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15/06/1999 | CEDH | N°34610/97

CEDH | DOMALEWSKI contre la POLOGNE


[TRADUCTION]
EN FAIT
Le requérant [M. Stanisław Domalewski] est un ressortissant polonais né en 1926. Il réside à Varsovie.
Les faits de la cause, tels qu’ils ont été exposés par l’intéressé, peuvent se résumer comme suit.
A.  Les circonstances de l’espèce
Du 15 février 1947 au 31 décembre 1956, le requérant fut fonctionnaire (funkcjonariusz) au ministère de la Sûreté publique (Ministerstwo Bezpieczeństwa Publicznego) et au comité de la sûreté publique (Komitet Do Spraw Bezpieczeństwa Publicznego).
Le 31 mai 1974, le bureau

régional de Varsovie de l’union des combattants pour la liberté et la démocratie (Zarząd Wojew...

[TRADUCTION]
EN FAIT
Le requérant [M. Stanisław Domalewski] est un ressortissant polonais né en 1926. Il réside à Varsovie.
Les faits de la cause, tels qu’ils ont été exposés par l’intéressé, peuvent se résumer comme suit.
A.  Les circonstances de l’espèce
Du 15 février 1947 au 31 décembre 1956, le requérant fut fonctionnaire (funkcjonariusz) au ministère de la Sûreté publique (Ministerstwo Bezpieczeństwa Publicznego) et au comité de la sûreté publique (Komitet Do Spraw Bezpieczeństwa Publicznego).
Le 31 mai 1974, le bureau régional de Varsovie de l’union des combattants pour la liberté et la démocratie (Zarząd Wojewódzki Związku Bojowników o Wolność i Demokrację) rendit une décision accordant la « qualité d’ancien combattant » (uprawnienia kombatanckie) au requérant, compte tenu de ce que :
« (…) il [avait] servi dans « l’armée polonaise restaurée » du 10 juin 1944 au 9 mai 1945. »
Le 2 juin 1976, le bureau précisa dans une décision que l’intéressé devait se voir accorder la « qualité d’ancien combattant » eu égard également au fait que :
« (…) du 29 mars 1946 au 10 février 1947, il [avait] pris part à la lutte armée pour renforcer le pouvoir du peuple (brał udział w walkach o utrwalanie władzy ludowej). »
Le 15 juillet 1976, le ministère de l’Intérieur exposa dans une déclaration que le requérant avait été fonctionnaire à l’ex-ministère de la Sûreté publique et à l’ex-comité de la sûreté publique du 15 février 1947 au 31 décembre 1956, et qu’il « avait participé à la lutte armée menée par les forces réactionnaires clandestines » (brał udział w zbrojnej walce z reakcyjnym podziemiem) du 15 février au 31 décembre 1947.
Le 29 juillet 1980, le bureau rendit une décision recommandant d’accorder la « qualité d’ancien combattant » au requérant, étant donné que :
« (...) il [avait] servi dans l’armée polonaise restaurée du 10 juin 1944 au 9 mai 1945 et dans les armées alliées du 5 avril au 9 juin 1944, [avait] pris part à la lutte armée pour renforcer le pouvoir du peuple du 29 mars 1946 au 10 février 1947 et du 15 février au 31 décembre 1947. »
Par la suite, à une date non précisée, l’intéressé prit sa retraite et perçut, à compter de ce jour, une pension de retraite et une « pension d’ancien combattant » (dodatek kombatancki), c’est-à-dire une prestation mensuelle à laquelle seuls les anciens combattants retraités pouvaient prétendre.
Le 22 avril 1994, le directeur du service des anciens combattants et des victimes de persécutions (Kierownik Urzędu Do Spraw Kombatantów i Osób Represjonowanych) rendit une décision privant le requérant de la qualité d’ancien combattant, en vertu de l’article 25 § 2. 1 a) combiné avec l’article 21 § 2. 4 a) de la loi du 24 janvier 1991 sur les anciens combattants et les autres victimes de la guerre et de la répression d’après-guerre (Ustawa o kombatantach oraz niektórych osobach będących ofiarami represji wojennych i okresu powojennego). Cette décision était ainsi motivée :
« La « qualité d’ancien combattant » a été accordée [au requérant] en vertu des décisions rendues par l’union des combattants pour la démocratie et la liberté eu égard aux déclarations [des autorités militaires compétentes] indiquant que l’intéressé avait pris part à la lutte armée pour renforcer le pouvoir du peuple et servi dans les armées alliées. [Cette qualité lui a été ultérieurement reconnue] par suite de la déclaration du ministère de l’Intérieur en date du 15 juillet 1976, selon laquelle l’intéressé avait été fonctionnaire à l’ex-ministère de la Sûreté publique et à l’ex-comité de la sûreté publique du 15 février 1947 au 31 décembre 1956, et avait participé à la lutte armée menée par les forces réactionnaires clandestines du 15 février au 31 décembre 1947.
