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26/11/1998 | CANADA | N°[1998]_3_R.C.S._393

Canada | R. c. M. (M.R.), [1998] 3 R.C.S. 393 (26 novembre 1998)


R. c. M. (M.R.), [1998] 3 R.C.S. 393

M.R.M. Appelant

c.

Sa Majesté la Reine Intimée

Répertorié: R. c. M. (M.R.)

No du greffe: 26042.

1998: 25 juin; 1998: 26 novembre.

Présents: Le juge en chef Lamer et les juges L’Heureux‑Dubé, Gonthier, Cory, McLachlin, Iacobucci, Major, Bastarache et Binnie.

en appel de la cour d’appel de la nouvelle‑écosse

POURVOI contre un arrêt de la Cour d’appel de la Nouvelle‑Écosse (1997), 159 N.S.R. (2d) 321, 7 C.R. (5th) 1, [1997] N.S.J. No. 144 (QL), qui a accueilli l’appel du mini

stère public contre un jugement du juge Dyer. Pourvoi rejeté, le juge Major est dissident.

Mona Lynch et Cathy Benton, pour...

R. c. M. (M.R.), [1998] 3 R.C.S. 393

M.R.M. Appelant

c.

Sa Majesté la Reine Intimée

Répertorié: R. c. M. (M.R.)

No du greffe: 26042.

1998: 25 juin; 1998: 26 novembre.

Présents: Le juge en chef Lamer et les juges L’Heureux‑Dubé, Gonthier, Cory, McLachlin, Iacobucci, Major, Bastarache et Binnie.

en appel de la cour d’appel de la nouvelle‑écosse

POURVOI contre un arrêt de la Cour d’appel de la Nouvelle‑Écosse (1997), 159 N.S.R. (2d) 321, 7 C.R. (5th) 1, [1997] N.S.J. No. 144 (QL), qui a accueilli l’appel du ministère public contre un jugement du juge Dyer. Pourvoi rejeté, le juge Major est dissident.

Mona Lynch et Cathy Benton, pour l’appelant.

Ivan G. Whitehall, c.r., et Paula Taylor, pour l’intimée.

Version française du jugement du juge en chef Lamer et des juges L’Heureux-Dubé, Gonthier, Cory, McLachlin, Iacobucci, Bastarache et Binnie rendu par

//Le juge Cory//

1 Le juge Cory -- Les enseignants et les personnes responsables de nos écoles sont chargés de la garde et de l’éducation de nos enfants. Il est difficile d’imaginer responsabilité ou tâche plus importante. La sécurité des élèves et le maintien de l’environnement ordonné si nécessaire à l’acquisition de connaissances passent par l’établissement et l’application de règles de conduite raisonnables dans les écoles. La nature des obligations et des tâches dont sont investies les écoles justifie‑t‑elle les fouilles d’élèves? Dans quelle mesure les élèves peuvent‑ils s’attendre au respect de leur vie privée lorsqu’ils se trouvent à l’école? Telles sont les questions qui doivent être examinées dans le présent pourvoi.

2 La présente affaire concerne la fouille d’un élève de 13 ans par le directeur adjoint d’une école secondaire de premier cycle. Cette fouille a permis de découvrir une petite quantité de marijuana, et l’élève a été accusé de possession d’un stupéfiant.

3 Pour établir si les éléments de preuve trouvés lors de la fouille auraient dû être écartés au procès de l’appelant, il faut déterminer quand et dans quelles circonstances la fouille d’un élève par un responsable d’école devrait être considérée comme abusive et donc contraire aux droits garantis à cet élève par la Charte canadienne des droits et libertés. Cette question fait intervenir des valeurs et des principes potentiellement contradictoires. D’une part, il est essentiel que les autorités scolaires puissent réagir avec célérité et efficacité à toute situation risquant déraisonnablement de perturber l’environnement scolaire ou de compromettre la sécurité des élèves. Les écoles d’aujourd’hui sont confrontées à des problèmes extrêmement difficiles qui étaient inimaginables il y a une génération. L’introduction d’armes dangereuses dans les écoles est un phénomène grandissant auquel s’ajoute la présence trop fréquente de drogues illicites, ce qui est source de problèmes graves et urgents. D’autre part, les écoles ont l’obligation d’inculquer à leurs élèves le respect des droits constitutionnels de tous les membres de la société. L’apprentissage du respect de ces droits est essentiel à notre société démocratique et devrait faire partie de l’éducation de tous les élèves. C’est par l’exemple que ces valeurs se transmettent le mieux, et elles peuvent être minées si les personnes en autorité font fi des droits des élèves. Comment parvenir au juste équilibre entre ces valeurs?

I. Les faits

4 La fouille dont il est question en l’espèce a été effectuée par M. Cadue, directeur adjoint d’une école secondaire de premier cycle. Monsieur Cadue était responsable de l’application des politiques de l’école, dont l’une prévoyait que tout élève surpris à l’école avec de la drogue ou de l’alcool en sa possession serait suspendu. S’il concluait qu’il y avait matière à incrimination, le directeur adjoint devait appeler la GRC.

5 Dans sa déposition, M. Cadue a déclaré avoir été informé par plusieurs élèves que l’appelant vendait de la drogue à l’école. Il a dit qu’il avait des raisons d’ajouter foi à ces renseignements parce que les élèves connaissaient bien l’appelant et que l’un d’eux lui avait déjà, à une autre occasion, donné des renseignements qui s’étaient avérés justes. Le jour en question, il devait se tenir à l’école une danse que M. Cadue serait chargé de surveiller. Plus tôt ce jour‑là, l’un des informateurs lui avait dit croire que l’appelant aurait de la drogue sur lui pendant la soirée.

6 Lorsque M. Cadue a vu l’appelant arriver à la danse, il a communiqué avec la GRC pour demander la présence d’un policier à l’école. Il a ensuite abordé l’appelant et son ami et les a invités à se rendre à son bureau. Il a alors demandé à chacun d’eux s’ils étaient en possession de drogue, en les prévenant qu’il les fouillerait. L’agent Siepierski, de la GRC, est alors arrivé en tenue civile. Il s’est entretenu brièvement avec M. Cadue à l’extérieur de la pièce puis, après y être entré, il s’est présenté aux deux garçons et s’est assis. Il est resté muet pendant que M. Cadue parlait aux élèves et les fouillait. L’appelant a vidé ses poches et a relevé les jambes de son pantalon, à la demande de M. Cadue. Le directeur adjoint a remarqué une protubérance dans l’une des chaussettes de l’appelant, d’où il a retiré un sac de cellophane. Il a remis le sac à l’agent Siepierski, qui en a identifié le contenu comme étant de la marijuana. Le policier a alors informé l’appelant qu’il était en état d’arrestation pour possession d’un stupéfiant et lui a fait lecture de la mise en garde policière et de son droit à l’assistance d’un avocat. Le policier l’a aussi avisé qu’il avait le droit de communiquer avec un parent ou un adulte. L’appelant a tenté en vain de joindre sa mère par téléphone et déclaré qu’il ne souhaitait communiquer avec personne d’autre. L’agent Siepierski et l’appelant se sont ensuite rendus au casier de l’appelant, qu’ils ont fouillé sans rien y trouver.

7 Au procès, le juge a conclu que la fouille avait porté atteinte aux droits garantis à l’appelant par la Charte et a écarté les éléments de preuve qu’elle avait permis de découvrir. Le ministère public n’a présenté aucun autre élément de preuve et l’accusation portée contre l’appelant a été rejetée. La Cour d’appel a accueilli l’appel du ministère public et ordonné la tenue d’un nouveau procès. L’autorisation de pourvoi a par la suite été accordée par notre Cour.

II. Les dispositions législatives pertinentes

8 Charte canadienne des droits et libertés

8. Chacun a droit à la protection contre les fouilles, les perquisitions ou les saisies abusives.

10. Chacun a le droit, en cas d’arrestation ou de détention:

. . .

b) d’avoir recours sans délai à l’assistance d’un avocat et d’être informé de ce droit;

24. . . .

(2) Lorsque, dans une instance visée au paragraphe (1), le tribunal a conclu que des éléments de preuve ont été obtenus dans des conditions qui portent atteinte aux droits ou libertés garantis par la présente charte, ces éléments de preuve sont écartés s’il est établi, eu égard aux circonstances, que leur utilisation est susceptible de déconsidérer l’administration de la justice.

32. (1) La présente charte s’applique:

a) au Parlement et au gouvernement du Canada, pour tous les domaines relevant du Parlement, y compris ceux qui concernent le territoire du Yukon et les territoires du Nord‑Ouest;

b) à la législature et au gouvernement de chaque province, pour tous les domaines relevant de cette législature.

Education Act, R.S.N.S. 1989, ch. 136

[traduction]

54 Il incombe à l’enseignant dans une école publique

. . .

b) de maintenir l’ordre et la discipline dans l’école ou la salle dont il est responsable et de rapporter au directeur ou à toute autre personne responsable de l’école la conduite de tout élève constamment intraitable ou désobéissant;

. . .

g) de se soucier constamment de la santé et du confort des élèves, de la propreté, de la température et de la ventilation des salles de classe, et du bon état des salles, des terrains et des immeubles;

Education Act, General Regulations, N.S. Reg. 226/84

[traduction]

3 . . .

(7) Le directeur rend compte au conseil scolaire par l’intermédiaire du surintendant des écoles, et est chargé:

a) de superviser et d’administrer le programme éducatif de l’école, que le conseil scolaire prescrit par l’intermédiaire du surintendant;

b) de mettre en {oe}uvre et de coordonner un programme d’études;

c) de superviser et d’évaluer le personnel et les programmes;

d) de développer une communication efficace avec les parents.

. . .

(9) Le directeur adjoint est chargé:

a) d’aider le directeur à exercer ses fonctions conformément aux directives du conseil scolaire ou du directeur;

b) d’exercer les fonctions du directeur pendant l’absence de ce dernier.

III. Historique des procédures judiciaires

A. Tribunal de la famille de Halifax

9 Le juge Dyer a décidé qu’il y avait eu atteinte aux droits garantis à l’appelant par l’art. 8 et l’al. 10b) de la Charte et que les éléments de preuve devraient être écartés conformément au par. 24(2).

10 Il a conclu que le directeur adjoint envisageait la possibilité d’une arrestation et d’accusations criminelles et non simplement des sanctions administratives. Il a statué qu’il existait entre M. Cadue et l’agent Siepierski une stratégie concertée selon laquelle Cadue procéderait à la fouille et le policier porterait une accusation de possession si cette fouille était fructueuse. Au moment de la fouille, une enquête criminelle [traduction] «battait son plein». Le juge Dyer a conclu que M. Cadue était devenu un mandataire de la police. Même si, à l’origine, il avait pu agir dans le cadre de ses pouvoirs administratifs, [traduction] «la situation est tout autre au moment où est sciemment prise la décision de ne pas se limiter aux mesures correctives internes, et d’appliquer toute la force du droit criminel, y compris la présence réelle de la police, et de porter des accusations formelles en cas de fouille fructueuse».

11 Le juge Dyer a donc établi une distinction entre la présente affaire et l’arrêt R. c. J.M.G. (1986), 56 O.R. (2d) 705, dans laquelle un directeur d’école avait agi sans l’aide ou l’intervention de la police. La cour y avait conclu que la fouille était justifiée, tandis qu’en l’espèce le juge Dyer a décidé qu’une norme de conduite différente s’imposait en raison de l’intervention réelle de la police avant la fouille.

12 Il a statué qu’il y avait eu, en droit, détention de l’appelant, si ce n’était au moment de l’intervention initiale de M. Cadue, à tout le moins dès l’intervention de la police avant le début de la fouille. Il ne partageait pas l’avis de la cour, dans J.M.G., que les élèves sont déjà détenus d’une certaine manière pendant qu’ils sont à l’école et que cela l’emporte sur les notions traditionnelles de détention aux fins de la Charte. De toute façon, il n’était pas d’avis de conclure que, lorsqu’ils interviennent, les policiers ne devraient être assujettis qu’à la norme moins stricte des responsables d’une école. L’appelant aurait eu le droit d’être informé de son droit d’avoir recours à l’assistance d’un avocat dans toute autre situation. Cette exigence ne devrait pas être écartée en raison du seul contexte scolaire.

