracité de la déclaration antérieure, on considérait que celle-ci avait été confirmée et elle devenait admissible pour établir la véracité de son contenu (Deacon c. The King, [1947] R.C.S. 531). Initialement, les tribunaux ne se sont pas interrogés sur les conditions qui devaient exister pour qu’un témoin puisse «confirmer» une déclaration antérieure incompatible. Au lieu de cela, les juges s’en remettaient à leur appréciation du comportement du témoin et de sa réaction lorsqu’il était confronté à une déclaration antérieure pour décider si le témoin en confirmait la véracité.

32 Cependant, dans R. c. Antoine, [1949] 1 W.W.R. 701 (C.A.), il a été jugé qu’il y a confirmation lorsque le témoin admet sous serment la véracité de la déclaration. C’est l’approche qu’a adoptée le juge Estey dans McInroy c. La Reine, [1979] 1 R.C.S. 588. Il a conclu, à la p. 608, que la question qu’il fallait trancher était de savoir si le témoin avait «reconn[u] [la déclaration] [. . .], lors de sa déposition, comme la vérité telle qu’[il] la voit à présent». Dans R. c. Smith (1985), 66 A.R. 195, la Cour d’appel de l’Alberta a conclu qu’une déclaration antérieure incompatible est confirmée si le témoin en admet la véracité lorsqu’il dépose. Le juge Lieberman a affirmé qu’il ne suffisait pas que le témoin affirme qu’il était sincère lorsqu’il a fait la déclaration. La Cour d’appel de l’Ontario a appliqué une approche similaire quant à la confirmation de déclarations incompatibles antérieures dans R. c. Atikian (1990), 62 C.C.C. (3d) 357, à la p. 364:

[traduction] Les jurés devaient comprendre que, avant qu’ils puissent conclure que le témoin avait confirmé la déclaration qu’elle avait faite et qu’ils puissent considérer que cette déclaration faisait la preuve des faits y contenus, ils devaient être convaincus que le témoin avait reconnu avoir fait cette déclaration et qu’elle était vraie, ou, évidemment, qu’elle était l’auteur d’une partie de la déclaration et que cette partie était vraie. Et que, de ce fait, elle a confirmé cette déclaration dans le cadre de son témoignage sous serment au procès.

33 Dans le contexte des déclarations antérieures incompatibles, le terme «confirmation» est utilisé pour établir une distinction entre le cas du témoin qui admet avoir fait une déclaration antérieure incompatible, mais non la véracité de cette déclaration, et celui du témoin qui admet non seulement avoir fait la déclaration antérieure mais affirme aussi qu’elle est vraie. Ce n’est que dans ce dernier cas que la déclaration est «confirmée» et admissible en preuve pour établir la véracité de son contenu. Il reste à se demander si le critère de confirmation des déclarations antérieures incompatibles devrait être appliqué à l’égard des déclarations enregistrées sur bande magnétoscopique visées par l’art. 715.1.

34 Le Black’s Law Dictionary (6e éd. 1990), définit «adopt» de la façon suivante:

[traduction] Accepter, s’approprier ou choisir. Faire sien ce qui ne l’était pas (un bien ou un acte).

35 De toute évidence, le mot «confirmation» peut avoir plusieurs sens. Toutefois, dans le contexte de l’art. 715.1, l’interprétation qui doit être donnée à ce mot est celle qui est compatible avec l’objet de l’article. À ce stade-ci, il convient de souligner que, dans le Code, le mot anglais «adopts» est rendu par le mot «confirme», qui n’a peut-être pas exactement le même sens. Néanmoins, il faut donner au mot «confirme» à l’art. 715.1 le même sens que celui attribué au mot «adopts» dans les présents motifs. C’est ce sens qui reflète le mieux l’objet de l’article.

36 Les cours d’appel de l’Alberta et de l’Ontario ont retenu des approches différentes quant à la confirmation de témoignages enregistrés sur bande magnétoscopique. Dans R. c. Meddoui (1990), 61 C.C.C. (3d) 345, la Cour d’appel de l’Alberta a conclu qu’un témoin avait «confirmé» («adopted») sa déclaration au sens de l’art. 715.1 lorsqu’elle avait dit qu’elle se rappelait avoir fait cette déclaration et qu’elle s’était alors efforcée d’être honnête et de dire la vérité. La cour a conclu qu’il n’était pas nécessaire que la plaignante ait un souvenir contemporain des événements discutés sur la bande. Cet arrêt a approuvé l’utilisation de l’enregistrement magnétoscopique comme preuve des événements décrits, même si le plaignant est incapable de se souvenir des événements qui sont discutés sur la bande et qui constituent le fondement de l’accusation.

