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12/02/2002 | CEDH | N°52982/99

CEDH | AFFAIRE SCIACCHITANO ET LO SCIUTO c. ITALIE


QUATRIÈME SECTION
AFFAIRE SCIACCHITANO ET LO SCIUTO c. ITALIE
(Requête n° 52982/99)
ARRÊT
STRASBOURG
12 février 2002
DÉFINITIF
12/05/2002
Cet arrêt deviendra définitif dans les conditions définies à l’article 44 § 2 de la Convention. Il peut subir des retouches de forme.
En l’affaire Sciacchitano et Lo Sciuto c. Italie,
La Cour européenne des Droits de l’Homme (quatrième section), siégeant en une chambre composée de :
Sir Nicolas Bratza, président,   MM. M. Pellonpää,    A. Pastor Ridruejo, 

  L. Ferrari Bravo,    M. Fischbach,    J. Casadevall,    S. Pavlovschi, juges,  et de M. O’Boyle, greffier d...

QUATRIÈME SECTION
AFFAIRE SCIACCHITANO ET LO SCIUTO c. ITALIE
(Requête n° 52982/99)
ARRÊT
STRASBOURG
12 février 2002
DÉFINITIF
12/05/2002
Cet arrêt deviendra définitif dans les conditions définies à l’article 44 § 2 de la Convention. Il peut subir des retouches de forme.
En l’affaire Sciacchitano et Lo Sciuto c. Italie,
La Cour européenne des Droits de l’Homme (quatrième section), siégeant en une chambre composée de :
Sir Nicolas Bratza, président,   MM. M. Pellonpää,    A. Pastor Ridruejo,    L. Ferrari Bravo,    M. Fischbach,    J. Casadevall,    S. Pavlovschi, juges,  et de M. O’Boyle, greffier de section,
Après en avoir délibéré en chambre du conseil le 22 janvier 2002,
Rend l’arrêt que voici, adopté à cette date :
PROCÉDURE
1.  A l’origine de l’affaire se trouve une requête dirigée contre la République italienne et dont des ressortissants italiens, M.  Biagio Sciacchitano et Mme Giovanna Lo Sciuto (« les requérants »), avaient saisi la Commission européenne des Droits de l’Homme le 3 décembre 1997 en vertu de l’ancien article 25 de la Convention de sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés fondamentales (« la Convention »). La requête a été enregistrée le 26 novembre 1999 sous le numéro de dossier 52982/99. Le gouvernement italien (« le Gouvernement ») est représenté par son agent, M. U. Leanza, et par son coagent, M. V. Esposito.
2.  La Cour a déclaré la requête recevable le 22 mars 2001.
EN FAIT
3.  Le 5 janvier 1990, les requérants déposèrent deux recours distincts au greffe du juge d’instance de Catane, faisant fonction de juge du travail, afin d’obtenir le paiement de prestations professionnelles, à savoir respectivement 315 981 347 et 34 627 745 lires italiennes.
4.  Quant au recours du requérant, par une ordonnance hors audience du 11 janvier 1990, le juge fixa la première audience au 20 novembre 1990. Le 11 décembre 1990, le juge réserva sa décision quant à l’admission de témoins ; par une ordonnance hors audience du 17 décembre 1990, le juge fit en partie droit à cette demande et reporta l’affaire au 25 octobre 1991.
5.  Quant au recours de la requérante, par une ordonnance hors audience du 11 janvier 1990, le juge fixa la première audience au 23 juillet 1991. Le jour venu, la requérante demanda la jonction de la présente affaire avec celle engagée par le requérant et le juge fixa l’audience suivante au 25 octobre 1991.
6.  Les deux procédures furent jointes. Des douze audiences fixées entre le 25 octobre 1991 et le 9 octobre 1995, trois concernèrent l’audition de témoins, sept concernèrent une expertise – dont cinq furent reportées car l’expert n’avait pas déposé au greffe son rapport –, une fut renvoyée d’office et une le fut en raison de l’absence des parties. L’audience du 13 novembre 1995 fut reportée au 11 décembre 1995 en raison d’une grève des avocats. Deux audiences plus tard, le 19 décembre 1996 eurent lieu les débats. Par un jugement du même jour, dont le texte fut déposé au greffe le 3 février 1997, le juge rejeta la demande des requérants.
7.  Le 16 août 1997, les requérants interjetèrent appel devant le tribunal. Par une ordonnance hors audience du 26 août 1997, le président du tribunal fixa la première audience au 8 juin 1999. Le 28 mars 2000, l’audience fut renvoyée au 12 décembre 2000.
8.  Selon les informations fournies par les requérantes, le texte d’un jugement du 12 décembre 2000 fut déposé au greffe le 12 janvier 2001.
EN DROIT
I.  SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L’ARTICLE 6 § 1 DE LA CONVENTION
9.  Les requérants allèguent que la durée de la procédure a méconnu le principe du « délai raisonnable » tel que prévu par l’article 6 § 1 de la Convention, ainsi libellé :
« Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue (...) dans un délai raisonnable, par un tribunal (...) qui décidera (...) des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil (...) »
10.  Le Gouvernement s’oppose à cette thèse.
11.  La période à considérer a débuté le 5 janvier 1990 et s’est terminée le 12 janvier 2001.
12.  Elle a donc duré plus de onze ans pour deux instances.