13 Il a souligné qu’on avait concédé que la fouille avait été faite sans mandat et qu’elle était abusive à première vue. Il a jugé que la fouille personnelle de l’appelant était envahissante et touchait son intégrité et son droit à la vie privée. À son avis, l’appelant n’avait pas, du fait de son inscription à l’école, renoncé à ses droits à la vie privée ni aux autres droits que lui confère la loi.

14 Le juge Dyer a conclu que les éléments de preuve devraient être écartés en vertu du par. 24(2) de la Charte. Il a noté que la jurisprudence semblait indiquer que la preuve matérielle est généralement admissible. Il croyait qu’il était possible d’établir une distinction entre la présente affaire et les [traduction] «affaires de drogue importantes» et n’a pas accepté l’argument selon lequel les affaires de drogue justifient une présomption d’admissibilité. Il a décidé qu’il y avait eu plusieurs violations de la Charte même si les occasions de la respecter n’avaient pas manqué, et que les violations commises étaient plus que négligeables. À son avis, l’exclusion de la preuve n’était pas susceptible de déconsidérer l’administration de la justice. Il était donc persuadé que l’exclusion était le redressement approprié.

B. Cour d’appel de la Nouvelle‑Écosse (1997), 159 N.S.R. (2d) 321

15 Le juge Pugsley, avec l’appui des juges Chipman et Roscoe, a dit, au par. 25, qu’on [traduction] «pouvait faire valoir de façon convaincante» que M. Cadue exerçait une fonction gouvernementale à titre de représentant de l’État en matière d’éducation, et que la Charte restreignait la portée des mesures prises par Cadue sous le régime de l’Education Act. Toutefois, comme aucun élément de preuve ni aucun argument n’avaient porté sur la question de l’application de la Charte, le juge Pugsley a considéré qu’il ne convenait pas de se prononcer sur cette question et a présumé, aux fins de l’appel, que la Charte s’appliquait.

16 Le juge Pugsley a fait remarquer que les droits garantis à l’art. 8 s’appliquent aux cas où les personnes ont une attente raisonnable en matière de vie privée, et que cette attente dépend du contexte. Il a affirmé que les droits des jeunes élèves doivent être interprétés à la lumière du rôle important que l’éducation joue dans la société et de l’intérêt qu’a cette dernière à garantir aux enfants un environnement scolaire sûr. Cet environnement sûr ne peut être maintenu que si les responsables et le personnel de l’école ont le pouvoir de faire régner l’ordre et la discipline, et notamment d’assurer la protection contre les trafiquants de drogue. Bien que l’Education Act ne les habilite pas expressément à procéder à des fouilles et à des saisies, le directeur et le personnel ont la responsabilité légale de faire régner l’ordre et la discipline, de se soucier de la santé et du confort des élèves et de superviser et d’administrer le programme éducatif de l’école.

17 Des dispositions similaires de la Loi sur l’éducation de l’Ontario ont été mentionnées dans l’arrêt J.M.G., précité, pour décider du caractère raisonnable d’une fouille effectuée par le directeur d’une école. Dans cette affaire, la Cour d’appel de l’Ontario a approuvé la norme moins stricte applicable à l’environnement scolaire qui avait été établie par la Cour suprême des États‑Unis dans l’affaire New Jersey c. T.L.O., 469 U.S. 325 (1985). Selon cette norme, deux conditions doivent être remplies: en premier lieu, l’action doit être [traduction] «justifiée dès le départ» et, en deuxième lieu, la fouille effectuée doit avoir, sur le plan de son étendue, un lien raisonnable avec les circonstances justifiant l’intervention au départ.

18 Le juge Pugsley partageait le choix de la Cour d’appel de l’Ontario de se fonder sur l’arrêt de la Cour suprême des États‑Unis dans ce contexte. Il a conclu que la preuve dans la présente affaire remplissait les deux conditions du critère de l’arrêt T.L.O. Monsieur Cadue avait reçu des renseignements fiables qui commandaient une action appropriée, et la fouille avait, [traduction] «sur le plan de son étendue, un lien raisonnable» puisqu’elle avait été effectuée en privé et n’était pas trop envahissante. Le juge Pugsley a estimé que le juge du procès avait commis une erreur en ne tenant pas compte des facteurs qui avaient incité M. Cadue à interroger et à fouiller l’appelant. Selon l’arrêt R. c. Debot, [1989] 2 R.C.S. 1140, un tribunal devrait se demander si les renseignements permettant de prévoir la perpétration d’une infraction criminelle étaient convaincants, si la source était fiable et si les renseignements étaient confirmés par l’enquête de la police avant la fouille.

19 Le juge Pugsley a conclu que les deux premiers facteurs étaient réunis en l’espèce et que le troisième ne constituait pas une condition préalable essentielle dans un contexte scolaire. L’examen de l’ensemble des circonstances devrait comprendre un examen de l’attente raisonnable en matière de vie privée [traduction] «que peuvent avoir les élèves d’une école secondaire de premier cycle face à l’intérêt de la société dans le maintien d’un environnement sûr dans les écoles» (p. 331). Notre Cour, selon le juge Pugsley, a reconnu que les gens devraient avoir des attentes moindres en matière de vie privée dans le cas d’un contrôle frontalier (R. c. Simmons, [1988] 2 R.C.S. 495) ou dans un contexte de réglementation (British Columbia Securities Commission c. Branch, [1995] 2 R.C.S. 3).

20 Le juge Pugsley a souligné qu’en l’espèce l’appelant avait subi uniquement une fouille superficielle et non pas une fouille très envahissante comme une fouille à nu et un examen des cavités corporelles. L’âge et le sexe de l’élève pourraient aussi être pertinents selon lui, et la fouille en l’espèce n’avait pas été faite par un enseignant sur une jeune élève. Compte tenu de tous ces facteurs, il a conclu que la fouille était raisonnable et qu’il n’avait pas été porté atteinte à l’attente raisonnable de l’appelant en matière de vie privée, dans un contexte scolaire.

21 La conclusion du juge du procès que le directeur adjoint avait agi en qualité de mandataire de la police a été examinée et rejetée. La seule présence d’un policier, sans plan préétabli ni directive de la police, était insuffisante pour faire de M. Cadue un mandataire de la police. À son avis, la preuve établissait clairement que l’invitation à se rendre au bureau de Cadue, l’interrogatoire et la fouille auraient eu lieu de toute façon, même en l’absence de l’agent Siepierski. Par conséquent, la seule question qui se posait en vertu de l’art. 8 était de savoir si la saisie subséquente des éléments de preuve par l’agent Siepierski a rendu abusives la fouille et la saisie initiales. Il a statué que, même s’il y avait eu saisie par le policier, elle était légale et que, partant, il n’y avait eu aucune violation des droits garantis à l’appelant par l’art. 8.

22 En ce qui concerne l’art. 10 de la Charte, le juge Pugsley s’est d’abord demandé si l’appelant avait été détenu, au sens de l’art. 10, par M. Cadue. Là encore, il a souligné que l’étendue du droit de l’appelant à l’assistance d’un avocat était définie par le contexte dans lequel il était invoqué, à savoir à titre d’élève dans une école secondaire de premier cycle. Il a suivi, à la p. 338, l’analyse de la Cour d’appel de l’Ontario dans l’arrêt J.M.G. (aux pp. 711 et 712), selon laquelle un élève est déjà [traduction] «détenu d’une certaine manière pendant qu’il est à l’école», et les mesures prises faisaient simplement partie du maintien de l’ordre et de la discipline dans l’école, et a conclu qu’il n’y avait pas eu détention par le directeur adjoint.

23 La deuxième question était de savoir si l’appelant avait été détenu par l’agent Siepierski. Le juge Pugsley a statué, à la p. 339, que ce [traduction] «n’est qu’après que l’agent Siepierski eut identifié la nature du contenu du sac en plastique qu’il y a eu détention» et que l’appelant a dès lors été avisé de ses droits en vertu de l’al. 10b). Il a décidé subsidiairement que, même si le juge du procès avait eu raison de dire qu’il y a eu détention et violation du droit à l’assistance d’un avocat, cette violation ne changeait rien au caractère raisonnable de la fouille. Il ne s’agissait pas d’un cas où les conseils d’un avocat auraient eu une incidence sur la découverte de la preuve.

IV. Analyse

A. Application de la Charte

(1) Application de la Charte aux autorités scolaires publiques

24 Il faut, d’entrée de jeu, déterminer si la Charte s’applique aux mesures prises par le directeur adjoint. Les tribunaux d’instance inférieure ont présumé qu’il en était ainsi, comme l’ont fait d’autres tribunaux dans des circonstances semblables (par exemple, dans J.M.G., précité). L’intimée dans le présent pourvoi ne s’est pas opposée à l’application de la Charte, et s’est contentée de prétendre que l’analyse fondée sur la Charte devrait tenir compte du contexte scolaire. L’appelant a prétendu que la Charte s’applique du fait que le conseil scolaire, les écoles et leurs employés font partie de l’appareil gouvernemental, selon le critère exposé par notre Cour dans l’arrêt McKinney c. Université de Guelph, [1990] 3 R.C.S. 229. On laissait entendre que les écoles et les conseils scolaires sont analogues au collège communautaire qui fait partie du gouvernement, selon l’arrêt Douglas/Kwantlen Faculty Assn. c. Douglas College, [1990] 3 R.C.S. 570. On soutenait subsidiairement que, puisque les mesures prises par le directeur adjoint étaient fondées sur l’Education Act, R.S.N.S. 1989, ch. 136, la Charte s’applique d’après l’arrêt Eldridge c. Colombie‑Britannique (Procureur général), [1997] 3 R.C.S. 624.

25 Compte tenu de la concession faite par l’intimée, il ne convient pas d’examiner et de décider de manière définitive lequel de ces arguments devrait être appliqué. Il vaut mieux présumer simplement, aux fins de la présente affaire, que les écoles font partie du gouvernement et que, partant, la Charte s’applique aux mesures prises par le directeur adjoint.

(2) Le directeur adjoint agissait‑il en qualité de mandataire de la police?

26 Dans la présente affaire, le juge du procès a aussi conclu que le directeur adjoint avait agi en qualité de mandataire de la police. Si elle était acceptée, cette conclusion fournirait non seulement une autre raison d’appliquer la Charte, mais encore aurait une incidence sur l’analyse des prétendues violations. L’appelant fait valoir qu’il n’y a pas lieu de modifier la conclusion du juge du procès sur cette question. En général, une cour d’appel s’abstiendrait de modifier une conclusion de cette nature. En l’espèce toutefois, vu que la preuve produite ne peut pas l’étayer, cette conclusion ne devrait pas être acceptée.

27 Il est clair que M. Cadue a coopéré avec la police. Il savait que si de la drogue était découverte, il y aurait matière à incrimination et à la prise de mesures disciplinaires scolaires, et que l’école avait pour politique de communiquer avec la police en pareil cas. Il a appelé la police avant d’entreprendre la fouille et a permis au policier de l’observer pendant qu’il y procédait. Lorsqu’elle a été découverte, la marijuana a été remise à l’agent Siepierski, qui a arrêté l’appelant et procédé à une autre fouille, celle du casier de l’appelant.

28 Le seul fait qu’il y ait eu coopération entre le directeur adjoint et la police et qu’un policier ait assisté à la fouille n’est pas suffisant pour indiquer que le directeur adjoint agissait en qualité de mandataire de la police. Le juge du procès a affirmé qu’il existait, entre M. Cadue et l’agent Siepierski, une [traduction] «stratégie concertée» qui a eu pour effet de transformer M. Cadue en mandataire de la police. En toute déférence, aucun élément de preuve n’étaye cette conclusion. Il n’y a aucune preuve de l’existence d’une entente ou de directives données à M. Cadue par la police qui aient pu donner naissance à un rapport mandant‑mandataire.

