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22/01/2009 | CANADA | N°2009_CSC_5

Canada | R. c. Smith, 2009 CSC 5 (22 janvier 2009)


COUR SUPRÊME DU CANADA

Référence : R. c. Smith, 2009 CSC 5, [2009] 1 R.C.S. 146

Date : 20090122

Dossiers : 32323, 31980

Entre :

Neil William Smith

Appelant

et

Sa Majesté la Reine

Intimée

et entre :

Wayne Alexander James

Appelant

et

Sa Majesté la Reine

Intimée

‑ et ‑

Procureur général de l’Ontario et Criminal Lawyers’ Association (Ontario)

Intervenants

Traduction française officielle

Coram : Binnie, LeBel, Deschamps, Fish, Abella, Charron

et Rothstein

Motifs de jugement :

(par. 1 à 17)

Motifs concordants en partie :

(par. 18 à 23)

Le juge Fish (avec l’accord des juges Binnie, LeBel, Abella, Charron et Rothstein)

La...

COUR SUPRÊME DU CANADA

Référence : R. c. Smith, 2009 CSC 5, [2009] 1 R.C.S. 146

Date : 20090122

Dossiers : 32323, 31980

Entre :

Neil William Smith

Appelant

et

Sa Majesté la Reine

Intimée

et entre :

Wayne Alexander James

Appelant

et

Sa Majesté la Reine

Intimée

‑ et ‑

Procureur général de l’Ontario et Criminal Lawyers’ Association (Ontario)

Intervenants

Traduction française officielle

Coram : Binnie, LeBel, Deschamps, Fish, Abella, Charron et Rothstein

Motifs de jugement :

(par. 1 à 17)

Motifs concordants en partie :

(par. 18 à 23)

Le juge Fish (avec l’accord des juges Binnie, LeBel, Abella, Charron et Rothstein)

La juge Deschamps

______________________________

R. c. Smith, 2009 CSC 5, [2009] 1 R.C.S. 146

Neil William Smith Appelant

c.

Sa Majesté la Reine Intimée

‑ et ‑

Wayne Alexander James Appelant

c.

Sa Majesté la Reine Intimée

et

Procureur général de l’Ontario et

Criminal Lawyers’ Association (Ontario) Intervenants

Répertorié : R. c. Smith

Référence neutre : 2009 CSC 5.

Nos du greffe : 32323, 31980.

2008 : 28 mars; 2009 : 22 janvier.

Présents : Les juges Binnie, LeBel, Deschamps, Fish, Abella, Charron et Rothstein.

en appel de la cour d’appel de la nouvelle‑écosse

POURVOIS contre un arrêt de la Cour d’appel de la Nouvelle‑Écosse (les juges Cromwell, Hamilton et Fichaud), 2007 NSCA 19, 251 N.S.R. (2d) 236 (sub nom. R. c. James), 802 A.P.R. 236, 216 C.C.C. (3d) 490, [2007] N.S.J. No. 56 (QL), 2007 CarswellNS 61, qui a confirmé les déclarations de culpabilité des deux accusés. Pourvois rejetés.

Timothy E. Breen, pour l’appelant Neil William Smith.

Donald C. Murray, c.r., pour l’appelant Wayne Alexander James.

James A. Gumpert, c.r., Peter J. Craig et Jennifer A. MacLellan, pour l’intimée.

Jennifer M. Woollcombe, pour l’intervenant le procureur général de l’Ontario.

Donald B. Bayne et Norman D. Boxall, pour l’intervenante Criminal Lawyers’ Association (Ontario).

Version française du jugement des juges Binnie, LeBel, Fish, Abella, Charron et Rothstein rendu par

Le juge Fish —

I

[1] En l’espèce, la Cour doit seulement statuer sur la suffisance de la mise en garde que le juge du procès a adressée au jury au sujet de deux témoins douteux.

