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02/12/2011 | CANADA | N°2011_CSC_59

Canada | Nor-Man Regional Health Authority Inc. c. Manitoba Association of Health Care Professionals, 2011 CSC 59 (2 décembre 2011)


COUR SUPRÊME DU CANADA

Référence : Nor-Man Regional Health Authority Inc. c. Manitoba Association of Health Care Professionals, 2011 CSC 59, [2011] 3 R.C.S. 616

Date : 20111202

Dossier : 33795

Entre :

Nor-Man Regional Health Authority Inc.

Appelante

et

Manitoba Association of Health Care Professionals

Intimée

- et -

Procureur général de la Colombie-Britannique

Intervenant

Traduction française officielle

Coram : La juge en chef McLachlin et les juges LeBel, Deschamps, Fish, Abella, Rothstein

et Cromwell

Motifs de jugement :

(par. 1 à 62)

Le juge Fish (avec l’accord de la juge en chef McLachlin et des juges LeBel, Deschamps,...

COUR SUPRÊME DU CANADA

Référence : Nor-Man Regional Health Authority Inc. c. Manitoba Association of Health Care Professionals, 2011 CSC 59, [2011] 3 R.C.S. 616

Date : 20111202

Dossier : 33795

Entre :

Nor-Man Regional Health Authority Inc.

Appelante

et

Manitoba Association of Health Care Professionals

Intimée

- et -

Procureur général de la Colombie-Britannique

Intervenant

Traduction française officielle

Coram : La juge en chef McLachlin et les juges LeBel, Deschamps, Fish, Abella, Rothstein et Cromwell

Motifs de jugement :

(par. 1 à 62)

Le juge Fish (avec l’accord de la juge en chef McLachlin et des juges LeBel, Deschamps, Abella, Rothstein et Cromwell)

Nor‑Man Regional Health Authority Inc. c. Manitoba Association of Health Care Professionals, 2011 CSC 59, [2011] 3 R.C.S. 616

Nor‑Man Regional Health Authority Inc. Appelante

c.

Manitoba Association of Health Care Professionals Intimée

et

Procureur général de la Colombie‑Britannique Intervenant

Répertorié : Nor‑Man Regional Health Authority Inc. c. Manitoba Association of Health Care Professionals

2011 CSC 59

No du greffe : 33795.

2011 : 20 octobre; 2011 : 2 décembre.

Présents : La juge en chef McLachlin et les juges LeBel, Deschamps, Fish, Abella, Rothstein et Cromwell.

en appel de la cour d’appel du manitoba

POURVOI contre un arrêt de la Cour d’appel du Manitoba (les juges Monnin, Steel et Freedman), 2010 MBCA 55, 255 Man. R. (2d) 93, 486 W.A.C. 93, 319 D.L.R. (4th) 193, 194 L.A.C. (4th) 193, 5 Admin. L.R. (5th) 291, 85 C.C.E.L. (3d) 163, [2010] 7 W.W.R. 1, 2010 CLLC ¶220‑034, [2010] M.J. No. 166 (QL), 2010 CarswellMan 217, qui a infirmé une décision du juge Bryk, 2009 MBQB 213, 243 Man. R. (2d) 281, 98 Admin. L.R. (4th) 266, 2009 CLLC ¶220‑048, [2009] M.J. No. 289 (QL), 2009 CarswellMan 386. Pourvoi accueilli.

Bryan P. Schwartz, William S. Gardner et Todd C. Andres, pour l’appelante.

Jacob Giesbrecht, pour l’intimée.

Jonathan Eades et Meghan Butler, pour l’intervenant.

Version française du jugement de la Cour rendu par

Le juge Fish —

I

[1] En l’espèce, un arbitre d’expérience en droit du travail a donné raison au syndicat quant à l’interprétation des dispositions sur les crédits de congés annuels incluses dans la convention collective, mais il a appliqué la préclusion à sa demande de réparation.

[2] Essentiellement, l’arbitre a conclu que le syndicat ne pouvait pas contester la façon dont l’employeur appliquait les dispositions litigieuses, parce qu’il y avait acquiescé de longue date. Compte tenu de la formule de calcul des congés annuels adoptée systématiquement et ouvertement par l’employeur et du fait que ce dernier avait agi à son détriment sur la foi de l’acquiescement du syndicat, il serait inéquitable, selon l’arbitre, que le syndicat contraigne maintenant l’employeur à respecter strictement les termes de la convention collective à cet égard.

[3] La Cour du Banc de la Reine du Manitoba a rejeté la demande de contrôle judiciaire présentée par le syndicat, parce qu’elle estimait que la sentence arbitrale était raisonnable (2009 MBQB 213, 243 Man. R. (2d) 281). La Cour d’appel du Manitoba a statué que la norme de contrôle applicable n’était pas la norme de la raisonnabilité, mais la norme de la décision correcte (2010 MBCA 55, 255 Man. R. (2d) 93). Suivant celle‑ci, la Cour d’appel a annulé l’application de la préclusion par l’arbitre.

[4] Avec égards, j’estime que la Cour d’appel a commis une erreur en révisant la décision de l’arbitre selon la norme de la décision correcte : la norme applicable est celle de la raisonnabilité.

