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28/02/1996 | CEDH | N°29070/95

CEDH | VAN PUYVELDE contre la FRANCE


SUR LA RECEVABILITE de la requête N° 29070/95 présentée par Philippe Van Puyvelde contre la France La Commission européenne des Droits de l'Homme (Deuxième Chambre), siégeant en chambre du conseil le 28 février 1996 en présence de M. H. DANELIUS, Président Mme G.H. THUNE MM. G. JÖRUNDSSON J.-C. SOYER H.G. SCHERMERS F. MARTINEZ L. LOUCAIDES J.-C. GEUS M.A. NOWICKI I.

CABRAL BARRETO J. MUCHA ...

SUR LA RECEVABILITE de la requête N° 29070/95 présentée par Philippe Van Puyvelde contre la France La Commission européenne des Droits de l'Homme (Deuxième Chambre), siégeant en chambre du conseil le 28 février 1996 en présence de M. H. DANELIUS, Président Mme G.H. THUNE MM. G. JÖRUNDSSON J.-C. SOYER H.G. SCHERMERS F. MARTINEZ L. LOUCAIDES J.-C. GEUS M.A. NOWICKI I. CABRAL BARRETO J. MUCHA D. SVÁBY P. LORENZEN Mme M.-T. SCHOEPFER, Secrétaire de la Chambre ; Vu l'article 25 de la Convention de sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés fondamentales ; Vu la requête introduite le 16 mars 1995 par Philippe Van Puyvelde contre la France et enregistrée le 3 novembre 1995 sous le N° de dossier 29070/95 ; Vu le rapport prévu à l'article 47 du Règlement intérieur de la Commission ; Après avoir délibéré, Rend la décision suivante :
EN FAIT Le requérant, de nationalité française, né en 1960, a été détenu à la maison d'arrêt de Carcassonne et réside actuellement à Peyriac Minervois. Les faits, tels qu'ils ont été présentés par le requérant, peuvent se résumer comme suit. Le requérant se maria le 19 décembre 1989 avec Mme Z. Deux enfants naquirent de cette union, les 1er avril 1990 et 30 décembre 1991. Une procédure de divorce fut engagée à la fin de l'année 1993. L'ordonnance de non-conciliation, rendue le 5 août 1994, autorisa les époux à résider séparément et confia la garde des enfants au requérant, avec un droit de visite et d'hébergement au profit de Mme Z. Le juge des enfants de Carcassonne, saisi par le procureur de la République, avait ordonné une mesure d'assistance éducative des enfants en milieu ouvert le 28 mars 1994. L'éducatrice chargée de cette mesure conclut, le 28 octobre 1994, qu'il n'avait pas été possible de "favoriser une évolution favorable de (la) situation en vue d'une normalisation des relations parents-enfants", ces derniers restant "les enjeux du conflit parental". Par ordonnance du 16 décembre 1994, le juge des enfants confia provisoirement les enfants au service de l'aide sociale à l'enfance du département de l'Aude. Le placement avait pour objectif "de permettre un rétablissement des relations mère-enfants en écartant ces derniers du conflit d'adulte dans lequel (le requérant) les impliquait". Les enfants furent placés auprès d'une famille d'accueil. Par arrêt du 1er août 1995, la cour d'appel de Montpellier confirma l'ordonnance du 16 décembre 1994. Elle s'exprima ainsi : " ... Attendu que le juge des enfants ordonnait une enquête sociale et divers examens qui mettaient en évidence l'insécurité affective des enfants, l'impossibilité pour la mère de bénéficier de la garde des enfants et une personnalité du père rendant incompatible un droit de garde ; Attendu que, malgré tout, une mesure d'assistance éducative en milieu ouvert intervenait le 28 mars 1994 au terme de laquelle il était constaté qu'aucune possibilité n'existait de faire évoluer la situation afin que la mère puisse voir régulièrement ses enfants, et de mettre ainsi fin aux troubles psychologiques constatés ; Attendu que c'est donc à juste titre que le juge des enfants a décidé de confier les mineurs au service de l'aide sociale à l'enfance, puisque cette décision était la seule à éviter de compromettre gravement les conditions d'éducation d'enfants mineurs, dont l'âge rend l'audition inopportune (...)". Plusieurs expertises avaient été ordonnées par ailleurs. Le rapport d'une psychologue clinicienne, remis le 22 juin 1994, concluait ainsi : "(le requérant) présente une perturbation de la personnalité incompatible avec le maintien de son droit de garde sur les enfants. Par ailleurs, il opère un barrage dans la relation mère-enfants hautement préjudiciable à ceux-ci (...)