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05/03/1990 | CEDH | N°12150/86

CEDH | MULACHIÈ contre l'ITALIE


SUR LA RECEVABILITE de la requête No 12150/86 présentée par Vittorio MULACHIÈ contre l'Italie __________ La Commission européenne des Droits de l'Homme, siégeant en chambre du conseil le 5 mars 1990 en présence de MM. C.A. NØRGAARD, Président J.A. FROWEIN S. TRECHSEL F. ERMACORA G. SPERDUTI E. BUSUTTIL A. WEITZEL J.C. SOYER H.G. SCHERMERS H. DANELIUS H.

VANDENBERGHE Mme G.H. THUNE MM. F. MART...

SUR LA RECEVABILITE de la requête No 12150/86 présentée par Vittorio MULACHIÈ contre l'Italie __________ La Commission européenne des Droits de l'Homme, siégeant en chambre du conseil le 5 mars 1990 en présence de MM. C.A. NØRGAARD, Président J.A. FROWEIN S. TRECHSEL F. ERMACORA G. SPERDUTI E. BUSUTTIL A. WEITZEL J.C. SOYER H.G. SCHERMERS H. DANELIUS H. VANDENBERGHE Mme G.H. THUNE MM. F. MARTINEZ C.L. ROZAKIS Mme J. LIDDY M. L. LOUCAIDES M. J. RAYMOND, Secrétaire adjoint de la Commission ; Vu l'article 25 de la Convention de Sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés fondamentales ; Vu la requête introduite le 8 mai 1986 par Vittorio MULACHIÈ contre l'Italie et enregistrée le 13 mai 1986 sous le No de dossier 12150/86 ; Vu le rapport prévu à l'article 40 du Règlement intérieur de la Commission ; Après avoir délibéré, Rend la décision suivante :
EN FAIT Les faits tels qu'ils ont été exposés par le requérant peuvent se résumer comme suit. Le requérant, Vittorio Mulachiè, est un ressortissant italien, né le 17 octobre 1937 à Venise. Il est domicilié à Mestre. Il est aide-soignant. Au moment des faits il exerçait ses fonctions dans une maison de repos pour personnes âgées. Pour la procédure devant la Commission le requérant est représenté par Maître Elio Zaffalon, avocat à Venise. Prévenu notamment d'avoir infligé des mauvais traitements aux personnes âgées confiées à ses soins et poursuivi du chef de coups et blessures (article 582 du C.P.), de mauvais traitements (article 572 du C.P.) de violence privée (article 336 du C.P.) d'attentats à la pudeur (article 519 du C.P.) et de violence privée à l'égard d'une personne âgée (article 610 du C.P.), le requérant fut reconnu coupable de mauvais traitements et de violence privée à l'égard d'une personne âgée (article 610 du C.P.). Le requérant releva appel de ce jugement. Il excipa notamment de sa nullité en ce qu'il l'aurait condamné pour mauvais traitements sur la base de faits qui ne lui auraient pas été reprochés à ce titre mais au titre d'autres accusations spécifiques. Il invoqua à l'appui de ses griefs les dispositions de l'article 477 du C.P.P. (1). Il affirma également que certains faits dont il avait eu à répondre au cours des débats ne lui avaient jamais été formellement reprochés auparavant. Par arrêt du 10 mai 1984, déposé au greffe le 7 août 1984, la cour d'appel rejeta l'exception de nullité soulevée par l'accusé. Elle releva en effet que l'accusé avait été formellement accusé de mauvais traitements en relation à tous les faits matériels ainsi qu'aux comportements énoncés au titre de délits plus graves ; qu'il ressortait de la lecture du jugement, que les juges avaient tenu compte d'un certain nombre de faits - tels qu'injures, coups et menaces - qui ne pouvaient faire l'objet de poursuites à défaut de plainte des victimes, mais pouvaient s'analyser comme procurant des souffrances d'ordre moral. Celles-ci selon une jurisprudence constante sont une conduite punissable au sens de l'article 572 du C.P. Elle releva enfin que tous les faits avaient été éclaircis lors de l'instruction faite par le parquet et exposés à nouveau lors des audiences.
