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19/07/1995 | CEDH | N°17506/90

CEDH | AFFAIRE KEROJÄRVI c. FINLANDE


COUR (CHAMBRE)
AFFAIRE KEROJÄRVI c. FINLANDE
(Requête no17506/90)
ARRÊT
STRASBOURG
19 juillet 1995
En l’affaire Kerojärvi c. Finlande1,
La Cour européenne des Droits de l’Homme, constituée, conformément à l’article 43 (art. 43) de la Convention de sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés fondamentales ("la Convention") et aux clauses pertinentes de son règlement B (2), en une chambre composée des juges dont le nom suit:
MM.  R. Bernhardt, président,
Thór Vilhjálmsson,
I. Foighel,
R. Pekkanen,


Sir  John Freeland,
MM.  A.B. Baka,
L. Wildhaber,
K. Jungwiert,
P. Kuris, 
ainsi que...

COUR (CHAMBRE)
AFFAIRE KEROJÄRVI c. FINLANDE
(Requête no17506/90)
ARRÊT
STRASBOURG
19 juillet 1995
En l’affaire Kerojärvi c. Finlande1,
La Cour européenne des Droits de l’Homme, constituée, conformément à l’article 43 (art. 43) de la Convention de sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés fondamentales ("la Convention") et aux clauses pertinentes de son règlement B (2), en une chambre composée des juges dont le nom suit:
MM.  R. Bernhardt, président,
Thór Vilhjálmsson,
I. Foighel,
R. Pekkanen,
Sir  John Freeland,
MM.  A.B. Baka,
L. Wildhaber,
K. Jungwiert,
P. Kuris, 
ainsi que de M. H. Petzold, greffier,
Après en avoir délibéré en chambre du conseil les 24 février et 19 juin 1995,
Rend l’arrêt que voici, adopté à cette dernière date:
PROCEDURE 
1.   L’affaire a été déférée à la Cour par le gouvernement de la République de Finlande ("le Gouvernement") le 10 juin 1994, dans le délai de trois mois qu’ouvrent les articles 32 par. 1 et 47 (art. 32-1, art. 47) de la Convention.  A son origine se trouve une requête (no 17506/90) dirigée contre la Finlande et dont un ressortissant de cet Etat, M. Erkki Kerojärvi, avait saisi la Commission européenne des Droits de l’Homme ("la Commission") le 25 août 1990 en vertu de l’article 25 (art. 25).
La requête du Gouvernement renvoie aux articles 44 et 48 (art. 44, art. 48).  Elle a pour objet d’obtenir une décision sur le point de savoir si les faits de la cause révèlent un manquement de l’Etat défendeur aux exigences de l’article 6 par. 1 (art. 6-1) de la Convention. 
2.   En réponse à l’invitation prévue à l’article 35 par. 3 d) du règlement B, le requérant a manifesté le désir de participer à l’instance et a désigné son conseil (article 31). 
3.   La chambre à constituer comprenait de plein droit M. R. Pekkanen, juge élu de nationalité finlandaise (article 43 de la Convention) (art. 43), et M. R. Ryssdal, président de la Cour (article 21 par. 3 b) du règlement B).  Le 25 juin 1994, celui-ci a tiré au sort le nom des sept autres membres, à savoir M. Thór Vilhjálmsson, M. I. Foighel, M. F. Bigi, Sir John Freeland, M. A.B. Baka, M. L. Wildhaber et M. K. Jungwiert, en présence du greffier (articles 43 in fine de la Convention et 21 par. 4 du règlement B) (art. 43).  Ultérieurement, M. P. Kuris, suppléant, a remplacé M. Bigi, empêché (articles 22 par. 1 et 24 par. 1 du règlement B). 
4.   En sa qualité de président de la chambre (article 21 par. 5 du règlement B), M. Ryssdal a consulté, par l’intermédiaire du greffier, l’agent du Gouvernement, l’avocat du requérant et le délégué de la Commission au sujet de l’organisation de la procédure (articles 39 par. 1 et 40).  Conformément à l’ordonnance rendue en conséquence le 6 juillet 1994, le greffier a reçu les mémoires du requérant et du Gouvernement le 2 novembre 1994.  Le 12 décembre, le délégué de la Commission a déposé un mémoire en réponse.  Par la suite, M. R. Bernhardt, vice-président de la Cour, a remplacé M. Ryssdal, empêché (article 21 par. 5, second alinéa, du règlement B). 
A diverses dates s’échelonnant entre le 25 janvier et le 20 février 1995, le Gouvernement, la Commission et le requérant ont fourni plusieurs documents et d’autres précisions, comme le greffier les y avait invités sur les instructions du président. 
5.  Ainsi qu’en avait décidé ce dernier, les débats se sont déroulés en public le 22 février 1995, au Palais des Droits de l’Homme à Strasbourg.  La Cour avait tenu auparavant une réunion préparatoire.