." Le rapport d'un médecin psychiatre, déposé le 19 juin 1995, relevait que : " (...) la composante procédurière est envahissante dans un climat passionnel à l'excès, de sorte que (le requérant) nourrit un vécu persécutoire où les jugements sommaires à l'emporte-pièce se développent sur un fond d'idéalisation de soi et de revendication. Il s'agit d'une personnalité prise dans un vécu persécutoire passionnel où la méfiance, une haute idée de soi-même (et bien piètre des autres), des jugements sommaires sans nuances participent d'une organisation procédurière, quérulente, érigée au rang de profession. Ces éléments infiltrent tout le champ affectif et relationnel (...) force est de retenir un attachement réel à ses enfants et un désarroi authentique lié à sa condition de père dépossédé du statut qu'il revendique." L'expert concluait que le requérant présentait une altération de la personnalité propre à influer sur son comportement et que la composante passionnelle pourrait générer des passages à l'acte de nature diverse. Le 31 juillet 1995, le juge des enfants maintint le placement des enfants pour une durée d'un an à compter du 16 juin 1995. Le juge considéra que les pressions psychologiques exercées par le père sur les enfants pour "disqualifier" leur mère étaient de nature à compromettre l'évolution de leur personnalité et qu'il n'était dès lors pas envisageable de lui remettre les enfants. Il précisa toutefois que "l'enfermement (du requérant) dans des positions extrêmes est d'autant plus regrettable que ce père serait sans cela capable de s'occuper des enfants, à qui il porte un amour réel". A propos de la mère des enfants, le juge précisa que l'expert n'avait relevé aucun élément de dangerosité mais une certaine fragilité et considéra qu'il serait inopportun de remettre les enfants à leur mère, en ce qu'ils seraient à nouveau replacés au centre d'une situation de conflit. Le juge fixa les droits de visite et d'hébergement du requérant et de Mme Z. Afin de permettre aux enfants d'évoluer sereinement dans le milieu d'accueil, hors du conflit parental et dans le souci d'établir une égalité entre les droits des père et mère, le droit de correspondance des parents fut limité à une lettre tous les quinze jours et les communications téléphoniques suspendues le temps du placement afin de permettre aux enfants "d'évoluer sereinement dans leur milieu d'accueil". Le juge précisa qu'en cas de non-représentation d'enfants, il envisagerait de suspendre tout droit de visite. Le 19 juillet 1995, le requérant fut jugé en comparution immédiate par le tribunal correctionnel pour non-représentation d'enfants, à l'issue du week-end du 14 juillet 1995, après s'être enfermé une journée chez lui avec ses enfants, et avoir menacé d'utiliser un bidon d'essence. Par jugement du même jour, le tribunal le déclara coupable et ajourna la peine en renvoyant l'affaire à une audience ultérieure, pour vérifier l'évolution de la situation. Entre-temps, des incidents s'étant produits entre le requérant et la famille d'accueil des enfants, ceux-ci furent retirés de cette famille et placés dans un foyer. A l'audience du 18 octobre 1995, le tribunal correctionnel prononça à l'encontre du requérant une peine de trois mois d'emprisonnement et le condamna à 3 000 francs de dommages