[5] Les arbitres en droit du travail ne sont pas tenus juridiquement d’appliquer les principes de common law et d’equity, dont la préclusion, de la même manière que les tribunaux judiciaires. Leur mission est différente, car elle tient compte du contexte particulier des relations du travail.

[6] Pour les aider à s’acquitter de cette mission, on a confié aux arbitres un large mandat qui leur permet d’adapter les principes juridiques qu’ils estiment pertinents aux griefs dont ils sont saisis. Dans l’exécution de ce mandat, ils doivent bien entendu agir raisonnablement, en accord avec les buts et objectifs du régime législatif, les principes des relations du travail, la nature du processus de négociation collective et le fondement factuel du grief.

[7] En l’espèce, la décision de l’arbitre respecte largement ces limites. Je suis d’avis d’accueillir l’appel et de rétablir la sentence arbitrale.

II

[8] Lorsqu’elle a déposé son grief, en juillet 2008, Jacqueline Plaisier comptait 20 ans de service ininterrompu — bien qu’elle ait travaillé à titre d’employée occasionnelle, à certains moments — pour la Nor‑Man Regional Health Authority Inc. (« Nor‑Man »).

[9] Mme Plaisier prétendait avoir droit à une semaine de congé annuel « en prime » l’année de son 20e anniversaire d’entrée en service, conformément aux art. 1104 et 1105 de la convention collective intervenue entre Nor‑Man et le syndicat la représentant, soit la Manitoba Association of Health Care Professionals (le « Syndicat »). Nor‑Man lui a refusé ce congé au motif que, selon son interprétation, les périodes d’emploi à titre occasionnel de Mme Plaisier ne comptaient pas pour l’application de l’art. 1105.

[10] Au cours de la période pertinente, les art. 1104 et 1105 de la convention collective étaient ainsi libellés :

[traduction]

1104 Les employées ont droit à des congés annuels payés, calculés en fonction des crédits qu’elles acquièrent selon les modalités suivantes :

Durée d’emploi

Rythme d’acquisition des crédits de congés annuels

De la première (1re) à la troisième (3e) année, inclusivement

Vingt (20) jours ouvrables par année*

De la quatrième (4e) à la [dixième] (10e) année, inclusivement

Vingt‑cinq (25) jours ouvrables par année

De la onzième (11e) à la vingtième (20e) année, inclusivement

Trente (30) jours ouvrables par année

À compter de la vingt‑et‑unième (21e) année

Trente‑cinq [(35)] jours ouvrables par année

*Les employées engagées avant le 31 août 1989 acquièrent « vingt‑et‑un » (21) jours de crédits de congés au lieu de « vingt » (20).

. . .

1105 Une semaine supplémentaire de congés annuels payés est accordée à l’employée au cours de l’année où survient son vingtième (20e) anniversaire d’entrée en service, et tous les cinq (5) ans par la suite. Les congés supplémentaires doivent être pris au cours de l’année de congé annuel où survient la date anniversaire. La présente disposition s’applique aux employées en poste le 31 août 1989. Elle ne s’applique pas aux employées engagées après le 31 août 1989.

[11] Lors du rejet de la demande de congé, Nor‑Man a informé Mme Plaisier que son « anniversaire d’entrée en service » visé à l’art. 1105 ne pouvait être fondé sur une date antérieure au 30 mai 1999, date à laquelle elle avait commencé à accumuler de l’ancienneté. Suivant la convention collective, ses périodes d’emploi à titre occasionnel ne comptaient pas dans le calcul de l’ancienneté. Selon Nor‑Man, elles ne comptaient donc pas pour les années de service ouvrant droit à la semaine de congé supplémentaire.

[12] Depuis 1988, Nor‑Man avait toujours appliqué les art. 1104 et 1105 en se fondant sur la « date d’ancienneté » de ses employés. Le Syndicat n’avait jamais contesté cette pratique avant le dépôt du grief de Mme Plaisier, quelque vingt ans et au moins cinq conventions collectives plus tard.

III

[13] Le grief de Mme Plaisier a été soumis à un arbitre, R. A. Simpson, conformément à la Loi sur les relations du travail, L.R.M. 1987, ch. L10 (« Loi »). Deux questions principales ont été examinées lors de l’arbitrage du grief : (1) Comment les art. 1104 et 1105 de la convention collective devaient‑ils être interprétés? (2) Le Syndicat était‑il préclus de faire valoir cette interprétation en l’espèce? ([2008] M.G.A.D. No. 30 (QL)).

[14] En ce qui concerne la première question, l’arbitre a accepté l’interprétation des art. 1104 et 1105 proposée par le Syndicat et il a expliqué sa conclusion en ces termes :

[traduction] La durée d’emploi n’est pas forcément synonyme d’ancienneté, mais représente la période ininterrompue pendant laquelle l’employé a été au service de l’employeur. [. . .] Dans certains milieux de travail, chaque période d’emploi à titre occasionnel correspond à une nouvelle relation d’emploi; dans d’autres, un changement de statut — d’employé occasionnel à employé permanent, ou vice versa — interrompt la relation d’emploi. En l’espèce, il n’y a eu aucune interruption de ce genre. [. . .] Bien que le statut [de Mme Plaisier] ait changé maintes fois au cours de sa carrière, elle est au service de l’Employeur depuis le 12 juillet 1988. Cette date constitue sa date d’entrée en service aux fins de la détermination de la durée de son emploi et de sa date anniversaire d’entrée en service pour l’application des articles 1104 et 1105 de la Convention collective. [par. 89]

[15] Après avoir conclu que l’interprétation des art. 1104 et 1105 proposée par le Syndicat était la bonne, l’arbitre a refusé d’en ordonner l’application en conséquence.