29 Notre Cour s’est penchée sur la question de savoir si une personne agit en qualité de mandataire de la police dans l’arrêt R. c. Broyles, [1991] 3 R.C.S. 595. Même si, dans cette affaire, il était question d’un indicateur, les éléments essentiels du critère qui y a été appliqué valent tout autant pour la présente affaire. On y affirme, à la p. 608:

Ce n’est que si les liens entre l’indicateur et l’État sont tels que l’échange entre l’indicateur et l’accusé s’est déroulé de façon essentiellement différente, que l’indicateur devra être considéré comme un représentant de l’État aux fins de l’échange. [. . .] L’échange entre l’accusé et l’indicateur aurait‑il eu lieu, de la même façon et sous la même forme, n’eût été l’intervention de l’État ou de ses représentants?

Appliquant ce critère à la présente affaire, il faut se demander si la fouille de l’appelant aurait eu lieu, sous la même forme et de la même manière, n’eût été la participation de la police. À mon avis, la preuve démontre qu’elle aurait eu lieu et qu’elle n’était pas réellement différente de ce qu’elle aurait été s’il n’y avait eu aucune participation de la police. Même si M. Cadue savait qu’il pourrait en résulter des accusations criminelles, le but premier de la fouille était le maintien de la discipline scolaire, dont il avait la responsabilité. Rien dans la preuve ne porte à croire que le directeur adjoint a entrepris la fouille ou l’a exécutée différemment à cause de l’intervention de la police. Il appert donc que le directeur adjoint n’agissait pas en qualité de mandataire de la police.

30 Cette conclusion n’est pas déterminante quant à l’application de l’art. 8, étant donné que la Charte s’applique de toute façon aux mesures prises par M. Cadue. Toutefois, la conclusion qu’il n’était pas un mandataire de la police aura une incidence sur l’analyse de la prétendue violation des droits garantis à l’appelant par la Charte.

B. Y a‑t‑il eu violation des droits garantis à l’appelant par l’art. 8 de la Charte?

(1) L’attente raisonnable en matière de vie privée

31 L’appelant avait‑il, dans les circonstances en question, une attente raisonnable en matière de vie privée et, dans l’affirmative, quelle en était la portée? L’appelant doit d’abord établir qu’il avait, dans les circonstances, une attente raisonnable en matière de vie privée. Cela est évident car si un accusé n’a pas d’attente raisonnable en matière de vie privée à l’égard de l’endroit pertinent, il ne peut y avoir de violation de l’art. 8 (voir, par exemple, R. c. Edwards, [1996] 1 R.C.S. 128; Schreiber c. Canada (Procureur général), [1998] 1 R.C.S. 841). Le besoin de respect de la vie privée «peut varier selon la nature de ce qu’on veut protéger, les circonstances de l’ingérence de l’État et l’endroit où celle‑ci se produit, et selon les buts de l’ingérence» (R. c. Colarusso, [1994] 1 R.C.S. 20, à la p. 53). L’existence d’une attente raisonnable en matière de vie privée doit être déterminée eu égard à l’ensemble des circonstances (Colarusso; Edwards, au par. 31; R. c. Wong, [1990] 3 R.C.S. 36, à la p. 62). Les facteurs qui doivent être pris en compte dans l’appréciation des circonstances peuvent inclure la présence de l’accusé au moment de la perquisition, la possession ou le contrôle du bien ou des lieux faisant l’objet de la perquisition, la propriété du bien ou des lieux en question, l’usage historique du bien ou de l’article visé, la capacité de régir l’accès, l’existence d’une attente subjective en matière de vie privée et le caractère objectivement raisonnable de l’attente (Edwards, au par. 45).

32 En l’espèce, c’est l’appelant qui a été fouillé. Dans ce cas, il est évident que certains des facteurs mentionnés dans l’arrêt Edwards ne s’appliquent pas. Toutefois, l’existence d’une attente subjective en matière de vie privée et le caractère objectivement raisonnable de cette attente demeurent importants. Il est aussi nécessaire d’examiner le contexte dans lequel la fouille a été effectuée. En l’espèce, l’appelant était un élève à l’école, qui participait à une activité scolaire tenue à l’école. La fouille a été effectuée par l’autorité scolaire responsable de la surveillance de cette activité. Compte tenu de tous ces facteurs, l’appelant avait‑il une attente raisonnable en matière de vie privée relativement à sa personne et aux articles qu’il transportait sur lui? J’estime que oui. L’élève qui est à l’école s’attendrait subjectivement à ce que sa vie privée, à tout le moins en ce qui concerne son corps, soit respectée. Compte tenu du droit accru à la vie privée qui, par le passé, a été reconnu aux gens en ce qui concerne leur personne même, une attente subjective en matière de vie privée à cet égard est raisonnable. Je ne crois pas que cette attente devienne déraisonnable du seul fait que l’élève se trouve à l’école. Il s’ensuit que l’appelant avait une attente raisonnable en matière de vie privée à cet égard et, partant, que l’art. 8 s’applique.

33 Toutefois, même si elle existe, l’attente raisonnable en matière de vie privée peut être réduite dans certaines circonstances, et cela aura une incidence sur l’analyse de l’art. 8 et sur l’examen de ce qui constitue une fouille, perquisition ou saisie abusive. Par exemple, il a été jugé que les gens ont une attente moins élevée en matière de vie privée à un passage frontalier puisqu’ils savent qu’ils peuvent être soumis à un interrogatoire et à une fouille dans le cadre de l’application des dispositions législatives sur les douanes (voir Simmons, précité). C’est à cause de cette attente moindre en matière de vie privée qu’il n’était pas nécessaire, pour qu’elle soit raisonnable, qu’une fouille douanière respecte les normes établies dans l’arrêt Hunter c. Southam Inc., [1984] 2 R.C.S. 145. De même, l’attente raisonnable en matière de vie privée d’un élève à l’école est sûrement moindre que celle qu’il aurait dans d’autres circonstances. Les élèves savent que leurs enseignants et autres autorités scolaires ont la responsabilité de procurer un environnement sûr et de maintenir l’ordre et la discipline dans l’école. Ils doivent savoir que cela peut parfois commander la fouille d’élèves et de leurs effets personnels de même que la saisie d’articles interdits. Un élève ne peut pas raisonnablement s’attendre à être exempté de telles fouilles. L’attente raisonnable en matière de vie privée d’un élève dans l’environnement scolaire est donc sérieusement réduite.

34 Dans certains cas, la cour peut être appelée à déterminer avec plus de précision si et dans quelle mesure un élève avait une attente raisonnable en matière de vie privée à l’endroit où la fouille a eu lieu. Dans le cas de la fouille d’un casier, par exemple, les tribunaux procèdent à une analyse plus détaillée des faits dans le but de déterminer le degré de contrôle exercé par les autorités scolaires sur les casiers et l’incidence que cela peut avoir sur l’attente raisonnable en matière de vie privée et sur le caractère raisonnable de la fouille (voir, par exemple, Zamora c. Pomeroy, 639 F.2d 662 (1981); People c. Overton, 301 N.Y.S.2d 479 (1969); State in Interest of T.L.O. c. Engerud, 94 N.J. 331 (1983), conf. par 469 U.S. 325 (1985)). En l’espèce, il y a eu fouille du casier de l’appelant, mais comme aucun élément de preuve n’y a été découvert, la légalité de cette fouille n’est pas en cause. Aux fins des présents motifs, il suffit de conclure que l’appelant avait effectivement une attente raisonnable en matière de vie privée relativement à sa propre personne, mais qu’il se serait raisonnablement attendu à moins de respect de sa vie privée dans un environnement scolaire. Ces conclusions peuvent être prises en considération pour définir la norme à appliquer à la fouille de l’appelant.

(2) La norme applicable aux fouilles effectuées par des autorités scolaires

a) Une norme différente est‑elle requise?

35 Les enseignants et les directeurs occupent un poste de confiance qui comporte de lourdes responsabilités. Ce sont eux qui doivent veiller à la sécurité et au bien‑être des enfants qui sont à l’école ou qui participent à des activités scolaires. Ce sont eux qui doivent s’acquitter de la tâche fondamentalement importante d’instruire les enfants afin de leur permettre de fonctionner dans la société et de réaliser leur potentiel. À cette fin, les responsables d’une école doivent procurer une atmosphère propice à l’apprentissage. Pendant la journée à l’école, ils doivent protéger nos enfants et leur enseigner. Les enseignants et les directeurs jouent un rôle qui est loin d’être négligeable relativement à l’avenir du pays.

36 Il est essentiel que nos enfants reçoivent un enseignement et qu’ils acquièrent des connaissances. Or, sans environnement ordonné, l’acquisition de connaissances sera difficile, voire impossible. Au cours des dernières années, il y a eu accroissement en nombre et en gravité des problèmes qui menacent la sécurité des élèves et la tâche fondamentalement importante de l’enseignement. La possession de drogues illicites et le port d’armes dangereuses dans les écoles sont devenus si répandus qu’ils menacent la capacité des responsables d’une école de remplir leur devoir de maintenir un environnement sûr et ordonné. Les conditions actuelles sont telles qu’il faut donner aux enseignants et aux administrateurs scolaires la souplesse nécessaire pour régler les problèmes de discipline à l’école. Ils doivent pouvoir agir rapidement et efficacement pour assurer la sécurité des élèves et empêcher les violations graves des règles de l’école.

37 L’une des façons dont les autorités scolaires peuvent être appelées à réagir raisonnablement aux problèmes de discipline consiste à fouiller des élèves et à saisir des articles interdits. La possession d’articles interdits par la politique de l’école peut, dans certains cas, constituer une infraction criminelle ou une preuve de la perpétration d’une telle infraction. Par conséquent, il peut arriver que l’on cherche à utiliser comme preuve dans un procès criminel des articles découverts au cours d’une fouille effectuée par une autorité scolaire. Se pose alors la question de savoir si la preuve découverte par un enseignant ou par un directeur devrait pouvoir être écartée parce que la fouille aurait été abusive si elle avait été effectuée par la police.

38 La Cour suprême des États‑Unis a examiné cette question dans l’arrêt T.L.O., précité. Dans cette affaire, le sous‑directeur adjoint d’une école secondaire avait fouillé le sac à main d’une élève soupçonnée de fumer dans les toilettes de l’école, en violation des règles de l’école. L’élève avait affirmé qu’elle n’avait jamais fumé et le sous‑directeur adjoint avait fouillé son sac à main, apparemment pour vérifier la véracité de cette affirmation. Il y a découvert un paquet de cigarettes, et, en le retirant, a aperçu un paquet de papier à cigarettes. Ayant alors des soupçons de consommation de drogue, il a procédé à une fouille complète du sac à main. Il y a découvert de la marijuana, une pipe, des sacs en plastique, une somme d’argent assez importante, une liste d’élèves qui devaient de l’argent à l’étudiante, et des lettres qui l’impliquaient dans le trafic de marijuana. Des accusations de délinquance ont été portées contre l’élève et une requête en suppression de la preuve trouvée dans son sac à main a été déposée.

39 Il a été jugé que l’interdiction du Quatrième amendement de procéder à des fouilles, perquisitions et saisies abusives s’applique aux fouilles effectuées par les responsables d’une école publique. Il a également été jugé, aux pp. 338 et 339, que les élèves à l’école peuvent prétendre avoir une attente raisonnable en matière de vie privée. Toutefois, selon les juges majoritaires, [traduction] «[l]e droit de l’enfant à la vie privée doit être soupesé en fonction de l’intérêt important qu’ont les enseignants et les administrateurs à faire régner la discipline dans les classes comme dans l’enceinte de l’école» (p. 339). La Cour a donc conclu, à la p. 340, que le contexte scolaire [traduction] «exige un adoucissement des restrictions auxquelles sont ordinairement assujetties les fouilles effectuées par des autorités publiques». Plus particulièrement, l’exigence d’un mandat ne [traduction] «convient pas à l’environnement scolaire», de sorte que les responsables d’une école ne sont pas tenus d’obtenir un mandat pour procéder à la fouille d’un élève qui relève de leur autorité (idem). La Cour a en outre conclu que le contexte scolaire [traduction] «exige aussi une certaine modification du niveau de soupçon d’activité illégale nécessaire pour justifier une fouille» (idem).