Ont comparu: 
- pour le Gouvernement 
MM. H. Rotkirch, directeur des Affaires juridiques,
ministère des Affaires étrangères,  agent,
A. Kosonen, conseiller juridique,
ministère des Affaires étrangères,  coagent,
J. Hirvonen, conseiller juridique,
ministère de la Justice,  conseiller;
- pour la Commission   
M. M.P. Pellonpää,  délégué; 
- pour le requérant 
M. M. Fredman, avocat,  conseil.
La Cour a entendu en leurs déclarations MM. Pellonpää, Rotkirch, Kosonen et Fredman, ainsi que des réponses à ses questions et à celles de deux juges. 
EN FAIT 
I.   LES CIRCONSTANCES DE L’ESPÈCE 
6.   Citoyen finlandais né en 1924, M. Erkki Kerojärvi est retraité et vit à Helsinki. 
7.   Le 5 septembre 1985, le fonds national d’indemnisation des accidents (tapaturmavirasto, olycksfallsverket - "le fonds d’indemnisation") statua sur une demande du requérant, qui sollicitait de l’Etat finlandais, en vertu de la loi de 1948 sur les blessures de guerre (sotilasvammalaki, lag om skada, ådragen i militärtjänst, 28.5.1948/404 - "la loi de 1948"), une indemnité à raison de certaines affections résultant, d’après lui, du service accompli pendant les guerres de 1939 à 1945 entre la Finlande et l’Union soviétique.  Le fonds d’indemnisation admit qu’une blessure causée dans le dos par un éclat d’obus était une blessure de guerre, mais rejeta les réclamations de M. Kerojärvi quant à une hernie inguinale, une prostatite chronique, une amygdalite aiguë et plusieurs autres affections.  Estimant le taux d’incapacité à moins de 10 %, minimum requis pour pouvoir prétendre à une rente viagère (elinkorko, livränta) en application de l’article 8 de la loi de 1948 (paragraphe 19 ci-dessous), le fonds d’indemnisation refusa une telle prestation au requérant.
En appel, le tribunal des assurances (vakuutusoikeus, försäkringsdomstolen) reconnut que l’intéressé souffrait en outre d’une amygdalite lui ouvrant droit en principe à indemnité, mais considéra que le taux d’incapacité n’en demeurait pas moins inférieur à 10 %. Le 4 septembre 1986, il débouta donc M. Kerojärvi de sa demande d’indemnisation.  La Cour suprême confirma ce jugement le 15 décembre 1987. 
8.   En janvier 1988, le requérant invita le fonds d’indemnisation à réajuster son taux d’incapacité.  Il invoquait un rapport médical du 3 juin 1987 pour établir qu’il souffrait des affections précitées.  En mai 1988, il produisit un nouveau rapport.
Le fonds d’indemnisation écarta la requête le 23 août 1988 au motif que l’intéressé n’avait pas démontré un changement radical des circonstances d’après lesquelles son incapacité avait d’abord été évaluée. 
9.   Le requérant attaqua cette décision devant le tribunal des assurances.  Il déposa de nouvelles pièces, parmi lesquelles des radiographies et des résultats d’examens de laboratoire du 17 avril 1989; il réitéra sa demande d’indemnité pour autant qu’elle avait été écartée dans l’instance visée au paragraphe 7 ci-dessus. 
10.   Au cours de la procédure, le tribunal des assurances recueillit l’avis du fonds d’indemnisation, daté du 24 octobre 1988, qui, sans être motivé, recommandait le rejet de l’appel.  Il obtint aussi copie du dossier administratif concernant le requérant et d’un dossier médical où se trouvaient consignés les examens médicaux subis en temps de guerre, auprès de l’état-major du district militaire de l’Uusimaa occidental (Länsi-Uudenmaan sotilaspiirin esikunta, staben för Västra Nylands militärdistrikt).  Il ressortait de ces documents, notamment, qu’en 1940 l’intéressé avait été traité dans un hôpital militaire pour une hernie inguinale et qu’en 1943, il avait subi une intervention à cause de celle-ci.
Le tribunal des assurances ne communiqua pas au requérant une copie de l’avis ou des dossiers précités.  Ils figuraient toutefois dans le dossier du tribunal, accessible à l’intéressé pendant toute la procédure devant celui-ci (article 19 de la loi de 1951 sur l’accès aux documents publics - laki yleisten asiakirjain julkisuudesta, lagen om allmänna handlingars offentlighet, 9.2.1951/83). 
11.   Le 19 octobre 1989, le tribunal des assurances débouta le requérant quant à la question du taux d’incapacité, estimant que les blessures dues à l’éclat d’obus et l’amygdalite aiguë représentaient toujours une incapacité de moins de 10 %.  Il rejeta également la demande de réparation, au motif que cette question avait été tranchée par l’arrêt de la Cour suprême du 15 décembre 1987 (paragraphe 7 ci-dessus) qui avait force exécutoire (paragraphe 21 ci-dessous).  Le jugement indiquait que le tribunal avait obtenu l’avis du fonds d’indemnisation et les dossiers de l’état-major du district militaire. Il précisait en outre que le tribunal des assurances retournerait à l’état-major le dossier administratif et celui relatif aux examens subis par M. Kerojärvi pendant la guerre; il signalait aussi que la Cour suprême pouvait être saisie "si l’affaire [concernait] le droit à indemnisation". 