Conformément à l’article 21 § 2. 4 a) de la loi susmentionnée du 24 janvier 1991, nul ne peut obtenir [en aucun cas et pour quelque raison que ce soit] la qualité d’ancien combattant s’il a exercé des fonctions dans les organes du service de la sûreté publique.
Aux termes de l’article 25 § 2, combiné avec l’article 21 § 2. 4 a) de ladite loi, quiconque a exercé des fonctions dans les organes de la sûreté publique sera privé de cette qualité [précédemment acquise].
Partant, la présente décision se justifie. »
Le 23 mai 1994, le requérant se pourvut devant la Cour administrative suprême (Naczelny Sąd Administracyjny), faisant valoir que la décision susmentionnée méconnaissait le principe de la légalité et se fondait sur des éléments insuffisants. Il affirma avoir été privé de sa qualité d’ancien combattant au seul motif qu’il avait exercé des fonctions au sein des organes du service de la sûreté publique, alors qu’il n’avait jamais commis d’acte condamnable, illégal ou immoral. En outre, il n’avait jamais participé à la lutte armée menée par les forces clandestines, mais avait acquis la « qualité d’ancien combattant » en raison de son combat pour l’indépendance de la Pologne et contre le nazisme. Enfin, il contesta l’exactitude des certificats délivrés par l’union des combattants pour la liberté et la démocratie.
Le 21 février 1996, la Cour administrative suprême tint une audience. Le même jour, elle rejeta le pourvoi de l’intéressé, déclarant qu’en vertu des articles 21 et 25 de la loi du 24 janvier 1991 sur les anciens combattants et les autres victimes de la guerre et de la répression d’après-guerre, nul ne pouvait obtenir la qualité d’ancien combattant ou la conserver, quels que fussent ses mérites, s’il avait par le passé exercé des fonctions ou été employé dans les services de la sûreté publique. En l’espèce, il était manifeste que l’intéressé avait été fonctionnaire à l’ex-ministère de la Sûreté publique et à l’ex-comité de la sûreté publique ; ce fait suffisait en soi, eu égard aux conditions posées par la loi du 24 janvier 1991, pour justifier la décision de le priver de la qualité précédemment acquise. La décision contestée avait donc été prise conformément aux dispositions pertinentes du droit matériel.
B.  Le droit et la pratique internes pertinents
La loi du 24 janvier 1991 sur les anciens combattants et les autres victimes de la guerre et de la répression d’après-guerre a abrogé la  loi du 26 mai 1982 sur la qualité spéciale d’ancien combattant (Ustawa o szczególnych uprawnieniach kombatantów).
La loi de 1991 a été promulguée pour régir l’octroi des privilèges spéciaux attachés à la « qualité d’ancien combattant » et visait, en partie, à condamner le rôle politique joué par l’ancien appareil communiste – en particulier le « service de la sûreté publique » (aparat bezpieczeństwa publicznego) – dans l’établissement du régime communiste, la mise en œuvre d’une politique stalinienne et la répression de toute opposition politique. Considérant que les personnes qui avaient exercé des fonctions dans les anciens organes de la sûreté publique, lesquels avaient notamment pour mission de combattre et d’éliminer toute forme d’opposition démocratique, ne méritaient pas les privilèges spéciaux attachés à la « qualité d’ancien combattant », le législateur décida de les en priver purement et simplement.
Le « service de la sûreté publique » se composait d’organes d’Etat incluant la police politique et les forces armées spéciales. Il était calqué sur le NKVD et le KGB et fut créé (sous le contrôle du NKVD) le 21 juillet 1944 pour assurer la mise en place du régime communiste et pour combattre, réprimer et éliminer les groupes d’opposition politique, notamment la résistance clandestine d’après-guerre contre le communisme et l’Eglise polonaise. Dans les années 50, ces organes étaient chargés des prisons et des camps de travail ; ils avaient également compétence, conformément aux règles de la procédure pénale, pour conduire des enquêtes. Selon la situation politique, ils étaient dénommés : le « département de la sûreté publique » (Resort Bezpieczeństwa Publicznego) et, par la suite, le « ministère de la Sûreté publique » (Ministerstwo Bezpieczeństwa Publicznego) (juillet 1944 – décembre 1954) ; le « comité de la sûreté publique » (Komitet do Spraw Bezpieczeństwa Publicznego) (1954-1956) ; et le « service de la sûreté » (Służba Bezpieczeństwa) – un département spécial du ministère de l’Intérieur (1956-1990, dissous après l’effondrement du communisme).