40 La Cour a souligné que [traduction] «le “motif raisonnable” n’est pas une condition irréductible de la validité d’une fouille» et qu’elle n’avait pas hésité, dans le passé, à adopter une norme moins stricte lorsque cela servirait le mieux l’intérêt public. La Cour a donc énoncé le critère suivant pour déterminer si une fouille effectuée par un responsable d’école est raisonnable (aux pp. 341 à 343):

[traduction] Nous nous associons à la majorité des tribunaux qui ont examiné cette question en concluant que l’adaptation des droits en matière de vie privée des élèves à la nécessité importante que les enseignants et les administrateurs aient la liberté de maintenir l’ordre dans les écoles n’exige pas le strict respect de la condition que les fouilles soient fondées sur un motif raisonnable de croire que la personne fouillée a enfreint ou est en train d’enfreindre la loi. La légalité de la fouille d’un élève devrait plutôt dépendre uniquement de son caractère raisonnable compte tenu de toutes les circonstances. Pour déterminer le caractère raisonnable d’une fouille, il faut se poser une double question: en premier lieu, il faut se demander «si l’action [. . .] était justifiée dès le départ», Terry c. Ohio, 392 U.S., à la p. 20, 88 S.Ct., à la p. 1879; en deuxième lieu, il faut se demander si la fouille effectuée «avait, sur le plan de son étendue, un lien raisonnable avec les circonstances justifiant l’intervention au départ», ibid. Ordinairement, la fouille d’un élève par un enseignant ou par un autre responsable d’école est «justifiée dès le départ» lorsqu’il y a des motifs raisonnables de soupçonner qu’elle fournira la preuve que l’élève a violé ou est en train de violer soit la loi, soit les règles de l’école. Une telle fouille est acceptable, sur le plan de son étendue, lorsque les mesures prises ont un lien raisonnable avec les objectifs qu’elle vise et ne sont pas trop envahissantes eu égard à l’âge et au sexe de l’élève et à la nature de l’infraction.

. . . En mettant l’accent sur la question du caractère raisonnable, la norme évitera aux enseignants et aux administrateurs d’une école d’avoir à se familiariser avec les subtilités des motifs raisonnables et leur permettra de régler leur conduite sur les préceptes de la raison et du bon sens.

En appliquant ce critère, la Cour à la majorité a conclu que la fouille exécutée par le sous‑directeur adjoint n’était pas abusive.

41 Dans l’arrêt J.M.G., précité, la Cour d’appel de l’Ontario a adopté le critère énoncé dans T.L.O. par la Cour suprême des États‑Unis. Dans cette affaire, un directeur d’école, qui agissait sur la foi de renseignements reçus d’un enseignant, a convoqué un élève à son bureau, l’a fouillé et a trouvé un petit paquet de marijuana caché dans sa chaussette ou sa jambe de pantalon. Il a ensuite appelé un policier, à qui il avait déjà parlé. Ce dernier est venu arrêter l’élève pour possession d’un stupéfiant. La Cour d’appel de l’Ontario a appliqué le critère de l’arrêt T.L.O. et conclu que la fouille était justifiée dès le départ (à la p. 709). Après avoir reçu des renseignements selon lesquels un élève cachait de la drogue quelque part sur lui, il n’était pas déraisonnable pour le directeur de l’obliger à enlever ses chaussettes pour prouver ou réfuter cette allégation. La fouille avait [traduction] «un lien raisonnable avec l’objectif souhaitable du maintien de l’ordre et de la discipline» (idem). La cour a aussi conclu que la fouille n’était pas trop envahissante (idem). Elle a noté qu’au Canada la loi exige généralement un mandat ou une autre autorisation préalable. La cour a toutefois estimé que les rapports entre le directeur et l’élève étaient différents de ceux qui existent entre un policier et un citoyen, et que [traduction] «dans l’ensemble, la société a intérêt à ce qu’un environnement éducatif approprié soit maintenu, ce qui implique clairement la capacité de faire régner la discipline scolaire de manière efficiente et efficace» (à la p. 710). Il a donc été jugé qu’il n’était [traduction] «ni possible ni souhaitable» d’exiger une autorisation préalable dans le cas de la fouille d’un élève par un directeur (à la p. 711).

42 Dans cette affaire, la Cour d’appel a suivi l’arrêt J.M.G. et appliqué le critère de l’arrêt T.L.O. Le critère établi dans T.L.O. dispense non seulement de l’obligation d’obtenir un mandat, mais encore de la nécessité d’avoir des motifs raisonnables, en les remplaçant par une norme générale du caractère raisonnable dans toutes les circonstances. Il faut toutefois noter que ce critère a été critiqué aux États‑Unis (voir, par exemple, J. M. Sanchez, «Expelling the Fourth Amendment from American Schools: Students’ Rights Six Years After T.L.O.» (1992), 21 J. L. & Education 381; Thomas C. Fischer, «From Tinker to TLO; Are Civil Rights for Students “Flunking” in School?» (1993), 22 J. L. & Education 409). J’estime néanmoins que le critère énoncé dans T.L.O. peut être appliqué au contexte des écoles élémentaires et secondaires au Canada. Il est possible d’arriver sensiblement au même résultat que dans l’arrêt T.L.O. en appliquant les principes tirés des arrêts où notre Cour s’est penchée sur la Charte.

43 Au Canada, la nécessité d’établir l’existence de motifs raisonnables et probables de procéder à une fouille fournit dans tous les cas, sous réserve de quelques exceptions très limitées, la garantie minimale de caractère raisonnable requise par la Constitution. Il reste néanmoins à savoir si cette norme devrait être requise dans le contexte scolaire.

b) Quelle norme devrait s’appliquer?

44 Selon la règle générale établie par notre Cour dans l’arrêt Hunter, précité, une perquisition ou une fouille doit, pour être raisonnable, avoir fait l’objet d’une autorisation préalable, habituellement sous forme de mandat, accordée par un arbitre neutre (aux pp. 160 à 162). Suivant cette règle, une perquisition ou fouille effectuée sans autorisation préalable est abusive à première vue. La Cour a toutefois reconnu, dans Hunter, à la p. 161, qu’«il n’est peut‑être pas raisonnable dans tous les cas d’insister sur l’autorisation préalable». Une telle autorisation, lorsqu’elle peut être obtenue, est une condition préalable du caractère raisonnable d’une fouille ou d’une perquisition (idem). Il a été en outre reconnu qu’il pourrait convenir de dispenser de l’obligation d’obtenir un mandat dans des situations où il est impossible d’obtenir une autorisation préalable.

45 À mon avis, la fouille d’un élève par une autorité scolaire est un exemple parfait de situation où il serait impossible d’exiger l’obtention d’un mandat ou d’une autre autorisation préalable avant de procéder à la fouille. Exiger un mandat serait clairement peu pratique et irréalisable dans l’environnement scolaire. Les enseignants et les administrateurs doivent pouvoir répondre rapidement et efficacement aux problèmes qui surgissent dans leur école. Lorsqu’un responsable d’école procède à une fouille ou à une saisie sur un élève, aucun mandat n’est requis. L’absence de mandat dans ces circonstances n’entraîne pas une présomption de fouille abusive.

46 L’autre principe de base énoncé dans l’arrêt Hunter veut qu’une perquisition ou une fouille raisonnable soit fondée sur des motifs raisonnables et probables. Il a été jugé, aux pp. 167 et 168, que «[l]e droit de l’État de déceler et de prévenir le crime commence à l’emporter sur le droit du particulier de ne pas être importuné lorsque les soupçons font place à la probabilité fondée sur la crédibilité». Par conséquent, «l’existence de motifs raisonnables et probables [. . .] de croire qu’une infraction a été

commise et que des éléments de preuve se trouvent à l’endroit de la perquisition, constitue le critère minimal, compatible avec l’art. 8 de la Charte, qui s’applique à l’autorisation d’une fouille, d’une perquisition ou d’une saisie» (p. 168). L’exigence de motifs raisonnables et probables a été maintenue, sous réserve seulement d’exceptions très limitées (comme, par exemple, dans le cas d’une fouille accessoire à l’arrestation; voir Cloutier c. Langlois, [1990] 1 R.C.S. 158).

47 Or les enseignants et les directeurs doivent pouvoir agir rapidement pour protéger leurs élèves et procurer l’atmosphère ordonnée propice à l’acquisition de connaissances. Si un enseignant apprenait qu’un élève transporte une arme dangereuse ou distribue une drogue illicite dangereuse, les parents de tous les autres élèves de l’école s’attendraient à ce qu’il fouille cet élève. Le rôle des enseignants est tel que ceux-ci doivent pouvoir effectuer des fouilles. En fait, les élèves devraient être conscients qu’ils doivent respecter le règlement de l’école et qu’ils peuvent donc faire l’objet de fouilles raisonnables. Il s’ensuit que leur attente en matière de vie privée sera moindre pendant qu’ils sont à l’école ou participent à une activité scolaire. Cette attente réduite en matière de vie privée, conjuguée à la nécessité de protéger les élèves et de leur procurer une atmosphère propice à l’acquisition de connaissances, indique clairement qu’il y a lieu d’adopter, à l’égard des fouilles effectuées par des enseignants et des directeurs, une attitude plus clémente et souple que dans le cas des fouilles effectuées par la police.

48 Les responsables d’une école peuvent fouiller un élève relevant de leur autorité s’ils ont des motifs raisonnables de croire qu’une règle de l’école a été violée ou est en train de l’être, et que la preuve de cette violation se trouve dans les lieux ou sur la personne de l’élève fouillé. Les fouilles entreprises dans des cas où la santé et la sécurité des élèves est en cause peuvent bien nécessiter l’application d’autres facteurs. Pour déterminer si une fouille est raisonnable, il faut prendre en considération toutes les circonstances qui l’ont entourée.

49 Les autorités scolaires doivent jouir d’un pouvoir discrétionnaire et d’une latitude raisonnables pour être en mesure d’assurer la sécurité de leurs élèves et d’appliquer le règlement de l’école. Celles-ci sont habituellement les mieux placées pour évaluer les renseignements qu’elles reçoivent. Grâce à leur formation et à leur expérience, elles sont les mieux placées pour évaluer les propensions et la crédibilité de leurs élèves, et pour faire le lien entre les renseignements qu’elles reçoivent et la situation qui existe dans leur propre école. Voilà pourquoi les tribunaux devraient reconnaître la situation privilégiée des autorités scolaires pour ce qui est de décider s’il y a des motifs raisonnables de procéder à la fouille.

50 Un enseignant ou un directeur ne devrait pas être tenu d’obtenir un mandat pour fouiller un élève, et, partant, l’absence de mandat dans ces circonstances ne crée pas de présomption de fouille abusive. L’enseignant ou le directeur qui a des motifs raisonnables de croire qu’une règle de l’école a été violée et que la preuve de cette violation peut être découverte sur l’élève même peut procéder légitimement à la fouille de ce dernier. Ces motifs peuvent bien résulter des renseignements reçus d’un seul élève que l’autorité scolaire juge crédible. Subsidiairement, les motifs raisonnables peuvent être fondés sur des renseignements émanant de plus d’un élève ou d’observations faites par des enseignants ou des directeurs, ou d’une combinaison de ces éléments d’information que l’autorité pertinente estime crédibles dans l’ensemble. Cette façon d’aborder les motifs raisonnables dans l’environnement scolaire permettra aux autorités scolaires de réagir rapidement et efficacement aux manquements au règlement de l’école et aux problèmes de discipline, ce qui est si essentiel au maintien d’un environnement sûr et propice à l’acquisition de connaissances. Elle permettra malgré tout d’assurer la protection raisonnable des droits des élèves. La démarche à suivre pour examiner les fouilles effectuées par des enseignants peut se résumer ainsi:

(1) Il n’est pas essentiel que l’autorité scolaire obtienne un mandat pour fouiller un élève.

(2) L’autorité scolaire doit avoir des motifs raisonnables de croire qu’il y a eu manquement au règlement ou à la discipline de l’école et que la fouille d’un élève en apporterait la preuve.