12.   Le 31 décembre 1989, le requérant se pourvut devant la Cour suprême; il dénonçait la décision du tribunal des assurances d’après laquelle la Cour suprême avait rendu le 15 décembre 1987 un arrêt définitif sur sa demande d’indemnisation.  Il demandait un traitement de consolidation sur une base annuelle et le remboursement de certains frais de subsistance.  Il affirmait que ses blessures de guerre étaient incurables.  Il n’indiquait pas dans son recours que les pièces recueillies par le tribunal des assurances ne lui avaient pas été communiquées. 
13.   Le tribunal des assurances transmit le dossier à la Cour suprême; l’avis du fonds d’indemnisation y figurait, mais non les dossiers administratif et médical, qui avaient été retournés à l’état-major du district militaire (paragraphe 11 ci-dessus).  D’après le Gouvernement, des copies du dossier administratif avaient été déposées dans la première procédure devant la Cour suprême.  Le Gouvernement signale en outre que, dans la seconde, le tribunal des assurances et la Cour suprême fondèrent leurs décisions du moins en partie sur lesdits dossiers. 
14.   A l’audience publique du 22 février 1995, l’agent du Gouvernement a déclaré qu’à l’époque des faits, le tribunal des assurances et la Cour suprême avaient pour pratique bien établie de ne pas communiquer le type de pièces dont il s’agit même s’ils les avaient sollicitées d’office et que la question à examiner portât sur la recevabilité ou le fond. 
15.   Le 7 juin 1990, la Cour suprême confirma la décision du tribunal des assurances du 19 octobre 1989.  Aux termes de son arrêt:
"RECOURS A LA COUR SUPREME
M. Kerojärvi a demandé une indemnité pour [certaines affections alléguées].
ARRÊT DE LA COUR SUPREME
La décision du tribunal des assurances est confirmée.
16.   Le requérant ne fut représenté par un conseil ni devant le tribunal des assurances ni devant la Cour suprême.  Il ne consulta le dossier à aucun moment de la procédure. 
II.   LE DROIT INTERNE PERTINENT
17.   Un régime d’indemnisation, entièrement financé par l’Etat finlandais, des blessures et maladies subies ou contractées au service militaire, a été instauré par la loi de 1948.  Aux termes de l’article 1 de la loi de 1956 portant prorogation de l’application de la loi sur les blessures de guerre (laki sotilasvammalain soveltamisalan laajentamisesta, lag angående utvidgad tillämpning av lagen om skada, ådragen i militärtjänst, 15.6.1956/390), la loi de 1948 s’applique entre autres aux soldats finlandais blessés au cours des guerres entre la Finlande et l’Union soviétique de 1939 à 1945. 
18.   La disposition générale de l’article 1 par. 1 de la loi de 1948 prévoit qu’au titre de la loi "seront dédommagés" les individus ayant subi des blessures ou contracté une maladie pendant le service, notamment en qualité d’appelés.  Les articles 2 et 3 renferment des règles détaillées sur le type de blessures ou de maladies pouvant passer pour causées par le service militaire aux fins d’une indemnisation en vertu de la loi.  19.     L’article 8 par. 1 du "Chapitre 2.  De l’indemnisation" (Korvaukset, Ersättingar) est ainsi libellé: 
"Une personne blessée ou malade (...) dont le taux d’incapacité est d’au moins 10 % a droit à une rente viagère.
Le chiffre représentant le taux d’incapacité correspond au degré où la blessure ou la maladie en question réduit la capacité de la personne concernée de subvenir à ses propres besoins." 
20.   Tel qu’il était applicable à l’époque des faits, l’article 29 par. 2 prévoyait qu’une décision du tribunal des assurances sur le droit à réparation en vertu de la loi de 1948 pouvait être attaquée devant la Cour suprême.  La décision du tribunal des assurances était toutefois définitive pour certaines questions.
La Cour suprême interprète la disposition précitée comme signifiant que la personne concernée peut interjeter appel sur le droit à indemnité mais non sur le taux d’incapacité, de sorte qu’un recours afférent à celui-ci est irrecevable. 
21.   D’après un principe général de droit en Finlande, une décision de la Cour suprême rejetant en tout ou partie la demande d’une personne qui sollicite une prestation d’une autorité publique a force exécutoire (lainvoima, laga kraft), en ce sens qu’elle n’est pas susceptible d’un autre recours, mais elle n’a pas force de chose jugée (oikeusvoima, rättskraft).  Le demandeur peut donc à tout moment, au moyen d’une nouvelle requête, prier l’autorité compétente de reconsidérer la revendication (voir, entre autres, Jaakko Uotila, Seppo Laakso, Teuvo Pohjolainen, Jarmo Vuorinen, pp. 186-189, dans Yleishallinto-oikeus pääpiirteittäin, Tampere 1989).  Ce principe vaut aussi pour une demande d’indemnisation en vertu de la loi de 1948. 
22.   Selon la nouvelle version de l’article 29 par. 2 telle qu’elle a été modifiée avec effet au 1er janvier 1994 (par la loi no 1225/93), les décisions du tribunal des assurances en application de la loi sont définitives.  Toutefois, sous réserve de conditions strictes, l’article 25 (lui aussi modifié) permet de rouvrir la procédure devant le fonds d’indemnisation ou le tribunal des assurances. 