[16] Sur ce volet du grief, l’arbitre a tiré les conclusions suivantes :

[traduction] L’énoncé conjoint des faits, les pièces jointes et les témoignages de vive voix révèlent que cette pratique de l’Employeur est appliquée depuis longtemps, systématiquement et ouvertement. Cette pratique a été révélée à tous les employés, grâce aux Relevés de confirmation des congés des employés produits annuellement, ainsi qu’à tous les employés et au Syndicat, grâce aux rapports d’ancienneté annuels, distribués et affichés. Des questions ont été posées et des réponses ont été fournies relativement à cette pratique. Si le Syndicat n’était pas au courant de la façon dont l’Employeur appliquait les articles 1104 et 1105, il aurait certainement dû l’être. Il serait inéquitable de permettre au Syndicat d’imposer son interprétation des articles 1104 et 1105. L’Employeur était en droit de présumer que le Syndicat avait accepté sa pratique et d’agir sur la foi de cette acceptation en s’abstenant de négocier une modification ou d’exercer le droit de décider qu’un changement de statut de l’employé entraîne une interruption de service. [par. 96]

[17] L’arbitre a cité et approuvé deux précédents dans lesquels un arbitre a appliqué de manière similaire la doctrine de la préclusion dans le contexte des relations du travail (Agassiz School Division No. 13 (Re), [1997] M.G.A.D. No. 61 (QL) (arbitre Graham) (« Agassiz »), et Manitoba (Department of Family Services and Housing) and C.U.P.E., Loc. 2153 (Murdock) (Re) (2005), 142 L.A.C. (4th) 173 (arbitre Peltz) (« Murdock »)).

[18] Dans ces deux cas, l’arbitre a conclu que l’employeur en cause avait appliqué incorrectement les dispositions pertinentes de la convention collective — pendant au moins vingt-cinq ans dans Agassiz, et pendant au moins trois ans dans Murdock — et que la préclusion l’empêchait de donner gain de cause au syndicat, pour des motifs correspondant essentiellement à ceux sur lesquels repose la sentence arbitrale dont nous sommes ici saisis.

[19] Les deux arbitres étaient au fait des principes fondamentaux de la préclusion. Essentiellement, ils ont tiré les conclusions suivantes : le syndicat avait connaissance — de droit, sinon de fait — de la façon incorrecte dont l’employeur appliquait les dispositions litigieuses de la convention collective pendant toute la période pertinente; le silence du syndicat valait acquiescement à la pratique de l’employeur; cela suffisait pour établir l’intention requise pour qu’il y ait préclusion; l’employeur pouvait raisonnablement agir sur la foi de l’acquiescement du syndicat; l’employeur a agi sur la foi de celui‑ci à son détriment. L’ensemble de ces éléments, selon les arbitres, avait pour effet de modifier les relations juridiques entre les parties.

[20] Ainsi, dans Murdock, l’arbitre a d’abord passé en revue les éléments essentiels de la préclusion, ses effets et la sentence arbitrale prononcée dans Agassiz, puis il a tiré la conclusion suivante :

[traduction] . . . en l’espèce, une assertion a résulté du silence, qui suffisait pour répondre aux critères d’application de la préclusion en equity et empêchait le Syndicat d’exiger le respect strict des droits en common law que lui conférait l’alinéa 15.03a) de la convention collective. Même si le Syndicat n’était pas au courant de cette pratique, il en avait connaissance de droit ou imputée. Compte tenu de toutes ces circonstances, il serait inéquitable de permettre au Syndicat d’exiger le respect de ses droits de la part de l’Employeur après une période d’acquiescement qui s’est poursuivie pendant la négociation collective. [p. 192]

[21] En l’espèce, l’arbitre a appliqué les décisions Agassiz et Murdock à ses constatations de fait et, comme je l’ai déjà mentionné, il a opposé la préclusion au Syndicat. Cette préclusion devait prendre fin à l’expiration de la convention collective, le 31 mars 2010.

[22] La Cour du Banc de la Reine du Manitoba a rejeté la demande de contrôle judiciaire présentée par le Syndicat. Le juge Bryk a statué que la norme de contrôle applicable était celle de la raisonnabilité, compte tenu de l’existence d’une clause privative dans la Loi et de la nature de la question en litige — une question mixte de fait et de droit qui ne revêtait pas une importance capitale pour le système juridique dans son ensemble et qui n’était pas étrangère au domaine d’expertise de l’arbitre.

[23] Le juge Bryk a ensuite conclu que la décision de l’arbitre n’était pas déraisonnable. À son avis, elle était intelligible, justifiable et appartenait « aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit » (Dunsmuir c. Nouveau‑Brunswick, 2008 CSC 9, [2008] 1 R.C.S. 190, par. 47).