et intérêts au profit de son ex- épouse. Le requérant fit appel. A l'issue de l'exercice de son droit de visite et d'hébergement du 27 au 31 octobre 1995, le requérant garda les enfants avec lui. Placé en garde à vue, il fut ensuite condamné, le 6 novembre 1995, à trois mois de prison ferme pour non-représentation d'enfants, avec mandat de dépôt à l'audience. Il fut placé en détention à la maison d'arrêt de Carcassonne. Il entama ensuite une grève de la faim, qu'il a ultérieurement cessée. Le 20 décembre 1995, après avoir ordonné des expertises complémentaires, le juge des enfants leva le placement des enfants et les confia à la garde de leur mère, en considérant que : "Les résultats de l'expertise (...) permettent aujourd'hui d'affirmer que si (le requérant), toujours prisonnier des aspects pathologiques de sa personnalité, n'a pas évolué et représente un danger pour ses enfants, Mme Z. en revanche, à condition qu'elle soit encadrée et soutenue, peut, à l'heure actuelle, retrouver la plénitude de ses fonctions maternelles (...)." Le juge décida par ailleurs de suspendre le droit de visite et d'hébergement du requérant, en motivant sa décision dans les termes suivants : "Il reste à statuer sur les droits de visite et d'hébergement qui devraient être normalement reconnus au père. Force est de constater cependant, qu'interrogé à ce sujet, il n'est absolument pas possible à l'heure actuelle d'avoir l'assurance absolue que (le requérant) respectera les cadres tels qu'ils pourraient être fixés. Il faut notamment souligner qu'il a à plusieurs reprises menacé de partir avec ses enfants à l'étranger et que compte tenu de la personnalité qu'est la sienne, il convient de prendre très au sérieux cette menace. Aujourd'hui encore, alors qu'on lui demande s'il est prêt à respecter une réglementation de ses droits de visite et d'hébergement, (le requérant) refuse de nous répondre. Ces éléments inquiétants nous amènent en conséquence aujourd'hui à réserver notre décision quant à l'opportunité d'accorder des droits de visite et d'hébergement (au requérant), compte tenu de son état d'esprit actuel et en l'absence de toute garantie concernant la représentation des enfants à l'issue de l'exercice d'un de ces droits (...)". Le requérant indique n'avoir pas fait appel de cette décision. Il est désormais sorti de prison après avoir purgé sa peine.
Eléments de droit interne Article 357 du Code pénal "Quand, par une décision de justice, provisoire ou définitive, ou par une convention judiciairement homologuée, il aura été décidé que l'autorité parentale sera exercée par le père ou la mère seul ou par les deux parents ou que le mineur sera confié à un tiers, le père ou la mère ou toute personne qui ne représentera pas ce mineur à ceux qui ont le droit de le réclamer (...)sera puni d'un emprisonnement d'un mois à un an et d'une amende de 500 F à 30 000 F (...)." Code civil Article 375 "Si la santé, la sécurité ou la moralité d'un mineur (...) sont en danger, ou si les conditions de son éducation sont gravement compromises, des mesures d'assistance éducative peuvent être ordonnées par justice à la requête des père et mère conjointement, ou de l'un d'eux, du gardien ou du tuteur, du mineur lui-même ou du ministère public (...). Elles peuvent être ordonnées en même temps pour plusieurs enfants relevant de la même autorité parentale. La décision fixe la durée de la mesure sans que celle-ci puisse, lorsqu'il s'agit d'une mesure éducative exercée par un service ou une institution, excéder deux ans. La mesure peut être renouvelée par décision motivée." Article 375-1 "Le juge des enfants est compétent, à charge d'appel, pour tout ce qui concerne l'assistance éducative. Le juge doit toujours s'efforcer de recueillir l'adhésion de la famille à la mesure envisagée." Article 375-2 "Chaque fois qu'il est possible, le mineur doit être maintenu dans son milieu actuel. Dans ce cas, le juge désigne, soit une personne qualifiée, soit un service d'observation, d'éducation ou de rééducation en milieu ouvert, en lui donnant mission d'apporter aide et conseil à la famille, afin de surmonter les difficultés matérielles ou morales qu'elle rencontre. Cette personne ou ce service est chargé de suivre le développement de l'enfant et d'en faire rapport au juge périodiquement (...)