La loi du 24 janvier 1991 a également instauré un nouvel organe public, le service des anciens combattants et des victimes de persécutions, qui est compétent pour accorder la « qualité d’ancien combattant » et chargé de vérifier si les personnes qui ont précédemment acquis cette qualité répondent aux nouveaux critères posés par la loi.
L’article 21 § 2. 4 a) de la loi de 1991, tel qu’applicable à l’époque des faits, énonçait :
« 2.  Nul ne peut obtenir la « qualité d’ancien combattant » si :
4.  a) il a exercé des fonctions [ou été employé] dans les organes du service de la sûreté publique. (…) »
L’article 25 § 2 de ladite loi, tel qu’applicable à l’époque des faits, disposait :
« Quiconque a obtenu la « qualité d’ancien combattant » alors qu’il relève de l’article 21 § 2 (…) 4 sera privé de cette qualité précédemment acquise. »
Conformément aux dispositions de la loi abrogée du 26 mai 1982 et de la nouvelle loi du 24 janvier 1991 (articles 12 à 20), les anciens combattants jouissaient (et continuent de jouir) d’un statut privilégié par rapport aux autres travailleurs ou retraités ; par exemple, ils peuvent prendre leur retraite plus tôt, et bénéficient d’une méthode particulièrement favorable de calcul des périodes d’activité ainsi que de diverses prestations versées en sus de la pension normale calculée selon les règles du régime général d’assurance sociale.
A l’époque où le requérant a été privé de sa « qualité d’ancien combattant », un retraité ayant cette qualité avait droit notamment à une « pension d’ancien combattant » s’élevant à 10 % du salaire mensuel moyen du secteur public, une réduction de 50 % sur les transports municipaux et ferroviaires et sur les lignes nationales du service public d’autocars, une indemnité spéciale couvrant 50 % des dépenses courantes telles que l’électricité, le gaz et le chauffage, et une réduction de 50 % sur les polices d’assurance-automobile.
Toutefois, la perte de la « qualité d’ancien combattant » n’avait et n’a toujours aucune incidence juridique ou pratique sur le droit à une pension ordinaire puisque, en vertu de l’article 26 de la loi du 24 janvier 1991, une personne privée de cette qualité conserve son droit à sa pension de retraite calculée selon les règles du régime général d’assurance sociale.
GRIEFS
1.  Le requérant se plaint de l’issue de la procédure par laquelle il a été privé de sa qualité d’ancien combattant, faisant valoir que les autorités polonaises n’ont pas correctement établi et apprécié les faits pertinents pour statuer sur son affaire. Il invoque l’article 6 de la Convention.
2.  Sur le terrain de l’article 14 de la Convention, il se plaint en outre d’avoir subi une discrimination de la part des autorités polonaises en raison de ses fonctions antérieures dans les « organes du service de la sûreté publique » et d’avoir été injustement privé de la qualité d’ancien combattant, qu’il avait régulièrement acquise, et des droits y afférents.
EN DROIT
1.  Le requérant se plaint de l’issue de la procédure par laquelle il a été privé de la qualité d’ancien combattant, faisait valoir que les autorités polonaises n’ont pas correctement établi et apprécié les faits pertinents pour statuer sur son affaire. Il invoque l’article 6 de la Convention.
Constatant que la procédure litigieuse ne portait pas sur une accusation en matière pénale dirigée contre le requérant, la Cour a d’abord examiné si l’article 6 § 1 de la Convention s’appliquait, sous sa « rubrique civile », à cette procédure.
Le passage pertinent de l’article 6 § 1 de la Convention est ainsi libellé :
« Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement (…) par un tribunal (…) établi par la loi, qui décidera (…) des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil (…) »
La Cour rappelle que pour que l’article 6 § 1, sous sa rubrique « civile », trouve à s’appliquer, il faut qu’il y ait « contestation » sur un « droit » que l’on peut prétendre, au moins de manière défendable, reconnu en droit interne. Il doit s’agir d’une contestation réelle et sérieuse ; elle peut concerner aussi bien l’existence même d’un droit que son étendue ou ses modalités d’exercice. En outre, l’issue de la procédure doit être directement déterminante pour le droit en question (voir, par exemple, l’arrêt Rolf Gustafson c. Suède du 1er juillet 1997, Recueil des arrêts et décisions 1997-IV, p. 1160, § 38).
