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04/03/1987 | CEDH | N°11281/84

CEDH | S. contre la Belgique


SUR LA RECEVABILITE de la requête N° 11281/84 présentée par M.S. contre la Belgique _________ La Commission européenne des Droits de l'Homme, siégeant en chambre du conseil le 4 mars 1987 en présence de MM. C.A. NØRGAARD, Président G. SPERDUTI J.A. FROWEIN G. JÖRUNDSSON S. TRECHSEL B. KIERNAN A.S. GÖZÜBÜYÜK A. WEITZEL J.C. SOYER H.G. SCHERMERS

H. DANELIUS H. VANDENBERGHE M. F....

SUR LA RECEVABILITE de la requête N° 11281/84 présentée par M.S. contre la Belgique _________ La Commission européenne des Droits de l'Homme, siégeant en chambre du conseil le 4 mars 1987 en présence de MM. C.A. NØRGAARD, Président G. SPERDUTI J.A. FROWEIN G. JÖRUNDSSON S. TRECHSEL B. KIERNAN A.S. GÖZÜBÜYÜK A. WEITZEL J.C. SOYER H.G. SCHERMERS H. DANELIUS H. VANDENBERGHE M. F. MARTINEZ M. H.C. KRÜGER, Secrétaire de la Commission ; Vu l'article 25 de la Convention de Sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés fondamentales ; Vu la requête introduite le 15 octobre 1984 par M.S. contre la Belgique et enregistrée le 26 novembre 1984 sous le N° de dossier 11281/84 ; Vu le rapport prévu à l'article 40 du Règlement intérieur de la Commission ; Vu la décision de la Commission, en date du 16 octobre 1986, de porter la requête à la connaissance du Gouvernement défendeur en application de l'article 42 par. 2 a) de son Règlement intérieur ; Vu les renseignements fournis par le Gouvernement défendeur et le requérant respectivement le 4 décembre 1986 et le 10 janvier 1987 ; Après avoir délibéré, Rend la décision suivante :
EN FAIT Les faits de la cause, tels qu'ils ont été exposés, peuvent se résumer comme suit : Le requérant, ressortissant allemand, né en 1959 à Beiersdorf, est domicilié à Cobourg chez ses parents. Il est musicien et actuellement au chômage. Dans la procédure devant la Commission il est représenté par Me Eberhard Engelhardt, avocat à Nuremberg. Le 27 juin 1981 le requérant se rendit en Belgique, utilisant la voiture de son père, avec quatre de ses amis allemands. Après avoir visité Bruxelles, le requérant et ses amis se rendirent à Diksmuide pour participer à une manifestation, le "Ijzerbedevaart". La voiture garée sur un parking fut fouillée par la police qui a trouvé un poignard et un manche à balai cassé. La police belge arrêta le requérant et ses amis. Après plusieurs interrogatoires et une période de détention de 24 heures le requérant et ses compagnons furent libérés sous condition de quitter immédiatement la Belgique. Le requérant prétend qu'à aucun moment il n'a été averti par la police belge qu'il serait pénalement poursuivi. Selon le Gouvernement belge, la citation à comparaître devant la quatrième chambre du tribunal correctionnel de Veurne (Furnes) pour l'audience du 3 décembre 1982 a été envoyée au requérant le 26 juillet 1982. Etant donné que le requérant n'avait pas de résidence en Belgique, deux copies en furent signifiées au Cabinet du procureur du Roi, le 30 juillet 1982, par huissier de justice. Ainsi qu'il résulte de l'avis de remise (Zustellungzeugnis) du juge du tribunal de Cobourg, en date du 23 août 1982, suite à la demande effectuée le 2 août 1982 par le procureur du Roi de Veurne, la citation fut signifiée au requérant en personne. Le 22 septembre 1982, un avocat de Gand fit savoir au greffier de Veurne, qu'il était le conseil du requérant, cité à comparaître le 3 décembre 1982 et demanda copie du dossier pénal. Le 3 décembre le tribunal rendit un jugement par défaut, le prévenu n'ayant pas été présent à l'audience. Le requérant fut condamné au paiement d'une amende de 8.000 FB pour détention d'armes et port d'armes lors d'une