[2] Dans les pourvois connexes R. c. Khela et R. c. Sahota, 2009 CSC 4, [2009] 1 R.C.S. 104, j’ai exposé le raisonnement qu’il convient d’adopter pour l’examen en appel du caractère adéquat des mises en garde de type Vetrovec (Vetrovec c. La Reine, [1982] 1 R.C.S. 811, p. 831). J’ai souligné que les tribunaux d’appel ne doivent pas mesurer la suffisance d’une mise en garde selon un critère de perfection. Il s’agit plutôt de se demander principalement si la directive a atteint son but : avertir le jury du danger de se fier à la déposition d’un témoin dont la crédibilité est contestée sans être conforté dans son opinion, par quelque autre élément de preuve, qu’il dit la vérité au sujet de l’implication de l’accusé dans le crime. La mise en garde doit aussi indiquer au jury le type de preuve pouvant le conforter à cet égard.

[3] En l’espèce, le juge du procès a fait une mise en garde approfondie et complète au sujet de deux individus très douteux. Selon toute interprétation raisonnable des faits au dossier, il est clair que le jury était resté avec l’impression que les témoins dont la crédibilité était contestée étaient extrêmement suspects et qu’il ne fallait accepter leurs témoignages qu’avec grande prudence.

[4] Je ne suis pas convaincu que le juge du procès ait commis une erreur dans la mise en garde qu’il a adressée au jury à propos des deux témoins douteux. Je suis donc d’avis de rejeter le pourvoi.

II

[5] Sean Simmons a été tué par balles le 3 octobre 2000 à Dartmouth, en Nouvelle‑Écosse. Les appelants, Wayne James et Neil Smith, ont été accusés d’avoir comploté avec Steven Gareau et Dean Kelsie pour le tuer et accusés de meurtre au premier degré. Selon la théorie du ministère public, M. Smith, un trafiquant de drogue de haut niveau qui fréquentait les Hells Angels de Halifax, a ordonné le meurtre de M. Simmons, MM. James et Paul Derry devant prendre les arrangements nécessaires et M. Gareau ou M. Kelsie, ou les deux, devant exécuter le meurtre.

[6] La preuve à charge qui pesait contre les appelants reposait, en grande partie, sur les témoignages de M. Derry et de sa femme, Tina Potts. Ceux‑ci avaient été impliqués dans le meurtre et les tentatives pour le camoufler. Ils ont obtenu l’immunité en échange de leur aide et ont bénéficié du programme de protection des témoins. La dette de drogue de M. Derry a été entièrement remboursée. Il est devenu un agent travaillant pour la police et touchait à ce titre 500 $ par semaine. Son téléphone était sur écoute et il portait un micro caché pour intercepter les conversations avec les appelants.

[7] M. Derry a témoigné qu’il était présent à une réunion au cours de laquelle M. Smith a dit à M. James qu’il voulait [traduction] « donner un grand coup » à M. Simmons. Le mobile était apparemment la liaison que le défunt avait eue des années auparavant avec la petite amie du chef de la section de Halifax des Hells Angels.

[8] Le jour du meurtre, M. Gareau, suivant les instructions de M. Derry, a repéré M. Simmons à son appartement. Il a téléphoné à MM. Derry et James pour leur dire où ils pouvaient trouver M. Simmons. MM. James et Derry, ainsi que Mme Potts et M. Kelsie, se sont rendus ensemble en voiture sur les lieux. M. James était armé d’un pistolet que lui avaient procuré M. Derry et Mme Potts. M. Derry a dit à M. James qu’il ne faudrait pas que ce soit lui qui tire, car, comme il était de race noire et de grande taille, il serait trop visible en plein après‑midi. M. James a alors passé l’arme à M. Kelsie et lui a dit comment exécuter le meurtre. Le groupe a retrouvé M. Gareau à un atelier d’installation de silencieux situé près de l’appartement. M. James lui a donné 20 $ et lui a dit d’aller à un bar plus tard. MM. Gareau et Kelsie sont allés à l’appartement pendant que les autres attendaient. Dans les minutes qui ont suivi, M. Kelsie est revenu à la voiture disant qu’il avait tué M. Simmons. M. Derry et Mme Potts se sont arrangés pour se débarrasser de l’arme et des vêtements que portait M. Kelsie au moment du meurtre.