___________________________ (1) Article 477 du C.P.P. : "Dans sa décision le juge peut donner des faits une définition juridique différente de celle énoncée dans la décision de renvoi en jugement ou dans la demande de citation à comparaître, infliger les peines correspondantes même si elles sont plus graves et appliquer s'il y a lieu des mesures de sûreté pourvu que l'infraction ne soit pas de compétence d'un juge plus élevé ou d'un juge spécial. S'il ressort des débats que les faits sont différents de ceux énoncés dans les actes précités, le juge, en dehors des cas prévus à l'article 445, décide par ordonnance de transmettre les actes au ministère public." La cour d'appel souligna par ailleurs qu'étant donné la nature de l'infraction, il était loisible aux juges de tenir compte d'un ensemble de circonstances qui sans transformer la nature de l'accusation venaient étayer cette dernière et que cela ne portait pas atteinte au principe de la correlation nécessaire entre accusation et condamnation, pour autant que ces circonstances aient été établies dans le plein respect des droits de la défense. Devant la Cour de cassation le requérant souleva à nouveau le problème. Par arrêt du 7 octobre 1985, déposé au greffe le 15 janvier 1986, la Cour de cassation rejeta son grief et confirma à cet égard dans son intégralité l'arrêt de la cour d'appel en insistant sur le fait que le but visé par l'article 477 du C.P.P., consacré également à l'article 6 par. 3 (a) de la Convention européenne des Droits de l'Homme, est d'assurer à l'accusé une complète possibilité de se défendre sur toutes les circonstances relatives au délit. Or, en l'espèce, toutes les circonstances avaient été relevées lors de l'instruction préparatoire et exposées à nouveau lors des débats en la présence de l'accusé.
GRIEFS Le requérant se plaint d'avoir été accusé de manière sommaire, incomplète et équivoque des accusations dont il faisait l'objet et de n'avoir ainsi pu se défendre de manière satisfaisante. Il se plaint en particulier d'avoir été condamné sur la base d'une série de conduites qu'il aurait tenues, qui ne constituaient pas des infractions mais tout au plus des actes vexatoires et pour des épisodes commis après la date indiquée dans l'acte d'accusation dont certains n'étaient relatés que dans les procès-verbaux d'interrogatoire et sur lesquels il ne s'était pas défendu au cours du procès. Le requérant invoque les dispositions de l'article 6 par. 1 et par. 3 (a) et (b) de la Convention.
EN DROIT
1. Le requérant se plaint d'avoir été accusé de manière sommaire, incomplète et équivoque des accusations dont il faisait l'objet et de n'avoir pu se défendre de manière satisfaisante. Il invoque les dispositions de l'article 6 par. 3 litt. (a) et litt. (b) (art. 6-3-a, 6-3-b) de la Convention. Ces dispositions prévoient que tout accusé a le droit d'"être informé, dans le plus court délai, dans une langue qu'il comprend et d'une manière détaillée, de la nature et de la cause de l'accusation portée contre lui" (par. 3 a) (art. 6-3-a) et de "disposer du temps et des facilités nécessaires à la préparation de sa défense" (par. 3 b) (art. 6-3-b). La Commission et la Cour ont souligné que la disposition de l'article 6 par. 3 (a) (art. 6-3-a) revêt une importance fondamentale pour la préparation de la défense et que sa portée doit notamment s'apprécier en relation à l'alinéa (b) du paragraphe 3 de l'article 6 (art. 6-3-b) qui reconnaît à toute personne le droit à disposer du temps et des facilités nécessaires à la préparation de sa défense (voir No. 524/59, déc. 19.12.60, Annuaire 3, pp. 323, 345 ; No. 8490/79, déc. 12.3.81, D.R. 22 pp. 140, 144 ; Cour Eur. D.H., arrêt Brozicek du 19 décembre 1989, série A No. 167, Avis Comm., par. 65) et à la lumière du droit plus général à un procès équitable que garantit le paragraphe 1 de l'article 6 (art. 6-1) de la Convention (voir mutatis mutandis Cour Eur. D.H., arrêts Deweer du 27 février 1980, série