37 Dans Meddoui, la cour a conclu que l’art. 715.1 modifie la règle concernant les souvenirs transcrits, ou consignés d’une autre façon, qui exigeait que le témoin n’ait aucun souvenir contemporain des événements décrits dans le document les rapportant avant que ce document puisse être admis en preuve pour établir la véracité de son contenu. Cette règle a été établie afin d’empêcher l’admission en preuve de déclarations antérieures compatibles jugées non pertinentes. La cour a conclu que l’art. 715.1 constituait une exception à cette règle. Elle a en outre reconnu qu’un compte rendu recueilli très tôt après les événements pouvait être d’une plus grande valeur probante que le témoignage donné au procès, particulièrement lorsque la mémoire contemporaine du témoin lui fait défaut ou qu’il a de la difficulté à exprimer ses souvenirs à la cour. La cour a statué qu’une assurance contemporaine de l’honnêteté passée serait une indication suffisante de fiabilité justifiant l’admission en preuve de la déclaration.

38 Dans l’arrêt R. c. Toten (1993), 83 C.C.C. (3d) 5, la Cour d’appel de l’Ontario a rejeté, en faveur d’une interprétation plus restrictive, l’interprétation qui avait été donnée au mot «confirme» dans Meddoui. La cour a conclu que, pour confirmer le contenu d’un enregistrement magnétoscopique, l’enfant plaignant doit être capable, à partir de son souvenir contemporain des événements relatés dans l’enregistrement, d’attester l’exactitude et le contenu de sa déclaration. L’enfant doit non seulement reconnaître avoir fait la déclaration, mais il doit aussi en reconnaître la véracité. Cette interprétation de «confirme» était fondée sur l’approche plus traditionnelle qui avait été utilisée à l’égard des déclarations antérieures incompatibles.

39 Est‑ce Meddoui ou Toten qui doit être appliqué pour définir l’art. 715.1, ou est-ce que des parties de chacun de ces arrêts devraient être utilisées pour décider s’il y a eu «confirmation» de la déclaration enregistrée sur bande magnétoscopique?

40 Vu l’objet manifeste de l’art. 715.1, je ne peux accepter la position de la Cour d’appel de l’Ontario que la notion de confirmation utilisée dans le contexte de l’enregistrement magnétoscopique des déclarations d’enfants devrait être la même que celle qui était appliquée à l’égard des déclarations antérieures incompatibles. Le mot confirmation n’a pas, en droit, un sens fixe qui doit être appliqué en toutes circonstances. Le critère strict de confirmation appliqué aux déclarations antérieures incompatibles était nécessaire pour s’assurer que ces déclarations possédaient un degré raisonnable de fiabilité avant de les admettre pour établir la véracité de leur contenu. Cependant, l’art. 715.1 intègre des garanties de fidélité et de fiabilité qui éliminent la nécessité d’avoir recours à un critère de confirmation aussi rigoureux. En outre, le fait que, en raison du bas âge ou de l’état émotionnel du plaignant, celui-ci n’ait pas de souvenirs contemporains des événements relatés dans l’enregistrement magnétoscopique ou soit incapable de témoigner au procès au sujet de ceux-ci, accroît le besoin de prendre en considération la déclaration enregistrée sur bande magnétoscopique.

41 Le critère établi dans Toten empêcherait un enfant qui n’a que peu ou pas de souvenirs des événements de «confirmer» l’enregistrement, qui serait donc inadmissible en vertu de l’art. 715.1. Or, c’est précisément dans cette situation que l’enregistrement est le plus nécessaire. Les enfants, particulièrement les plus jeunes, ont tendance à oublier les détails d’un événement avec le temps. Un enregistrement réalisé peu de temps après l’événement a plus de chance d’être fidèle que le témoignage présenté de vive voix au procès par l’enfant des mois après. Il est fort possible qu’un jeune enfant se souvienne d’être allé au poste de police, d’y avoir fait une déclaration et de s’être efforcé de dire la vérité à ce moment‑là, et, pourtant, qu’il n’ait aucun souvenir des événements désagréables. Cela est particulièrement vrai lorsqu’il s’est écoulé beaucoup de temps entre la plainte initiale et le procès. Afin de permettre la réalisation des objectifs de l’art. 715.1, c’est‑à‑dire, d’une part, aider les tribunaux dans la recherche de la vérité en préservant un compte rendu recueilli peu de temps après l’incident, et, d’autre part, empêcher que des enfants vulnérables subissent un préjudice supplémentaire par suite de leur participation au processus pénal, l’enregistrement magnétoscopique devrait généralement être admis en preuve.

