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27/04/2000 | CEDH | N°39883/98

CEDH | AFFAIRE BERTOZZI c. ITALIE


DEUXIÈME SECTION
AFFAIRE BERTOZZI c. ITALIE
(Requête n° 39883/98)
ARRÊT
STRASBOURG
27 avril 2000
En l’affaire Bertozzi c. Italie,
La Cour européenne des Droits de l’Homme (deuxième section), siégeant en une chambre composée de :
MM. M. Fischbach président,    L. Ferrari Bravo,    G. Bonello,   Mme V. Strážnická,   M. P. Lorenzen,   Mme M. Tsatsa-Nikolovska,   M. A.B. Baka, juges,  et de M. E. Fribergh, greffier de section ; 
Après en avoir délibéré en chambre du conseil le 6 avril 2000,> Rend l’arrêt que voici, adopté à cette date :
PROCÉDURE
1.  L’affaire a été déférée à la Cour par M. Guido Berto...

DEUXIÈME SECTION
AFFAIRE BERTOZZI c. ITALIE
(Requête n° 39883/98)
ARRÊT
STRASBOURG
27 avril 2000
En l’affaire Bertozzi c. Italie,
La Cour européenne des Droits de l’Homme (deuxième section), siégeant en une chambre composée de :
MM. M. Fischbach président,    L. Ferrari Bravo,    G. Bonello,   Mme V. Strážnická,   M. P. Lorenzen,   Mme M. Tsatsa-Nikolovska,   M. A.B. Baka, juges,  et de M. E. Fribergh, greffier de section ; 
Après en avoir délibéré en chambre du conseil le 6 avril 2000,
Rend l’arrêt que voici, adopté à cette date :
PROCÉDURE
1.  L’affaire a été déférée à la Cour par M. Guido Bertozzi (« le requérant »), ressortissant italien, le 10 août 1999. A son origine se trouve une requête (n°39883/98) dirigée contre la République italienne et dont un requérant avait saisi la Commission européenne des Droits de l’Homme (« la Commission ») le 14 mai 1997 en vertu de l’ancien article 25 de la Convention de sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés fondamentales (« la Convention »). Le requérant est représenté par Me M. Vecchio, avocat à Rome. Le gouvernement italien (« le Gouvernement ») est représenté par son agent, M. U. Leanza et son coagent, M. V. Esposito.
2.  Le 27 octobre 1998, la Commission a retenu la requête (n°39883/98) relative à la durée de la procédure. Dans son rapport du 4 mars 1999 (ancien article 31), elle conclut à l'unanimité à la violation de l'article 6 § 1 de la Convention.
3.  A la suite de l’entrée en vigueur du Protocole n° 11 le 1er novembre 1998, et conformément à l’article 5 § 4 dudit Protocole, lu en combinaison avec les articles 24 § 6 et 100 § 1 du règlement de la Cour (« le règlement »), un collège de la Grande Chambre a décidé, le 20 septembre 1999, que l’affaire serait examinée par une chambre constituée au sein de l’une des sections de la Cour.
4.  Le président de la Cour, M. L. Wildhaber, a ensuite attribué l’affaire à la deuxième section. La chambre constituée au sein de ladite section comprenait de plein droit M. B. Conforti, juge élu au titre de l'Italie (articles 27 § 2 de la Convention et 26 § 1 a) du règlement), et M. C.L. Rozakis, président de la section (article 26 § 1 a) du règlement). Les autres membres désignés par ce dernier pour compléter la chambre étaient M. M. Fischbach, M. G. Bonello, Mme V. Strážnická, M. P. Lorenzen et Mme M. Tsatsa-Nikolovska (article 26 § 1 b) du règlement).
5.  Ultérieurement, M. Rozakis et M. Conforti, qui avaient participé à l’examen de l’affaire par la Commission, se sont déportés (article 28 du règlement). En conséquence, M. Fischbach a remplacé M. Rozakis en tant que président de la chambre (article 12 du règlement) et M. A.B. Baka a été désigné pour le remplacer au sein de celle-ci. Par la suite, le Gouvernement a désigné M. L. Ferrari Bravo, juge élu au titre de Saint-Marin, pour siéger à la place de M. Conforti (articles 27 § 2 de la Convention et 29 § 1 du règlement).
6.  Le 30 novembre 1999, le Gouvernement a informé la Cour qu'il n'entendait pas présenter un nouveau mémoire et se référait à ses observations devant la Commission du 15 juin 1998. Le 29 novembre 1999, le greffe avait reçu le mémoire du requérant, un second mémoire arriva le 31 janvier 2000.
EN FAIT
7.  Le 6 mai 1983, le requérant assigna M. A., ainsi que sa compagnie d'assurances et la société anonyme H., devant le tribunal de Rome afin d'obtenir réparation des dommages subis lors d'un accident de la circulation.
8.  La mise en état de l'affaire commença le 20 septembre 1983. Après une autre audience, le 12 juin 1984, l'une des parties défenderesses fut entendue. Des onze audiences qui se tinrent entre le 18 décembre 1984 et le 15 février 1988, sept concernèrent une expertise médicale, trois furent consacrées au dépôt de documents et une à l'audition du requérant. Le 19 avril 1988, le juge ordonna au greffe de se procurer certains documents et à l'audience suivante les parties demandèrent un renvoi pour les examiner. Des neuf audiences qui eurent lieu entre le 6 mars 1989 et le 19 janvier 1993, quatre concernèrent une expertise comptable, deux un complément de la même expertise et trois le dépôt de mémoires ou de documents. Le 22 juin 1993, le juge nomma un nouvel expert médical, qui prêta serment le 13 décembre 1993. L'audience suivante fut remise car l'expert n'avait pas déposé au greffe son rapport. Des trois audiences qui se tinrent entre le 8 novembre 1994 et le 10 avril 1995, une fut remise pour permettre aux parties d’examiner le rapport d’expertise et deux furent consacrées au dépôt de mémoires. L'instruction se termina, une audience plus tard, le 26 février 1996, par la présentation des conclusions.