manifestation. Le Gouvernement précise à cet égard que deux copies du jugement furent signifiées à l'Office du procureur du Roi le 10 décembre 1982 par huissier de justice. Ainsi qu'il ressort du certificat de remise du greffier du tribunal d'instance de Cobourg, le jugement rédigé en néerlandais auquel on avait annexé une traduction française, fut signifié au requérant en personne, en date du 20 janvier 1983, par le tribunal d'instance de Cobourg. En conformité avec les mesures de mise en oeuvre de la Convention européenne d'entraide judiciaire en matière pénale du 20 avril 1959, il est prévu, dans les relations entre autorités belges et allemandes, qu'aux documents établis dans la langue de l'Etat demandeur sera jointe une traduction française, ce qui a été fait en l'occurrence. L'Allemagne, comme la faculté lui en était laissée par l'article 16 par. 2 de ladite Convention, n'a pas exigé qu'une traduction soit établie dans sa propre langue nationale. Sur les conseils du greffier, le requérant, qui ne comprend ni le néerlandais ni le français, n'entreprit rien quant à ce document. Le 15 avril 1983 un autre document belge de huit pages, dont six en flamand et deux en français, fut également signifié au requérant en personne par le tribunal d'instance de Cobourg. Il s'agit notamment des mises en demeure relatives au paiement des amendes et des frais de justice. Le greffier lui expliqua que le tribunal de Furnes l'avait condamné au paiement d'une somme de 9.653 FB dont 8.000 FB à titre d'amende et 1.653 FB au titre des frais de procédure. Or, à ce moment-là le requérant avait déjà contacté le consulat général de Belgique à Munich, par lettre du 29 mars 1983, lequel s'est déclaré incompétent. Le Consulat Général de la République Fédérale d'Allemagne à Anvers, auquel le requérant s'est ensuite adressé, recommanda au requérant de donner mandat à un avocat belge et lui envoya une liste d'avocats belges germanophones. Le requérant n'en fit rien ne disposant d'aucun moyen financier. En mai 1984 le requérant reçut une décision du Procureur Général près la Cour Fédérale de Justice - Registre Fédéral Central (Der Generalbundesanwalt - das Bundeszentralregister) du 7 mai 1984 lui signifiant l'inscription au casier judiciaire de la condamnation prononcée à son encontre le 3 décembre 1982 en Belgique. Contre cette décision le requérant formula une demande en vue d'obtenir une décision judiciaire (Antrag auf gerichtliche Entscheidung) qui fut rejetée le 21 octobre 1984 par décision de la cour d'appel (Oberlandesgericht) de Karlsruhe. Les griefs du requérant peuvent se résumer comme suit : Le requérant allègue la violation de l'article 6 de la Convention. Il se plaint notamment du fait qu'il a été condamné en Belgique sans avoir été cité à comparaître dans une langue qu'il comprend et sans avoir eu la possibilité de se défendre.
EN DROIT Le requérant se plaint de ce qu'il a fait l'objet d'un jugement rendu par défaut par la quatrième chambre, siégeant en matière correctionnelle, du tribunal de première instance de Furnes, en Belgique. Il fait valoir notamment qu'il a été condamné sans avoir été cité à comparaître dans une langue qu'il comprend et sans avoir eu la possibilité de se défendre. Il est vrai que l'article 6 (Art. 6, 6-3-a) de la Convention reconnaît en son par. 3 litt. a) à tout accusé le droit d'être informé de la nature et de la cause de l'accusation portée contre lui, et d'une manière générale, le droit à un procès équitable. Toutefois, la Commission n'est pas appelée à se prononcer sur le point de savoir si les faits allégués par le requérant révèlent l'apparence d'une violation de cette disposition eu égard au fait qu'il y avait eu notification en bonne et due forme. En