42 Dans Toten, il a été suggéré que l’enregistrement magnétoscopique serait utile dans les cas où l’enfant se rappelle des événements, mais est incapable de les exprimer. Selon moi, cette approche est trop étroite. Elle ne tient pas compte des objectifs plus vastes de la loi. Les juges qui président les procès ne s’attendent pas à ce que les enfants s’expriment parfaitement. Ils savent que l’interrogatoire principal d’un enfant ne correspondra pas de façon précise à la forme narrative idéale du témoignage d’un adulte. De fait, le juge du procès a le pouvoir discrétionnaire d’autoriser les avocats à poser des questions suggestives au cours de l’interrogatoire principal afin de permettre au juge des faits d’obtenir le témoignage de l’enfant. Les enfants sont des victimes vulnérables et, pour diverses raisons, leur aptitude à témoigner peut aller de l’incapacité totale d’exprimer en mots les événements dont ils se souviennent à la capacité de raconter certains événements, mais pas tous. Dans l’une ou l’autre de ces situations, l’admission d’une déclaration enregistrée sur bande magnétoscopique aiderait la cour à découvrir la vérité. Il ne conviendrait pas de considérer que l’article ne vise que les «plaignants incapables de s’exprimer».

43 Bien que je sois d’accord avec une bonne partie du raisonnement énoncé dans Meddoui, je ne peux souscrire à la thèse qui a été avancée et selon laquelle, lorsqu’un témoin a un souvenir contemporain indépendant des événements, l’enregistrement magnétoscopique n’ajoute rien au témoignage. L’admission en preuve de déclarations enregistrées sur bande magnétoscopique peu de temps après les événements en cause peut être d’une grande aide en augmentant le témoignage de l’enfant au procès, du fait que le récit des événements décrits dans la déclaration a été fait lorsque les incidents étaient frais à la mémoire de l’enfant. Dans Toten, à la p. 28, on a avec justesse souligné que [traduction] «[l]a déclaration antérieure, conjuguée à la déposition du plaignant en cour, peut fort bien offrir une version plus complète du témoignage du plaignant».

44 Je reconnais que l’approche retenue dans Meddoui quant à la «confirmation» soulève un autre problème. Plus précisément, le témoin qui est incapable de se souvenir des événements ne peut pas vraiment être contre‑interrogé sur le contenu de sa déclaration, et, par conséquent, la fiabilité de son témoignage ne peut pas être mise à l’épreuve de cette façon. Cependant, il a été reconnu dans R. c. Khan, [1990] 2 R.C.S. 531, R. c. Smith, [1992] 2 R.C.S. 915, et R. c. B. (K.G.), [1993] 1 R.C.S. 740, que le contre‑interrogatoire n’est pas la seule garantie de fiabilité. L’article 715.1 comporte divers éléments qui assurent la fiabilité requise de la déclaration enregistrée sur la bande magnétoscopique. Il s’agit notamment du fait que: a) la déclaration doit avoir été faite dans un délai raisonnable; b) le juge des faits peut regarder toute l’entrevue, et qu’il a ainsi l’occasion d’observer le comportement de l’enfant et d’apprécier sa personnalité et son intelligence; c) l’enfant doit attester qu’il essayait de dire la vérité au moment où la déclaration a été faite. De même, on peut contre‑interroger l’enfant au procès et lui demander s’il disait vraiment la vérité au moment où la déclaration a été faite. Ces éléments fournissent suffisamment de garanties de fiabilité pour compenser l’incapacité de contre‑interroger sur les événements oubliés. Qui plus est, lorsque le plaignant n’a aucun souvenir indépendant des événements, la nécessité de l’enregistrement magnétoscopique est évidente. Dans Meddoui, on a recommandé que, dans de telles circonstances, on fasse une mise en garde spéciale au juge des faits (analogue à celle faite dans Vetrovec c. La Reine, [1982] 1 R.C.S. 811) contre les risques que comporterait le fait de prononcer une déclaration de culpabilité sur la foi seulement de l’enregistrement magnétoscopique. Selon moi, il s’agissait d’un sage conseil, qui devrait être suivi.