(3) Les autorités scolaires sont les mieux placées pour évaluer les renseignements qui leur sont donnés et pour faire le lien entre ceux‑ci et la situation qui existe dans leur école. Les tribunaux devraient reconnaître la situation privilégiée des autorités scolaires pour ce qui est de décider s’il existe des motifs raisonnables de procéder à la fouille.

(4) Les exemples suivants peuvent constituer des motifs raisonnables dans ce contexte: des renseignements reçus d’un élève jugé crédible, des renseignements émanant de plus d’un élève, des observations d’un enseignant ou d’un directeur, ou d’une combinaison de ces éléments d’information que l’autorité pertinente juge crédibles. La nature convaincante des renseignements reçus et la crédibilité de ces sources ou celle d’autres sources doivent être évaluées par l’autorité scolaire en fonction de la situation qui existe dans l’école donnée.

Si elles suivent cette démarche, les autorités scolaires seront en mesure de concevoir des mesures correctives efficaces et souples.

c) La fouille doit être raisonnable

51 Pour être raisonnable, la fouille doit être effectuée de manière raisonnable et être autorisée par une disposition législative qui est elle-même raisonnable. On ne trouve aucune autorisation particulière de procéder à des fouilles dans l’Education Act, R.S.N.S. 1989, ou dans son règlement d’application. Cependant, la responsabilité qui incombe aux enseignants et aux directeurs de maintenir l’ordre et la discipline dans l’école et de veiller à la santé et au bien-être des élèves autorise, par déduction nécessaire, les fouilles d’élèves. Voir l’al. 54b) de la Loi et les par. 3(7) et (9) du Règlement. Les enseignants doivent pouvoir fouiller les élèves pour être en mesure de s’acquitter des responsabilités que leur impose la loi. Il est raisonnable, voire essentiel, de donner cette autorisation de fouiller aux enseignants et aux directeurs. Il faut maintenant examiner les circonstances dans lesquelles la fouille elle-même peut être jugée raisonnable.

52 La fouille exécutée par les autorités scolaires doit être elle‑même raisonnable et appropriée eu égard aux circonstances et à la nature du manquement au règlement de l’école, dont on soupçonne l’existence. L’étendue acceptable de la fouille variera selon la gravité de l’infraction dont on soupçonne l’existence. Par exemple, il peut être raisonnable qu’un enseignant agisse immédiatement et procède à toute fouille nécessaire lorsqu’il y a des motifs raisonnables de croire qu’un élève transporte un fusil ou une autre arme dangereuse. L’existence d’une menace immédiate à la sécurité des élèves justifie le recours à des fouilles rapides, complètes et approfondies. Le même type de fouille ne serait peut‑être pas justifié si, par exemple, l’on croyait raisonnablement qu’un élève a dans sa poche de la gomme à mâcher interdite par le règlement de l’école. Le caractère raisonnable d’une fouille effectuée par des enseignants ou des directeurs à la suite de la communication de renseignements doit être examiné et apprécié en fonction de toutes les circonstances en cause, y compris la responsabilité qu’ils ont d’assurer la sécurité des élèves.

53 Les circonstances à examiner devraient aussi comprendre l’âge et le sexe de l’élève. Par exemple, la fouille personnelle d’une élève par un enseignant peut bien être déplacée et abusive. Chaque fouille devrait être effectuée de façon aussi délicate que possible et tenir compte de l’âge et du sexe de l’élève. Il ne faudrait pas oublier que la façon dont les élèves sont traités dans de telles circonstances aura une incidence sur leur respect futur des droits d’autrui.

54 Les facteurs qui doivent être pris en considération pour déterminer si la fouille effectuée par un enseignant ou un directeur dans l’environnement scolaire était raisonnable peuvent se résumer ainsi:

1. Il faut d’abord déterminer s’il est possible de déduire des dispositions de la loi sur l’éducation pertinente que les enseignants et les directeurs sont autorisés à fouiller leurs élèves lorsque cela est indiqué. Dans l’environnement scolaire, cette autorisation légale serait raisonnable.

2. La fouille elle‑même doit être effectuée de manière raisonnable. Elle devrait s’effectuer de manière délicate et être la moins envahissante possible.

3. Pour déterminer si une fouille était raisonnable, il faut examiner toutes les circonstances qui l’ont entourée.

d) Quand et à qui cette norme s’applique‑t‑elle?

55 Cette norme modifiée des fouilles raisonnables devrait s’appliquer aux fouilles d’élèves à l’école, effectuées par des enseignants ou des autorités scolaires conformément à leur responsabilité et à leur pouvoir de maintenir l’ordre, la discipline et la sécurité à l’école. Cette norme ne s’appliquera pas aux mesures qui excèdent l’autorité des enseignants ou des directeurs.

56 En outre, la situation est différente si les autorités scolaires agissent en qualité de mandataires de la police. L’application du critère établi dans l’arrêt Broyles, précité, permettra de déterminer si la personne qui a procédé à la fouille était un mandataire de la police. Il faudra déterminer si la fouille aurait eu lieu sous la même forme et de la même manière, n’eût été la participation de la police. La norme habituelle, qui exige une autorisation préalable sous forme de mandat fondé sur des renseignements fournissant des motifs raisonnables et probables, continuera de s’appliquer à la police et à ses mandataires dans leurs activités en milieu scolaire. La norme modifiée applicable aux autorités scolaires est nécessaire pour leur donner la latitude dont elles ont besoin pour s’acquitter de leur responsabilité de maintenir un environnement scolaire sûr et ordonné. Il n’existe cependant aucune raison de dispenser les policiers de se conformer aux normes habituelles uniquement parce que la personne qu’ils souhaitent fouiller est dans une école élémentaire ou secondaire. Puisque la norme habituelle continue de s’appliquer aux actions de la police, elle doit aussi s’appliquer à tout mandataire de la police. S’il en était autrement, il y aurait manifestement un risque d’abus.

(3) Application à la présente affaire

57 La fouille effectuée en l’espèce était‑elle abusive? Je suis d’avis que non. Par conséquent, il n’y a eu aucune violation des droits garantis à l’appelant par l’art. 8 de la Charte.

58 En premier lieu, pour les raisons déjà exposées, je suis convaincu que M. Cadue n’agissait pas en qualité de mandataire de la police. Le seul fait qu’il y ait eu une certaine coopération entre le directeur adjoint et la police, vu qu’ils savaient tous les deux que des accusations criminelles pourraient résulter, ne suffit pas à établir l’existence d’un rapport mandant‑mandataire. Il n’y a tout simplement aucune preuve de l’existence d’une entente entre M. Cadue et l’agent Siepierski, et rien n’indique que M. Cadue ait agi selon des directives de la police. Il a convoqué l’appelant à son bureau et entrepris la fouille dans le but premier de s’acquitter de sa responsabilité de maintenir l’ordre et la discipline à l’école. La fouille a été exécutée conformément au pouvoir qu’il avait, à titre de directeur adjoint, de faire régner la discipline. Le fait qu’il ait su que des procédures criminelles pourraient résulter de la découverte éventuelle de drogue ne change rien à la situation. La fouille aurait eu lieu sous la même forme et de la même manière, indépendamment de toute participation policière. Par conséquent, le directeur adjoint n’agissait pas en qualité de mandataire de la police et, partant, la norme modifiée applicable aux autorités scolaires devrait régir l’examen de la fouille qu’il a effectuée.

59 On ne peut pas dire non plus que le policier a effectué lui‑même la fouille et que c’est donc la norme plus élevée habituelle qui devrait s’appliquer. Le policier a assisté à la fouille, mais n’y a aucunement participé. Sa présence était uniquement passive, jusqu’au moment où la drogue a été découverte et lui a été remise, et l’arrestation effectuée. Si le policier avait participé activement de quelque façon à la fouille, d’autres facteurs devraient s’appliquer. Ce n’est toutefois pas le cas en l’espèce.

60 On a, de plus, allégué que la seule présence du policier était suffisante pour conclure qu’il était en fait l’autorité qui procédait à la fouille. Cette allégation est contredite par la preuve et ne saurait être acceptée. Le policier est demeuré complètement passif en tout temps. Il ne faut pas oublier qu’il peut arriver qu’un élève du secondaire soit plus grand et plus fort que l’enseignant qui doit le fouiller dans le but d’assurer la sécurité des autres élèves. Il n’y a pas de doute que, dans ces circonstances, si l’école en avait les moyens, elle pourrait éventuellement retenir les services d’un agent de sécurité, qui, à moins de menaces de violence, resterait là assis passivement dans le bureau. Sa présence ne compromettrait pas la validité de la fouille. Cela ne devrait faire aucune différence que ce soit un policier qui soit présent pourvu que celui‑ci demeure passif pendant la fouille. En l’espèce, l’élève a, dans son témoignage, exprimé l’avis que M. Cadue était le [traduction] «patron», que c’était son école. Cela confirme qu’aux yeux de l’accusé le policier n’a pas participé à la fouille.

61 En conséquence, le critère applicable aux fouilles effectuées par des enseignants s’applique à la fouille de l’appelant par M. Cadue. L’absence de mandat ne signifie donc pas que la fouille était abusive à première vue. Il reste deux autres questions à examiner. Premièrement, il faut déterminer si le directeur adjoint avait des motifs raisonnables de croire qu’une règle de l’école avait été violée ou était en train de l’être, et que l’on trouverait la preuve de cette violation sur la personne de l’appelant. Deuxièmement, il faut décider si la fouille a été effectuée de manière raisonnable.

62 Monsieur Cadue avait reçu de plusieurs élèves des renseignements indiquant que l’appelant était en possession de marijuana et qu’il en faisait le trafic à l’école. Il a cru que ces renseignements étaient fiables puisque ces élèves connaissaient bien l’appelant. L’un des élèves lui avait déjà donné des renseignements exacts à une autre occasion. Aucun de ces renseignements n’avait été corroboré par ses propres observations, mais cette corroboration n’est pas toujours nécessaire. En l’espèce, les renseignements provenaient de plusieurs sources que le directeur adjoint avait raison de juger crédibles. Le jour de la fouille, il avait été averti précisément que l’appelant transporterait de la drogue ce soir‑là. Cela lui aurait donné des motifs raisonnables de croire qu’il trouverait une substance interdite, à savoir de la marijuana, s’il fouillait alors l’appelant. Compte tenu de tous ces facteurs, la condition qu’il existe des motifs raisonnables est remplie en l’espèce.

63 La fouille entreprise par M. Cadue a été effectuée de manière raisonnable. Elle a eu lieu dans l'intimité relative du bureau du directeur. Elle convenait à l’infraction de possession d’une substance interdite qui, selon ce que M. Cadue croyait raisonnablement, était en la possession de M.R.M. La fouille a été effectuée de la manière la moins envahissante possible et avec suffisamment de délicatesse.

64 En résumé, la fouille était implicitement autorisée par les dispositions de l’Education Act de la Nouvelle‑Écosse. Une disposition autorisant la fouille d’élèves lorsque cela s’impose est raisonnable dans l’environnement scolaire. En sa qualité d’élève, M.R.M. avait une attente réduite en matière de vie privée. Monsieur Cadue avait des motifs raisonnables de croire que M.R.M. violait le règlement de l’école et qu’une fouille permettrait de le prouver. La fouille a été effectuée de manière raisonnable et délicate. Compte tenu de toutes les circonstances, je suis persuadé que la fouille n’était pas abusive et que, dans ce contexte, il n’y a eu aucune violation des droits garantis à M.R.M. par l’art. 8. En satisfaisant à ces exigences, la fouille remplit aussi toutes les conditions du critère établi dans l’arrêt T.L.O. Il y a lieu de noter que cette affaire ne porte que sur une fouille d’élèves exécutée dans une école élémentaire ou secondaire. On ne s’est pas penché sur le cas des fouilles effectuées dans des établissements de niveau collégial ou universitaire.