23.   Le cas échéant, les dispositions régissant la procédure devant les juridictions ordinaires s’appliquent à celle se déroulant devant le tribunal des assurances (article 9 par. 4 de la loi de 1958 sur le tribunal des assurances - laki vakuutusoikeudesta, lag om försäkringsdomstolen, 17.1.1958/14).D’après le chapitre 26, article 6, du code de procédure judiciaire (oikeudenkäymiskaari, rättegångsbalken), si la cour d’appel (hovioikeus, hovrätten) recueille de sa propre initiative un avis ou une autre déclaration écrite pouvant influer sur sa décision, elle doit, à moins que ce ne soit à l’évidence superflu, inviter les parties à les commenter par écrit.
PROCEDURE DEVANT LA COMMISSION 
24.  Dans sa requête (no 17506/90) du 25 août 1990 à la Commission, le requérant formulait plusieurs griefs concernant l’examen de sa demande aux fins de se voir reconnaître un taux plus élevé d’incapacité; il alléguait des violations des articles 6 par. 1 et 14 (art. 6-1, art. 14) de la Convention. 
25.   Le 7 avril 1993, la Commission a retenu le grief tiré de l’article 6 par. 1 (art. 6-1) et relatif à la non-communication de documents dans la procédure devant la Cour suprême; elle a rejeté la requête pour le surplus.  Dans son rapport du 11 janvier 1994 (article 31) (art. 31), elle conclut à l’unanimité qu’il y a eu violation de l’article 6 par. 1 (art. 6-1).  Le texte intégral de son avis figure en annexe au présent arrêt2.
CONCLUSIONS PRESENTEES A LA COUR 
26.   A l’audience du 22 février 1995, le Gouvernement a invité la Cour à dire, comme il l’en avait priée dans son mémoire, qu’il n’y avait pas eu violation de la Convention en l’espèce. 
27.  A la même occasion, le requérant a maintenu les demandes formulées dans son mémoire et par lesquelles il invitait la Cour 1) à constater que la procédure devant la Cour suprême avait méconnu son droit à un procès équitable garanti par l’article 6 (art. 6) de la Convention; et 2) à lui octroyer une satisfaction équitable en application de l’article 50 (art. 50). 
EN DROIT 
I.   SUR LA VIOLATION ALLEGUEE DE L’ARTICLE 6 PAR. 1 (art. 6-1) DE LA CONVENTION 
28.   Le requérant se plaint de ce que la Cour suprême n’ait pas purgé d’office le vice de la procédure devant le tribunal des assurances, provenant de ce que celui-ci n’avait pas communiqué à l’intéressé certaines pièces du dossier.  Selon lui, il y a infraction au droit à un procès équitable, prévu à l’article 6 par. 1 (art. 6-1) de la Convention dont les passages pertinents sont ainsi libellés:
"Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement (...) par un tribunal (...) qui décidera (...)des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil (...)" 
29.   Le Gouvernement conteste l’applicabilité de l’article 6 par. 1 (art. 6-1) à la procédure en cause et affirme qu’en tout cas, cette disposition a été respectée. 
30.   La Commission partage les vues du requérant. 
31.   L’instance devant le tribunal des assurances s’est déroulée avant la ratification de la Convention par la Finlande, le 10 mai 1990, et échappe donc à la compétence ratione temporis de la Cour.  Celle-ci se bornera en conséquence à examiner la procédure devant la Cour suprême, et d’ailleurs les comparants n’ont pas prétendu qu’il devrait en aller autrement.      
A. Sur l’applicabilité de l’article 6 par. 1 (art. 6-1)
1. Existence d’une "contestation" sur un "droit" 
32.   Selon les principes dégagés par sa jurisprudence (voir, entre autres, l’arrêt Zander c. Suède du 25 novembre 1993, série A no 279-B, p. 38, par. 22), la Cour doit d’abord rechercher s’il y avait "contestation" sur un "droit" que l’on peut prétendre, au moins de manière défendable, reconnu en droit interne.  Il doit s’agir d’une contestation réelle et sérieuse; elle peut concerner aussi bien l’existence même d’un droit que son étendue ou ses modalités d’exercice; enfin, l’issue de la procédure doit être directement déterminante pour un tel droit. 
33.   Il n’est pas contesté qu’à l’exception du dernier, ces critères d’applicabilité de l’article 6 par. 1 (art. 6-1) se trouvent remplis et la Cour n’aperçoit aucune raison de statuer autrement.
Le Gouvernement nie en revanche l’applicabilité au motif que l’issue de la procédure devant la Cour suprême ne pouvait être directement déterminante pour le droit du requérant à une indemnisation en vertu de la loi de 1948.  La Cour suprême n’aurait pas eu compétence pour examiner des recours sur le taux d’incapacité (paragraphe 20 ci-dessus) pas plus que sur l’indemnisation alors que, comme en l’espèce, elle s’est déjà prononcée sur la demande par une décision antérieure - ici, du 15 décembre 1987 - de sorte que la question a, selon les termes du Gouvernement, acquis force de chose jugée (res judicata).  En bref, la Cour suprême n’aurait pas examiné et ne pourrait examiner la cause du requérant au fond. 