L’effet d’une incohérence entre le témoignage de vive voix de l’enfant et sa déclaration sur l’enregistrement magnétoscopique

45 Le critère de confirmation ne devrait pas constituer la décision finale sur la question de la fiabilité, mais plutôt être un moyen de s’assurer que l’enregistrement satisfait au degré de fiabilité requis pour être admis pour établir la véracité de son contenu. La confirmation de l’enregistrement rend cet élément de preuve admissible conformément à l’art. 715.1. Une fois que le juge du procès a statué que la déclaration a été confirmée, l’enregistrement devient un témoignage sur les événements qui y sont décrits comme si l’enfant faisait les déclarations contenues dans l’enregistrement en salle d’audience (L. (D.O.), précité, à la p. 458). L’enregistrement ainsi confirmé devrait, avec le témoignage rendu de vive voix au procès, constituer l’ensemble du témoignage en interrogatoire principal présenté par le plaignant.

46 Une fois que l’enregistrement magnétoscopique a été admis en preuve, toute question qui se soulève au sujet des circonstances dans lesquelles l’enregistrement a été fait, de la véracité des déclarations du témoin ou de la fiabilité globale de la preuve sera prise en considération par le juge des faits dans l’appréciation du poids qui doit être accordé à la déclaration enregistrée.

47 Si, dans le cours du contre‑interrogatoire, l’avocat de la défense arrache des déclarations qui contredisent une partie ou une autre de l’enregistrement magnétoscopique, cela ne rend pas ces parties inadmissibles en preuve. Il est évident que, au moment de la décision finale sur les questions en litige, il se peut fort bien qu’on accorde moins de poids à un enregistrement qui a été contredit. Cependant, le fait que l’enregistrement a été contredit au cours du contre‑interrogatoire ne signifie pas nécessairement que le contenu de l’enregistrement est faux ou qu’il n’est pas fiable. Le juge du procès peut néanmoins conclure, comme en l’espèce, que les incohérences sont sans importance et que l’enregistrement est plus fiable que le témoignage obtenu au procès. Dans l’arrêt R. c. B. (G.), [1990] 2 R.C.S. 30, à la p. 55, le juge Wilson a déclaré ceci:

. . . une faille, comme une contradiction, dans le témoignage d’un enfant ne devrait pas avoir le même effet qu’une faille semblable dans le témoignage d’un adulte. [. . .] Il se peut que les enfants ne soient pas en mesure de relater des détails précis et de décrire le moment ou l’endroit avec exactitude, mais cela ne signifie pas qu’ils se méprennent sur ce qui leur est arrivé et qui l’a fait.

48 Elle a conclu que, même si la crédibilité de tout témoin doit être appréciée, la norme applicable aux adultes à cet égard ne convient pas toujours pour apprécier la crédibilité d’un jeune enfant. Cette façon d’aborder la question du témoignage des enfants a été répétée dans R. c. W. (R.), [1992] 2 R.C.S. 122, aux pp. 132 à 134. Dans cet arrêt, le juge McLachlin a reconnu que les enfants ont une perspective des choses qui peut influer sur leur souvenir des événements et que la présence d’incohérences, spécialement sur des questions secondaires, devrait être évaluée en contexte. Un contre‑interrogatoire habile permet presque à coup sûr d’embrouiller un enfant, même s’il dit la vérité. Cette confusion peut engendrer des incohérences dans son témoignage. Même si le juge des faits doit être prudent à l’égard de tout élément de preuve qui a été contredit, il s’agit là d’une question qui concerne le poids qui doit être accordé à l’enregistrement magnétoscopique et non son admissibilité.

49 En l’espèce, le juge Lane a, avec raison, considéré que la présence des incohérences était une question concernant la valeur probante. Elle a appliqué les principes dégagés dans les arrêts B. (G.) et W. (R.), précités, et statué que les incohérences mineures sur des détails secondaires n’avaient pas une [traduction] «grande importance» et qu’elles ne devraient pas l’empêcher de tenir pour avérée la déclaration enregistrée sur la bande magnétoscopique. En outre, elle a conclu que, en ce qui a trait aux éléments essentiels de l’agression, le témoignage rendu par la plaignante en interrogatoire principal et en contre‑interrogatoire concordait avec sa déclaration sur l’enregistrement magnétoscopique. Le juge Lane a dit ceci:

[traduction] . . . je suis convaincue hors de tout doute raisonnable en ce qui concerne l’essence de sa plainte. Comme je l’ai dit précédemment, elle s’est montrée tout à fait cohérente sur les détails essentiels et cette cohérence n’a pas été altérée en dépit d’un contre‑interrogatoire très habile.

Il était loisible au juge Lane de préférer l’enregistrement magnétoscopique au témoignage obtenu en contre‑interrogatoire. Sa décision n’était pas déraisonnable et ne devrait pas être modifiée.