[24] La Cour d’appel du Manitoba a conclu que le juge Bryk avait fait erreur en appliquant la norme de contrôle de la raisonnabilité à la conclusion de l’arbitre selon laquelle il y avait préclusion. La cour estimait que la norme applicable était celle de la décision correcte, puisque la conclusion de l’arbitre au sujet de la préclusion mettait en jeu une question de droit qui revêtait une importance capitale pour le système de justice dans son ensemble et qui était étrangère au domaine d’expertise des arbitres en droit du travail (Dunsmuir, par. 55 et 60).

[25] La Cour d’appel a ensuite conclu que l’arbitre avait mal interprété la doctrine de la préclusion promissoire. Elle a déclaré que le concept juridique de la préclusion promissoire exige, de la part de l’auteur de la promesse, l’intention de modifier ses relations juridiques avec le destinataire de la promesse. Or, en l’espèce, l’arbitre avait simplement conclu que l’auteur de la promesse (le Syndicat) aurait dû connaître la méthode de calcul des congés annuels adoptée par le destinataire de la promesse (Nor‑Man), sans tirer quelque conclusion que ce soit sur l’intention du Syndicat.

[26] Pour ce seul motif, la Cour d’appel a annulé la conclusion de l’arbitre selon laquelle il y avait préclusion.

[27] Par souci de clarté, je précise que l’arbitre n’a jamais mentionné la [traduction] « préclusion promissoire ». Il ne prétendait pas non plus appliquer le concept juridique de préclusion promissoire. Il a simplement utilisé le terme [traduction] « préclusion » pour désigner la réparation qu’il a accordée, comme cela avait été fait dans les précédents sur lesquels il s’est appuyé.

[28] En toute justice pour la Cour d’appel, je reconnais que la préclusion appliquée par l’arbitre tient plus de la préclusion promissoire que de tout autre type de préclusion recensé par la Cour dans Ryan c. Moore, 2005 CSC 38, [2005] 2 R.C.S. 53, par. 52. Il n’en demeure pas moins qu’il s’agit d’une réparation fixée par un arbitre et non de la doctrine de la préclusion promissoire telle qu’elle est appliquée par les tribunaux judiciaires.

IV

[29] La norme de contrôle applicable en l’espèce doit être déterminée suivant les principes établis dans Dunsmuir.

[30] L’arrêt Dunsmuir établit clairement qu’« [i]l n’est pas toujours nécessaire de se livrer à une analyse exhaustive pour arrêter la bonne norme de contrôle » (par. 57). En effet, la cour de révision doit vérifier d’abord « si la jurisprudence établit déjà de manière satisfaisante le degré de déférence correspondant à une catégorie de questions en particulier » (Dunsmuir, par. 62; Smith c. Alliance Pipeline Ltd., 2011 CSC 7, [2011] 1 R.C.S. 160, par. 24). C’est seulement lorsque « cette démarche se révèle infructueuse, [que le tribunal] entreprend l’analyse des éléments qui permettent d’arrêter la bonne norme de contrôle » (Dunsmuir, par. 62).

[31] La jurisprudence dominante établit clairement que, règle générale, les sentences arbitrales rendues en vertu d’une convention collective sont assujetties à la norme de contrôle de la raisonnabilité.

[32] Définie étroitement, la question en litige est celle de savoir si la décision de l’arbitre fait exception à cette règle générale du fait qu’il a appliqué la préclusion. Définie largement, elle consiste à déterminer si les sentences arbitrales qui mettent en jeu des réparations de common law ou d’equity sont, de ce fait, assujetties au contrôle judiciaire selon la norme de la décision correcte.

[33] Peu importe la façon dont cette question est formulée, c’est la première fois qu’elle nous est soumise directement et, comme nous l’avons vu, les juridictions inférieures sont arrivées à des conclusions opposées sur la norme de contrôle applicable.

[34] Compte tenu de ce qui précède, j’estime qu’il vaut mieux utiliser — sur le plan du fond, si ce n’est de la forme — le cadre analytique établi dans Dunsmuir et adopté dans Smith. Cette façon de faire nous permettra d’expliquer pourquoi il convient d’appliquer la norme de la raisonnabilité, plutôt que celle de la décision correcte, aux instances semblables à celle‑ci et nous aidera à déterminer si la sentence arbitrale respecte cette norme.

V

[35] La décision d’un tribunal administratif est assujettie à la norme de la décision correcte si elle soulève une question constitutionnelle; une question de « droit générale “à la fois, d’une importance capitale pour le système juridique dans son ensemble et étrangère au domaine d’expertise de l’arbitre” »; une « question touchant véritablement à la compétence »; ou une question portant sur la délimitation des compétences respectives de tribunaux spécialisés concurrents (Dunsmuir, par. 58‑61; Smith, par. 26; Toronto (Ville) c. S.C.F.P., section locale 79, 2003 CSC 63, [2003] 3 R.C.S. 77 (« Toronto (Ville) »), par. 62, le juge LeBel).

