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30/04/2009 | CEDH | N°46064/07

CEDH | AFFAIRE PAPATHANASIS c. GRECE


PREMIÈRE SECTION
AFFAIRE PAPATHANASIS c. GRÈCE
(Requête no 46064/07)
ARRÊT
STRASBOURG
30 avril 2009
DÉFINITIF
06/11/2009
Cet arrêt peut subir des retouches de forme.
En l’affaire Papathanasis c. Grèce,
La Cour européenne des droits de l’homme (première section), siégeant en une chambre composée de :
Nina Vajić, présidente,   Christos Rozakis,   Khanlar Hajiyev,   Dean Spielmann,   Sverre Erik Jebens,   Giorgio Malinverni,   George Nicolaou, juges,  et de Søren Nielsen, greffier de section,


Après en avoir délibéré en chambre du conseil le 7 avril 2009,
Rend l’arrêt que voici, adopté à cette dat...

PREMIÈRE SECTION
AFFAIRE PAPATHANASIS c. GRÈCE
(Requête no 46064/07)
ARRÊT
STRASBOURG
30 avril 2009
DÉFINITIF
06/11/2009
Cet arrêt peut subir des retouches de forme.
En l’affaire Papathanasis c. Grèce,
La Cour européenne des droits de l’homme (première section), siégeant en une chambre composée de :
Nina Vajić, présidente,   Christos Rozakis,   Khanlar Hajiyev,   Dean Spielmann,   Sverre Erik Jebens,   Giorgio Malinverni,   George Nicolaou, juges,  et de Søren Nielsen, greffier de section,
Après en avoir délibéré en chambre du conseil le 7 avril 2009,
Rend l’arrêt que voici, adopté à cette date :
PROCÉDURE
1.  A l’origine de l’affaire se trouve une requête (no 46064/07) dirigée contre la République hellénique et dont un ressortissant de cet Etat, M. Dimitrios Papathanasis (« le requérant »), a saisi la Cour le 11 octobre 2007 en vertu de l’article 34 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (« la Convention »).
2.  Le gouvernement grec (« le Gouvernement ») est représenté par les délégués de son agent, M. M. Apessos, assesseur auprès du Conseil juridique de l’Etat, et Mme Z. Hatzipavlou, auditrice auprès du Conseil juridique de l’Etat.
3.  Le 22 avril 2008, la présidente de la première section a décidé de communiquer le grief tiré de la durée de la procédure au Gouvernement. Comme le permet l’article 29 § 3 de la Convention, il a en outre été décidé que la chambre se prononcerait en même temps sur la recevabilité et le fond.
EN FAIT
LES CIRCONSTANCES DE L’ESPÈCE
4.  Le requérant est né en 1932. Il est avocat et réside à Athènes.
A.  Le contexte du litige
5.  Par décision no 2 en date du 9 janvier 1997, le comité de deuxième instance du ministère du Travail annula la nomination du requérant au poste de conseil juridique de la Banque nationale de Grèce au motif qu’il ne remplissait pas les conditions requises par la loi.
6.  Le 10 octobre 1997, le requérant saisit le même comité d’une demande en révision de la décision en question. Le 19 novembre 1997, le comité l’informa que la décision incriminée n’était pas susceptible d’une demande en révision, mais seulement d’un recours en annulation devant les juridictions administratives et ce, dans un délai de soixante jours à partir de sa notification (document no 34158).
B.  La première procédure engagée par le requérant
7.  Le 10 décembre 1997, le requérant saisit le tribunal administratif d’Athènes d’un recours tendant à l’annulation de la décision du comité de deuxième instance du ministère du Travail en date du 9 janvier 1997 prononçant l’annulation de sa nomination au poste de conseil juridique.
8.  Le 30 juin 1998, le tribunal déclara le recours irrecevable pour tardiveté (décision no 8056/1998). Le 6 août 1998, le requérant interjeta appel.
9.  Le 10 mars 2000, par un arrêt longuement motivé, la cour administrative d’appel d’Athènes confirma la décision attaquée (arrêt no 1096/2000). Le 26 juillet 2000, le requérant se pourvut en cassation. Il ressort du dossier que cette procédure n’a pas été poursuivie.
C.  La procédure litigieuse
10.  Le 15 janvier 1998, le requérant saisit le tribunal administratif d’Athènes d’un recours en annulation du document no 34158 du comité de deuxième instance du ministère du Travail.