effet, aux termes de l'article 26 (art. 26) de la Convention, "la Commission ne peut être saisie qu'après l'épuisement des voies de recours internes, tel qu'il est entendu selon les principes de droit international généralement reconnus". En l'espèce, le requérant n'a pas démontré qu'il a fait opposition au jugement rendu le 3 décembre 1982 par défaut par le tribunal de première instance de Furnes, et signifié le 20 janvier 1983, ainsi qu'il pouvait le faire, en application de l'article 187 du Code d'instruction criminelle belge et ce dès qu'il en avait eu connaissance par les différentes significations par l'intermédiaire du tribunal de Cobourg. Il ne peut dès lors être considéré comme ayant épuisé les voies de recours dont il disposait en droit belge. De plus, l'examen de l'affaire n'a permis de déceler aucune circonstance particulière qui aurait pu dispenser le requérant, selon les principes de droit international généralement reconnus en la matière, d'épuiser les voies de recours internes. Il s'ensuit que le requérant n'a pas satisfait à la condition relative à l'épuisement des voies de recours internes et que sa requête doit être rejetée, sur ce point, conformément à l'article 27 par. 3 (art. 27-3) de la Convention. Par ces motifs, la Commission DECLARE LA REQUETE IRRECEVABLE. Le Secrétaire Le Président de la Commission de la Commission (H.C. KRÜGER) (C.A. NØRGAARD)
ANNEXE
Code d'instruction criminelle
Article 187. L. 9 mars 1908, art. 1er. - Le condamné par défaut pourra faire opposition au jugement dans les «quinze jours», «...», qui suivent celui de sa signification.
Lorsque la signification du jugement n'a pas été faite en parlant à sa personne, le prévenu pourra faire opposition, quant aux condamnations pénales, dans les «quinze jours», «...», qui suivent celui où il aura connu la signification et, s'il n'est pas établi qu'il en a eu connaissance, jusqu'à l'expiration des délais de prescription de la peine. Il pourra faire opposition, quant aux condamnations civiles, jusqu'à l'exécution du jugement.
V. Arr. roy. No 301 du 30 mars 1936, sous 203, infra.
La partie civile et la partie civilement responsable ne pourront faire opposition que dans les conditions énoncées «à l'alinéa 1er».
L'opposition sera signifiée au ministère public et aux parties en cause.
Si l'opposition n'a pas été signifiée dans les «quinze jours» qui suivent la signification du jugement, «...», il pourra être procédé à l'exécution des condamnations et, en cas d'appel des parties poursuivantes ou de l'une d'elles, il pourra être procédé au jugement sur l'appel.
La condamnation sera comme non avenue par suite de l'opposition ; néanmoins, les frais et dépens causés par l'opposition, y compris le coût de l'expédition et de la signification du jugement, seront laissés à charge de l'opposant, si le défaut lui est imputable.
Ainsi modifié par L. 10 juillet 1967, art. 1er, 97°, et 15 juin 1981, art. 1er.
V. 150, 183, 208, 478, 644 ; - Judic. 32 s. ; - Pén. 54 et note ; - L. 8 avril 1965, art. 58 modif., t. II, v° Protection de la jeunesse.


Synthèse
Formation : Cour (plénière)
Numéro d'arrêt : 11281/84
Date de la décision : 04/03/1987
Type d'affaire : DECISION
Type de recours : Violation de l'Art. 5-4 ; Non-violation de l'art. 5-1 ; Satisfaction équitable réservée

Analyses

(Art. 5-1) ARRESTATION OU DETENTION REGULIERE, (Art. 5-1) LIBERTE PHYSIQUE, (Art. 5-1) SURETE, (Art. 5-1) VOIES LEGALES, (Art. 5-4) INTRODUIRE UN RECOURS


Parties
Demandeurs : S.
Défendeurs : la Belgique

Origine de la décision
Date de l'import : 21/06/2012
Fonds documentaire ?: HUDOC
Identifiant URN:LEX : urn:lex;coe;cour.europeenne.droits.homme;arret;1987-03-04;11281.84 ?

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