Un voir‑dire aurait‑il dû être tenu?

50 Au procès, l’enregistrement magnétoscopique a été montré à la plaignante, qui a témoigné que c’était elle qu’on voyait sur la bande, qu’elle avait fait les déclarations contenues dans l’enregistrement et que ces déclarations étaient vraies. Le juge Lane a alors statué que les conditions de l’art. 715.1 étaient remplies et que la déclaration sur la bande magnétoscopique était admissible pour établir la véracité de son contenu. Il est manifeste qu’aucun voir‑dire formel n’a été tenu sur la question de l’admissibilité.

51 Les motifs minoritaires exposés par le juge L’Heureux‑Dubé dans l’arrêt L. (D.O.), précité, indiquent que, préalablement à l’admission en preuve de l’enregistrement magnétoscopique d’une déclaration en vertu de l’art. 715.1, un voir‑dire doit être tenu pour examiner le contenu de l’enregistrement afin de s’assurer que les déclarations qu’il contient respectent les règles de la preuve. Je suis d’accord avec cette conclusion. Tant l’arrêt L. (D.O.) que l’arrêt Toten, précité, indiquent que, à cette étape, le juge du procès peut exercer son pouvoir discrétionnaire pour écarter l’enregistrement magnétoscopique de la déclaration si le préjudice que pourrait causer son admission en preuve l’emporte sur sa valeur probante. Ce pouvoir discrétionnaire d’écarter l’enregistrement est limité aux affaires où l’admission de l’enregistrement serait inéquitable pour l’accusé. Ces affaires seront relativement rares. (Voir Toten, à la p. 32; R. c. Potvin, [1989] 1 R.C.S. 525, à la p. 548.) Le juge L’Heureux‑Dubé, dans L. (D.O.), à la p. 463, énumère de nombreux facteurs qui, selon elle, devraient être pris en considération dans l’exercice de ce pouvoir discrétionnaire:

a) le genre des questions utilisées par toute autre personne apparaissant sur la bande;

b) l’intérêt de toute personne participant à la prise de la déclaration;

c) la qualité de la reproduction magnétoscopique et sonore;

d) la présence ou l’absence d’éléments de preuve inadmissibles dans la déclaration;

e) la possibilité d’éliminer les éléments inadéquats par l’épuration de la bande;

f) l’existence ou l’absence d’autres déclarations extrajudiciaires de la plaignante déposées en preuve;

g) l’existence de renseignements visuels qui tendraient à porter préjudice à l’accusé (par exemple, des blessures de la victime non reliées à l’incident);

h) la question de savoir si la poursuite a été autorisée à utiliser toute autre méthode visant à faciliter le témoignage de la plaignante;

i) le fait que le procès ait lieu devant un juge seul ou devant juge et jury; et

j) le temps écoulé depuis l’enregistrement de la bande et la capacité actuelle du témoin de relater les événements décrits de façon effective.

52 La prise en compte de ces facteurs aiderait à faire en sorte que le contenu de la déclaration respecte de façon générale les règles de la preuve et que la déclaration ait une valeur probante. Le pouvoir discrétionnaire d’écarter des éléments de preuve ne devrait pas être exercé pour trancher des questions concernant la valeur probante. Dans les cas où il existe des éléments de preuve contradictoires et où les avis sont partagés sur l’utilité de l’enregistrement magnétoscopique pour obtenir un récit honnête et complet de la version du plaignant, la déclaration devrait être admise en preuve, sauf si le juge du procès est convaincu qu’elle pourrait nuire au processus de recherche de la vérité. (Voir Toten, aux pp. 32 et 33.)

53 Dans le présent pourvoi, l’intimé a prétendu que l’entrevue effectuée par les policiers avant l’enregistrement magnétoscopique pouvait avoir vicié la déclaration ainsi enregistrée et que cette possibilité aurait dû être examinée dans un voir‑dire. Même si je conviens qu’il aurait été préférable que, dans la mesure où cela était raisonnablement possible, les policiers s’abstiennent d’interroger la plaignante avant d’enregistrer sa déclaration, en définitive, la fiabilité de l’enregistrement magnétoscopique n’est pas une question qui doit être tranchée à l’occasion d’un voir‑dire. Le fait qu’une entrevue ait été réalisée avant l’enregistrement magnétoscopique et l’effet qu’a pu avoir cette entrevue sur la déclaration enregistrée par la suite concernent le poids qui doit être accordé à la preuve et non son admissibilité. Il serait préférable que les policiers menant l’interrogatoire enregistré posent à l’enfant des questions simples à réponses libres. Il faut reconnaître que, dans certaines situations, il sera nécessaire et approprié de poser des questions suggestives. Notre Cour a récemment confirmé un arrêt de la Cour d’appel de l’Ontario qui avait statué que la possibilité que des témoignages soient viciés était une question concernant le poids de ces témoignages et non leur admissibilité; voir R. c. Buric, [1997] 1 R.C.S. 535.