34.   M. Kerojärvi et le délégué de la Commission soulignent que non seulement le Gouvernement a soulevé pour la première fois devant la Cour les arguments qui précèdent, mais que ceux-ci viennent contredire ce qu’il avait précédemment plaidé devant la Commission, à savoir que la Cour suprême avait compétence pour connaître de l’affaire au fond. Les nouveaux arguments reposeraient donc sur une qualification totalement différente de la véritable nature de la procédure interne. Dans l’intérêt du "bon déroulement de la procédure" devant les organes de la Convention, le Gouvernement devrait donc être forclos à les soulever devant la Cour.  Le délégué invoque à cet égard, mutatis mutandis, l’arrêt Pine Valley Developments Ltd et autres c. Irlande du 29 novembre 1991 (série A no 222, pp. 21-22, par. 47) et le requérant s’appuie sur l’arrêt Stjerna c. Finlande du 25 novembre 1994 (série A no 299-B, p. 60, par. 36).
Quoi qu’il en soit, selon l’intéressé et le délégué, la compétence et le contrôle de la Cour suprême s’étendent au fond de l’appel et ne se trouvent pas limités de la manière indiquée par le Gouvernement. 
35.   La Cour ne juge pas devoir trancher ici le différend relatif au changement d’attitude du Gouvernement quant à la compétence de la Cour suprême car, en toute hypothèse, l’argument de celui-ci d’après lequel l’arrêt de la Cour suprême du 15 décembre 1987 dans la première procédure (paragraphe 7 in fine ci-dessus) avait pour effet de priver ladite cour de la compétence pour connaître de la prétention élevée par M. Kerojärvi dans le cadre de sa nouvelle requête au fonds d’indemnisation, n’emporte pas sa conviction.  Il semblerait, au contraire, que ledit arrêt avait seulement force exécutoire et que le requérant avait à tout moment la faculté d’inviter les autorités compétentes à reconsidérer sa demande d’indemnisation (paragraphe 21 ci-dessus) comme il l’a fait en janvier 1988 (paragraphe 8 ci-dessus). Nul élément ne permet de penser que, dans la seconde procédure en 1990, la Cour suprême n’eût pu accueillir le recours si elle avait désapprouvé la conclusion du tribunal des assurances sur le fond. L’issue de cette procédure devant elle était donc directement déterminante, aux fins de l’article 6 par. 1 (art. 6-1), pour le droit à réparation revendiqué par l’intéressé sur la base de la loi de 1948.
2. Sur le caractère civil du droit du requérant 
36.   M. Kerojärvi et les autorités finlandaises se trouvaient en désaccord sur le point de savoir s’il avait droit à une indemnité en vertu de la loi de 1948 à raison des affections contractées au service militaire.  Certes, le droit en question présentait certains aspects de droit public en ce qu’il avait trait à un régime d’indemnisation établi par la loi, géré par les pouvoirs publics et financé entièrement par l’Etat finlandais.  Les aspects de droit privé prédominaient toutefois.  Une rente viagère octroyée en application de la loi de 1948 était individuelle et pécuniaire par nature et tendait à compenser la perte de moyens de subsistance résultant d’une incapacité (paragraphe 18 ci-dessus).
Eu égard à ce qui précède, la Cour n’aperçoit aucune raison de distinguer le cas d’espèce des précédentes affaires dans lesquelles elle a conclu que les contestations sur les prestations au titre d’un régime de sécurité sociale concernent des "droits de caractère civil" (voir, en particulier, les arrêts Feldbrugge c. Pays-Bas du 29 mai 1986, série A no 99, pp. 12-16, paras. 26-40, Salesi c. Italie du 26 février 1993, série A no 257-E, pp. 59-60, par. 19, et Schuler-Zgraggen c. Suisse du 24 juin 1993, série A no 263, p. 17, par. 46).  Partant, comme le Gouvernement l’a concédé devant la Cour, le droit contesté revêtait un "caractère civil".
3. Conclusion 
37.   En somme, l’article 6 par. 1 (art. 6-1) s’applique en l’occurrence.
B. Sur l’observation de l’article 6 par. 1 (art. 6-1) 
38.   Le Gouvernement conteste, à l’encontre du requérant et de la Commission, que la circonstance que la Cour suprême n’a pas communiqué au requérant une copie de l’avis du fonds d’indemnisation et les dossiers administratif et médical de l’état-major du district militaire s’analyse en un manquement au droit de l’intéressé à un procès équitable.
Il fait valoir que le tribunal des assurances avait recueilli les dossiers de sa propre initiative et les avait retournés à l’état-major.  Ils ne figuraient donc pas parmi les pièces que ledit tribunal a transmises à la Cour suprême.  Certes, une copie des papiers administratifs se trouvait parmi les documents de la première procédure devant la Cour suprême (paragraphe 13 ci-dessus), mais, d’après le Gouvernement, ils ne pouvaient guère avoir d’importance pour l’issue de la seconde.  Les documents que le tribunal des assurances avait obtenus de l’autorité militaire n’auraient renfermé aucun renseignement utile pour la solution de l’affaire ou de nature à influer sur la décision de la Cour suprême.  Celle-ci aurait écarté le recours pour des motifs de procédure et la communication à M. Kerojärvi des pièces dont il s’agit ne lui aurait pas fourni de renseignements supplémentaires propres à jeter la lumière sur la décision de la Cour suprême.