." Article 375-3 "S'il est nécessaire de retirer l'enfant de son milieu actuel, le juge peut décider de le confier : 1° A celui des père et mère qui n'avait pas l'exercice de l'autorité parentale ou chez qui l'enfant n'avait pas sa résidence habituelle ; 2° A un autre membre de la famille ou à un tiers digne de confiance ; 3° A un service ou à un établissement sanitaire ou d'éducation ordinaire ou spécialisé ; 4° Au service départemental de l'aide sociale à l'enfance. Toutefois, lorsqu'une requête en divorce a été présentée ou un jugement de divorce rendu entre les père et mère, ces mesures ne peuvent être prises que si un fait nouveau de nature à entraîner un danger pour le mineur s'est révélé postérieurement à la décision statuant sur les modalités de l'exercice de l'autorité parentale ou confiant l'enfant à un tiers (...)." Article 375-6 "Les décisions prises en matière d'assistance éducative peuvent être, à tout moment, modifiées ou rapportées par le juge qui les a rendues soit d'office, soit à la requête des père et mère conjointement, ou de l'un d'eux, de la personne ou du service à qui l'enfant a été confié, ou du tuteur, du mineur lui-même ou du ministère public (...)." Article 375-7 "Les père et mère dont l'enfant a donné lieu à une mesure d'assistance éducative, conservent sur lui leur autorité parentale et en exercent tous les attributs qui ne sont pas inconciliables avec l'application de la mesure (...). S'il est nécessaire de placer l'enfant hors de chez ses parents, ceux-ci conservent un droit de correspondance et un droit de visite. Le juge en fixe les modalités et peut même, si l'intérêt de l'enfant l'exige, décider que l'exercice de ces droits, ou de l'un d'eux, sera provisoirement suspendu."
GRIEFS
1. Le requérant considère que le placement de ses enfants, puis l'attribution de leur garde à la mère porte atteinte à son droit au respect de sa vie familiale garanti par l'article 8 de la Convention. Il demande le retour de ses enfants auprès de lui.
2. Il se plaint, en invoquant l'article 3 de la Convention, du traitement inhumain subi par lui-même et ses enfants.
3. Il estime, en citant l'article 5 par. 1 b) de la Convention, qu'il est "privé de liberté" en vertu d'une ordonnance de placement des enfants illégale et injuste. Il considère en outre que sa sûreté et celle de ses enfants ne sont pas assurées, au regard notamment de sa femme, des familles d'accueil ou des services médicaux et d'encadrement.
4. Il estime que sa cause n'a pas été entendue équitablement, car ses enfants n'ont pas été entendus, qu'il n'a pas eu le temps de préparer sa défense et que les témoins à décharge n'ont jamais été entendus. Il invoque l'article 6 par. 1 et 3 b) et d) de la Convention.
5. Estimant qu'aucune infraction ne peut être légalement établie à son encontre, et que lui-même et ses enfants font l'objet d'une discrimination, il allègue la violation des articles 6 par. 2, 7 et 14 de la Convention.
EN DROIT
1. Le requérant considère que le placement de ses enfants, puis l'attribution de leur garde à la mère portent atteinte à son droit au respect de sa vie familiale garanti par l'article 8 (art. 8) de la Convention qui dispose que : "1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui."