11.  Le 30 juin 1998, le tribunal déclara le recours irrecevable, au motif que le document attaqué n’avait pas de caractère exécutoire et ne pouvait pas faire l’objet d’un recours en annulation (décision no 8057/1998).
12.  Le 20 octobre 1998, le requérant interjeta appel. L’audience eut lieu le 11 mars 1999.
13.  Le 19 mars 2000, la cour administrative d’appel d’Athènes confirma la décision attaquée (arrêt no 1097/2000). Cet arrêt fut notifié au requérant le 15 novembre 2000.
14.  Le 14 décembre 2000, le requérant se pourvut en cassation.
15.  Le 13 décembre 2004, la première chambre du Conseil d’Etat, composée de cinq membres, par un arrêt longuement motivé, renvoya l’affaire devant sa formation de sept membres (arrêt no 3517/2004). L’audience eut lieu le 9 mai 2005.
16.  Le 10 avril 2006, la formation de sept membres de la première chambre du Conseil d’Etat fit siennes les conclusions de la cour administrative d’appel et rejeta le pourvoi (arrêt no 1054/2006). Cet arrêt fut mis au net et certifié conforme le 16 avril 2007.
EN DROIT
I.  SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L’ARTICLE 6 § 1 DE LA CONVENTION AU REGARD DE LA DURÉE DE LA PROCÉDURE
17.  Le requérant allègue que la durée de la procédure a méconnu le principe du « délai raisonnable » tel que prévu par l’article 6 § 1 de la Convention, ainsi libellé :
« Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue (...) dans un délai raisonnable, par un tribunal (...), qui décidera (...) des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil (...) »
18.  Le Gouvernement s’oppose à cette thèse.
19.  La période à considérer a débuté le 15 janvier 1998, avec la saisine du tribunal administratif d’Athènes, et s’est terminée le 10 avril 2006, avec l’arrêt no 1054/2006 du Conseil d’Etat. Elle a donc duré huit ans et plus de deux mois pour trois instances.
A.  Sur la recevabilité
20.  La Cour constate que ce grief n’est pas manifestement mal fondé au sens de l’article 35 § 3 de la Convention. Elle relève en outre qu’il ne se heurte à aucun autre motif d’irrecevabilité. Il convient donc de le déclarer recevable.
B.  Sur le fond
21.  La Cour rappelle que le caractère raisonnable de la durée d’une procédure s’apprécie suivant les circonstances de la cause et eu égard aux critères consacrés par sa jurisprudence, en particulier la complexité de l’affaire, le comportement du requérant et celui des autorités compétentes ainsi que l’enjeu du litige pour les intéressés (voir, parmi beaucoup d’autres, Frydlender c. France [GC], no 30979/96, § 43, CEDH 2000-VII).
22.  La Cour a traité à maintes reprises d’affaires soulevant des questions semblables à celle du cas d’espèce et a constaté la violation de l’article 6 § 1 de la Convention (voir Frydlender précité).
23.  Après avoir examiné tous les éléments qui lui ont été soumis, la Cour considère que le Gouvernement n’a exposé aucun fait ni argument pouvant mener à une conclusion différente dans le cas présent. Compte tenu de sa jurisprudence en la matière, la Cour estime qu’en l’espèce la durée de la procédure litigieuse est excessive et ne répond pas à l’exigence du « délai raisonnable ».
Partant, il y a eu violation de l’article 6 § 1.
II.  SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L’ARTICLE 6 § 1 DE LA CONVENTION AU REGARD DE L’EQUITÉ DE LA PROCÉDURE
24.  Le requérant se plaint enfin, sous l’angle de l’article 6 § 1 de la Convention, que les juridictions saisies se sont trompées dans leur raisonnement et qu’elles ont failli à leur obligation de lui garantir un procès équitable.
Sur la recevabilité