L’avis du fonds d’indemnisation aurait été versé au dossier transmis à la Cour suprême, mais aurait consisté en une unique phrase invitant le tribunal des assurances à écarter l’appel pour défaut de fondement; il n’aurait pas développé la position énoncée dans sa décision du 23 août 1988 ni avancé d’arguments auxquels le requérant ait eu à répondre (paragraphes 8 et 10 ci-dessus).
Le Gouvernement souligne que M. Kerojärvi ne s’est prévalu à aucun stade de la procédure de la faculté d’avoir accès aux dossiers ou à l’avis en question, bien que le tribunal des assurances s’y soit référé dans son jugement du 19 octobre 1989 (paragraphe 11 ci-dessus). Il ne se serait pas non plus plaint à la Cour suprême de ce que le tribunal ne lui eût pas communiqué ces pièces (paragraphe 12 ci-dessus). 
39.   Selon le requérant et la Commission, que les documents dont il s’agit aient eu ou non une incidence sur le rejet du recours par la Cour suprême, l’article 6 (art. 6) faisait obligation à celle-ci de les communiquer d’office à l’intéressé.  La notion de "procès équitable" exigerait que le requérant lui-même ait eu la faculté d’apprécier la pertinence et le poids desdites pièces et de formuler les observations qu’il jugerait adéquates. Comme il n’en aurait pas eu le loisir, il n’aurait pu participer de manière adéquate à l’instance devant celle-ci.  On ne saurait lui reprocher de ne pas s’être plaint à celle-ci de ce défaut de communication.  Lorsque, comme en l’occurrence, un appelant ne bénéficie pas de l’assistance d’un conseil, la Cour suprême devrait encore davantage veiller d’elle-même à ce que justice non seulement soit rendue, mais paraisse rendue. 
40.   La Cour réaffirme que, d’après sa jurisprudence, les modalités d’application de l’article 6 (art. 6) en appel varient selon les particularités de la procédure considérée; il faut prendre en compte l’ensemble du procès mené dans l’ordre juridique interne et le rôle qu’y a joué la juridiction d’appel (voir, par exemple, les arrêts Monnell et Morris c. Royaume-Uni du 2 mars 1987, série A no 115, p. 22, par. 56, Helmers c. Suède du 29 octobre 1991, série A no 212-A, p. 15, par. 31, et Maxwell c. Royaume-Uni du 28 octobre 1994, série A no 300-C, p. 96, par. 34). 
41.   En l’espèce, la Cour n’a pas compétence ratione temporis pour connaître de l’instance devant le tribunal des assurances (paragraphe 31 ci-dessus).  Celle-ci peut toutefois servir de contexte pour la question de savoir si celle devant la Cour suprême fut équitable (voir, mutatis mutandis, l’arrêt Hokkanen c. Finlande du 23 septembre 1994, série A no 299-A, p. 19, par. 53).
A ce propos la Cour note que le tribunal des assurances avait rejeté les prétentions du requérant - au moins en partie au fond - sans transmettre à l’intéressé l’avis et les dossiers qu’il avait obtenus du fonds d’indemnisation et de l’état-major du district militaire. Bien que M. Kerojärvi pût consulter ces documents dans le dossier du tribunal des assurances, c’est semble-t-il seulement parce que celui-ci les mentionna dans son jugement du 19 octobre 1989 que l’intéressé apprit qu’ils figuraient dans le dossier.  Au moment de la notification de son jugement, le tribunal avait déjà retourné les dossiers administratif et médical à l’état-major (paragraphe 11 ci-dessus). L’argument du Gouvernement sur ce point ne convainc donc pas la Cour, qui estime que la possibilité ouverte au requérant de consulter les documents en la possession du tribunal ne revêt pas d’importance lorsqu’il s’agit de mesurer l’équité de la procédure devant la Cour suprême. 
42.   A l’audience publique du 22 février 1995, l’agent du Gouvernement a indiqué qu’il était de pratique constante devant la Cour suprême comme en première instance, devant le tribunal des assurances, de ne pas communiquer le type de documents dont il s’agit (paragraphe 14 ci-dessus).La Cour relève que vu cette pratique, la Cour suprême pouvait supposer que le tribunal des assurances n’avait pas transmis à l’intéressé l’avis du fonds d’indemnisation et les dossiers militaires; qu’en conséquence, dans la procédure devant elle, la capacité du requérant de contester la décision litigieuse se trouvait affectée. La Cour suprême pouvait en outre présumer que le requérant, qui n’avait pas l’assistance d’un avocat, ignorait cette pratique.  En dépit de toutes ces circonstances, la haute juridiction, compétente pour connaître du fond, n’a pris aucune mesure pour que l’intéressé dispose des pièces.  En la matière, il importe peu, pour l’obligation que l’article 6 par. 1 (art. 6-1) impose à la Cour suprême, que le requérant ne se soit pas plaint du défaut de communication des documents mentionnés dans la décision du tribunal des assurances ou qu’il ait eu accès au dossier en la possession de la Cour suprême (paragraphes 11 et 13 ci-dessus).  Bref, la procédure menée devant celle-ci n’a pas permis à la partie appelante, M. Kerojärvi, d’y participer de manière adéquate (arrêts Feldbrugge précité, pp. 17-18, par. 44, Schuler-Zgraggen précité, p. 18, par. 52, et McMichael c. Royaume-Uni du 24 février 1995, série A no 307-B, pp. 53-54, par. 80). 