A No. 35 p. 30, par. 56, Artico du 13 mai 1980, série A No. 37, p. 15, par. 32, Goddi du 9 avril 1984, série A No. 76, p. 11, par. 28, enfin Colozza et Rubinat du 12 février 1985, série A No. 89, p. 14, par. 26). L'information visée à l'article 6 par. 3 (a) (art. 6-3-a) doit porter à la fois sur les faits matériels mis à la charge de l'accusé, qui sont à l'origine de son inculpation, et sur leur qualification juridique (voir No. 7628/76 X c/Belgique, déc. 9.5.77, D.R. 9 p. 169, et No. 8490/79, Zimmermann c/Autriche, déc. 12.3.81, D.R. 22 p. 140 et rapport Comm. 6.7.82, D.R. 30 p. 15 (règlement amiable). A cet égard la Commission relève que les accusations portées contre le requérant s'appuyaient sur un ensemble de faits et de comportements dont certains, d'une particulière gravité, avaient été qualifiés comme constituant des infractions spécifiques. A raison de ces mêmes faits les requérants avaient de surcroît été accusés plus généralement de mauvais traitements. La Commission note également que les différentes conduites reprochées au requérant avaient été portées à sa connaissance au cours de la procédure notamment durant les interrogatoires effectués pendant l'instruction et ressortaient en tous cas de l'ordonnance de renvoi en jugement ainsi que des actes du procès mis à la disposition de la défense. En tous cas, il n'a pas été contesté que les diverses circonstances et les multiples épisodes ayant contribué à l'établissement de ces faits aient pu être examinés contradictoirement lors des audiences du procès. A la lumière de ces constatations, la Commission estime que le requérant a été dûment informé de la nature et de la cause de l'accusation portée contre lui, conformément aux dispositions de l'article 6 par. 3 a) (art. 6-3-a) de la Convention et a pu disposer du temps et des facilités nécessaires à la préparation de sa défense conformément aux dispositions de l'article 6 par. 3 b) (art. 6-3-b) de la Convention. Il s'ensuit que ce grief est manifestement mal fondé et doit être rejeté conformément à l'article 27 par. 2 (art. 27-2) de la Convention.
2. Le requérant a également allégué qu'à raison des mêmes faits il y a eu également violation du droit à un procès équitable, garanti par l'article 6 par. 1 (art. 6-1) de la Convention. Toutefois, la Commission constate que les griefs soulevés par le requérant reposent uniquement sur l'allégation selon laquelle il n'aurait pas été dûment informé de la nature et de la cause de l'accusation dont il a fait l'objet et n'aurait pu de ce fait préparer sa défense de manière satisfaisante. Or, la Commission vient de constater qu'à cet égard les griefs du requérant sont manifestement mal fondés. D'autre part, rien dans le dossier ne vient étayer la thèse selon laquelle il aurait été porté atteinte à l'équité de la procédure. Il s'ensuit donc que les griefs tirés par le requérant d'une violation des dispositions de l'article 6 par. 1 (art. 6-1) de la Convention qui reposent sur les mêmes faits doivent être eux aussi rejetés comme étant manifestement mal fondés au sens de l'article 27 par. 2 (art. 27-2) de la Convention. Par ces motifs, la Commission DECLARE LA REQUETE IRRECEVABLE
Le Secrétaire adjoint de Le Président de la Commission la Commission (J. RAYMOND) (C.A. NØRGAARD)


Type d'affaire : DECISION
Type de recours : recevable (partiellement) ; irrecevable (partiellement)

Analyses

(Art. 5-3) DUREE DE LA DETENTION PROVISOIRE


Parties
Demandeurs : MULACHIÈ
Défendeurs : l'ITALIE

Références :

Origine de la décision
Formation : Commission
Date de la décision : 05/03/1990
Date de l'import : 21/06/2012

Fonds documentaire ?: HUDOC


Numérotation
Numéro d'arrêt : 12150/86
Identifiant URN:LEX : urn:lex;coe;cour.europeenne.droits.homme;arret;1990-03-05;12150.86 ?

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