25.  La Cour rappelle qu’aux termes de l’article 19 de la Convention, elle a pour tâche d’assurer le respect des engagements résultant de la Convention pour les Parties contractantes. En particulier, il ne lui appartient pas de connaître des erreurs de fait ou de droit prétendument commises par une juridiction interne, sauf si et dans la mesure où elles pourraient avoir porté atteinte aux droits et libertés sauvegardés par la Convention (voir, notamment, García Ruiz c. Espagne [GC], no 30544/96, § 28, CEDH 1999-I). La Cour ne peut apprécier elle-même les éléments de fait ayant conduit une juridiction nationale à adopter telle décision plutôt que telle autre, sinon elle s’érigerait en juge de quatrième instance et elle méconnaîtrait les limites de sa mission (voir, mutatis mutandis, Kemmache c. France (no 3), 24 novembre 1994, § 44, série A no 296-C). La Cour a pour seule fonction, au regard de l’article 6 de la Convention, d’examiner les requêtes alléguant que les juridictions nationales ont méconnu des garanties procédurales spécifiques énoncées par cette disposition ou que la conduite de la procédure dans son ensemble n’a pas garanti un procès équitable au requérant (voir, parmi beaucoup d’autres, Donadzé c. Géorgie, no 74644/01, §§ 30-31, 7 mars 2006).
26.  En l’occurrence, rien ne permet de penser que la procédure, au cours de laquelle le requérant a pu présenter tous ses arguments, n’a pas été équitable. La Cour ne décèle en effet aucun indice d’arbitraire dans l’examen du litige par les juridictions saisies ni de violation des droits procéduraux de l’intéressé.
27.  Il s’ensuit que ce grief est manifestement mal fondé et doit être rejeté en application de l’article 35 §§ 3 et 4 de la Convention.
III.  SUR L’APPLICATION DE L’ARTICLE 41 DE LA CONVENTION
28.  Aux termes de l’article 41 de la Convention,
« Si la Cour déclare qu’il y a eu violation de la Convention ou de ses Protocoles, et si le droit interne de la Haute Partie contractante ne permet d’effacer qu’imparfaitement les conséquences de cette violation, la Cour accorde à la partie lésée, s’il y a lieu, une satisfaction équitable. »
29.  Dans le formulaire de requête, le requérant réclamait 1 000 000 euros au titre du dommage moral et diverses autres sommes au titre du dommage matériel. Toutefois, dans ses observations en réponse à celles du Gouvernement, il n’a présenté aucune demande de satisfaction équitable bien que, dans les lettres qui lui furent adressées les 25 avril et 1er septembre 2008, son attention fût attirée sur l’article 60 du règlement de la Cour qui dispose qu’une demande spécifique de satisfaction équitable au titre de l’article 41 de la Convention doit être formulée dans le délai imparti pour les observations sur le fond. En l’absence de réponse dans le délai fixé dans la lettre du 1er septembre 2008, la Cour estime qu’il n’y a pas lieu d’octroyer de somme au titre de l’article 41 de la Convention (voir, mutatis mutandis, Willekens c. Belgique, no 50859/99, § 27, 24 avril 2003 ; Konstantopoulos AE et autres c. Grèce, no 58634/00, § 35, 10 juillet 2003 ; Interoliva ABEE c. Grèce, no 58642/00, § 35, 10 juillet 2003 ; Litoselitis c. Grèce, no 62771/00, § 34, 5 février 2004 ; Jarnevic & Profit c. Grèce, no 28338/02, § 40, 7 avril 2005 ; Ouzounoglou c. Grèce, no 32730/03, § 45, 24 novembre 2005).
PAR CES MOTIFS, LA COUR, À L’UNANIMITÉ,
1.  Déclare la requête recevable quant au grief tiré de la durée excessive de la procédure et irrecevable pour le surplus ;
2.  Dit qu’il y a eu violation de l’article 6 § 1 de la Convention ;
3.  Rejette la demande de satisfaction équitable.
Fait en français, puis communiqué par écrit le 30 avril 2009, en application de l’article 77 §§ 2 et 3 du règlement.
Søren Nielsen Nina Vajić   Greffier Présidente
ARRÊT PAPATHANASIS c. GRÈCE
ARRÊT PAPATHANASIS c. GRÈCE 


Synthèse
Formation : Cour (quatrième section)
Numéro d'arrêt : 46064/07
Date de la décision : 30/04/2009
Type d'affaire : Arrêt (au principal et satisfaction équitable)
Type de recours : Non-violation de l'art. 10

Analyses

(Art. 6) PROCEDURE CIVILE, (Art. 6-1) TRIBUNAL ETABLI PAR LA LOI, (Art. 6-1) TRIBUNAL IMPARTIAL


Parties
Demandeurs : PAPATHANASIS
Défendeurs : GRECE

Origine de la décision
Date de l'import : 21/06/2012
Fonds documentaire ?: HUDOC
Identifiant URN:LEX : urn:lex;coe;cour.europeenne.droits.homme;arret;2009-04-30;46064.07 ?

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