[9] Au procès des appelants, la défense a fait valoir que M. Derry et Mme Potts n’étaient pas des témoins crédibles. L’avocat a déclaré au jury qu’ils avaient fabriqué de toutes pièces leurs témoignages sur la participation des appelants pour se protéger contre des poursuites — sacrifiant MM. Smith et James, qui ont reconnu être des trafiquants de drogue de haut niveau, pour accroître leur pouvoir de négociation.

[10] Le juge du procès a informé les jurés de façon générale sur la crédibilité des témoins et a attiré leur attention plus particulièrement sur Paul Derry et Tina Potts :

[traduction] . . . je vous avertis que vous devez faire preuve d’une extrême prudence avant d’accepter leurs témoignages. Il est risqué pour vous de vous fonder uniquement sur leurs témoignages, car Tina Potts et Paul Derry sont tous deux considérés en droit comme des complices dans le meurtre de M. Simmons et aussi M. Derry est un agent travaillant pour la police. Tous deux ont admis avoir fait l’objet d’une série de déclarations de culpabilité pour des infractions criminelles, dont bon nombre impliquaient la malhonnêteté. Tous deux ont aussi admis avoir vécu de la fraude et du trafic de drogue. De plus, ces deux témoins étaient très impliqués dans les infractions qui nous intéressent. Selon leurs témoignages, ils ont fourni l’arme utilisée, ont conduit les autres sur les lieux de l’infraction et se sont ensuite débarrassé de la preuve. Par ailleurs, de son propre aveu, M. Derry a participé activement à la recherche de Sean Simmons avant le meurtre.

Lors de leur arrestation pour le meurtre de Sean Simmons, tous deux ont admis avoir menti à la police. Ils ont obtenu l’immunité contre toute poursuite en échange de leur collaboration avec la police et de leurs témoignages au procès. Paul Derry touchait 500 $ par semaine comme agent travaillant pour la police et on leur a fourni, à lui et à Mme Potts, un appartement. La dette de drogue de M. Derry a été entièrement remboursée. Lui et Mme Potts ont été relocalisés et sont entrés dans le programme de protection des témoins.

M. Derry a reconnu qu’en entrant en contact avec la police il voulait voir s’il pouvait travailler pour elle dans une opération. Autrement dit, il cherchait à se faire de l’argent et à obtenir l’immunité pour lui et Mme Potts. Vous devez examiner tous les autres éléments de preuve dans cette affaire et chercher ceux qui confirment ou étayent les témoignages de Tina Potts et de Paul Derry. Ce que vous devez chercher, c’est une preuve qui corrobore les parties importantes de leurs dépositions et qui vous permet d’être sûrs que leurs témoignages au procès est véridique. [d.a., no 31980, p. 50‑51]

[11] Le juge du procès a ensuite examiné certains éléments de preuve que le jury pourrait prendre en considération pour déterminer si d’autres preuves confirmaient les témoignages de M. Derry et de Mme Potts. Il a conclu ainsi la mise en garde de type Vetrovec :

[traduction] Dans ce procès, nous avons entendu des témoignages sur M. Derry et Mme Potts. Je peux vous dire qu’en droit ils sont considérés comme des complices et qu’il existe une règle de droit selon laquelle le témoignage d’un complice ne peut confirmer ou appuyer celui d’un autre. Vous ne devez pas examiner leurs dépositions pour voir si elles corroborent effectivement l’une l’autre. Je n’ai pas indiqué tous les éléments de preuve susceptibles de renforcer les dépositions de ces deux témoins. Au final, vous devez vous demander si les parties importantes de leurs témoignages ont été suffisamment confirmées pour vous convaincre que leur version des faits est véridique et que vous pouvez sans danger vous y fier. Je dois vous dire que vous n’êtes pas tenus de par la loi de trouver de tels éléments de corroboration pour pouvoir vous fier à leurs témoignages. Vous pouvez vous y fier sans trouver d’élément de corroboration si vous êtes convaincus hors de tout doute raisonnable que leur récit est véridique. Il est toutefois dangereux pour vous d’accepter les témoignages de Mme Potts et de M. Derry à moins de trouver appui dans le reste de la preuve. [d.a., no 31980, p. 53‑54]

Plus tôt dans ses directives, le juge du procès a rappelé aux jurés que M. Derry et Mme Potts ont tous deux un casier judiciaire et leur a dit que les déclarations de culpabilité antérieures [traduction] « peuvent dénoter l’absence de responsabilité morale de dire la vérité » (d.a., no 31980, p. 49).

