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12/02/2002 | CEDH | N°52968/99

CEDH | AFFAIRE DEL BONO ET AUTRES c. ITALIE


QUATRIÈME SECTION
AFFAIRE DEL BONO ET AUTRES c. ITALIE
(Requête n° 52968/99)
ARRÊT
STRASBOURG
12 février 2002
DÉFINITIF
12/05/2002
Cet arrêt deviendra définitif dans les conditions définies à l’article 44 § 2 de la Convention. Il peut subir des retouches de forme.
En l’affaire Del Bono et autres c. Italie,
La Cour européenne des Droits de l’Homme (quatrième section), siégeant en une chambre composée de :
Sir Nicolas Bratza, président,   MM. M. Pellonpää,    A. Pastor Ridruejo,    L. Ferrari

Bravo,    M. Fischbach,    J. Casadevall,    S. Pavlovschi, juges,  et de M. O’Boyle, greffier de section,
A...

QUATRIÈME SECTION
AFFAIRE DEL BONO ET AUTRES c. ITALIE
(Requête n° 52968/99)
ARRÊT
STRASBOURG
12 février 2002
DÉFINITIF
12/05/2002
Cet arrêt deviendra définitif dans les conditions définies à l’article 44 § 2 de la Convention. Il peut subir des retouches de forme.
En l’affaire Del Bono et autres c. Italie,
La Cour européenne des Droits de l’Homme (quatrième section), siégeant en une chambre composée de :
Sir Nicolas Bratza, président,   MM. M. Pellonpää,    A. Pastor Ridruejo,    L. Ferrari Bravo,    M. Fischbach,    J. Casadevall,    S. Pavlovschi, juges,  et de M. O’Boyle, greffier de section,
Après en avoir délibéré en chambre du conseil le 22 janvier 2002,
Rend l’arrêt que voici, adopté à cette date :
PROCÉDURE
1.  A l’origine de l’affaire se trouve une requête dirigée contre la République italienne et dont des ressortissants italiens, Mme Maria Elisa Del Bono, M. Carmelo Stracuzzi et Mme Simona Stracuzzi (« les requérants »), avaient saisi la Commission européenne des Droits de l’Homme le 15 janvier 1998 en vertu de l’ancien article 25 de la Convention de sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés fondamentales (« la Convention »). La requête a été enregistrée le 26 novembre 1999 sous le numéro de dossier 52968/99. Les requérants sont représentés par Me A. Vicari, avocat à Militello (Messine). Le gouvernement italien (« le Gouvernement ») est représenté par son agent, M. U. Leanza, et par son coagent, M. V. Esposito.
2.  La Cour a déclaré la requête recevable le 22 mars 2001.
EN FAIT
3.  Le 15 septembre 1978, les requérants assignèrent M. C. devant le tribunal de Patti afin d'obtenir réparation des dommages subis suite au décès de M. S., respectivement mari et père des requérants, survenu lors d'un accident de chasse.
4.  La mise en état de l'affaire commença le 23 novembre 1978, date à laquelle le juge autorisa la mise en cause de la compagnie d’assurances E. Le 8 mars 1979, celle-ci se constitua dans la procédure et demanda la jonction de cette procédure avec une autre pendante entre les même parties. Par une ordonnance du 23 mars 1979, dont le texte fut déposé au greffe le 29 mars 1979, le juge de la mise en état rejeta la demande de jonction et ajourna l'affaire au 24 mai 1979. Le jour venu, M. C. demanda un renvoi pour examiner des documents. Les quatre audiences qui se tinrent entre le 11 octobre 1979 et le 24 avril 1980 concernèrent la mise en cause de la compagnie d'assurances F. et sa constitution dans la procédure.
5.  Des dix-neuf audiences fixées entre le 10 juillet 1980 et le 26 mai 1986, deux furent renvoyées en raison d'un empêchement de l'avocat de M. C., une le fut à cause d'un empêchement de l'avocat des requérants, trois furent renvoyées à la demande des parties, sept furent ajournées pour permettre aux parties de verser au dossier des actes et pour les examiner, quatre concernèrent la mise en cause de la compagnie d'assurances G., qui entre-temps avait remplacé la compagnie F., et sa constitution dans la procédure, une fut reportée d'office, et la dernière le fut pour permettre aux parties de présenter leurs conclusions, ce qu'elles firent le 20 novembre 1986. L'audience de plaidoiries fut fixée au 15 juin 1987. Des quatre audiences fixées entre le 22 juillet 1987 et le 18 décembre 1989, deux furent renvoyées d'office et deux à la demande des parties. Le 21 décembre 1992, le tribunal déclara l'interruption de la procédure car un des avocats des parties était décédé.
6.  Les 17 juin 1993, les requérants reprirent la procédure. Par une ordonnance du 18 mai 1995, dont le texte fut déposé au greffe le 22 mai 1995, après avoir retrouvé le dossier qui avait été perdu, le président du tribunal fixa l'audience de plaidoiries au 2 octobre 1995 et accorda aux requérants jusqu'au 17 juillet 1995 pour notifier aux parties défenderesses la reprise de la procédure. Lors de l'audience du 2 octobre 1995, le nouvel avocat constitué pour les requérants demanda un renvoi pour pouvoir notifier ladite reprise car il n'avait pas été informé de l'ordonnance du tribunal. Après un renvoi d'office, le 26 janvier 1998 eut lieu l'audience de plaidoiries devant la chambre compétente.