[36] En revanche, la norme de la raisonnabilité l’emporte généralement lorsque la décision du tribunal administratif touche aux faits, au pouvoir discrétionnaire ou à la politique; lorsque les faits et le droit s’entrelacent et ne peuvent être facilement dissociés; ou lorsque le tribunal administratif interprète sa propre loi constitutive ou une « loi étroitement liée à son mandat et dont il a une connaissance approfondie » (Dunsmuir, par. 51 et 53‑54; Smith, par. 26).

[37] Rappelons que la Cour d’appel a conclu que la norme de contrôle applicable en l’espèce était celle de la décision correcte, parce que la question revêtait à son avis une importance capitale pour le système juridique dans son ensemble et qu’elle était étrangère au domaine d’expertise de l’arbitre.

[38] Avec égards, je ne suis pas du même avis. Nous sommes en présence d’une préclusion appliquée à titre de réparation par un arbitre saisi d’un grief en vertu d’une convention collective. Aucun aspect de cette réparation n’en fait une question de droit générale « à la fois, d’une importance capitale pour le système juridique dans son ensemble et étrangère au domaine d’expertise de l’arbitre » au sens de l’arrêt Dunsmuir (par. 60). Par conséquent, elle ne saurait appartenir à cette catégorie — ni à quelque autre catégorie — déjà établie de questions assujetties à la norme de la décision correcte suivant l’arrêt Dunsmuir.

[39] En outre, la deuxième étape de l’examen relatif à la norme de contrôle exigé par Dunsmuir — une analyse contextuelle — confirme que c’est la norme de la raisonnabilité qui s’applique, et non celle de la décision correcte.

[40] En se livrant à une analyse contextuelle, la cour de révision doit demeurer sensible à la tension qui s’exerce entre la primauté du droit et le respect des organismes administratifs auxquels le législateur a conféré des pouvoirs (Dunsmuir, par. 27). La jurisprudence a relevé une liste non exhaustive de quatre facteurs contextuels pour guider les cours dans cet exercice : (1) l’existence ou l’inexistence d’une clause privative, (2) la raison d’être du tribunal administratif, (3) la nature de la question en cause et (4) l’expertise du tribunal administratif (Dunsmuir, par. 64).

[41] Ces indicateurs contextuels confirment que la déférence est justifiée en l’espèce. Comme je l’ai mentionné précédemment, ils sont également utiles à l’appréciation du caractère raisonnable d’une réparation contestée fixée par un arbitre.

[42] Tout d’abord, il est bien établi que, règle générale, c’est la norme de la raisonnabilité qui s’applique aux sentences arbitrales prononcées en vertu d’une convention collective : « La Cour a maintes fois reconnu l’expertise relative de l’arbitre dans l’interprétation d’une convention collective et préconisé le respect de sa décision à cet égard » (Dunsmuir, par. 68).

[43] Dans la présente affaire, comme nous l’avons vu, la Cour d’appel était d’avis que l’application de la préclusion par l’arbitre était un aspect de sa décision qui ne faisait pas partie des questions qui commandent la déférence. Avec égards, je ne partage pas cet avis.

[44] Certes, les doctrines de common law et d’equity émanent des tribunaux, mais il ne s’ensuit pas pour autant que les arbitres sont dépourvus du pouvoir légal ou de l’expertise nécessaires pour les adapter et les appliquer de façon plus judicieuse à l’arbitrage de différends et de griefs dans le contexte des relations du travail.

[45] Au contraire, les arbitres en relations du travail, grâce à leurs larges mandats légal et contractuel — et à leur expertise — , ont tous les outils nécessaires pour adapter les doctrines de common law et d’equity qu’ils estiment pertinentes dans les limites de leur sphère circonscrite de créativité. Ils peuvent à bon droit, à cette fin, élaborer des doctrines et concevoir des réparations adéquates dans leur domaine, en s’inspirant des principes juridiques généraux, des buts et objectifs du régime législatif, des principes des relations du travail, de la nature du processus de négociation collective et du fondement factuel des griefs dont ils sont saisis.

[46] Cette latitude découle du large pouvoir conféré aux arbitres par les conventions collectives et les textes législatifs, comme la Loi qui s’applique dans le cas qui nous occupe. Par exemple, l’art. 121 de la Loi précise que l’arbitre ou le conseil d’arbitrage tient compte non seulement de la convention collective, mais également « de la substance réelle de la question en litige entre les parties ». Il « n’est pas lié par une interprétation juridique stricte de la question en litige », et sa sentence « règle de façon définitive et péremptoire la question soumise à l’arbitrage ».

[47] Le large mandat dont les arbitres sont investis découle également de leur rôle particulier de promotion de la paix dans les relations industrielles (Conseil de l’éducation de Toronto (Cité) c. F.E.E.E.S.O., district 15, [1997] 1 R.C.S. 487 (« F.E.E.E.S.O., district 15 »), par. 36; Parry Sound (district), Conseil d’administration des services sociaux c. S.E.E.F.P.O., section locale 324, 2003 CSC 42, [2003] 2 R.C.S. 157, par. 17).