C. Y a‑t‑il eu violation des droits garantis à l’appelant par l’al. 10b) de la Charte?

65 L’appelant soutient, en outre, qu’il était détenu lorsque M. Cadue l’a emmené dans son bureau et que, parce qu’il n’a pas alors été informé de son droit à l’assistance d’un avocat, il y a eu violation des droits que lui garantit l’al. 10b) de la Charte. Je ne puis retenir cet argument.

66 L’appelant a témoigné qu’il n’estimait n’avoir d’autre choix que de suivre le directeur adjoint à son bureau et d’y rester. Il ne fait aucun doute qu’il a dû éprouver une certaine contrainte. À l’école, les élèves doivent souvent se sentir contraints d’obéir aux règles de l’école et aux directives de leurs enseignants et de leurs directeurs. Les élèves peuvent souvent se voir demander par les enseignants de se rendre à un certain endroit et d’y rester jusqu’à nouvel ordre. Or l’environnement scolaire exige qu’il en soit ainsi. Cela ne signifie pas que les élèves sont détenus au sens de l’al. 10b).

67 Selon la définition qui en a été donnée, la «détention» comprend la «privation de liberté par contrainte physique» ou la situation qui a cours «lorsqu’un policier ou un autre agent de l’État restreint la liberté d’action d’une personne au moyen d’une sommation ou d’un ordre qui peut entraîner des conséquences sérieuses sur le plan juridique et qui a pour effet d’empêcher l’accès à un avocat» (R. c. Therens, [1985] 1 R.C.S. 613, à la p. 642). Même si le fait pour un élève de devoir se présenter au bureau du directeur ou d’être assujetti à quelque autre forme de contrainte de la part d’une autorité scolaire pouvait être perçu comme correspondant aux termes stricts de la définition du mot «détention» dans l’arrêt Therens, il n’y a pas lieu de considérer cela comme de la «détention» aux fins de l’application de l’al. 10b). À mon avis, cette disposition est destinée à s’appliquer non pas aux rapports entre les élèves et les enseignants, mais plutôt aux rapports entre les particuliers et l’État, en ce qui a trait habituellement aux enquêtes relatives à une infraction criminelle. Le droit à l’assistance d’un avocat garanti par l’al. 10b) vise à remédier à la situation de vulnérabilité dans laquelle se trouve le particulier qui est détenu en vertu du pouvoir de coercition de l’État au cours d’une enquête criminelle et qui, ainsi privé de sa liberté, risque de faire des déclarations susceptibles de l’incriminer (R. c. Bartle, [1994] 3 R.C.S. 173, à la p. 191). Son application dans le contexte scolaire n’est pas indiquée et entraînerait des résultats absurdes. Par conséquent, il n’y a pas eu détention au sens de la Charte en l’espèce et il n’est donc pas possible de conclure à l’existence d’une violation de l’al. 10b).

68 Là encore, il faut préciser que si le directeur adjoint avait agi en qualité de mandataire de la police, ou si le policier lui‑même avait joué un rôle actif dans la détention de l’appelant, ce dernier aurait bien pu être détenu au sens de l’al. 10b). D’après les faits de la présente affaire, l’appelant n’a cependant pas été détenu avant son arrestation par l’agent Siepierski. Il a été régulièrement avisé et informé de son droit à l’assistance d’un avocat au moment de son arrestation. Je conclus donc qu’il n’y a eu aucune violation des droits garantis à l’appelant par l’al. 10b).

V. Dispositif

69 En définitive, le pourvoi est rejeté.

Version française des motifs rendus par

//Le juge Major//

70 Le juge Major (dissident) -- Je partage un bon nombre des conclusions du juge Cory.

71 En particulier, je suis d’accord pour dire que les actes que les responsables d’une école accomplissent, en tant que prolongement du gouvernement, sont assujettis à la Charte canadienne des droits et libertés. Je conviens que l’attente en matière de vie privée d’un élève à l’école est suffisante pour déclencher l’application de l’art. 8, mais que cette attente est et devrait être moindre que celle d’un membre du public en général.

72 Il va de soi que les autorités scolaires doivent être en mesure de procurer aux élèves un lieu sûr qui crée un environnement propice à l’acquisition de connaissances. Afin d’assurer l’existence d’un tel environnement, l’Education Act, R.S.N.S. 1989, ch. 136, réduit l’attente en matière de vie privée des élèves en accordant aux enseignants et aux autres membres du personnel d’une école la capacité de fouiller les casiers, les pupitres et les élèves eux-mêmes. Les élèves et les parents connaissent et acceptent ces conditions lors de l’inscription.

73 Je ne partage pas la conclusion du juge Cory selon laquelle la Cour d’appel de la Nouvelle‑Écosse a eu raison d’infirmer la décision du juge du procès et de conclure que le directeur adjoint, en l’espèce, n’agissait pas en qualité de mandataire de la police au moment où il a procédé à la fouille de l’appelant. Le juge du procès avait conclu qu’au moment critique le directeur adjoint agissait en qualité de mandataire de la police. Il y avait des éléments de preuve qui permettaient au juge du procès de tirer cette conclusion, que ni la Cour d’appel de la Nouvelle‑Écosse ni notre Cour ne devraient modifier. En conséquence, j’estime que la fouille à laquelle le directeur adjoint a procédé aurait pu être légale si celui-ci avait alors agi en sa qualité de directeur adjoint. Par contre, comme il agissait en qualité de mandataire de la police, la fouille effectuée exigeait que l’appelant bénéficie des protections que lui assure la Charte.

74 Les présents motifs n’entraveront pas le fonctionnement sûr et ordonné des écoles. Le risque de préjudice physique et l’usage répandu de l’alcool et des drogues illégales dans certaines écoles sont une réalité triste mais bien connue. Les membres du personnel d’une école sont en mesure de régler ces problèmes. S’ils choisissent de faire appel à la police, ce qui serait prudent dans bien des cas, et que, ce faisant, ils décident de devenir ses mandataires, la procédure prescrite en matière d’enquête policière doit alors être suivie.

Les faits

75 La chronologie des faits à l’origine du présent pourvoi est décrite au complet dans les motifs du juge Cory.

Analyse

Première question

76 Au procès, le juge Dyer du tribunal de la famille a statué que le directeur adjoint, M. Cadue, avait agi en qualité de mandataire de l’agent Siepierski lorsqu’il a fouillé l’appelant et son copain en vue de trouver des stupéfiants. Il a conclu:

[traduction] La présente affaire concernait, au départ, une jeune personne et un responsable d’école. Le policier était là à la demande de Cadue qu’il a toutefois autorisé à effectuer une fouille personnelle. Je conclus à l’existence d’une stratégie concertée selon laquelle Cadue procéderait à la fouille et le policier porterait une accusation de possession si cette fouille était fructueuse. À ce stade, une enquête criminelle battait son plein. De ce fait, je conclus que Cadue est ainsi devenu un mandataire de la police malgré les apparences et l’absence d’une déclaration officielle des rôles à leur retour dans le bureau.

La Cour d’appel de la Nouvelle‑Écosse a écarté cette conclusion de fait pour le motif que la preuve disponible ne permettait pas de conclure à l’existence d’un mandat et que la seule présence d’un policier n’était pas suffisante pour donner naissance à un rapport mandant‑mandataire: voir R. c. Broyles, [1991] 3 R.C.S. 595. L’arrêt Broyles, qui concernait le recours à un indicateur de police, a établi un critère pour décider quand cet indicateur est un représentant ou mandataire de la police. Pour décider si un indicateur est un représentant de l’État, la question qui se pose est (à la p. 608): «L’échange entre l’accusé et l’indicateur aurait‑il eu lieu, de la même façon et sous la même forme, n’eût été l’intervention de l’État ou de ses représentants?»

77 Le critère de l’arrêt Broyles devrait être interprété à la lumière des circonstances auxquelles il s’applique. Dans le présent pourvoi, la situation est nettement différente de celle où la police charge un indicateur de gagner l’amitié d’une personne afin de recueillir les renseignements qu’elle désire. Les responsables d’une école qui procèdent à des fouilles le font généralement spontanément dans le but de vérifier s’il y a manquement aux règles de l’école, et non pas sur l’ordre de la police dans le cadre d’une enquête criminelle. Les responsables d’une école n’ont généralement pas l’habitude de procéder à des fouilles et il est probable que l’intervention ou la présence d’un policier affectera la nature de ce genre de fouille. Il est faux de prétendre, comme le fait l’intimée, que la présence du policier n’a aucun effet sur la perception que l’appelant peut avoir de l’interrogatoire et de la fouille subséquente.

78 J’estime qu’il n’y a pas lieu de modifier la conclusion du juge du procès et les déductions qu’il en fait. Le directeur adjoint et le policier se sont entretenus à l’extérieur du bureau du directeur avant que le directeur adjoint ne procède à la fouille de l’appelant. Le juge du procès pouvait conclure, comme il l’a fait raisonnablement, que le directeur adjoint avait reçu des directives du policier sur la façon de procéder à la fouille. Il n’y avait aucune preuve du contenu de la conversation que le policier et le directeur adjoint ont eue à l’extérieur du bureau où les élèves étaient détenus, mais je partage l’opinion du juge du procès qu’il est exagéré de prétendre que leur rencontre a porté sur autre chose que la raison d’appeler la police et la manière de procéder à la fouille.

79 Il est particulièrement révélateur que le directeur adjoint ait témoigné que la politique de l’école l’obligeait à communiquer avec la Gendarmerie royale du Canada («GRC») lorsqu’un élève était surpris avec de la drogue ou de l’alcool en sa possession, s’il croyait que cette possession était de nature criminelle. Cette politique, si valable soit‑elle, a pour effet de transformer un responsable d’école en mandataire de facto de la police lorsque cette dernière retient ses services pour procéder à l’enquête subséquente.

80 Notre société fait appel à ses agents de la paix pour assurer notre sécurité; leur métier est dangereux. L’utilisation de raccourcis par les fonctionnaires chargés d’appliquer la loi s’avérera souvent efficace mais pourra tout aussi souvent contrevenir aux droits garantis par la Charte, comme cela s’est produit en l’espèce.

Deuxième question

81 La fouille de l’appelant a été effectuée sans mandat et était donc abusive à première vue: voir Hunter c. Southam Inc., [1984] 2 R.C.S. 145. Pour établir le caractère raisonnable, le ministère public doit démontrer: (1) que la fouille était autorisée par la loi, (2) que la loi autorisant la fouille était raisonnable, et (3) que la manière dont la fouille a été effectuée était raisonnable. L’intimée a soutenu que l’Education Act était la loi qui autorisait le directeur adjoint à fouiller l’appelant. Cependant, s’il avait agi en qualité de mandataire de la police, il aurait tiré son pouvoir de fouiller de la Loi sur les stupéfiants, L.R.C. (1985), ch. N‑1 (maintenant abrogée). L’article 11 de la Loi sur les stupéfiants prévoit ceci:

11. L’agent de la paix peut, dans le lieu qu’il perquisitionne en application de l’article 10, saisir, d’une part, un stupéfiant ou un objet qu’il soupçonne, pour des motifs raisonnables, de contenir ou de cacher un stupéfiant et, d’autre part, un objet qu’il croit, pour des motifs raisonnables, relié à la perpétration d’une infraction à la présente loi ou susceptible de servir à prouver la perpétration d’une telle infraction. La perquisition du lieu inclut la fouille d’une personne qui s’y trouve.

82 L’arrêt de notre Cour R. c. Debot, [1989] 2 R.C.S. 1140, à la p. 1168, indique quels critères devraient être pris en considération pour déterminer si une fouille sans mandat peut être justifiée:

(i) Les renseignements permettant de prévoir la perpétration d’une infraction criminelle étaient‑ils convaincants?

(ii) Si ces renseignements reposent sur un tuyau provenant d’une source extérieure à la police, cette source était‑elle fiable?

(iii) L’enquête de la police confirmait‑elle ces renseignements avant que les policiers décident de procéder à la fouille?

83 Je suis d’accord avec le juge Cory pour dire que ces critères ne devraient pas s’appliquer avec autant de rigueur aux fouilles effectuées par des responsables d’une école, mais, en l’espèce, le directeur adjoint agissait en qualité de mandataire de la police, et non pas en sa qualité d’administrateur d’une école. Aucune norme modifiée du caractère raisonnable ne s’applique à la conduite de la police ou de ses mandataires du simple fait qu’ils procèdent à une fouille dans une école et que la fouille est effectuée d’une manière qui serait appropriée si elle était faite seulement par le personnel de l’école.