54 Lorsqu’on demande l’admission en preuve d’un témoignage en vertu de l’art. 715.1 du Code, un voir‑dire formel doit être tenu afin de décider si les exigences de cet article sont respectées et si l’enregistrement est conforme aux règles de la preuve. Cependant, l’omission du juge Lane de tenir un voir‑dire n’a causé aucun tort important. Étant donné que S.D. a dûment confirmé le contenu de l’enregistrement magnétoscopique et qu’il n’y a aucune preuve tendant à indiquer que le juge Lane aurait pu ou aurait dû exercer son pouvoir discrétionnaire résiduel et écarter cet élément de preuve en raison d’effets injustement préjudiciables qu’aurait son admission pour l’intimé, l’enregistrement magnétoscopique a à bon droit été admis en preuve.

55 Dans la mesure où cela est raisonnablement possible, un système judiciaire sensible au problème devrait, en ayant à l’esprit l’objectif de l’art. 715.1, interpréter cet article d’une manière qui tende à éviter que la participation des enfants au processus pénal ne leur cause un préjudice supplémentaire. Cela doit évidemment être fait d’une manière équilibrée, c’est-à-dire en veillant toujours à ce que l’accusé jouisse de son droit fondamental à un procès équitable. Les définitions et les procédures énoncées dans les présents motifs visent à réaliser ces objectifs.

Pourvoi accueilli.

Procureur de l’appelante: Le procureur général de l’Ontario, Toronto.

Procureurs de l’intimé: Hicks, Block, Adams, Derstine, Toronto.

* Le juge Sopinka a pris part au jugement du 16 octobre 1997, mais n’a pas pris part aux présents motifs de jugement.


Synthèse
Référence neutre : [1997] 3 R.C.S. 1183 ?
Date de la décision : 18/12/1997
Sens de l'arrêt : Le pourvoi est accueilli

Analyses

Droit criminel - Enregistrement magnétoscopique - Enfants - Enregistrement magnétoscopique de la déclaration de l’enfant plaignant réalisé peu de temps après le crime reproché et admis en preuve après sa confirmation par celle‑ci - Conditions d’admissibilité des déclarations enregistrées sur bande magnétoscopique visées à l’art. 715.1 du Code criminel - Un voir‑dire était‑il nécessaire? - Effet des incohérences entre le témoignage de vive voix d’un enfant et sa déclaration enregistrée sur bande magnétoscopique - Code criminel, L.R.C. (1985), ch. C‑46, art. 715.1.

L’intimé a été déclaré coupable d’avoir commis des attouchements à des fins d’ordre sexuel sur sa fille âgée de six ans. La police a enquêté sur la plainte le soir même où elle a été déposée et a enregistré sur bande magnétoscopique la déclaration de la plaignante décrivant l’incident. Au procès, après l’interrogatoire principal de la plaignante, on lui a montré l’enregistrement magnétoscopique de sa déclaration. La plaignante a dit que c’était bien elle qu’on voyait sur la bande, et elle a confirmé qu’elle avait fait les déclarations contenues dans l’enregistrement et que celles‑ci étaient vraies. Le juge du procès a statué que la plaignante avait confirmé la déclaration enregistrée et a admis cette déclaration en preuve conformément à l’art. 715.1 du Code criminel. Au cours du contre‑interrogatoire, la plaignante a fait des déclarations contredisant en partie les déclarations enregistrées sur la bande magnétoscopique. La Cour d’appel de l’Ontario a infirmé la déclaration de culpabilité et a ordonné la tenue d’un nouveau procès, à la discrétion du ministère public. Les questions en litige étaient de savoir quelles sont les conditions d’admissibilité des déclarations enregistrées sur bande magnétoscopique visées à l’art. 715.1, quel est l’effet d’une incohérence entre le témoignage de vive voix d’un enfant et sa déclaration enregistrée sur bande magnétoscopique, et si un voir‑dire aurait dû être tenu quant à l’admissibilité de la déclaration de la plaignante enregistrée sur bande magnétoscopique.

Arrêt: Le pourvoi est accueilli.