[48] Les conventions collectives régissent les rapports incessants entre les employeurs et leurs employés, qui sont représentés par leurs syndicats. Lorsque surviennent des différends — et il en survient inévitablement — , on s’attend à ce que la convention collective survive, au moins jusqu’aux prochaines négociations. Le maintien harmonieux de cette relation repose sur un système d’arbitrage des griefs sensible aux intérêts immédiats et à long terme des employés et de l’employeur.

[49] Les arbitres en droit du travail sont particulièrement bien placés pour répondre aux exigences des relations entre employeur et employé. Ils ont toutefois besoin de la souplesse voulue pour façonner des solutions réparatrices lorsque la situation l’exige. En effet, un processus rigide de règlement des différends risque non seulement de provoquer la désintégration de la relation, mais également de troubler la paix industrielle.

[50] Voilà les principes qui régissent l’arbitrage en droit du travail au Canada. Leur objet et leur raison d’être sont depuis longtemps familiers aux arbitres et aux auteurs. Il y a plus de 30 ans, à l’époque où il présidait la commission des relations du travail de la Colombie‑Britannique, Paul C. Weiler, aujourd’hui professeur émérite à l’Université Harvard, a souligné l’importance de ces principes dans un différend particulièrement pertinent en l’espèce. Il a expliqué en ces termes pourquoi la règle de la préclusion doit être appliquée différemment par un arbitre et une cour de justice :

[traduction] . . . une relation régie par une convention collective est d’une tout autre nature. Le syndicat et l’employeur traitent l’un avec l’autre pendant des années, d’une convention et d’un renouvellement à l’autre. Ils doivent régler quotidiennement des problèmes très variés touchant l’éventail complet des conditions d’emploi, et ce, en appliquant des dispositions contractuelles souvent formulées en termes très généraux et ambigus. Dans la plupart des cas, les décisions opérationnelles prises dans le cadre de la convention collective procèdent de l’initiative de l’employeur. Si le syndicat n’approuve pas certaines décisions de la direction, il s’y opposera et présentera un grief. En revanche, dans le cas où le syndicat ne fait valoir aucune objection contre une mesure patronale dont il est pleinement conscient, la seule inférence raisonnable que l’employeur peut en tirer est que cette mesure est acceptable. Supposons que l’employeur décide d’agir sur la foi de cette inférence, mais que le syndicat réexamine la question par la suite, conclue qu’il pourrait faire valoir un argument valable fondé sur la convention collective et demande à l’arbitre d’ordonner rétroactivement le respect strict de ses droits en common law. Il serait de toute évidence injuste et inéquitable de permettre ce revirement soudain, au détriment de l’autre partie. Pour reprendre les propos du Conseil dans l’affaire [Corporation of the District of Burnaby and Canadian Union of Public Employees, Local 23, [1978] 2 C.L.R.B.R. 99, p. 103], « [i]l est difficile d’imaginer meilleure recette pour miner le climat de confiance et l’esprit de collaboration essentiels à de saines relations patronales‑syndicales et provoquer ultimement des turbulences dans les relations industrielles, ce qui va à l’encontre des objectifs du Code du travail » . . .

(Re Corporation of the City of Penticton and Canadian Union of Public Employees, Local 608 (1978), 18 L.A.C. (2d) 307 (B.C.L.R.B.), p. 320)

[51] Les cours de révision doivent demeurer sensibles à ces particularités des relations fondées sur la négociation collective et réserver aux arbitres le droit d’élaborer des doctrines à vocation réparatrice propres aux relations du travail. À l’intérieur de cette sphère, les sentences arbitrales commandent la déférence de la part des tribunaux.

[52] Cependant, la sphère réservée au pouvoir discrétionnaire des arbitres n’est nullement dépourvue de limites. La sentence arbitrale qui prête à un principe de common law ou d’equity une application qui n’est pas raisonnablement adaptée à la nature distinctive des relations du travail demeure forcément assujettie au contrôle judiciaire selon la norme de la raisonnabilité.

[53] D’autres facteurs contextuels militent en faveur de la déférence des cours de justice envers les arbitres qui adoptent et appliquent des principes de common law et d’equity à l’intérieur de la sphère d’activité qui leur est propre : le par. 128(2) de la Loi contient une clause privative qui protège les décisions des arbitres et des conseils d’arbitrage. Ces derniers bénéficient d’une expertise institutionnelle en ce qui concerne le règlement des conflits de travail sous le régime d’une convention collective (F.E.E.E.S.O., district 15, par. 37), même s’ils sont dépourvus d’une expertise personnelle en ce qui concerne les questions de droit. Il ressort clairement de Dunsmuir que, « sur le plan institutionnel, on peut présumer que les arbitres [. . .] possèdent une expertise relative dans l’interprétation de la loi dont ils tiennent leur mandat ainsi que des dispositions législatives connexes qu’ils sont souvent appelés à appliquer dans l’exercice de leurs fonctions » (par. 68 (je souligne)).