84 Les circonstances dans lesquelles la fouille a eu lieu contreviennent à l’art. 8 parce qu’elles ne satisfont pas à la norme établie dans Debot. En tant que mandataire de la police, le directeur adjoint n’a effectué aucune vérification pour confirmer les renseignements qu’il avait reçus; il s’est contenté d’agir sur la foi de ce que lui avaient dit les indicateurs. Bien qu’il ne soit pas nécessaire de satisfaire complètement aux trois conditions du critère de l’arrêt Debot, étant donné que la faiblesse d’un élément peut être compensée par la force d’autres éléments, le caractère raisonnable de la fouille en question était précaire. Les tuyaux étaient quelque peu convaincants mais ils manquaient de précision quant à l’endroit où l’appelant transporterait la drogue. De plus, le directeur adjoint a eu peu de contacts avec l’un des indicateurs et aucun avec les autres. Sa capacité d’évaluer leur crédibilité se trouvait donc limitée.

Application du par. 24(2)

85 Pour décider si un élément de preuve obtenu en violation de la Charte devrait être admis, trois facteurs sont considérés: l’équité du procès, la gravité de la violation et l’effet que l’exclusion de l’élément de preuve aurait sur la considération dont jouit l’administration de la justice: voir R. c. Collins, [1987] 1 R.C.S. 265. Dans les deux arrêts R. c. Stillman, [1997] 1 R.C.S. 607, et R. c. Belnavis, [1997] 3 R.C.S. 341, la Cour a exposé l’analyse à faire pour décider si un élément de preuve devrait être écarté conformément au par. 24(2) de la Charte.

86 L’arrêt Stillman a décrit l’équité du procès comme un facteur d’une importance fondamentale et a recommandé de classifier la preuve selon qu’elle est obtenue ou non par mobilisation de l’accusé contre lui‑même. À la page 655, le juge Cory statue ceci:

La preuve est obtenue en mobilisant l’accusé contre lui‑même lorsque l’accusé, en violation de ses droits garantis par la Charte, est forcé de s’incriminer sur l’ordre de l’État au moyen d’une déclaration, de l’utilisation de son corps ou de la production de substances corporelles.

Si l’utilisation de l’élément de preuve contesté rendait le procès inéquitable, cet élément doit être écarté indépendamment des autres facteurs du par. 24(2). En général, la preuve obtenue par mobilisation de l’accusé contre lui‑même nuit à l’équité du procès.

87 L’intimée a soutenu que la preuve en l’espèce ne devrait pas être qualifiée de preuve obtenue par mobilisation de l’appelant contre lui‑même car celui‑ci a simplement accompli un geste qui a aidé le directeur adjoint à trouver les stupéfiants. L’intimée a ajouté qu’il s’agissait d’un élément de preuve matérielle qui, de toute façon, était fort susceptible d’être découvert puisque le directeur adjoint aurait pu suivre l’appelant et attendre qu’il retire de son propre chef la drogue de sa chaussette: voir R. c. Evans, [1996] 1 R.C.S. 8.

88 L’appelant a été détenu par le directeur adjoint et s’est senti obligé d’obtempérer aux demandes de ce dernier et du policier, de sorte qu’il est déraisonnable de considérer qu’il n’a fait qu’aider le directeur adjoint en se déchaussant et en relevant la jambe de son pantalon. Ces actes étaient essentiels à la découverte des stupéfiants. De même, je ne juge pas convaincante la prétention de l’intimée que l’élément de preuve aurait inévitablement été découvert si le directeur adjoint avait suivi l’appelant et attendu qu’il retire le stupéfiant de sa chaussette. Cela est très hypothétique vu que l’appelant aurait pu éventuellement quitter la danse sans retirer le stupéfiant de sa chaussette.

89 Bref, je suis d’avis de qualifier la preuve en l’espèce de preuve obtenue par mobilisation de l’accusé contre lui‑même et de conclure que son utilisation nuirait à l’équité du procès. Étant donné ma conclusion, il n’est pas nécessaire d’examiner les autres facteurs du par. 24(2) et, en conséquence, j’écarterais l’élément de preuve en cause.

Dispositif

90 En définitive, je suis d’avis d’accueillir le pourvoi et de rétablir l’acquittement de l’appelant.

Pourvoi rejeté, le juge Major est dissident.

Procureur de l’appelant: Nova Scotia Legal Aid, Halifax.

Procureur de l’intimée: Le procureur général du Canada, Ottawa.


Sens de l'arrêt : Le pourvoi est rejeté

Analyses

Droit constitutionnel - Charte des droits - Application -- Fouilles, perquisitions et saisies à l’école - Élève d’école secondaire de premier cycle soupçonné de trafic de drogue et fouillé à l’école par le directeur adjoint en présence de la GRC - La protection contre les fouilles, les perquisitions et les saisies abusives s’applique-t-elle aux fouilles d’étudiants à l’école? -- Charte canadienne des droits et libertés, art. 32.

Droit constitutionnel - Charte des droits - Fouilles, perquisitions et saisies - Élève d’école secondaire de premier cycle soupçonné de trafic de drogue et fouillé à l’école par le directeur adjoint en présence de la GRC - Drogue illégale découverte - Circonstances dans lesquelles une fouille par un responsable d’école est abusive - Les normes habituelles en matière de fouille, perquisition et saisie s’appliquent-elles en contexte scolaire? -- La preuve saisie est‑elle admissible? - Charte canadienne des droits et libertés, art. 8, 24(2).

Droit constitutionnel — Charte des droits — Détention -- Écoles -- Élève soupçonné de trafic de drogue forcé de se rendre au bureau d’un responsable d’école et d’y subir une fouille par le directeur adjoint en présence de la GRC -- L’élève était-il détenu au sens de l’art. 10b) de la Charte canadienne des droits et libertés?

Des élèves ont donné au directeur adjoint d’une école secondaire de premier cycle des renseignements raisonnablement dignes de foi, selon lesquels l’accusé, un autre élève, avait l’intention de vendre de la drogue lors d’une activité scolaire tenue à l’école. Le directeur adjoint a invité l’accusé et son compagnon à se rendre à son bureau où il a demandé à chacun d’eux s’ils étaient en possession de drogue, en les prévenant qu’il les fouillerait. Un agent de la GRC en tenue civile, appelé par le directeur adjoint conformément à la politique de l’école, était présent mais est resté muet pendant que le directeur adjoint parlait aux élèves et les fouillait. Le directeur adjoint a découvert et saisi un sac de cellophane contenant de la marijuana et l’a remis au policier qui a informé l’accusé qu’il était en état d’arrestation pour possession d’un stupéfiant. Le policier lui a fait lecture de la mise en garde policière et de son droit à l’assistance d’un avocat, et l’a avisé qu’il avait le droit de communiquer avec un parent ou un adulte. L’accusé a tenté en vain de joindre sa mère par téléphone et a déclaré qu’il ne souhaitait communiquer avec personne d’autre. Le policier et l’accusé se sont ensuite rendus au casier de l’accusé, qu’ils ont fouillé sans rien y trouver.

Le juge du procès a conclu que le directeur adjoint avait agi en qualité de mandataire de la police et que la fouille avait porté atteinte aux droits garantis à l’accusé par la Charte canadienne des droits et libertés. Il a écarté les éléments de preuve qu’elle avait permis de découvrir. Le ministère public n’a présenté aucun autre élément de preuve et l’accusation portée contre l’accusé a été rejetée. La Cour d’appel a accueilli l’appel du ministère public et ordonné la tenue d’un nouveau procès. Il s’agit, en l’espèce, de déterminer quand et dans quelles circonstances la fouille d’un élève par un responsable d’école élémentaire ou secondaire devrait être considérée comme abusive et donc contraire aux droits garantis à cet élève par la Charte.

Arrêt (le juge Major est dissident): Le pourvoi est rejeté.

Le juge en chef Lamer et les juges L’Heureux‑Dubé, Gonthier, Cory, McLachlin, Iacobucci, Bastarache et Binnie: La protection de la Charte contre les fouilles, les perquisitions et les saisies abusives (art. 8) s’applique parce que les écoles font partie du gouvernement.

Le seul fait qu’il y ait eu coopération entre le directeur adjoint et la police et qu’un policier ait assisté à la fouille n’est pas suffisant pour indiquer que le directeur adjoint agissait en qualité de mandataire de la police. La fouille aurait eu lieu sans le policier et elle n’était pas réellement différente de ce qu’elle aurait été s’il n’y avait eu aucune participation de la police.

Pour démontrer l’existence d’une violation de l’art. 8 de la Charte, l’accusé doit d’abord établir qu’il avait une attente raisonnable en matière de vie privée à l’égard de l’endroit pertinent. Étant donné que c’est l’accusé qui a été fouillé, l’existence d’une attente subjective en matière de vie privée et le caractère objectivement raisonnable de cette attente sont importants. L’attente subjective en matière de vie privée qui, par le passé, a été reconnue aux gens en ce qui concerne leur personne même est raisonnable et ne devient pas déraisonnable du seul fait que l’élève se trouve à l’école. L’attente raisonnable en matière de vie privée peut toutefois être réduite dans certaines circonstances. Dans le cas d’un élève à l’école, elle est moindre que celle qu’il aurait dans d’autres circonstances, car les élèves savent que leurs enseignants et autres autorités scolaires ont la responsabilité de procurer un environnement sûr et de maintenir l’ordre et la discipline dans l’école. Ils savent que cela peut parfois commander la fouille d’élèves et de leurs effets personnels de même que la saisie d’articles interdits.

Une norme différente devrait s’appliquer aux fouilles effectuées par des autorités scolaires. Les enseignants et les directeurs occupent un poste de confiance qui comporte les lourdes responsabilités d’enseigner et de veiller à la sécurité et au bien‑être des enfants. Aux fins de l’enseignement, les responsables d’une école doivent procurer une atmosphère propice à l’apprentissage. La possession de drogues illicites et le port d’armes dangereuses à l’école menacent la capacité des responsables d’une école de remplir leur devoir. Les conditions actuelles sont telles qu’il faut donner aux enseignants et aux administrateurs scolaires la souplesse nécessaire pour régler les problèmes de discipline à l’école et être en mesure d’agir rapidement et efficacement. L’une des façons dont les autorités scolaires peuvent être appelées à réagir raisonnablement consiste à fouiller des élèves et à saisir des articles interdits. En matière de droit criminel, la preuve découverte par un enseignant ou par un directeur ne devrait pas être écartée parce que la fouille aurait été abusive si elle avait été effectuée par la police.

Selon la règle générale établie par notre Cour, une perquisition ou une fouille doit, pour être raisonnable, avoir fait l’objet d’une autorisation préalable (habituellement sous forme de mandat), et reposer sur des motifs raisonnables et probables. Une perquisition ou fouille effectuée sans autorisation préalable est abusive à première vue. Exiger un mandat ou une autre autorisation préalable pour procéder à la fouille serait clairement peu pratique et irréalisable dans l’environnement scolaire. Les enseignants et les directeurs doivent pouvoir répondre rapidement et efficacement aux problèmes qui surgissent à l’école, afin de protéger leurs élèves et procurer l’atmosphère ordonnée propice à l’acquisition de connaissances. Leur rôle est tel qu’ils doivent pouvoir effectuer des fouilles. En outre, l’attente des élèves en matière de vie privée sera moindre pendant qu’ils sont à l’école ou participent à une activité scolaire. Cette attente réduite en matière de vie privée, conjuguée à la nécessité de protéger les élèves et de leur procurer une atmosphère propice à l’acquisition de connaissances, indique clairement qu’il y a lieu d’adopter, à l’égard des fouilles effectuées par des enseignants et des directeurs, une attitude plus clémente et souple que dans le cas des fouilles effectuées par la police.