L’article 715.1 du Code, qui est une exception législative à la règle de l’inadmissibilité du ouï‑dire, permet qu’une déclaration extrajudiciaire soit admise en preuve dans les procès concernant les infractions qui y sont énumérées, si le plaignant a moins de 18 ans et si l’enregistrement magnétoscopique a été réalisé dans un délai raisonnable après l’infraction reprochée. Le plaignant doit également y décrire les faits à l’origine de l’accusation et il doit confirmer dans son témoignage le contenu de l’enregistrement magnétoscopique. L’article a pour objet primordial de consigner ce qui est probablement le meilleur souvenir de l’événement. Il vise également à prévenir ou à réduire considérablement le risque de préjudice supplémentaire à l’enfant par suite de sa participation aux procédures judiciaires.

Il faut donner au mot anglais «adopts» utilisé à l’art. 715.1 un sens compatible avec l’objet de cet article, et le même sens doit être attribué au mot correspondant «confirme» dans le texte français. Le critère strict de confirmation appliqué aux déclarations antérieures incompatibles, qui était nécessaire pour garantir que ces déclarations possédaient un degré raisonnable de fiabilité, ne devrait pas être appliqué parce que l’art. 715.1 intègre des garanties de fidélité et de fiabilité.

Le témoin qui ne peut se souvenir des événements ne peut pas vraiment être contre‑interrogé sur le contenu de sa déclaration. L’article 715.1 comporte divers éléments qui assurent la fiabilité requise de la déclaration enregistrée: a) la déclaration doit avoir été faite dans un délai raisonnable; b) le juge des faits peut regarder toute l’entrevue et ainsi observer le comportement de l’enfant et apprécier sa personnalité et son intelligence; c) l’enfant doit attester qu’il essayait de dire la vérité au moment où la déclaration a été faite. En outre, on peut contre‑interroger l’enfant au procès et lui demander s’il disait vraiment la vérité au moment où la déclaration a été faite. Qui plus est, lorsque le plaignant n’a aucun souvenir indépendant des événements, la nécessité de l’enregistrement magnétoscopique est évidente. Cependant, il faut donner au juge des faits une mise en garde spéciale contre les risques que comporterait le fait de prononcer une déclaration de culpabilité sur la foi seulement de l’enregistrement magnétoscopique.

Une fois que le juge du procès a statué que la déclaration a été confirmée, l’enregistrement devient un témoignage sur les événements qui y sont décrits, comme si l’enfant faisait les déclarations contenues dans l’enregistrement en salle d’audience. L’enregistrement ainsi confirmé devrait, avec le témoignage rendu de vive voix rendu au procès, constituer l’ensemble du témoignage en interrogatoire principal présenté par le plaignant. Toute question qui se soulève au sujet des circonstances dans lesquelles l’enregistrement a été fait, de la véracité des déclarations du témoin ou de la fiabilité globale de la preuve sera prise en considération par le juge des faits dans l’appréciation du poids qui doit être accordé à la déclaration enregistrée. Le fait que des parties de l’enregistrement soient contredites durant le contre‑interrogatoire ne les rend pas inadmissibles en preuve, mais il se peut fort bien que, au moment de la décision finale sur les questions en litige, on accorde moins de poids à un enregistrement qui a été contredit. Le fait que l’enregistrement a été contredit au cours du contre‑interrogatoire ne signifie pas que le contenu de l’enregistrement est faux ou qu’il n’est pas fiable.

La norme applicable pour apprécier la crédibilité du témoignage d’un adulte ne convient pas toujours pour apprécier la crédibilité d’un jeune enfant. Les enfants ont une perspective des choses qui peut influer sur leur souvenir des événements, et la présence d’incohérences, spécialement sur des questions secondaires, devrait être évaluée en contexte. Un contre‑interrogatoire habile permet presque à coup sûr d’embrouiller un enfant, même s’il dit la vérité, et cette confusion peut engendrer des incohérences dans son témoignage.

Un voir‑dire doit être tenu pour examiner le contenu de l’enregistrement afin de s’assurer que les déclarations qu’il contient respectent les règles de la preuve. À cette étape, le juge du procès peut exercer son pouvoir discrétionnaire pour écarter l’enregistrement magnétoscopique de la déclaration si le préjudice que pourrait causer son admission en preuve l’emporte sur sa valeur probante. Le pouvoir discrétionnaire d’écarter des éléments de preuve ne devrait pas être exercé pour trancher des questions concernant la valeur probante. Lorsqu’il existe des éléments de preuve contradictoires et que les avis sont partagés sur l’utilité de l’enregistrement magnétoscopique pour obtenir un récit honnête et complet de la version du plaignant, la déclaration devrait être admise en preuve, sauf si le juge du procès est convaincu qu’elle pourrait nuire au processus de recherche de la vérité.