III

[12] Les appelants soutiennent que la mise en garde du juge du procès était insuffisante, car elle n’expliquait pas au jury pourquoi un agent rémunéré, qui était un complice dans l’infraction, est particulièrement bien placé — et a un mobile particulièrement puissant — pour fabriquer l’histoire de l’implication des accusés. Selon les avocats des appelants, une explication plus approfondie du risque que présentaient ces témoins s’imposait. En particulier, le jury aurait dû être informé que M. Derry et Mme Potts avaient une bonne occasion et un bon mobile pour induire la cour en erreur et inventer une version convaincante des événements qui met faussement en cause MM. James et Smith.

[13] Je ne suis pas convaincu que le juge du procès ait fait erreur à cet égard. À mon avis, c’est avec raison que la Cour d’appel de la Nouvelle‑Écosse a conclu :

[traduction] Il ressort de l’examen de l’ensemble de ces directives que les plaintes ne sont tout simplement pas fondées. Prises dans leur totalité dans le contexte de ce dossier, les directives du juge satisfont amplement à l’exigence de mise en garde appropriée énoncée dans Sauvé. Non seulement les mises en garde du juge ne révèlent aucune erreur, mais elles sont aussi remarquablement approfondies.

(2007 NSCA 19, 216 C.C.C. (3d) 490, par. 110)

[14] Pour évaluer le risque qu’il y a à accepter la déposition d’un témoin douteux, le jury doit comprendre les raisons d’un examen rigoureux (R. c. Sauv— (2004), 182 C.C.C. (3d) 321 (C.A. Ont.), par. 85). Pour ce faire, il doit être informé des caractéristiques du témoin qui soulèvent de sérieux doutes quant à sa crédibilité. Il n’est pas nécessaire de lui expliquer de façon exhaustive comment une caractéristique donnée peut permettre à un témoin de bouleverser l’instruction de la cause.

[15] L’approche préconisée par les appelants peut être utile dans certaines circonstances, surtout si le jury ne connaît pas ou ne voit pas les risques que présente l’acceptation de la déposition d’un témoin douteux. Dans les cas où le témoin douteux est un complice, il peut être utile que le juge du procès explique pourquoi ce témoin pourrait concocter une histoire particulièrement convaincante mettant faussement en cause l’accusé. Tout ce qu’un complice doit ajouter à une histoire autrement véridique, et susceptible d’être confirmée, est la participation de l’accusé.

[16] Comme je l’ai expliqué dans Khela, toutefois, il n’existe pas de formule particulière pour une mise en garde appropriée de type Vetrovec. Les juges de première instance disposent d’un pouvoir discrétionnaire considérable pour formuler leurs directives en fonction des circonstances du procès. En l’espèce, le juge du procès a fourni au jury plus qu’une simple liste de caractéristiques défavorables. Il a attiré l’attention sur le fait que M. Derry et Mme Potts sont des complices, des criminels, des fraudeurs et, dans le cas de M. Derry, un agent rémunéré. Il a expliqué en détail leur participation au crime et a mentionné leurs ententes d’immunité ainsi que les avantages qu’ils avaient reçus en échange de leur collaboration. En plus de la mise en garde de type Vetrovec qu’il a faite dans ses directives, il a averti les jurés, avant les dépositions de M. Derry et de Mme Potts, de considérer leurs témoignages avec « soin et prudence ». Il a fait remarquer qu’en raison de certains avantages ou promesses obtenus de la police, les témoins peuvent avoir [traduction] « intérêt à donner une déposition favorable ».

[17] La Cour d’appel a conclu que M. Derry et Mme Potts étaient le genre de témoins visés par les mises en garde de type Vetrovec. J’en conviens. C’est pour cette raison que le juge du procès avait clairement averti le jury du danger de se fonder uniquement sur les témoignages de M. Derry et de Mme Potts pour déclarer les appelants coupables. Il n’a de ce fait commis aucune erreur. Je suis donc d’avis de rejeter les pourvois.

