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27/02/2001 | CEDH | N°44398/98

CEDH | AFFAIRE VALENTINO c. ITALIE


PREMIÈRE SECTION
AFFAIRE VALENTINO c. ITALIE
(Requête n° 44398/98)
ARRÊT
STRASBOURG
27 février 2001
DÉFINITIF
27/05/2001
Cet arrêt deviendra définitif dans les conditions définies à l’article 44 § 2 de la Convention. Il peut subir des retouches de forme avant la parution de sa version définitive.
En l’affaire Valentino c. Italie,
La Cour européenne des Droits de l’Homme (première section), siégeant en une chambre composée de :
Mme E. Palm, présidente,   MM. B. Conforti,    L. Ferrari Bravo,

    Gaukur Jörundsson,    R. Türmen,    B. Zupančič,    T. Panţîru, juges,  et de M. M. O’Boyle, greffier d...

PREMIÈRE SECTION
AFFAIRE VALENTINO c. ITALIE
(Requête n° 44398/98)
ARRÊT
STRASBOURG
27 février 2001
DÉFINITIF
27/05/2001
Cet arrêt deviendra définitif dans les conditions définies à l’article 44 § 2 de la Convention. Il peut subir des retouches de forme avant la parution de sa version définitive.
En l’affaire Valentino c. Italie,
La Cour européenne des Droits de l’Homme (première section), siégeant en une chambre composée de :
Mme E. Palm, présidente,   MM. B. Conforti,    L. Ferrari Bravo,    Gaukur Jörundsson,    R. Türmen,    B. Zupančič,    T. Panţîru, juges,  et de M. M. O’Boyle, greffier de section,
Après en avoir délibéré en chambre du conseil le 6 février 2001,
Rend l’arrêt que voici, adopté à cette date :
PROCÉDURE
1.  A l’origine de l’affaire se trouve une requête dirigée contre la République italienne et dont un ressortissant italien, M. Francesco Valentino (« le requérant »), avait saisi la Commission européenne des Droits de l’Homme le 28 avril 1997 en vertu de l’ancien article 25 de la Convention de sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés fondamentales (« la Convention »). La requête a été enregistrée le 13 novembre 1998 sous le numéro de dossier 44398/98. Le requérant est représenté par Me N. Fiorentin, avocat à Udine. Le gouvernement italien (« le Gouvernement ») est représenté par son agent, M. U. Leanza, et par son coagent, M. V. Esposito.
2.  La Cour a déclaré la requête recevable le 4 juillet 2000.
EN FAIT
3.  Le 25 septembre 1981, le requérant assigna M. P. en tant que titulaire de la firme individuelle R. devant le tribunal d’Udine afin de faire constater que cette dernière n’avait pas exécuté un contrat d’entreprise et obtenir, ainsi, la résolution du contrat et la réparation des dommages subis.
4.  L’instruction de l’affaire commença le 7 décembre 1981. Après trois audiences au cours desquelles les parties demandèrent l’audition de témoins, par une ordonnance du 23 mai 1983, le juge de la mise en état ordonna la comparution de l’expert qui avait déjà réalisé une expertise in futurum à la demande du requérant. L’audition prévue à cette fin se tint le 20 juin 1983, date à laquelle le juge ordonna une nouvelle expertise. Le 14 novembre 1983, le juge de la mise en état posa une question complémentaire à l’expert. L’audience du 19 mars 1984 fut renvoyée au 17 décembre 1984 à la demande des parties. Suite à une demande de saisie présentée par la partie défenderesse, par une ordonnance du 24 août 1984, le juge accueillit ladite demande.
5.  Le 9 juin 1986, le juge ordonna la jonction à la présente affaire d’une autre procédure entamée le 16 mars 1984 par M. P. à l’encontre de M. C. Le 26 janvier 1987, le requérant demanda un renvoi afin d’examiner le rapport d’expertise entre-temps déposé au greffe et le juge ajourna l’affaire au 13 juillet 1987. Les quatre audiences qui eurent lieu entre le 22 février 1988 et le 13 mars 1989 concernèrent la demande d’audition de témoins. Par une ordonnance du 15 mars 1989, le juge fixa la date pour la présentation des conclusions au 2 octobre 1989. Cette audience n’eut pas lieu. A l’audience du 10 décembre 1990 les parties ne se présentèrent pas. Le 25 mars 1991, la partie défenderesse demanda la révocation de l’ordonnance du 15 mars 1989. L’audience prévue pour le 24 juin 1991 fut reportée d’office au 11 novembre 1991. Ce jour-là et le 17 février 1992 les parties demandèrent à nouveau l’audition de témoins. Après trois renvois, dont un d’office, le 16 février 1993 le juge ajourna l’affaire au 20 avril 1993 en vue d’une conciliation. Cette audience fut renvoyée au 27 avril 1993 car le requérant ne s’était pas présenté. La tentative de conciliation ayant échoué, par une ordonnance du 27 décembre 1993, le juge admit l’audition de témoins, qui se tint les 12 octobre 1993 et 1er mars 1994. Le 9 mai 1994, le juge fixa la date pour la présentation des conclusions au 6 juin 1994. L’audience de plaidoiries devant la chambre compétente fut fixée au 7 mars 1996.
6.  Par un jugement du même jour, dont le texte fut déposé au greffe le 13 mai 1996, le tribunal rejeta la demande du requérant, condamna ce dernier et M. C. solidairement à verser une certaine somme à M. P. et rejeta la demande de validation de la saisie conservatoire ordonnée par le juge de la mise en état le 24 août 1984.