43.   Eu égard à ce qui précède, le requérant ne saurait passer pour avoir bénéficié d’un procès équitable dans l’instance devant la Cour suprême.Partant, il y a eu violation de l’article 6 par. 1 (art. 6-1). 
II.   SUR L’APPLICATION DE L’ARTICLE 50 (art. 50) DE LA CONVENTION 
44.   Aux termes de l’article 50 (art. 50) de la Convention,  
"Si la décision de la Cour déclare qu’une décision prise ou une mesure ordonnée par une autorité judiciaire ou toute autre autorité d’une Partie Contractante se trouve entièrement ou partiellement en opposition avec des obligations découlant de la (...) Convention, et si le droit interne de ladite Partie ne permet qu’imparfaitement d’effacer les conséquences de cette décision ou de cette mesure, la décision de la Cour accorde, s’il y a lieu, à la partie lésée une satisfaction  équitable."
A. Préjudice moral 
45.   Le requérant réclame 160 000 marks finlandais pour le préjudice moral subi faute d’un procès équitable. 
46.   M. Kerojärvi n’a pas démontré que l’absence de communication des documents lui ait causé un tort moral.  Comme le Gouvernement, la Cour considère que le constat de violation de l’article 6 par. 1 (art. 6-1) fournit en soi une satisfaction équitable suffisante.     
B.  Frais et dépens 
47.   Le requérant sollicite le remboursement des frais et dépens, 76 144 marks finlandais au total, soit: 
a) 3 000 marks pour les frais exposés devant les juridictions finlandaises, y compris les dépenses assumées afin d’obtenir des copies des documents "gardés secrets"; 
b) 20 000 marks (taxe sur la valeur ajoutée non comprise) pour trente heures de travail consacrées par son avocat à la procédure devant la Commission; 
c) 50 000 marks (taxe sur la valeur ajoutée non comprise) pour soixante-dix heures de travail consacrées à la préparation de l’affaire et à la comparution devant la Cour; 
d) 3 144 marks pour la traduction des documents déposés devant les organes de Strasbourg. 
48.   Quant au point a), le Gouvernement prétend que, le requérant n’ayant pas allégué devant la Cour suprême de violation de la Convention, il n’y a pas lieu à remboursement des frais exposés dans la procédure interne.  L’intéressé ne pourrait pas non plus recouvrer les frais de photocopies puisque ce serait le Gouvernement qui lui aurait fourni des copies des documents.
En ce qui concerne les points b) et c), le Gouvernement juge les honoraires d’avocat excessifs.  Il ne s’oppose pas au point d). 
49.   Le délégué estime raisonnables les prétentions pour frais judiciaires. 
50.   La Cour ne considère pas que les frais dans la procédure interne aient été exposés afin d’éviter ou de réparer le manquement à la Convention constaté (voir, entre autres, l’arrêt Hokkanen précité, p. 28, par. 80).  Il y a donc lieu de rejeter le point a) des prétentions.
Quant aux points b) et c), la Cour ne juge pas excessifs les montants sollicités.  Elle alloue donc 70 000 marks plus la taxe sur la valeur ajoutée, dont il convient de déduire les 7 350 francs français déjà versés par le Conseil de l’Europe par la voie de l’assistance judiciaire.
Il échet d’octroyer en entier la somme réclamée sous le point d). 
PAR CES MOTIFS, LA COUR, A L’UNANIMITE, 
1.  Dit que l’article 6 par. 1 (art. 6-1) de la Convention s’applique en l’espèce; 
2.  Dit qu’il y a eu violation de l’article 6 par. 1 (art. 6-1) de la Convention;
3.   Dit que le constat de violation qui précède constitue en soiune satisfaction équitable suffisante pour préjudice moral; 
4.  Dit que la Finlande doit verser, dans les trois mois, 73 144 (soixante-treize mille cent quarante-quatre) marks finlandais, plus la taxe sur la valeur ajoutée, pour les frais et dépens exposés dans la procédure de Strasbourg, moins 7 350 (sept mille trois cent cinquante) francs français à convertir en marks finlandais au taux applicable à la date du prononcé du présent arrêt; 
5.  Rejette la demande de satisfaction équitable pour le surplus. Fait en français et en anglais, puis prononcé en audience publique au Palais des Droits de l’Homme, à Strasbourg, le 19 juillet 1995. 
Rudolf BERNHARDT
Président
Pour le Greffier
Paul MAHONEY
Greffier adjoint
Au présent arrêt se trouve joint, conformément aux articles 51 par. 2 (art. 51-2) de la Convention et 55 par. 2 du règlement B, l’exposé de l’opinion concordante de M. Pekkanen. 
R. B.
P. M.
OPINION CONCORDANTE DE M. LE JUGE PEKKANEN
(Traduction)
Je me suis rallié à mes collègues pour le constat d’une violation de l’article 6 par. 1 (art. 6-1) de la Convention, étant entendu que cette conclusion tient aux circonstances exceptionnelles de la cause.