Version française des motifs rendus par

[18] La juge Deschamps — Dans les affaires connexes R. c. Khela et R. c. Sahota, 2009 CSC 4, [2009] 1 R.C.S. 104, j’explique les éléments que doit comporter, à mon avis, la mise en garde adressée au jury conformément à l’arrêt Vetrovec c. La Reine, [1982] 1 R.C.S. 811, au sujet de la crédibilité des témoins douteux. En clair, même si le cadre tiré de R. c. Sauvé (2004), 182 C.C.C. (3d) 321 (C.A. Ont.), peut être utile, je ne pense pas qu’il faille demander aux jurés de chercher des preuves corroborantes qui soient « indépendantes » et « substantielles ». La véritable question concerne la crédibilité.

[19] Comme le souligne le juge Fish (par. 1) au nom de la majorité, il s’agit seulement en l’espèce de décider si le contenu de la mise en garde de type Vetrovec que le juge du procès a faite au sujet des témoignages de Paul Derry et de Tina Potts est acceptable. J’adopte les faits tels que mon collègue les a exposés et, pour les motifs qui suivent, je suis également d’avis de rejeter les pourvois.

[20] Comme dans Khela, j’examinerai l’exposé au jury selon l’approche fondée sur la crédibilité qui est établie dans Vetrovec et R. c. Zebedee (2006), 211 C.C.C. (3d) 199 (C.A. Ont.).

[21] Premièrement, le juge du procès a spécifiquement attiré l’attention du jury sur les témoignages de M. Derry et de Mme Potts. Deuxièmement, il a donné d’abondantes explications, citées par la majorité, sur les raisons d’un examen particulièrement rigoureux : principalement les faits que les témoins avaient de lourds antécédents judiciaires, avaient participé aux infractions faisant l’objet d’une accusation et avaient reçu l’immunité et d’autres faveurs en échange de leurs témoignages. Troisièmement, il a clairement averti les jurés qu’il était dangereux de se fonder sur les témoignages de M. Derry et de Mme Potts pour déclarer les accusés coupables, à moins de trouver appui dans le reste de la preuve.

[22] Tout jury raisonnable ayant reçu ces directives aurait fait preuve d’une grande prudence dans son examen des témoignages en question et dans l’appréciation de leur crédibilité.

[23] Les directives sont parfaitement conformes à l’approche fonctionnelle applicable aux mises en garde de type Vetrovec, et le verdict ne peut être contesté au motif qu’elles sont insuffisantes. Par conséquent, je souscris à l’opinion de la majorité qu’il y a lieu de confirmer la décision de la Cour d’appel, de rejeter les pourvois et de maintenir les déclarations de culpabilité.

Pourvois rejetés.

Procureurs de l’appelant Neil William Smith : Fleming, Breen, Toronto.

Procureur de l'appelant Wayne Alexander James : Donald C. Murray, Dartmouth.

Procureur de l’intimée : Procureur général de la Nouvelle‑Écosse, Halifax.

Procureur de l’intervenant le procureur général de l’Ontario : Procureur général de l’Ontario, Toronto.

Procureurs de l’intervenante Criminal Lawyers’ Association (Ontario) : Bayne, Sellar, Boxall, Ottawa.


Sens de l'arrêt : Les pourvois sont rejetés

Analyses

Droit criminel - Exposé au jury - Suffisance de la mise en garde de type Vetrovec - Contenu de la mise en garde - Témoignages de complices présentés au procès par le ministère public - Accusés déclarés coupables de meurtre au premier degré - Le juge du procès a‑t‑il commis une erreur dans la mise en garde qu’il a adressée au jury à propos des complices?.