13.  La Cour rappelle avoir constaté dans de nombreux arrêts (voir, par exemple, Bottazzi c. Italie [GC], n° 34884/97, § 22, CEDH 1999-V) l’existence en Italie d’une pratique contraire à la Convention résultant d’une accumulation de manquements à l’exigence du « délai raisonnable ». Dans la mesure où la Cour constate un tel manquement, cette accumulation constitue une circonstance aggravante de la violation de l’article 6 § 1.
14.  Ayant examiné les faits de la cause à la lumière des arguments des parties et compte tenu de sa jurisprudence en la matière, la Cour estime que la durée de la procédure litigieuse ne répond pas à l’exigence du « délai raisonnable » et qu’il y a là encore une manifestation de la pratique précitée.
Partant, il y a eu violation de l’article 6 § 1.
II.  SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L’ARTICLE 1 DU PROTOCOLE N° 1
15.  Les requérants se plaignent également de ce que la longueur de la procédure litigieuse a porté atteinte au droit au respect de leurs biens tel que garanti par l’article 1 du Protocole n° 1.
16.  Eu égard au constat relatif à l’article 6 § 1 (paragraphe 14 ci-dessus), la Cour estime qu’il n’y a pas lieu d’examiner s’il y a eu, en l’espèce, violation de cette disposition (voir l’arrêt Zanghì c. Italie du 19 février 1991, série A n° 194-C, p. 47, § 23).
III.  SUR L’APPLICATION DE L’ARTICLE 41 DE LA CONVENTION
17.  Aux termes de l’article 41 de la Convention,
« Si la Cour déclare qu’il y a eu violation de la Convention ou de ses Protocoles, et si le droit interne de la Haute Partie contractante ne permet d’effacer qu’imparfaitement les conséquences de cette violation, la Cour accorde à la partie lésée, s’il y a lieu, une satisfaction équitable. »
A.  Dommage
18.  Les requérants réclament, globalement, 159 517 140 lires italiennes (ITL) au titre du préjudice matériel et 300 000 000 ITL au titre du préjudice moral qu’ils auraient subi.
19.  La Cour n’aperçoit pas de lien de causalité entre la violation constatée et le dommage matériel allégué et rejette cette demande. En revanche, considère qu’il y a lieu d’octroyer à chaque requérant 12 000 euros (EUR) au titre du préjudice moral.
B.  Frais et dépens
20.  Le requérant demande 59 039 300 ITL et la requérante 33 567 080 ITL pour les frais et dépens encourus devant les juridictions internes. Les requérants s’en remettent à la Cour pour qu’elle établisse le montant des frais et dépens encourus devant la Cour.
21.  Selon la jurisprudence de la Cour, un requérant ne peut obtenir le remboursement de ses frais et dépens que dans la mesure où se trouvent établis leur réalité, leur nécessité et le caractère raisonnable de leur taux (voir, par exemple, l’arrêt Bottazzi précité, § 30). En l’espèce et compte tenu des éléments en sa possession et des critères susmentionnés, la Cour rejette la demande relative aux frais et dépens de la procédure nationale, estime raisonnable la somme de 500 EUR au titre des frais et dépens pour la procédure devant la Cour et donc accorde à chaque requérant 250 EUR.
C.  Intérêts moratoires
22.  Selon les informations dont dispose la Cour, le taux d’intérêt légal applicable en Italie à la date d’adoption du présent arrêt était de 3 % l’an.
PAR CES MOTIFS, LA COUR, À L’UNANIMITÉ,
1.  Dit qu’il y a eu violation de l’article 6 § 1 de la Convention ;
2.  Dit qu’il n’y a pas lieu d’examiner le grief tiré de l’article 1 du Protocole n°1 ;
3.  Dit
a)  que l’Etat défendeur doit verser à chaque requérant, dans les trois mois à compter du jour où l’arrêt est devenu définitif conformément à l’article 44 § 2 de la Convention, 12 000 EUR (douze mille euros) pour dommage moral et 250 EUR (deux cent cinquante euros) pour frais et dépens ;
b)  que ces montants seront à majorer d’un intérêt simple de 3 % l’an à compter de l’expiration de ce délai et jusqu’au versement ;
4.  Rejette les demandes de satisfaction équitable pour le surplus.
Fait en français, puis communiqué par écrit le 12 février 2002, en application de l’article 77 §§ 2 et 3 du règlement.
Michael O’Boyle Sir Nicolas Bratza   Greffier Président
ARRÊT SCIACCHITANO ET LO SCIUTO c. ITALIE
ARRÊT SCIACCHITANO ET LO SCIUTO c. ITALIE 
ARRÊT «NAMEAPPLICANT» c. ITALIE
ARRÊT «NAMEAPPLICANT» c. ITALIE 


Synthèse
Formation : Cour (quatrième section)
Numéro d'arrêt : 52982/99
Date de la décision : 12/02/2002
Type d'affaire : Arrêt (Au principal et satisfaction équitable)
Type de recours : Violation de l'art. 6-1 ; Préjudice moral - réparation pécuniaire ; Non-lieu à examiner P1-1 ; Remboursement partiel frais et dépens - procédure de la Convention ; Dommage matériel - demande rejetée ; Frais et dépens (procédure nationale) - demande rejetée

Analyses

(Art. 6) PROCEDURE CIVILE


Parties
Demandeurs : SCIACCHITANO ET LO SCIUTO
Défendeurs : ITALIE

Origine de la décision
Date de l'import : 21/06/2012
Fonds documentaire ?: HUDOC
Identifiant URN:LEX : urn:lex;coe;cour.europeenne.droits.homme;arret;2002-02-12;52982.99 ?

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