En l’espèce, la Cour relève que la procédure litigieuse avait pour objet le point de savoir si le requérant devait ou non conserver la « qualité d’ancien combattant » précédemment acquise et constate que la décision définitive, qui a finalement privé l’intéressé de cette qualité, était déterminante pour les droits patrimoniaux de celui-ci, en particulier le droit à une « pension d’ancien combattant », c’est-à-dire le versement d’une certaine somme d’argent. Dès lors, elle estime que la procédure avait trait à une « contestation » sur les « droits de caractère civil » du requérant et, par conséquent, que l’article 6 § 1 de la Convention trouve à s’appliquer.
Toutefois, la Cour constate également que le requérant n’allègue aucune méconnaissance particulière de son droit d’être entendu équitablement par les autorités internes et qu’il se plaint essentiellement de l’issue de la procédure devant ces autorités et des erreurs de fait qu’elles auraient commises.
A cet égard, la Cour rappelle qu’aux termes de l’article 19 de la Convention elle a pour tâche d’assurer le respect des engagements résultant de la Convention pour les Parties contractantes. Spécialement, il ne lui appartient pas de connaître des erreurs de fait ou de droit prétendument commises par une juridiction interne, sauf si et dans la mesure où elles pourraient avoir porté atteinte aux droits et libertés sauvegardés par la Convention (arrêt García Ruiz c. Espagne [GC], n° 30544/96, § 28, CEDH 1999-I).
Il s’ensuit que cette partie de la requête est irrecevable pour défaut manifeste de fondement au sens de l’article 35 § 1 de la Convention, et qu’elle doit être rejetée en application de l’article 35 § 4 de la Convention.
2.  Sur le terrain de l’article 14 de la Convention, le requérant se plaint en outre d’avoir subi une discrimination de la part des autorités polonaises en raison de ses fonctions antérieures dans les « organes du service de la sûreté publique » et, par conséquent, d’avoir été injustement privé de la qualité d’ancien combattant, qu’il avait régulièrement acquise, et des droits y afférents.
La Cour rappelle tout d’abord que d’après sa jurisprudence constante, l’article 14 de la Convention complète les autres clauses normatives de la Convention et des Protocoles. Il n’a pas d’existence indépendante puisqu’il vaut uniquement pour « la jouissance des droits et libertés » qu’elles garantissent. Certes, il peut entrer en jeu même sans un manquement à leurs exigences et, dans cette mesure, il possède une portée autonome, mais il ne saurait trouver à s’appliquer si les faits du litige ne tombent pas sous l’emprise de l’une au moins desdites clauses (arrêt Gaygusuz c. Autriche du 16 septembre 1996, Recueil 1996-IV, p. 1141, § 36).
En l’espèce, la Cour observe que le grief du requérant ne se limite pas au point de savoir si le droit polonais opère une discrimination, mais il porte également sur la perte des avantages pécuniaires afférents à la « qualité d’ancien combattant » lesquels, comme l’a constaté la Cour, sont des droits patrimoniaux. Dès lors, la Cour estime que le grief appelle un examen sous l’angle de l’article 1 du Protocole n° 1 à la Convention combiné avec l’article 14 de la Convention (voir, mutatis mutandis, l’arrêt Gaygusuz, loc. cit., pp. 1141-1142, §§ 39-41).
L’article 1 du Protocole n° 1, en ses dispositions pertinentes, est ainsi libellé :
« Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d’utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international.
L’article 14 de la Convention se lit ainsi :
« La jouissance des droits et libertés reconnus dans la (...) Convention doit être assurée, sans distinction aucune, fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion, les opinions politiques ou toutes autres opinions, l’origine nationale ou sociale, l’appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance ou toute autre situation. »