a) La Commission examinera en premier lieu la compatibilité du placement des enfants avec l'article 8 (art. 8) précité. La Commission considère que le fait de placer les enfants constitue une ingérence, au sens de l'article 8 par. 2 (art. 8-2), dans le droit du requérant au respect de sa vie familiale. La Commission doit donc envisager si les conditions posées par cette disposition ont été respectées par les autorités françaises. Il ne fait pas de doute pour la Commission qu'il s'agissait d'une mesure prévue par la loi, à savoir les articles 375 et suivants du Code civil. La Commission considère également que cette mesure poursuivait un but légitime, à savoir l'intérêt des enfants, ainsi qu'il ressort des différentes décisions rendues. La cour d'appel a ainsi confirmé l'ordonnance de placement au motif que "cette décision était la seule à éviter de compromettre gravement les conditions d'éducation d'enfants mineurs". La Commission doit enfin établir si le placement des enfants était "nécessaire dans une société démocratique", au sens de l'article 8 par. 2 (art. 8-2) précité. La Commission relève en premier lieu que le placement avait été précédé d'une mesure d'assistance éducative en milieu ouvert, pendant laquelle les enfants étaient suivis, dans leur milieu, par une éducatrice spécialisée. Toutefois, dans un rapport du 28 octobre 1994, celle-ci conclut que cette mesure n'avait pu conduire à une "normalisation des relations parents-enfants, ceux-ci restant "les enjeux du conflit parental". La Commission observe que la décision de placement des enfants en famille d'accueil, prise par le juge le 16 décembre 1994, visait à "permettre un rétablissement des relations mère-enfants en écartant ces derniers du conflit d'adulte dans lequel (le requérant) les impliquait". Plusieurs expertises furent pratiquées, concluant notamment que le requérant "opér(ait) un barrage dans la relation mère-enfants hautement préjudiciable à ceux-ci". Dans sa décision du 31 juillet 1995, confirmant le placement, le juge tint compte à la fois des "pressions psychologiques" exercées par le requérant sur les enfants pour "disqualifier" leur mère, et de la fragilité de celle-ci. Enfin, la Commission relève que, pendant le placement, le requérant a eu la possibilité d'exercer le droit de visite et d'hébergement fixé par le juge, ainsi que le droit de correspondance, seules les communications téléphoniques étant suspendues afin de permettre aux enfants "d'évoluer sereinement dans leur milieu d'accueil". La Commmission rappelle que les autorités nationales compétentes sont en principe mieux placées que les organes de la Convention pour évaluer les éléments dont elles disposent (cf. notamment Cour eur. D.H., arrêt Olsson c/Suède (n° 2) du 27 novembre 1992, série A n° 250, pp. 35- 36, par. 90 ; arrêt Hokkanen c/Finlande du 23 septembre 1994, série A n° 299, p. 24, par. 64). La Commission estime qu'en l'espèce les autorités françaises ont tenu compte de raisons pertinentes et suffisantes aux fins de l'article 8 par. 2 (art. 8-2) de la Convention et n'ont pas excédé leur marge d'appréciation. Elle en déduit que le placement des enfants était nécessaire dans une société démocratique, et ne peut passer pour disproportionné. Il s'ensuit que cette partie de la requête est manifestement mal fondée, au sens de l'article 27 par. 2 (art. 27-2) de la Convention.
b) S'agissant de l'attribution à Mme Z. du droit de garde sur les enfants et de la suspension du droit de visite et d'hébergement du requérant, la Commission relève que ce dernier n'a pas fait appel de la décision du juge des enfants du 20 décembre 1995. La Commission observe également qu'il ne s'agit pas d'une décision définitive, et qu'en tout état de cause, le requérant conserve la possibilité de saisir le juge compétent d'une demande de modification des modalités actuelles concernant les enfants. Il s'ensuit que le requérant n'a pas, sur ce point, épuisé les voies de recours internes, au sens de l'article 26 (art. 26) de la Convention, et que cette partie de la requête est irrecevable en application des articles 26 et 27 par. 3 (art. 26, 27-3) de la Convention.