7.  Par un jugement du 9 février 1998, dont le texte fut déposé au greffe le 18 février 1998, le tribunal déclara l'extinction du procès car les requérants n'avait pas respecté le délai accordé pour notifier la reprise de la procédure.
EN DROIT
I.  SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L’ARTICLE 6 § 1 DE LA CONVENTION
8.  Les requérants allèguent que la durée de la procédure a méconnu le principe du « délai raisonnable » tel que prévu par l’article 6 § 1 de la Convention, ainsi libellé :
« Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue (...) dans un délai raisonnable, par un tribunal (...) qui décidera (...) des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil (...) »
9.  Le Gouvernement s’oppose à cette thèse.
10.  La période à considérer a débuté le 15 septembre 1978 et s’est terminée le 18 février 1998.
11.  Elle a donc duré plus de dix-neuf ans et cinq mois pour une instance.
12.  La Cour rappelle avoir constaté dans de nombreux arrêts (voir, par exemple, Bottazzi c. Italie [GC], n° 34884/97, § 22, CEDH 1999-V) l’existence en Italie d’une pratique contraire à la Convention résultant d’une accumulation de manquements à l’exigence du « délai raisonnable ». Dans la mesure où la Cour constate un tel manquement, cette accumulation constitue une circonstance aggravante de la violation de l’article 6 § 1.
13.  Ayant examiné les faits de la cause à la lumière des arguments des parties et compte tenu de sa jurisprudence en la matière, la Cour estime que la durée de la procédure litigieuse ne répond pas à l’exigence du « délai raisonnable » et qu’il y a là encore une manifestation de la pratique précitée.
Partant, il y a eu violation de l’article 6 § 1.
II.  SUR L’APPLICATION DE L’ARTICLE 41 DE LA CONVENTION
14.  Aux termes de l’article 41 de la Convention,
« Si la Cour déclare qu’il y a eu violation de la Convention ou de ses Protocoles, et si le droit interne de la Haute Partie contractante ne permet d’effacer qu’imparfaitement les conséquences de cette violation, la Cour accorde à la partie lésée, s’il y a lieu, une satisfaction équitable. »
A.  Dommage
15.  Les requérants réclament globalement 600 000 000 lires italiennes (ITL) au titre du préjudice matériel et 400 000 000 ITL au titre du préjudice moral qu’ils auraient subi.
16.  La Cour n’aperçoit pas de lien de causalité entre la violation constatée et le dommage matériel allégué et rejette cette demande. En revanche, elle considère qu’il y a lieu d’octroyer à chaque requérant 28 000 euros (EUR) au titre du préjudice moral.
B.  Frais et dépens
17.  Les requérants demandent également 66 601 000 ITL pour les frais et dépens encourus devant la Cour.
18.  Selon la jurisprudence de la Cour, un requérant ne peut obtenir le remboursement de ses frais et dépens que dans la mesure où se trouvent établis leur réalité, leur nécessité et le caractère raisonnable de leur taux (voir, par exemple, l’arrêt Bottazzi précité, § 30). En l’espèce et compte tenu des éléments en sa possession et des critères susmentionnés, la Cour estime raisonnable la somme de 2 400 EUR au titre des frais et dépens pour la procédure devant la Cour et donc accorde à chaque requérant 800 EUR.
C.  Intérêts moratoires
19.  Selon les informations dont dispose la Cour, le taux d’intérêt légal applicable en Italie à la date d’adoption du présent arrêt était de 3 % l’an.
PAR CES MOTIFS, LA COUR, À L’UNANIMITÉ,
1.  Dit qu’il y a eu violation de l’article 6 § 1 de la Convention ;
2.  Dit
a)  que l’Etat défendeur doit verser à chaque requérant, dans les trois mois à compter du jour où l’arrêt est devenu définitif conformément à l’article 44 § 2 de la Convention, 28 000 EUR (vingt-huit mille euros) pour dommage moral et 800 EUR (huit cents euros) pour frais et dépens ;
b)  que ces montants seront à majorer d’un intérêt simple de 3 % l’an à compter de l’expiration de ce délai et jusqu’au versement ;
3.  Rejette les demandes de satisfaction équitable pour le surplus.
Fait en français, puis communiqué par écrit le 12 février 2002, en application de l’article 77 §§ 2 et 3 du règlement.
Michael O’Boyle Sir Nicolas Bratza   Greffier Président
ARRÊT DEL BONO ET AUTRES c. ITALIE
ARRÊT DEL BONO ET AUTRES c. ITALIE 
ARRÊT «NAMEAPPLICANT» c. ITALIE
ARRÊT «NAMEAPPLICANT» c. ITALIE 


Synthèse
Formation : Cour (quatrième section)
Numéro d'arrêt : 52968/99
Date de la décision : 12/02/2002
Type d'affaire : Arrêt (Au principal et satisfaction équitable)
Type de recours : Violation de l'art. 6-1 ; Dommage matériel - demande rejetée ; Préjudice moral - réparation pécuniaire ; Remboursement partiel frais et dépens - procédure de la Convention

Analyses

(Art. 6) PROCEDURE CIVILE


Parties
Demandeurs : DEL BONO ET AUTRES
Défendeurs : ITALIE

Origine de la décision
Date de l'import : 21/06/2012
Fonds documentaire ?: HUDOC
Identifiant URN:LEX : urn:lex;coe;cour.europeenne.droits.homme;arret;2002-02-12;52968.99 ?

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