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12/02/2002 | CEDH | N°52960/99

CEDH | AFFAIRE VENTRONE c. ITALIE


QUATRIÈME SECTION
AFFAIRE VENTRONE c. ITALIE
(Requête n° 52960/99)
ARRÊT
STRASBOURG
12 février 2002
DÉFINITIF
12/05/2002
Cet arrêt deviendra définitif dans les conditions définies à l’article 44 § 2 de la Convention. Il peut subir des retouches de forme.
En l’affaire Ventrone c. Italie,
La Cour européenne des Droits de l’Homme (quatrième section), siégeant en une chambre composée de :
 Sir Nicolas Bratza, président,   MM. M. Pellonpää,    A. Pastor Ridruejo,    L. Ferrari Bravo,    M.

Fischbach,    J. Casadevall,    S. Pavlovschi, juges,  et de M. O’Boyle, greffier de section,
Après en avoir déli...

QUATRIÈME SECTION
AFFAIRE VENTRONE c. ITALIE
(Requête n° 52960/99)
ARRÊT
STRASBOURG
12 février 2002
DÉFINITIF
12/05/2002
Cet arrêt deviendra définitif dans les conditions définies à l’article 44 § 2 de la Convention. Il peut subir des retouches de forme.
En l’affaire Ventrone c. Italie,
La Cour européenne des Droits de l’Homme (quatrième section), siégeant en une chambre composée de :
 Sir Nicolas Bratza, président,   MM. M. Pellonpää,    A. Pastor Ridruejo,    L. Ferrari Bravo,    M. Fischbach,    J. Casadevall,    S. Pavlovschi, juges,  et de M. O’Boyle, greffier de section,
Après en avoir délibéré en chambre du conseil le 22 janvier 2002,
Rend l’arrêt que voici, adopté à cette date :
PROCÉDURE
1.  A l’origine de l’affaire se trouve une requête dirigée contre la République italienne et dont des ressortissants italiens, Mme Ida Ventrone et M. Francesco Ventrone (« les requérants »), avaient saisi la Commission européenne des Droits de l’Homme le 27 décembre 1997 en vertu de l’ancien article 25 de la Convention de sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés fondamentales (« la Convention »). La requête a été enregistrée le 26 novembre 1999 sous le numéro de dossier 52960/99. Les requérants sont représentés par Me T. Gagliani, avocat à Rome. Le gouvernement italien (« le Gouvernement ») est représenté par son agent, M. U. Leanza, et par son coagent, M. V. Esposito.
2.  La Cour a déclaré la requête recevable le 22 mars 2001.
EN FAIT
3.  Le 2 juillet 1991, les requérants, héritiers de Mme M. V., assignèrent Me F. V. devant le tribunal de Santa Maria Capua Vetere afin de faire constater la cessation du mandat que Mme M. V. avait donné à celui-ci. Ils demandaient également la condamnation de ce dernier à présenter le compte rendu de son activité ainsi que la restitution de ce qu’il avait reçu en raison du mandat et la réparation des dommages subis.
4.  La mise en état de l’affaire commença le 15 octobre 1991. Par une ordonnance du même jour, le juge de la mise en état ordonna aux requérants de verser des documents au dossier et ajourna l’affaire au 6 février 1992. Après trois audiences, au cours desquelles les requérants insistèrent sur leur demande tendant à obtenir la présentation du compte rendu de l’activité du défendeur, le 25 février 1993 ceux-ci versèrent des documents au dossier. Le 11 mai 1993, Me F. V. déposa le compte rendu. Le 1er juin 1993, les requérants contestèrent celui-ci. Après une audience, par une ordonnance du 12 juillet 1993, le juge de la mise en état transmit le dossier au tribunal afin d’obtenir une décision concernant la suspension de la présente affaire, dans l’attente de l’issue d’une autre procédure pendante entre les mêmes parties. Le 8 octobre 1993, le tribunal ordonna ladite suspension.
5.  Par une ordonnance du 28 octobre 1993, le même tribunal, en se prononçant dans la deuxième affaire, ordonna la jonction des deux procédures. Le 28 janvier 1994, les requérants présentèrent une demande tendant à ce que le président du tribunal fixe la date pour la continuation de la procédure. Le 8 février 1994, ce dernier fixa la date au 7 octobre 1997. Le 23 février 1996, les requérants présentèrent une demande à ce que la date de l’audience fût avancée. Le 7 mars 1996, le président avança la date au 16 juillet 1996. Après deux audiences, par une ordonnance du 30 avril 1997 le juge de la mise en état fixa l’audience pour la présentation des conclusions au 1er juillet 1997. Le jour venu, l’audience de plaidoiries devant la chambre compétente fut fixée au 15 mai 2000.
6.  Toutefois cette audience ne se tint pas parce que, entre-temps, en application de la loi n° 276 du 22 juillet 1997 (« sezioni stralcio »), le président du tribunal chargea un juge honoraire (« Giudice Onorario Aggregato ») de l’affaire.
7.  Par un jugement du 11 octobre 1999, déposé le 15 octobre 1999, le juge déclara la recours des requérantes irrecevable.
8.  Le 24 janvier 2000 les requérantes interjetèrent appel devant la cour d’appel de Naples contre le jugement du 11 octobre 1999. Le mise en état de l’affaire commença le 26 avril 2000. Après deux audiences, le 24 novembre 2000 les parties présentèrent leur conclusions et l’audience de plaidoiries se tint le 21 juin 2001.