Pour les questions de procédure, la Cour suprême finlandaise a pour pratique d’aider autant que faire se peut les parties dans les instances dont elle se trouve saisie.  L’article 6 (art. 6) de la Convention ne saurait toutefois, à mon sens, exiger d’une juridiction de recours qu’elle vérifie d’office la manière dont la procédure a été menée devant une juridiction inférieure et de prendre des mesures de redressement toutes les fois qu’il y a des raisons de supposer l’existence d’une lacune.  Un tel principe, aussi souhaitable qu’il puisse paraître, serait difficile à mettre en pratique.  D’abord, la compétence des juridictions de recours des Etats contractants se borne en général aux moyens du recours.  De plus, elles ont d’habitude une énorme charge de travail et si l’article 6 (art. 6) de la Convention les obligeait de surcroît à exercer d’office le rôle indiqué ci-dessus, elles auraient à s’acquitter d’une tâche que l’on ne pourrait avec réalisme escompter d’elles et qui pourrait gravement entraver l’administration efficace de la justice.  Une juridiction de recours ne devrait donc en principe être tenue, en vertu de l’article 6 (art. 6) de la Convention, de purger un vice survenu dans une instance devant une juridiction inférieure que si elle en a le pouvoir et que si cette question a été portée à son attention par le biais d’un recours.
En l’occurrence, le requérant n’avait pas signalé dans son appel à la Cour suprême que le tribunal des assurances ne lui avait pas communiqué les documents en question alors que, comme les pièces en la possession de la Cour européenne permettent de le déduire, on lui avait indiqué qu’ils avaient été versés au dossier du tribunal des assurances en lui notifiant la décision de celui-ci (paragraphe 40 de l’arrêt). L’intéressé ne s’est pas plaint devant la Cour suprême du défaut de communication desdits documents; je n’en ai pas moins conclu avec la Cour qu’il y a eu atteinte aux droits que garantit l’article 6 par. 1 (art. 6-1) de la Convention.
Une raison déterminante qui m’y a amené est qu’à l’époque des faits, comme le Gouvernement l’a révélé à un stade ultérieur de la procédure, le tribunal des assurances avait pour pratique constante de ne pas communiquer des documents comme ceux dont il s’agit même s’ils avaient été produits à sa demande.  Cette pratique ne pouvait guère passer pour se concilier avec la notion de procès équitable figurant à l’article 6 par. 1 (art. 6-1) de la Convention.  Cependant, la procédure devant le tribunal des assurances échappant à sa compétence ratione temporis, la Cour européenne ne pouvait se prononcer que sur la procédure devant la Cour suprême.  Connaissant la pratique susvisée, cette dernière pouvait supposer que le tribunal des assurances n’avait pas accordé un procès équitable au requérant et aurait donc dû prendre les mesures nécessaires pour redresser le vice de procédure survenu devant la juridiction inférieure.
1 Notes du greffier  1.  L'affaire porte le n° 20/1994/467/548.  Les deux premiers chiffres en indiquent le rang dans l'année d'introduction, les deux derniers la place sur la liste des saisines de la Cour depuis l'origine et sur celle des requêtes initiales (à la Commission) correspondantes.  2.  Le règlement B, entré en vigueur le 2 octobre 1994, s'applique à toutes les affaires concernant les Etats liés par le Protocole n° 9 (P9).
2 Note du greffier: pour des raisons d'ordre pratique, il n'y figurera que dans l'édition imprimée (volume 322 de la série A des publications de la Cour), mais on peut se le procurer auprès du greffe.
CHAPPELL v. THE UNITED KINGDOM JUDGMENT
CHAPPELL v. THE UNITED KINGDOM JUDGMENT
KEROJÄRVI v. FRANCE JUDGMENT
ARRÊT KEROJÄRVI c. FRANCE
KEROJÄRVI v. FRANCE JUDGMENT
OPINION CONCORDANTE DE M. LE JUGE PEKKANEN
ARRÊT KEROJÄRVI c. FRANCE
OPINION CONCORDANTE DE M. LE JUGE PEKKANEN


Synthèse
Formation : Cour (chambre)
Numéro d'arrêt : 17506/90
Date de la décision : 19/07/1995
Type d'affaire : Arrêt (au principal et satisfaction équitable)
Type de recours : Violation de l'Art. 6-1 ; Préjudice moral - constat de violation suffisant ; Remboursement partiel frais et dépens - procédure de la Convention

Analyses

(Art. 35-3) RATIONE TEMPORIS, (Art. 6) PROCEDURE ADMINISTRATIVE, (Art. 6-1) CONTESTATION, (Art. 6-1) DROITS ET OBLIGATIONS DE CARACTERE CIVIL, (Art. 6-1) PROCES EQUITABLE


Parties
Demandeurs : KEROJÄRVI
Défendeurs : FINLANDE

Origine de la décision
Date de l'import : 21/06/2012
Fonds documentaire ?: HUDOC
Identifiant URN:LEX : urn:lex;coe;cour.europeenne.droits.homme;arret;1995-07-19;17506.90 ?

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