Les accusés ont été inculpés de meurtre au premier degré et de complot en vue de commettre le meurtre. La preuve à charge reposait, en grande partie, sur les témoignages de deux prétendus complices impliqués dans le meurtre et les tentatives pour le camoufler. Ceux‑ci ont obtenu l’immunité et bénéficié du programme de protection des témoins en échange de leur aide dans l’enquête policière et de leurs témoignages. Le juge du procès a averti les jurés qu’ils devaient faire preuve de prudence avant d’accepter leurs témoignages et qu’il était risqué de se fonder uniquement sur leurs dépositions, mais qu’ils pouvaient s’y fier s’ils étaient convaincus hors de tout doute raisonnable que leur récit était véridique. Il leur a demandé de chercher des preuves qui confirment ou étayent les parties importantes des témoignages des complices et a examiné certains éléments de preuve que le jury pourrait prendre en considération. Les accusés ont été reconnus coupables des deux infractions. La Cour d’appel a maintenu les déclarations de culpabilité, statuant que l’exposé au jury, pris dans son ensemble et dans le contexte du dossier satisfait à l’exigence d’une mise en garde suffisante de type Vetrovec.

Arrêt : Les pourvois sont rejetés.

Les juges Binnie, LeBel, Fish, Abella, Charron et Rothstein : Dans l’examen des mises en garde de type Vetrovec, les tribunaux d’appel doivent décider si le jury a été averti du danger de se fier à la déposition d’un témoin sans être conforté dans son opinion, par quelque autre élément de preuve, qu’il dit la vérité au sujet de l’implication de l’accusé dans le crime. La mise en garde doit aussi indiquer au jury le type de preuve pouvant le conforter à cet égard. Pour évaluer le risque qu’il y a à accepter la déposition d’un témoin douteux, le jury doit comprendre les raisons d’un examen rigoureux et les caractéristiques du témoin qui soulèvent des doutes quant à sa crédibilité. Il n’existe pas de formule particulière pour une mise en garde appropriée et les juges de première instance disposent d’un pouvoir discrétionnaire considérable pour formuler leurs directives en fonction des circonstances du procès. En l’espèce, la mise en garde de type Vetrovec était approfondie et complète. Elle a clairement averti le jury du danger de se fonder uniquement sur les témoignages des complices pour déclarer les accusés coupables. [2‑3] [14] [16‑17]

La juge Deschamps : Les directives sont parfaitement conformes à l’approche fonctionnelle applicable aux mises en garde de type Vetrovec. Il n’est pas nécessaire de demander aux jurés de chercher des preuves corroborantes qui soient indépendantes et substantielles. La véritable question concerne la crédibilité. En l’espèce, le juge du procès a spécifiquement attiré l’attention du jury sur les témoignages des complices et a donné d’abondantes explications sur les raisons d’un examen particulièrement rigoureux de ces témoignages. Il a clairement averti les jurés qu’il était dangereux de se fonder sur les témoignages des complices pour déclarer les accusés coupables, à moins de trouver appui dans le reste de la preuve. Tout jury raisonnable ayant reçu ces directives aurait fait preuve d’une grande prudence dans son examen des témoignages en question et dans l’appréciation de leur crédibilité. [18] [21-23]


Parties
Demandeurs : Sa Majesté la Reine
Défendeurs : Smith

Références :

Jurisprudence
Citée par le juge Fish
Arrêts mentionnés : R. c. Khela, 2009 CSC 4, [2009] 1 R.C.S. 104
Vetrovec c. La Reine, [1982] 1 R.C.S. 811
R. c. Sauv— (2004), 182 C.C.C. (3d) 321.
Citée par la juge Deschamps
Arrêts mentionnés : R. c. Khela, 2009 CSC 4, [2009] 1 R.C.S. 104
Vetrovec c. La Reine, [1982] 1 R.C.S. 811
R. c. Sauv— (2004), 182 C.C.C. (3d) 321
R. c. Zebedee (2006), 211 C.C.C. (3d) 199.

Proposition de citation de la décision: R. c. Smith, 2009 CSC 5 (22 janvier 2009)


Origine de la décision
Date de la décision : 22/01/2009
Date de l'import : 06/04/2012

Numérotation
Référence neutre : 2009 CSC 5 ?
Numéro d'affaires : 32323, 31980
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ca;cour.supreme;arret;2009-01-22;2009.csc.5 ?
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