VI

[54] Selon l’intimée, l’application souple de la préclusion aux relations du travail est une question qu’il vaut mieux laisser au législateur. Je ne suis pas de cet avis. Le pouvoir légal requis existe déjà : il découle nécessairement du régime établi par la Loi, et d’autres textes législatifs de même nature adoptés ailleurs au pays, que les arbitres en droit du travail sont déjà habilités — sous réserve des limites mentionnées précédemment (au par. 6) — à appliquer les principes juridiques généraux avec souplesse pour régler les différends dans l’application des conventions collectives. On a plus particulièrement confié aux arbitres le [traduction] « mandat légal [. . .] d’adapter le principe de la préclusion aux cadre et objectifs de politique générale particuliers du monde des relations industrielles » (Re Corporation of the City of Penticton, p. 319‑320).

[55] L’intimée prétend également que l’arrêt Toronto (Ville) permet d’affirmer qu’un arbitre en droit du travail est tenu d’appliquer les doctrines de common law de façon correcte. Je ne suis pas de cet avis. Comme nous l’avons vu, l’application de règles ou de principes généraux de droit n’est pas automatiquement assujettie à la norme de la décision correcte, à moins qu’elle ne soulève des questions de droit « à la fois, d’une importance capitale pour le système juridique dans son ensemble et étrangère[s] au domaine d’expertise de l’arbitre » (Toronto (Ville), par. 62, le juge LeBel; Dunsmuir, par. 60; Smith, par. 26).

VII

[56] En l’espèce, on peut difficilement qualifier de déraisonnable l’application de la préclusion par l’arbitre.

[57] Pour reprendre les propos du juge LeBel dans Montréal (Ville) c. Administration portuaire de Montréal, 2010 CSC 14, [2010] 1 R.C.S. 427, par. 38, « [l]e concept de raisonnabilité de la décision s’entend d’abord de la transparence et de l’intelligibilité des motifs justifiant cette décision. Mais, il exprime aussi une exigence de qualité de ces motifs et des résultats du processus décisionnel ». L’arrêt Dunsmuir, au par. 47, va dans le même sens.

[58] À mon avis, les motifs de l’arbitre sont non seulement transparents et intelligibles, mais aussi cohérents. Dans ses motifs, l’arbitre a exposé en détail la preuve, les prétentions des parties et son analyse. Il a examiné les décisions invoquées par les parties et il a indiqué et appliqué les précédents qu’il jugeait pertinents et convaincants. Ces précédents appuient sa décision, et ses motifs expliquent amplement les raisons qui l’ont amené en l’espèce à appliquer la préclusion à titre de réparation.

[59] Sur le fond, l’intimée avance que l’arbitre a omis de tirer une conclusion de fait concernant l’intention du Syndicat de modifier ses relations juridiques avec Nor‑Man, alors qu’il aurait dû le faire selon le test applicable à la préclusion promissoire établi par la Cour dans Maracle c. Travellers Indemnity Co. of Canada, [1991] 2 R.C.S. 50, p. 57.

[60] Je rejette également cette prétention. La question n’est pas de savoir si l’arbitre n’a pas appliqué l’arrêt Maracle à la lettre, mais s’il a adapté et appliqué la doctrine d’equity que constitue la préclusion d’une manière raisonnablement conforme aux buts et objectifs de la Loi, aux principes des relations du travail, à la nature du processus de négociation collective et au fondement factuel du grief de Mme Plaisier.

[61] Or, je suis convaincu qu’il l’a fait.

VIII

[62] Pour tous ces motifs, je suis d’avis d’accueillir l’appel avec dépens et de rétablir la sentence arbitrale en totalité.

Pourvoi accueilli avec dépens.

Procureurs de l’appelante : Pitblado, Winnipeg.

Procureurs de l’intimée : Inkster, Christie, Hughes, Winnipeg.

Procureur de l’intervenant : Procureur général de la Colombie‑Britannique, Victoria.


Sens de l'arrêt : Le pourvoi est accueilli

Analyses

Relations du travail - Griefs - Sentence arbitrale - Norme de contrôle - Arbitre ayant appliqué la préclusion à la demande de réparation présentée par le syndicat en vertu de la convention collective - La sentence arbitrale mettant en jeu une réparation de common law ou d’equity est‑elle assujettie à la norme de contrôle de la décision raisonnable ou à celle de la décision correcte?.

P prétendait avoir droit à une semaine de congé annuel en prime l’année de son 20e anniversaire d’entrée en service, conformément aux dispositions de la convention collective intervenue entre Nor‑Man et le Syndicat la représentant. Nor‑Man lui a refusé ce congé. L’arbitre a conclu que la pratique de l’employeur consistant à exclure les périodes d’emploi à titre occasionnel du calcul des congés annuels contrevenait aux dispositions de la convention collective. Toutefois, le Syndicat ne pouvait pas contester la façon dont l’employeur appliquait les dispositions litigieuses de la convention collective, parce qu’il y avait acquiescé de longue date. Selon l’arbitre, le Syndicat était préclus d’exiger le respect strict des droits que lui confèrent les dispositions litigieuses de la convention collective jusqu’à l’expiration de cette dernière. La demande de contrôle judiciaire présentée par le Syndicat a été rejetée au motif que la sentence arbitrale était raisonnable. La Cour d’appel, estimant que la norme applicable était celle de la décision correcte, a annulé la conclusion de l’arbitre selon laquelle il y avait préclusion.

Arrêt : Le pourvoi est accueilli.