Même s’il est préférable que les policiers s’abstiennent, dans la mesure où cela est raisonnablement possible, d’interroger le plaignant avant d’enregistrer sa déclaration, en définitive, la fiabilité de l’enregistrement magnétoscopique n’est pas une question qui doit être tranchée à l’occasion d’un voir‑dire. Le fait qu’une entrevue ait été réalisée avant l’enregistrement magnétoscopique et l’effet qu’a pu avoir cette entrevue sur la déclaration enregistrée par la suite concernent le poids qui doit être accordé à la preuve, non son admissibilité. Les policiers menant l’interrogatoire enregistré devraient poser à l’enfant des questions simples à réponses libres. Dans certaines situations, cependant, il sera nécessaire et approprié de poser des questions suggestives.

L’omission de tenir un voir‑dire n’a causé aucun tort important. Étant donné que la plaignante a confirmé le contenu de l’enregistrement magnétoscopique et qu’il n’y avait aucune preuve tendant à indiquer que le juge du procès aurait pu ou aurait dû exercer son pouvoir discrétionnaire résiduel et écarter l’élément de preuve en cause en raison d’effets injustement préjudiciables qu’aurait son admission pour l’intimé, l’enregistrement magnétoscopique a à bon droit été admis en preuve.


Parties
Demandeurs : Sa Majesté la Reine
Défendeurs : F. (C.C.)

Références :

Jurisprudence
Arrêt appliqué: R. c. Meddoui (1990), 61 C.C.C. (3d) 345
arrêt non suivi: R. c. Toten (1993), 83 C.C.C. (3d) 5
arrêt examiné: R. c. L. (D.O.), [1993] 4 R.C.S. 419
arrêts mentionnés: Deacon c. The King, [1947] R.C.S. 531
R. c. Antoine, [1949] 1 W.W.R. 701
McInroy c. La Reine, [1979] 1 R.C.S. 588
R. c. Smith (1985), 66 A.R. 195
R. c. Atikian (1990), 62 C.C.C. (3d) 357
R. c. Khan, [1990] 2 R.C.S. 531
R. c. Smith, [1992] 2 R.C.S. 915
R. c. B. (K.G.), [1993] 1 R.C.S. 740
Vetrovec c. La Reine, [1982] 1 R.C.S. 811
R. c. B. (G.), [1990] 2 R.C.S. 30
R. c. W. (R.), [1992] 2 R.C.S. 122
R. c. Potvin, [1989] 1 R.C.S. 525
R. c. Buric, [1997] 1 R.C.S. 535.
Lois et règlements cités
Code criminel, L.R.C. (1985), ch. C‑46, art. 715.1 [aj. L.R.C., ch. 19 (3e suppl.), art. 16].
Doctrine citée
Bala, Nicholas and Hilary McCormack. «Accommodating the Criminal Process to Child Witnesses: L. (D.O.) and Levogiannis» (1994), 25 C.R. (4th) 341.
Black’s Law Dictionary, 6th ed. St. Paul, Minn.: West Publishing Co., 1990, «adopt».
Canada. Débats de la Chambre des communes, 2e sess., 33e lég., vol. I, 1986, 4 novembre 1986 (l’hon. Bob Kaplan), p. 1040.
Flin, Rhona and J. R. Spencer. «Do Children Forget Faster?», [1991] Crim. L.R. 189.
Lathi, Diana B. «Sex Abuse, Accusations of Lies, and Videotaped Testimony: A Proposal for a Federal Hearsay Exception in Child Sexual Abuse Cases» (1997), 68 U. Colo. L. Rev. 507.
McGrath, Mike and Carolyn Clemens. «The Child Victim as a Witness in Sexual Abuse Cases» (1985), 46 Mont. L. Rev. 229.
Perry, Nancy Walker and Bradley D. McAuliff, «The Use of Videotaped Child Testimony: Public Policy Implications» (1993), 7 Notre Dame J.L. Ethics & Pub. Pol’y 387.

Proposition de citation de la décision: R. c. F. (C.C.), [1997] 3 R.C.S. 1183 (18 décembre 1997)


Origine de la décision
Date de l'import : 06/04/2012
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ca;cour.supreme;arret;1997-12-18;.1997..3.r.c.s..1183 ?
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