La Cour rappelle que même si les droits découlant du versement de cotisations à un régime d’assurance sociale, en particulier le droit de tirer des bénéfices d’un tel régime – par exemple sous forme de pension – peuvent être revendiqués sous l’angle de l’article 1 du Protocole n° 1, cette disposition ne saurait s’interpréter comme donnant droit à une rente d’un montant déterminé (Müller c. Autriche, requête n° 5849/72, rapport de la Commission du 1er octobre 1975, Décisions et rapports (DR) 3, p. 25 ; T. c. Suède, requête n° 10671/83, décision de la Commission du 4 mars 1985, DR 42, p. 229).
En outre, la Cour note qu’une distinction est discriminatoire au sens de l’article 14 si elle manque de justification objective et raisonnable, c’est-à-dire si elle ne poursuit pas un « but légitime » ou s’il n’y a pas de « rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but visé ». Par ailleurs, les Etats contractants jouissent à cet égard d’une certaine marge d’appréciation pour déterminer si et dans quelle mesure des différences entre des situations à d’autres égards analogues justifient des distinctions de traitement (arrêt Gaygusuz, loc. cit.).
En l’espèce, la Cour relève qu’à la suite de l’arrêt rendu par la Cour administrative suprême le 21 février 1996, le requérant a perdu la « qualité » spéciale et privilégiée « d’ancien combattant » qui lui donnait droit à une rente (à savoir une « pension d’ancien combattant ») en plus de sa pension ordinaire et à d’autres avantages tels que des réductions auxquelles les autres retraités n’avaient pas droit ou une indemnité couvrant certaines de ses dépenses courantes. Toutefois, l’intéressé a conservé tous les droits attachés à la pension ordinaire qui lui est versée dans le cadre du régime général d’assurance sociale. Par conséquent, ses droits patrimoniaux découlant du paiement des cotisations à son régime de retraite sont demeurés inchangés.
Dans ces conditions, la Cour estime que le droit du requérant de tirer des bénéfices du régime d’assurance sociale n’a pas été enfreint d’une manière contraire à l’article 1 du Protocole n° 1, étant donné en particulier que la perte de la « qualité d’ancien combattant » n’a pas porté atteinte à l’essence même des droits à pension de l’intéressé.
En outre, elle considère que le fait d’avoir privé le requérant de la « qualité d’ancien combattant » ne s’analyse pas en une discrimination contraire à l’article 14 de la Convention.
A cet égard, la Cour fait observer qu’en vertu de la loi du 24 janvier 1991 sur les anciens combattants et les autres victimes de la guerre et de la répression d’après-guerre, le requérant a été exclu du groupe privilégié des « anciens combattants », de la même manière et dans les mêmes conditions que toute autre personne ayant précédemment été employée ou ayant exercé des fonctions dans les anciens organes communistes du service de la sûreté publique, eu égard au rôle politique joué par ces organes dans le maintien du régime totalitaire et la lutte contre toute opposition politique à l’ancien régime.
Enfin, la Cour souligne que les mesures législatives prises par l’Etat polonais à l’égard de ces personnes visaient principalement à vérifier si ceux qui avaient exercé des fonctions dans des organes généralement considérés comme un appareil de répression répondaient aux conditions légales en vigueur pour l’octroi d’un statut honorifique spécial. Dès lors, les moyens employés par les autorités polonaises trouvaient une justification objective et raisonnable dans le passé communiste de la Pologne et poursuivaient un but légitime, à savoir régir le fonctionnement du système de privilèges exceptionnels.
Il s’ensuit que la requête, pour le surplus, est irrecevable pour défaut manifeste de fondement au sens de l’article 35 § 3 de la Convention, et qu’elle doit être rejetée en application de l’article 35 § 4.
Par ces motifs, la Cour, à l’unanimité,
Déclare la requête irrecevable.
DÉCISION DOMALEWSKI c. POLOGNE
DÉCISION DOMALEWSKI c. POLOGNE 


Type d'affaire : Decision
Type de recours : Partiellement irrecevable ; Partiellement recevable

Analyses

(Art. 3) TRAITEMENT INHUMAIN


Parties
Demandeurs : DOMALEWSKI
Défendeurs : la POLOGNE

Références :

Notice Hudoc


Origine de la décision
Formation : Cour (deuxième section)
Date de la décision : 15/06/1999
Date de l'import : 14/10/2011

Fonds documentaire ?: HUDOC


Numérotation
Numéro d'arrêt : 34610/97
Identifiant URN:LEX : urn:lex;coe;cour.europeenne.droits.homme;arret;1999-06-15;34610.97 ?
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