La fouille d’un élève par les responsables d’une école n’a pas à reposer sur des motifs raisonnables et probables. Au contraire, dans ces circonstances, ils peuvent effectuer cette fouille s’ils ont des motifs raisonnables de croire qu’une règle de l’école a été violée ou est en train de l’être, et que la preuve de cette violation se trouve dans les lieux ou sur la personne de l’élève fouillé. Les fouilles entreprises dans des cas où la santé et la sécurité des élèves est en cause peuvent bien nécessiter l’application d’autres facteurs. Pour déterminer si une fouille est raisonnable, il faut prendre en considération toutes les circonstances qui l’ont entourée.

Un enseignant ou un directeur ne devrait pas être tenu d’obtenir un mandat pour fouiller un élève, et, partant, l’absence de mandat dans ces circonstances ne crée pas de présomption de fouille abusive. L’enseignant ou le directeur qui a des motifs raisonnables de croire qu’une règle de l’école a été violée et que la preuve de cette violation peut être découverte sur l’élève même peut procéder légitimement à la fouille de ce dernier. Ces motifs peuvent bien résulter de renseignements reçus d’un seul élève que l’autorité scolaire juge crédible. Subsidiairement, les motifs raisonnables peuvent être fondés sur des renseignements émanant de plus d’un élève ou d’observations faites par des enseignants ou des directeurs, ou d’une combinaison de ces éléments d’information que l’autorité pertinente estime crédibles dans l’ensemble. La démarche à suivre pour examiner les fouilles effectuées par des enseignants peut se résumer ainsi:

(1) Il n’est pas essentiel que l’autorité scolaire obtienne un mandat pour fouiller un élève.

(2) L’autorité scolaire doit avoir des motifs raisonnables de croire qu’il y a eu manquement au règlement ou à la discipline de l’école et que la fouille d’un élève en apporterait la preuve.

(3) Les autorités scolaires sont les mieux placées pour évaluer les renseignements qui leur sont donnés et pour faire le lien entre ceux‑ci et la situation qui existe dans leur école. Les tribunaux devraient reconnaître la situation privilégiée des autorités scolaires pour ce qui est de décider s’il existe des motifs raisonnables de procéder à la fouille.

(4) Les exemples suivants peuvent constituer des motifs raisonnables dans ce contexte: des renseignements reçus d’un élève jugé crédible, des renseignements émanant de plus d’un élève, des observations d’un enseignant ou d’un directeur, ou d’une combinaison de ces éléments d’information que l’autorité pertinente juge crédibles. La nature convaincante des renseignements reçus et la crédibilité de ces sources ou celle d’autres sources doivent être évaluées par l’autorité scolaire en fonction de la situation qui existe dans l’école donnée.

La fouille exécutée par les autorités scolaires doit elle‑même être raisonnable, autorisée par la loi et appropriée eu égard aux circonstances et à la nature du manquement au règlement de l’école, dont on soupçonne l’existence. L’étendue acceptable de la fouille variera selon la gravité de l’infraction dont on soupçonne l’existence. Le caractère raisonnable d’une fouille effectuée par des enseignants ou des directeurs à la suite de la communication de renseignements doit être examiné et apprécié en fonction de toutes les circonstances en cause, y compris la responsabilité qu’ils ont d’assurer la sécurité des élèves. Les circonstances à examiner devraient aussi comprendre l’âge et le sexe de l’élève.

Les facteurs qui doivent être pris en considération pour déterminer si la fouille effectuée par un enseignant ou un directeur dans l’environnement scolaire était raisonnable peuvent se résumer ainsi:

1. Il faut d’abord déterminer s’il est possible de déduire des dispositions de la loi sur l’éducation pertinente que les enseignants et les directeurs sont autorisés à fouiller leurs élèves lorsque cela est indiqué. Dans l’environnement scolaire, cette autorisation légale serait raisonnable.

2. La fouille elle‑même doit être effectuée de manière raisonnable. Elle devrait s’effectuer de manière délicate et être la moins envahissante possible.

3. Pour déterminer si une fouille était raisonnable, il faut examiner toutes les circonstances qui l’ont entourée.

Cette norme modifiée des fouilles raisonnables devrait s’appliquer aux fouilles d’élèves à l’école, effectuées par des enseignants ou des autorités scolaires conformément à leur responsabilité et à leur pouvoir de maintenir l’ordre, la discipline et la sécurité à l’école. Cette norme ne s’appliquera pas aux mesures qui excèdent l’autorité des enseignants ou des directeurs. En outre, la situation est différente si les autorités scolaires agissent en qualité de mandataires de la police, et, dans ce cas, les normes habituelles s’appliquent.

En l’espèce, le directeur adjoint n’agissait pas en qualité de mandataire de la police et le policier n’a pas lui‑même effectué la fouille. La seule présence du policier n’était pas suffisante pour conclure qu’il était en fait l’autorité qui procédait à la fouille. Le policier est demeuré complètement passif en tout temps. Le critère applicable aux fouilles effectuées par des enseignants s’appliquait donc. La fouille était implicitement autorisée par les dispositions de l’Education Act de la Nouvelle‑Écosse. En sa qualité d’élève, l’accusé avait une attente réduite en matière de vie privée. Le directeur adjoint avait des motifs raisonnables de croire que l’accusé violait le règlement de l’école et qu’une fouille permettrait de le prouver. La fouille a été effectuée de manière raisonnable et délicate. Compte tenu de toutes les circonstances, la fouille n’était pas abusive et ne violait pas les droits garantis à l’accusé par l’art. 8.

Cette affaire ne porte que sur une fouille d’élèves exécutée dans une école élémentaire ou secondaire. On ne s’est pas penché sur le cas des fouilles effectuées dans des établissements de niveau collégial ou universitaire.

Même si le fait pour un élève de devoir se présenter au bureau du directeur ou d’être assujetti à quelque autre forme de contrainte de la part d’une autorité scolaire pouvait être perçu comme correspondant aux termes stricts de la définition du mot «détention», il n’y a pas lieu de considérer cela comme de la «détention» aux fins de l’application de l’al. 10b). Cette disposition est destinée à s’appliquer non pas aux rapports entre les élèves et les enseignants, mais plutôt aux rapports entre les particuliers et l’État, en ce qui a trait habituellement aux enquêtes relatives à une infraction criminelle. Son application dans le contexte scolaire n’est pas indiquée et entraînerait des résultats absurdes.

Le juge Major (dissident): Les actes que les responsables d’une école accomplissent, en tant que prolongement du gouvernement, sont assujettis à la Charte. L’attente en matière de vie privée d’un élève à l’école est suffisante pour déclencher l’application de l’art. 8, mais cette attente est et devrait être moindre que celle d’un membre du public en général.

Une fouille effectuée sans mandat est abusive à première vue. Pour établir le caractère raisonnable d’une fouille, le ministère public doit démontrer qu’elle était autorisée par une loi raisonnable et qu’elle a été effectuée d’une manière raisonnable. Une fouille sans mandat peut être justifiée (1) si les renseignements permettant de prévoir la perpétration du crime étaient convaincants, (2) si la source était fiable et (3), si les renseignements étaient confirmés. Ces critères ne devraient pas s’appliquer avec autant de rigueur aux fouilles effectuées par des responsables d’une école agissant en leur qualité de responsables d’une école.

En l’espèce, le directeur adjoint agissait en qualité de mandataire de facto de la police en raison de la politique de l’école qui obligeait les autorités scolaires à communiquer avec la police lorsqu’un élève était surpris avec de la drogue. La fouille effectuée exigeait donc que l’accusé bénéficie des protections que lui assure la Charte. De plus, les circonstances dans lesquelles la fouille a eu lieu contreviennent à l’art. 8 parce qu’elles ne satisfont pas aux normes requises pour qu’une fouille soit valide. En tant que mandataire de la police, le directeur adjoint n’a effectué aucune vérification pour confirmer les renseignements qu’il avait reçus; il s’est contenté d’agir sur la foi de ce que lui avaient dit les indicateurs. La fouille à laquelle le directeur adjoint a procédé aurait pu être légale s’il avait alors agi en sa qualité de directeur adjoint, en raison de la norme modifiée du caractère raisonnable qui régit les fouilles effectuées par des responsables scolaires.

Pour décider si un élément de preuve obtenu en violation de la Charte devrait être admis en vertu du par. 24(2) de la Charte, il faut considérer l’équité du procès, la gravité de la violation et l’effet que l’exclusion de l’élément de preuve aurait sur la considération dont jouit l’administration de la justice. Étant donné que l’accusé a été détenu par le directeur adjoint et qu’il s’est senti obligé d’obtempérer aux demandes de ce dernier et du policier, la preuve était une preuve obtenue par mobilisation de l’accusé contre lui‑même. L’utilisation de cette preuve nuirait à l’équité du procès, de sorte qu’elle devrait être écartée en vertu du par. 24(2) de la Charte.


Parties
Demandeurs : Sa Majesté la Reine
Défendeurs : M. (M.R.)

Références :

Jurisprudence
Citée par le juge Cory
Arrêt appliqué: R. c. Broyles, [1991] 3 R.C.S. 595
arrêts examinés: R. c. J.M.G. (1986), 56 O.R. (2d) 705
New Jersey c. T.L.O., 469 U.S. 325 (1985), conf. 94 N.J. 331 (1983)
Hunter c. Southam Inc., [1984] 2 R.C.S. 145
arrêts mentionnés: R. c. Debot, [1989] 2 R.C.S. 1140
R. c. Simmons, [1988] 2 R.C.S. 495
British Columbia Securities Commission c. Branch, [1995] 2 R.C.S. 3
McKinney c. Université de Guelph, [1990] 3 R.C.S. 229
Douglas/Kwantlen Faculty Assn. c. Douglas College, [1990] 3 R.C.S. 570
Eldridge c. Colombie‑Britannique (Procureur général), [1997] 3 R.C.S. 624
R. c. Edwards, [1996] 1 R.C.S. 128
Schreiber c. Canada (Procureur général), [1998] 1 R.C.S. 841
R. c. Colarusso, [1994] 1 R.C.S. 20
R. c. Wong, [1990] 3 R.C.S. 36
Zamora c. Pomeroy, 639 F.2d 662 (1981)
People c. Overton, 301 N.Y.S.2d 479 (1969)
State in Interest of T.L.O. c. Engerud, 94 N.J. 331 (1983), conf. 469 U.S. 325 (1985)
Cloutier c. Langlois, [1990] 1 R.C.S. 158
R. c. Therens, [1985] 1 R.C.S. 613
R. c. Bartle, [1994] 3 R.C.S. 173.
Citée par le juge Major (dissident)
R. c. Broyles, [1991] 3 R.C.S. 595
Hunter c. Southam Inc., [1984] 2 R.C.S. 145
R. c. Debot, [1989] 2 R.C.S. 1140
R. c. Collins, [1987] 1 R.C.S. 265
R. c. Stillman, [1997] 1 R.C.S. 607
R. c. Belnavis, [1997] 3 R.C.S. 341
R. c. Evans, [1996] 1 R.C.S. 8.
Lois et règlements cités
Charte canadienne des droits et libertés, art. 8, 10b), 24(2), 32(1).
Education Act, R.S.N.S. 1989, ch. 136, art. 54b), g).
Education Act, General Regulations, N.S. Reg. 226/84, art. 3(7), (9).
Loi sur les stupéfiants, L.R.C. (1985), ch. N‑1, art. 11 [abr. 1996, ch. 19, art. 94].
Doctrine citée
Fischer, Thomas C. «From Tinker to TLO
Are Civil Rights for Students “Flunking” in School?» (1993), 22 J. L. & Education 409.
Sanchez, J. M. «Expelling the Fourth Amendment from American Schools: Students’ Rights Six Years After T.L.O.» (1992), 21 J. L. & Education 381.

Proposition de citation de la décision: R. c. M. (M.R.), [1998] 3 R.C.S. 393 (26 novembre 1998)


Origine de la décision
Date de la décision : 26/11/1998
Date de l'import : 06/04/2012

Numérotation
Référence neutre : [1998] 3 R.C.S. 393 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ca;cour.supreme;arret;1998-11-26;.1998..3.r.c.s..393 ?
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