Définie largement, la question consiste à déterminer si les sentences arbitrales qui mettent en jeu des réparations de common law ou d’equity sont, de ce fait, assujetties au contrôle judiciaire selon la norme de la décision correcte. Il est bien établi que, règle générale, c’est la norme de la raisonnabilité qui s’applique aux sentences arbitrales prononcées en vertu d’une convention collective. En l’espèce, la préclusion appliquée à titre de réparation d’equity par l’arbitre ne constitue pas une question qui revêt une importance capitale pour le système juridique dans son ensemble et est étrangère au domaine d’expertise de l’arbitre. Par conséquent, elle ne saurait appartenir à cette catégorie — ni à quelque autre catégorie — déjà établie de questions assujetties à la norme de la décision correcte. En outre, une analyse contextuelle vient confirmer qu’il convient d’appliquer la norme de la raisonnabilité — plutôt que celle de la décision correcte. La déférence est justifiée en l’espèce.

Un processus rigide de règlement des différends risque non seulement de provoquer la désintégration de la relation, mais également de troubler la paix industrielle. Les arbitres en droit du travail ont toutefois besoin de la souplesse voulue pour façonner des solutions réparatrices lorsque la situation l’exige. Ils ne sont pas tenus juridiquement d’appliquer les principes de common law et d’equity, dont la préclusion, de la même manière que les tribunaux judiciaires. Ils peuvent, à bon droit, élaborer des doctrines et concevoir des réparations adéquates dans leur domaine, en s’inspirant des principes juridiques généraux, des buts et objectifs du régime législatif, des principes des relations du travail, de la nature du processus de négociation collective et du fondement factuel des griefs dont ils sont saisis. Le large mandat dont les arbitres sont investis découle du vaste pouvoir qui leur est conféré par les conventions collectives et les textes législatifs, comme la Loi sur les relations du travail (« Loi »), et de leur rôle particulier de promotion de la paix dans les relations industrielles. Grâce à leur expertise, ils ont tous les outils nécessaires pour adapter les doctrines de common law et d’equity qu’ils estiment pertinentes dans les limites de leur sphère de créativité. La sphère réservée au pouvoir discrétionnaire des arbitres n’est nullement dépourvue de limites. La sentence arbitrale qui prête à un principe de common law ou d’equity une application qui n’est pas raisonnablement adaptée à la nature distinctive des relations du travail demeure forcément assujettie au contrôle judiciaire selon la norme de la raisonnabilité.

En l’espèce, on peut difficilement qualifier de déraisonnable la sentence prononcée par l’arbitre. Ses motifs sont non seulement transparents et intelligibles, mais aussi cohérents. L’arbitre a adapté et appliqué la doctrine d’equity que constitue la préclusion d’une manière raisonnablement conforme aux buts et objectifs de la Loi, aux principes des relations du travail, à la nature du processus de négociation collective et au fondement factuel du grief de P. Les motifs de l’arbitre expliquent amplement les raisons qui l’ont amené en l’espèce à appliquer la préclusion à titre de réparation.


Parties
Demandeurs : Nor-Man Regional Health Authority Inc.
Défendeurs : Manitoba Association of Health Care Professionals

Références :

Jurisprudence
Arrêts appliqués : Dunsmuir c. Nouveau‑Brunswick, 2008 CSC 9, [2008] 1 R.C.S. 190
Smith c. Alliance Pipeline Ltd., 2011 CSC 7, [2011] 1 R.C.S. 160
arrêts mentionnés : Agassiz School Division No. 13 (Re), [1997] M.G.A.D. No. 61 (QL)
Manitoba (Department of Family Services and Housing) and C.U.P.E., Loc. 2153 (Murdock) (Re) (2005), 142 L.A.C. (4th) 173
Ryan c. Moore, 2005 CSC 38, [2005] 2 R.C.S. 53
Toronto (Ville) c. S.C.F.P., section locale 79, 2003 CSC 63, [2003] 3 R.C.S. 77
Conseil de l’éducation de Toronto (Cité) c. F.E.E.E.S.O., district 15, [1997] 1 R.C.S. 487
Parry Sound (district), Conseil d’administration des services sociaux c. S.E.E.F.P.O., section locale 324, 2003 CSC 42, [2003] 2 R.C.S. 157
Re Corporation of the City of Penticton and Canadian Union of Public Employees, Local 608 (1978), 18 L.A.C. (2d) 307
Montréal (Ville) c. Administration portuaire de Montréal, 2010 CSC 14, [2010] 1 R.C.S. 427
Maracle c. Travellers Indemnity Co. of Canada, [1991] 2 R.C.S. 50.
Lois et règlements cités
Loi sur les relations du travail, L.R.M. 1987, ch. L10, art. 121, 128(2).

Proposition de citation de la décision: Nor-Man Regional Health Authority Inc. c. Manitoba Association of Health Care Professionals, 2011 CSC 59 (2 décembre 2011)


Origine de la décision
Date de la décision : 02/12/2011
Date de l'import : 06/04/2012

Numérotation
Référence neutre : 2011 CSC 59 ?
Numéro d'affaire : 33795
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ca;cour.supreme;arret;2011-12-02;2011.csc.59 ?
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