2. Le requérant se plaint du traitement inhumain subi par lui-même et ses enfants. Il invoque l'article 3 (art. 3) de la Convention, qui se lit comme suit : "Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants." Telle qu'interprétée par les organes de la Convention, la notion de traitements inhumains et dégradants, au sens de la Convention, doit correspondre à un minimum de gravité pour tomber sous le coup de l'article 3 (art. 3). L'appréciation de ce minimum est relative par essence et dépend de l'ensemble des données de la cause (cf. Cour eur. D.H., affaire Irlande c/Royaume-Uni, arrêt du 18 janvier 1978, série A n° 25, p. 65, par. 162). La Commission estime que la situation du requérant n'atteint pas un seuil de gravité tel que l'article 3 puisse trouver à s'appliquer. Ce grief est donc manifestement mal fondé au sens de l'article 27 par. 2 (art. 27-2) de la Convention.
3. Le requérant considère que la procédure n'a pas été équitable, dans la mesure où ni ses enfants, ni les témoins à décharge n'ont été entendus. Il invoque l'article 6 par. 1 et 3 b) et d) (art. 6-1, 6-3-b, 6-3-d) de la Convention. Dans la mesure où le requérant n'était pas "accusé", au sens de l'article 6 par. 3 (art. 6-3) de la Convention, cette disposition ne s'applique pas en l'espèce. La Commission examinera ce grief sous l'angle de l'article 6 par. 1 (art. 6-1) de la Convention, dont les dispositions pertinentes sont ainsi libellées : "Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement (...) par un tribunal (...) qui décidera (...) des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil (...)." La Commission relève que les décisions prises quant au placement des enfants l'ont été à l'issue de débats contradictoires, au cours desquels le requérant a pu faire valoir son point de vue et ses arguments. La Commission note également que l'audition des enfants, qui est une faculté pour le juge, a été jugée inopportune en raison de leur jeune âge. Après avoir examiné les pièces du dossier, la Commission arrive à la conclusion que les différentes procédures relatives au placement et à la garde des enfants se sont déroulées dans le respect de l'exigence du "procès équitable", au sens de l'article 6 par. 1 (art. 6-1) de la Convention. Le désaccord du requérant quant aux décisions prises ne suffit pas à infirmer cette constatation. Il s'ensuit que ce grief est manifestement mal fondé, au sens de l'article 27 par. 2 (art. 27-2) de la Convention.
4. Estimant qu'aucune infraction ne peut être légalement établie à son encontre, le requérant cite l'article 7 (art. 7) de la Convention, qui est ainsi libellé : "Nul ne peut être condamné pour une action ou une omission qui, au moment où elle a été commise, ne constituait pas une infraction d'après le droit national ou international. De même il n'est infligé aucune peine plus forte que celle qui était applicable au moment où l'infraction a été commise (...)." Le requérant invoque également le droit à la sûreté, prévu par l'article 5 (art. 5) de la Convention, ainsi que la présomption d'innocence, garantie par l'article 6 par. 2 (art. 6-2) de la Convention et se plaint de faire l'objet d'une discrimination. La Commission observe à cet égard que le requérant a été condamné à deux reprises, pour non-représentation d'enfants, en application de l'article 357 du Code pénal, dont les conditions d'application étaient réunies. Elle ne constate aucune apparence de violation des dispositions citées. La Commission estime, dès lors, que cette partie de la requête est dénuée de fondement, au sens de l'article 27 par. 2 (art. 27-2) de la Convention. Par ces motifs, la Commission, à l'unanimité, DECLARE LA REQUETE IRRECEVABLE. Le Secrétaire de la Le Président de la Deuxième Chambre Deuxième Chambre (M.-T. SCHOEPFER) (H. DANELIUS)


Synthèse
Formation : Commission (deuxième chambre)
Numéro d'arrêt : 29070/95
Date de la décision : 28/02/1996
Type d'affaire : DECISION
Type de recours : Partiellement irrecevable

Analyses

(Art. 13) DROIT A UN RECOURS EFFECTIF


Parties
Demandeurs : VAN PUYVELDE
Défendeurs : la FRANCE

Origine de la décision
Date de l'import : 21/06/2012
Fonds documentaire ?: HUDOC
Identifiant URN:LEX : urn:lex;coe;cour.europeenne.droits.homme;arret;1996-02-28;29070.95 ?

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