9.  Par un arrêt du 21 juin 2001, dont le texte fut déposé au greffe le 9 juillet 2001, la cour fit en partie droit à l’appel.
EN DROIT
I.  SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L’ARTICLE 6 § 1 DE LA CONVENTION
10.  Les requérants allèguent que la durée de la procédure a méconnu le principe du « délai raisonnable » tel que prévu par l’article 6 § 1 de la Convention, ainsi libellé :
« Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue (...) dans un délai raisonnable, par un tribunal (...) qui décidera (...) des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil (...) »
11.  Le Gouvernement s’oppose à cette thèse.
12.  La période à considérer a débuté le 2 juillet 1991 et s’est terminée le 9 juillet 2001.
13.  Elle a donc duré un peu plus de dix ans pour deux instances.
14.  La Cour rappelle avoir constaté dans de nombreux arrêts (voir, par exemple, Bottazzi c. Italie [GC], n° 34884/97, § 22, CEDH 1999-V) l’existence en Italie d’une pratique contraire à la Convention résultant d’une accumulation de manquements à l’exigence du « délai raisonnable ». Dans la mesure où la Cour constate un tel manquement, cette accumulation constitue une circonstance aggravante de la violation de l’article 6 § 1.
15.  Ayant examiné les faits de la cause à la lumière des arguments des parties et compte tenu de sa jurisprudence en la matière, la Cour estime que la durée de la procédure litigieuse ne répond pas à l’exigence du « délai raisonnable » et qu’il y a là encore une manifestation de la pratique précitée.
Partant, il y a eu violation de l’article 6 § 1.
II.  SUR L’APPLICATION DE L’ARTICLE 41 DE LA CONVENTION
16.  Aux termes de l’article 41 de la Convention,
« Si la Cour déclare qu’il y a eu violation de la Convention ou de ses Protocoles, et si le droit interne de la Haute Partie contractante ne permet d’effacer qu’imparfaitement les conséquences de cette violation, la Cour accorde à la partie lésée, s’il y a lieu, une satisfaction équitable. »
A.  Dommage
17.  Les requérants réclament globalement 20 000 000 lires italiennes (ITL) au titre du préjudice matériel et 60 000 000 ITL au titre du préjudice moral qu’ils auraient subi.
18.  La Cour n’aperçoit pas de lien de causalité entre la violation constatée et le dommage matériel allégué et rejette cette demande. En revanche, elle considère qu’il y a lieu d’octroyer à chaque requérant 10 000 euros (EUR) au titre du préjudice moral.
B.  Frais et dépens
19.  Les requérants demandent également 10 000 000 ITL, globalement, pour les frais et dépens encourus devant les juridictions internes et 11 038 260 ITL pour ceux encourus devant la Cour.
20.  Selon la jurisprudence de la Cour, un requérant ne peut obtenir le remboursement de ses frais et dépens que dans la mesure où se trouvent établis leur réalité, leur nécessité et le caractère raisonnable de leur taux (voir, par exemple, l’arrêt Bottazzi précité, § 30). En l’espèce et compte tenu des éléments en sa possession et des critères susmentionnés, la Cour rejette la demande relative aux frais et dépens de la procédure nationale, estime raisonnable la somme de 2 500 EUR au titre des frais et dépens de la procédure devant la Cour et accorde donc 1 250 EUR à chaque requérant.
C.  Intérêts moratoires
21.  Selon les informations dont dispose la Cour, le taux d’intérêt légal applicable en Italie à la date d’adoption du présent arrêt était de 3 % l’an.
PAR CES MOTIFS, LA COUR, À L’UNANIMITÉ,
1.  Dit qu’il y a eu violation de l’article 6 § 1 de la Convention ;
2.  Dit
a)  que l’Etat défendeur doit verser à chaque requérant, dans les trois mois à compter du jour où l’arrêt est devenu définitif conformément à l’article 44 § 2 de la Convention, 10 000 EUR (dix mille euros) pour dommage moral et 1 250 EUR (mille deux cent cinquante euros) pour frais et dépens ;
b)  que ces montants seront à majorer d’un intérêt simple de 3 % l’an à compter de l’expiration de ce délai et jusqu’au versement ;
3.  Rejette les demandes de satisfaction équitable pour le surplus.
Fait en français, puis communiqué par écrit le 12 février 2002, en application de l’article 77 §§ 2 et 3 du règlement.
Michael O’Boyle Sir Nicolas Bratza   Greffier Président
ARRÊT VENTRONE c. ITALIE
ARRÊT VENTRONE c. ITALIE 
ARRÊT «NAMEAPPLICANT» c. ITALIE
ARRÊT «NAMEAPPLICANT» c. ITALIE 


Synthèse
Formation : Cour (quatrième section)
Numéro d'arrêt : 52960/99
Date de la décision : 12/02/2002
Type d'affaire : Arrêt (Au principal et satisfaction équitable)
Type de recours : Violation de l'art. 6-1 ; Dommage matériel - demande rejetée ; Préjudice moral - réparation pécuniaire ; Frais et dépens (procédure nationale) - demande rejetée ; Remboursement partiel frais et dépens - procédure de la Convention

Analyses

(Art. 6) PROCEDURE CIVILE


Parties
Demandeurs : VENTRONE
Défendeurs : ITALIE

Origine de la décision
Date de l'import : 21/06/2012
Fonds documentaire ?: HUDOC
Identifiant URN:LEX : urn:lex;coe;cour.europeenne.droits.homme;arret;2002-02-12;52960.99 ?

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