9.  L'audience de plaidoiries devant la chambre compétente fut fixée au 8 octobre 1997. Le texte du jugement fut déposé au greffe le 13 mai 1998.
EN DROIT
I. SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L’ARTICLE 6 § 1 DE LA CONVENTION
10.  Le requérant allègue que la durée de la procédure a méconnu le principe du « délai raisonnable » tel que prévu par l’article 6 § 1 de la Convention, ainsi libellé :
« Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue (...) dans un délai raisonnable, par un tribunal (…) qui décidera (…) des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil (…) »
11.  Le Gouvernement s’oppose à cette thèse.
12.  La période à considérer a débuté le 6 mai 1983 et s'est terminée le 13 mai 1998.
13.  Elle a donc duré plus de quinze ans, pour une instance.
14.  La Cour rappelle avoir constaté dans quatre arrêts du 28 juillet 1999 (voir, par exemple, l’arrêt Bottazzi c. Italie à paraître dans le recueil officiel de la Cour, § 22) l’existence en Italie d’une pratique contraire à la Convention résultant d’une accumulation de manquements à l’exigence du « délai raisonnable ». Dans la mesure où la Cour constate un tel manquement, cette accumulation constitue une circonstance aggravante de la violation de l’article 6 § 1.
15.  Ayant examiné les faits de la cause à la lumière des arguments des parties et compte tenu de sa jurisprudence en la matière, la Cour estime que la durée de la procédure litigieuse ne répond pas à l’exigence du « délai raisonnable » et qu’il y a là encore une manifestation de la pratique précitée.
Partant, il y a eu violation de l’article 6 § 1.
II. Sur l’application de l’article 41 DE LA Convention
16.  Aux termes de l’article 41 de la Convention,
« Si la Cour déclare qu’il y a eu violation de la Convention ou de ses Protocoles, et si le droit interne de la Haute Partie contractante ne permet d’effacer qu’imparfaitement les conséquences de cette violation, la Cour accorde à la partie lésée, s’il y a lieu, une satisfaction équitable. »
A. Dommage
17.  Le requérant réclame 50 000 000 lires italiennes (ITL) au titre du préjudice matériel et au moins 10 000 000 ITL au titre du préjudice moral qu'il aurait subi.
18.  La Cour estime qu’il n’y a en l’espèce aucun lien de causalité entre la violation constatée et le préjudice matériel allégué. Elle rejette cette partie de la demande. En revanche, la Cour considère qu’il y a lieu d'octroyer au requérant 40 000 000 ITL au titre du préjudice moral.
B. Frais et dépens
19.  Le requérant demande également 38 921 050 ITL pour les frais et dépens encourus devant les juridictions internes et 17 890 400 ITL pour ceux encourus devant la Cour.
20.  Selon la jurisprudence de la Cour, un requérant ne peut obtenir le remboursement de ses frais et dépens que dans la mesure où se trouvent établis leur réalité, leur nécessité et le caractère raisonnable de leur taux (voir, par exemple, l’arrêt Bottazzi précité, § 30). En l’espèce et compte tenu des éléments en sa possession et des critères susmentionnés, la Cour rejette la demande relative aux frais et dépens de la procédure nationale, estime raisonnable la somme de 5 000 000 ITL pour la procédure devant la Cour et l’accorde au requérant.
C. Intérêts moratoires
21.  Selon les informations dont dispose la Cour, le taux d’intérêt légal applicable en Italie à la date d’adoption du présent arrêt était de 2,5 % l’an.
Par ces motifs, la Cour, à l’unanimité,
1. Dit qu’il y a eu violation de l’article 6 § 1 de la Convention ;
2. Dit
a) que l’Etat défendeur doit verser au requérant, dans les trois mois, 40 000 000 (quarante millions) lires italiennes pour dommage moral et 5 000 000 (cinq millions) lires italiennes pour frais et dépens ;
b)  que ces montants seront à majorer d’un intérêt simple de 2,5 % l’an à compter de l’expiration dudit délai et jusqu’au versement ;
3. Rejette la demande de satisfaction équitable pour le surplus.
Fait en français, puis communiqué par écrit le 27 avril 2000, en application de l’article 77 §§ 2 et 3 du règlement.
Erik Fribergh Marc Fischbach   Greffier Président
ARRÊT BERTOZZI C. ITALIE
ARRÊT «NAMEAPPLICANT» DU ...


Synthèse
Formation : Cour (deuxième section)
Numéro d'arrêt : 39883/98
Date de la décision : 27/04/2000
Type d'affaire : Arrêt (Au principal et satisfaction équitable)
Type de recours : Violation de l'Art. 6-1 ; Dommage matériel - demande rejetée ; Préjudice moral - réparation pécuniaire ; Remboursement partiel frais et dépens - procédure de la Convention

Analyses

(Art. 6) PROCEDURE CIVILE


Parties
Demandeurs : BERTOZZI
Défendeurs : ITALIE

Références :

Notice Hudoc


Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: HUDOC
Identifiant URN:LEX : urn:lex;coe;cour.europeenne.droits.homme;arret;2000-04-27;39883.98 ?
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