7.  Selon les informations fournies par le requérant, ledit jugement devint définitif le 29 juin 1997.  
EN DROIT
I.  SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L’ARTICLE 6 § 1 DE LA CONVENTION
8.  Le requérant allègue que la durée de la procédure a méconnu le principe du « délai raisonnable » tel que prévu par l’article 6 § 1 de la Convention, ainsi libellé :
« Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue (...) dans un délai raisonnable, par un tribunal (…) qui décidera (…) des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil (…) »
9.  La période à considérer a débuté le 25 septembre 1981 et s’est terminée le 29 juin 1997.
10.  Elle a donc duré plus de quinze ans et neuf mois pour une instance.
11.  La Cour rappelle avoir constaté dans de nombreux arrêts (voir, par exemple, Bottazzi c. Italie [GC], n° 34884/97, § 22, CEDH 1999-V) l’existence en Italie d’une pratique contraire à la Convention résultant d’une accumulation de manquements à l’exigence du « délai raisonnable ». Dans la mesure où la Cour constate un tel manquement, cette accumulation constitue une circonstance aggravante de la violation de l’article 6 § 1.
12.  Ayant examiné les faits de la cause à la lumière des arguments des parties et compte tenu de sa jurisprudence en la matière, la Cour estime que la durée de la procédure litigieuse ne répond pas à l’exigence du « délai raisonnable » et qu’il y a là encore une manifestation de la pratique précitée.
Partant, il y a eu violation de l’article 6 § 1.
II.  Sur l’application de l’article 41 DE LA Convention
13.  Aux termes de l’article 41 de la Convention,
« Si la Cour déclare qu’il y a eu violation de la Convention ou de ses Protocoles, et si le droit interne de la Haute Partie contractante ne permet d’effacer qu’imparfaitement les conséquences de cette violation, la Cour accorde à la partie lésée, s’il y a lieu, une satisfaction équitable. »
A.  Dommage
14.  Le requérant réclame 100 000 000 lires italiennes (ITL) au titre du préjudice matériel et 60 000 000 ITL au titre du préjudice moral qu’il aurait subi.
15.  La Cour n’aperçoit pas de lien de causalité entre la violation constatée et le dommage matériel allégué et rejette cette demande. En revanche, la Cour considère qu’il y a lieu d’octroyer au requérant 48 000 000 ITL au titre du préjudice moral.
B.  Frais et dépens
16.  Le requérant demande également 8 000 000 pour les frais et dépens encourus devant les juridictions internes et 26 428 608 pour ceux encourus devant la Cour.
17.  Selon la jurisprudence de la Cour, un requérant ne peut obtenir le remboursement de ses frais et dépens que dans la mesure où se trouvent établis leur réalité, leur nécessité et le caractère raisonnable de leur taux (voir, par exemple, l’arrêt Bottazzi précité, § 30). En l’espèce et compte tenu des éléments en sa possession et des critères susmentionnés, la Cour rejette la demande relative aux frais et dépens de la procédure nationale, estime raisonnable la somme de 3 000 000 ITL pour la procédure devant la Cour et l’accorde au requérant.
C.  Intérêts moratoires
18.  Selon les informations dont dispose la Cour, le taux d’intérêt légal applicable en Italie à la date d’adoption du présent arrêt était de 3,5 % l’an.
Par ces motifs, la Cour, à l’unanimité,
1.  Dit qu’il y a eu violation de l’article 6 § 1 de la Convention ;
2.  Dit,
a)  que l’Etat défendeur doit verser au requérant, dans les trois mois à compter du jour où l’arrêt est devenu définitif conformément à l’article 44 § 2 de la Convention, 48 000 000 (quarante-huit millions) lires italiennes pour dommage moral et 3 000 000 (trois millions) lires italiennes pour frais et dépens ;
b)  que ces montants seront à majorer d’un intérêt simple de 3,5 % l’an à compter de l’expiration de ce délai et jusqu’au versement ;
3.  Rejette la demande de satisfaction équitable pour le surplus.
Fait en français, puis communiqué par écrit le 27 février 2001, en application de l’article 77 §§ 2 et 3 du règlement.
Michael O’Boyle Elisabeth Palm   Greffier Présidente
ARRÊT VALENTINO c. ITALIE 
ARRÊT VALENTINO c. ITALIE
ARRÊT «NAMEAPPLICANT» c. ITALIE 
ARRÊT «NAMEAPPLICANT» c. ITALIE


Synthèse
Formation : Cour (première section)
Numéro d'arrêt : 44398/98
Date de la décision : 27/02/2001
Type d'affaire : Arrêt (Au principal et satisfaction équitable)
Type de recours : Violation de l'art. 6-1 ; Dommage matériel - demande rejetée ; Préjudice moral - réparation pécuniaire ; Remboursement partiel frais et dépens - procédure de la Convention

Analyses

(Art. 6) PROCEDURE CIVILE


Parties
Demandeurs : VALENTINO
Défendeurs : ITALIE

Références :

Notice Hudoc


Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: HUDOC
Identifiant URN:LEX : urn:lex;coe;cour.europeenne.droits.homme;arret;2001-02-27;44398.98 ?
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